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DICTIONNAIRE
LANGUEDOCIEN-FRANÇAIS
CONTENANT
les définitions, radicaux et étyniologies des mots; les idiotismes,
dictons, maximes et proverbes, leurs origines et celles des coutumes, usages et institutions;
les noms propres de personnes et de lieux;
origines, étymologies et significations; les termes d'agriculture, de métiers, d'arts, de professions,
d'industries; la flore et la faune méridionales; etc., etc.
l'AR
Maximin D'HOMBRES
ANCIEN PRF.SinKNT DU TRIBUNAL CIVlI. l) ALAFS, MBMnRR DE I, ACAnEMIP. I)K NIMES,
ANCIEN PRÉSIDENT TIF. I.A SOCIÉTÉ SriENTIFIOUB ET MTTKnAIRE B'aI.AIS,
ET
Gratien CHARVET
MEMBRE RE I, ACADÉMIE DE NIMES, DR l,A SOCIETE .Mir.llF.OI.OlilnUE DE MONTPKI.I.IEIl
KT riR I.A SOCIÉTÉ SCIENTIFIQUE ET LITTÉRAIRE d'aLAIS,
l^ORRRSPONOANT nu MINISTÈRE riE l.'iNSTBDCTION PUBLIQUR FOUR I.BS TRAVAUX HI.STORI0UR5,
OFFICIRR n'ACADÉMIR.
ALAIS
Imprimerie et Lithographie \. BRUGUEIKULLI-.. (Jrand'rue. \)à.
1884
DICTIONNAIRE
LANGUEDOCIEN-FRANÇAIS
DICTIONNAIRE
[LANGUEDOCIEN-FRANÇAIS
CONTENANT
les définitions, radicaox et étymologies des mots; les idiotismes,
dictons, maximes et proverbes, leurs origines et celles des coutumes, usages et institution!;
les noms propres de personnes et de lieux,
origines, étymologies et significations; les termes d'agriculture, de métiers, d'arts, de professions,
d'industries; la flore et la faune méridionales; etc., etc.
PAR
Maximin D'HOMBRES
ANCIEN PRÉSIDENT DU TRIBUNAL CIVIL d'aLAIS, MEMBRE DE L' ACADÉMIE DE NIMES,
ANCIEN PRÉSIDENT DE LA SOCIÉTÉ STaENTIFIQUE ET LITTÉRAIRE D'ALAIS,
ET
Gratien CHARVET
MEMBRE DE l'aCADÉMIB DE NIMES, DE LA SOCIÉTÉ ARCHÉOLOGIQUE DE MONTPELLIER
ET DE LA SOCIÉTÉ SCIENTIFIQUE KT LITTÉRAIRE d'aLAIS,
CORRESPONDANT DU MINISTÈRE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE POUR LES TRAVAUX HISTORIQUES,
OFFICIER d'académie.
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•«
5 -
ALAIS
Imprimerie et Lithographie A. BRUGUEIROLLK. Grand'rue, 93.
1884
^
MAXIMIN DHOMBRES
Deu agradal e al pobol uM.
Agréable à Dieu et utile au peuple.
Vieille Charte d'Alais.
On l'a dit bien souvent et avec juste raison : certaines familles semblent être prédestinées au goût des
recherches studieuses; elles possèdent ce don naturellement et se le transmettent de génération en géné-
ration comme un précieux héritage. Cette observation ne s'est jamais manifestée avec plus d'évidence qu'à
l'égard de Maximin d'Hombres.
François-Louis-Maximin d'Hombres naquit, le 14 août 1810, à Alais, d'une ancienne et honorable
famille des Cévennes. Il était le fils de François-Régis d'Hombres dont les vertus charitables sont restées
légendaires, et de Marie-Antoinette-Eulalie Desroche, de Génolhac.
Petit neveu des deux célèbres Boissier de Sauvages, par sa grand'mère Marie-Augustine Boissier de
La Croix de Sauvages, et neveu du baron d'Hombres-Firmas, il voulut se rendre digne de ses devanciers
et suivre comme eux, avec honneur, la voie que leurs travaux lui avaient ouverte.
Doué d'une intelligence peu commune et d'une pénétration non moins remarquable, Maximin fit avec
succès ses études classiques à Forcalquier d'abord, à Aix ensuite, chez les Jésuites. U les poursuivit plus
tard au collège de sa ville natale, et alla les compléter à Paris par celles du Droit.
Ses débuts à Alais, comme avocat, lui valurent les éloges les plus mérités, et firent présager pour lui un
brillant avenir. Il prit, pendant trente-cinq ans, une part active à tous les grands débats judiciaires qui se
produisirent devant le tribunal de celte ville. A partir de 1840, il fit toujours partie des Conseils de l'ordre;
et, à neuf reprises différentes, il en fut élu bâtonnier. « Cœur noble, âme généreuse, esprit cultivé,» a dit
sur sa tombe un de ses anciens confrères, « Maximin d'Hombres était un de ces hommes dont le tjdent et la
probité s'imposent et honorent les corps auxquels ils appartiennent (1). »
Caractère aimable et enjoué, esprit incisif et éminemment gaulois, Maxiniin avait l'aimable défaut des
hommes très spirituels, qui n'ont jamais l'air de se prendre tout-à-fait au sérieux, lors même qu'ils se
livrent à des occupations fort sérieuses; contrairement aux esprits bornés ou superficiels, qui se gardent
bien de douter d'eux-mêmes, et font consister leur principal mérite à s'occuper, avec une gravité affectée,
de choses parfaitement insignifiantes.
Un membre de la société d'AIais a décrit avec finesse « celle figure originale et sympathique, pré-
sentant un singulier mélange de douceur et de malice, de bonhomie et de causticité Ce charmant
causeur, prompt à la réplique, habile à lancer le trait, à la verve familière, aiguisée, piquante, ironique,
mais jamais blessante (2). » , ,
Une bienveillance constante, une bonté inaltérable, formait, en effet, le fond du caractère de Maximin
(1) Discours de M. Emile Pin, Mtonnier de l'Ordre des avocats.
(2) V. ArpRAN. — Compte-rendu des travaux de la Société scientifique et littéraire d'Alais, pendant l'année 1873.
n
d'Hombres. Ses qualités charmantes, son abord facile et plein d'aménité, lui attiraient l'estime et lafTec-
tion universelles. Quant à ses amis, ils ont pu apprécier combien l'un d'entre eux (1) l'a justement défin,
en signalant chez lui cette ténacité du cœur qui rendait ses afTections indissolubles.
Pourrions-nous oublier, en parlant des précieuses qualités de notre ami, celles qui étaient peut-être
les moins apparentes, mais en même temps les plus réelles : ces vertus bienfaisantes, ces habitudes de
charité, héréditaires dans sa famille, dont pourraient rendre témoignage tant de misères secourues, tant
d'infortunes soulagées en silence, sans faste et sans ostentation?
Aussi, lorsqu'à la fin de sa carrière d'avocat, parcourue avec autant d'honneur que de distinction,
Maximin d'Hombres fut appelé à la Présidence du Tribunal [d'Alais, tous ses concitoyens, sans acception
d'opinions, applaudirent avec enthousiame à une nomination si bien justifiée.
*
Maximin d'Hombres avait épousé, le 26 novembre 1844, M"" Victorine Farjon, de Montpellier, dont
l'inaltérable affection l'a, jusqu'à ses derniers moments, entouré des soins les plus délicats et les plus
dévoués.
Durant de longues années, Maximin d'Hombres a fait partie du Conseil municipal d'A.lais, où l'avaient
appelé la confiance et l'affection de ses concitoyens; et il a rempli, pendant un certain temps, les fonctions
d'adjoint à la mairie.
Il était membre de V Académie du Gard, de la Société des études pour les langues romanes et de
la Société scientifique et littéraire d'Alais, dont il a occupé la présidence pendant l'année 1872.
Maximin d'Hombres avait eu quatre frères, morts avant lui, et une sœur qui lui survit : 1° Hippolyte,
ancien élève de l'École polytechnique, mort en Afrique, capitaine du génie; — 2° Léonce, mort religieux
trappiste; — 3° Ernest, mort garde-général des Eaux-et-Forêts ; — 4° Paulin, mort enseigne de vaisseau
devant Saint-Jean-d'UUoa; — 5° Pauline, religieuse de la Visitation à Tarascon, seule survivante.
Avec Maximin s'est éteinte la descendance mâle de la branche cadette de la famille d'Hombres.
*
Doué d'une aptitude exceptionnelle pour toutes sortes de travaux, mais principalement porté vers
les études littéraires, historiques et archéologiques, Maximin savait faire marcher de front ces diverses
études avec celles de sa profession. Les premières avaient même d'autant plus de charme et d'attrait pour
lui, qu'elles fournissaient à son esprit une agréable diversion aux fatigues du barreau, et lui servaient
en quelque sorte de délassement.
Le but constant qu'il poursuivit toute sa vie fut de mettre en lumière les principaux faits historiques
qui se rattachent au passé de sa ville natale pour laquelle il professait, comme tous ses devanciers, une
prédilection intime et profonde, un culte ardent et passionné : Soli totus amor (2).
A part ses incontestables qualités littéraires, ce qui mérite surtout d'être signalé dans Maximin
d'Hombres, c'est l'esprit de suite et l'opiniâtreté dans le travail qui, chez l'historien et l'érudit, sont toujours
des qualités fécondes.
« On est en général tenté de plaindre les savants qui consacrent leur vie à composer de gros livres et
les curieux qui passent leur temps à les lire, dit M. Gaston Boissier. Peut-être les uns et les autres sont-ils
beaucoup moins malheureux qu'on ne le suppose. S'il faut un certain courage pour se jeter résolument dans
ces études pénibles et infinies, il est rare, quand les premières difficultés sont vaincues, qu'on n'éprouve pas
tl) Éloge de Maximin d'Hombres, par M. d'Espinassous.
(î) Épigraphe inscrite par Maximin d'Hombres en tête de son Étude sur Alais.
pour elles un grand attrait : elles ont ce privilège qu'elles donnent beaucoup plus qu'elles ne promettent.
Les érudits, qui se sont fait un domaine restreint et fermé, le fouillent avec passion dans tous les sens, et
finissent toujours par y découvrir (]uelque coin de terre inconnu où ils sont les premiers à poser le pied.
Ce plaisir est un des plus vifs qu'on puisse éprouver, et il n'est pas commun (1). »
Maximin d'Hombres a laissé trois excellentes Études ou notices réunies dans le volume des Recherchée
historiques sur Alais, publié en 1860, en collaboration avec MM. Marette, Duclaux-Monteil et César Fabre.
La première de ces notices est un précis historique sur la Seigneurie d' Alais. C'est, sans contredit,
le travail le plus complet qui ait jamais été publié sur cette matière.
La seconde contient une étude archéologique et historique sur l'ancienne église de Saint-Jean-Baptiste
d'Alais, convertie plus tard en cathédrale.
La troisième traite des anciens noms des rues et places de la ville avec l'indication de leur étymologie.
On doit, en outre, à Maximin d'Hombres, de nombreux articles publiés dans l'Écho d'Alais, journal
dont l'existence a duré onze années, de 1841 à 1852, et dont il fut l'un des principaux fondateurs.
On a aussi de lui une notice biographique placée en tête de la deuxième édition de Las Castagnados,
recueil de poésies languedociennes du marquis de Lafare-Alais, à qui l'unissait une vieille et étroite amitié;
et trois ou quatre plaquettes, sans nom d'auteur, qui n'ont jamais été mises en vente : il n'en a été tiré
qu'un nombre très restreint d'exemplaires (2).
Mais les travaux les plus remarquables dus à ses longues et patientes recherches et à sa profonde
érudition, sont : 1* Une étude de longue haleine, sous forme de discours, intitulée : ALAIS, ses origines,
sa langue, ses chartes, sa commune et son consulat; 2' Le nouveau Dictionnaire languedocien-français,
resté inachevé.
• «
Dans son étude sur Alais, l'auteur expose d'abord l'ensemble de son œuvre.
Il a pris à tâche de faire ressortir le synchronisme qui existe entre les origines de l'organisation
municipale de la ville d'Alais et celles de la formation de son langage. Il établit l'étymologie du nom
d'.Mais qui tient par ses racines à la langue celtique; il montre la contrée successivement occupée par les
Ibères, les Ligures, les Celtes, les Romains, les Franks, les Yisigoths, les Sarrasins, et assimilant à son
idiome des éléments divers empruntés au langage de ses envahisseurs. Il signale l'introduction de la forme
latine, dans la langue indigène, comme la conséquence évidente de l'occupation romaine et de l'établisse-
ment du christianisme dans la Gaule méridionale; et, après l'apaisement des grandes secousses produites
par les invasions, il montre ce mémo langage national, ainsi modifié, s'assujétissant à des règles, se flxant
progressivement, et, sous le nom de langue romane, s'imposant à l'Europe occidentale.
Abordant ensuite la période féodale, l'auteur fait apparaître, en 1093, le premier seigneur connu
d'Alais, Raymond Pelet, qui prend part à la première croisade, de concert avec Raymond-Décan d'Uzès et
Guillaume de Sabran, sous les ordres de Raymond IV de Saint-Gilles. Il fait voir aussi les papes Gélase II,
en 1118, et Alexandre III, en 1162, recevant à Alais l'hospitalité des Pelet; il décrit la vie seigneuriale,
les aventures des troubadours de la contrée; il dépeint enfin, au seuil du XIII' siècle, la ville d'Alais entrant
(1) G. BoissiER. — Les provinces orientales de l'empire romain.
(î) Les Chartes d'Àlals du Xtll* siècle, traduites du roman et da latin en rimes françaises, 40 pages in-8*; — Rapport au
Conseil municipal d'Alais sur la dénomination des rues et places de la ville; — Caup-â'œil sur l'alignement et les tgrulicats d»
Gardon, 80 pages in-8°.
«r
« en possession d'elle-même et de la vie publique; » le peuple alaisien établissant ses droits; aflirmant son
existence civile et son organisation communale.
Parvenu à cette partie de son Étude, l'auteur passe en revue les principaux articles de la charte
de 1200, octroyée par les seigneurs aux habitants d'Alais, et si étrangement défigurée dans son texte et
dans sa date par MM. Beugnot (1) et LafcrriC-re (2). Rétablissant les textes d'après les documents originaux
déposés aux archives municipales, il présente une vue d'ensemble de l'organisation communale d'Alais, en
faisant ressortir le profond sentiment religieux qui domine dans les institutions de la société naissante.
*
Le nouveau Dictiontiairc languedocien-français fut le but constant vers lequel convergèrent les études
de Maximin d'Hombres, et la meilleure partie de l'existence de notre cher et regretté confrère a été con-
sacrée à cette œuvre capitale, qu'une mort prématurée ne lui a pas pcrmi d'achever.
En publiant son Dictionnaire languedocien-français, l'abté de Sauvages s'était donné pour mission
principale d'enseigner à parler correctement le français à ceux de ses compatriotes qui, accoutumés dès
l'enfance à formuler leur pensée en languedocien, n'en donnaient, en se servant du français, qu'une tra-
duction vicieuse hérissée de gasconismes. Il se proposait, en outre, d'expliquer les mots du vieux langage
dont fourmillent les anciens documents écrits de l'époque féodale.
Cette préoccupation constante a empêché le savant abbé d'atteindre le résultat qu'on était en droit
d'espérer de lui. Elle lui a fait souvent négliger ou omettre les mots les plus usuels et le mieux employés
pour s'attacher de préférence aux termes purement techniques. Ainsi restreint dans sa spécialité, on peut
dire que le plan de l'ouvrage manque d'unité et demeure incomplet, au grand préjudice du dialecte alaisien.
Le danger qu'avait voulu conjurer l'abbé de Sauvages n'existe d'ailleurs plus de nos jours. Ce n'est
pas, en effet, l'altération de la langue française par le languedocien qui est à craindre à l'heure présente :
l'influence contraire est bien plus à redouter, et nous assistons, chaque jour, à l'envahissement progressif
de notre belle et vieille langue d'Oc, qui tend à se per^'ertir et à se corrompre, en se francisant.
C'est pour combler les nombreuses lacunes du dictionnaire de l'abbé de Sauvages que l'auteur des
Castagnados eut le premier la pensée, il y a déjà plus de trente ans, de rendre sa physionomie vraie au
dialecte alaisien, cet ami d'enfance qu'il savait manier avec tant de grâce et d'esprit. Il associa à cette œuvre
considérable deux amis intimes, MM. J-M. Marette et Maximin d'Hombres, animés comme lui du feu sacré;
et, avec leur collaboration, il jeta les fondements de l'œuvre future, en commençant par recueillir la
onmenclature de tous les mots qui devaient entrer dans le nouveau Dictionnaire languedocien-français,
nomenclature écrite en entier de la main du marquis de La FarL-, et destinée de servir de guide aux trois
collaborateurs. Cette classification devait être considérée comme un arrêt définitif, qu'il fallait religieu-
sement respecter.
Mais la mort vint successivement enrayer ou suspendre l'accomplissement de l'œuvre commencée.
M. le marquis de Lafare-Alais succomba le premier en 1846; M. Marelle le suivit vingt ans plus tard, en 1866.
L'honneur et le fardeau de l'entreprise devinrent alors l'héritage exclusif du dernier des survivants,
qui, à son tour, devait disparaître avant d'avoir pu mettre la dernière main h ce monument patriotique.
« «
A dater de sa nomination comme président du Trilnnial civil d'Alais, l'existence de Maximin d'Hombres
ne devait plus être qu'une longue agonie précédant une crise suprême.
(1) Doaimenis inédUt sur l'histoire de France. Les Oliié, ou registres des arrêts rendus par la Cour du roi, publiés par
M. Ilengnot, membre de l'Institut. T. III, 2~ partie, 131Î-1318. Appendice; Anciennes coutumes d'Alais, pp. 1458-1501.
(2) LAFKRRifcBK. Uisloire du Droit français, T. V, Coutumes de France, sect. 11; Anciennes Coutumes d'Alais, Paris 1858.
Notre ami succomba, le 27 décembre 1873, à la cruelle maladie dont il était atteint depuis plusieurs
mois. II mourut en chrétien convaincu et résigné, digne couronnement d'une aussi belle existence.
M. K. de Roux-Larcy a résumé en trois mots, sur sa tombe, la noble devise de Maximin : « Dévoue-
ment, abnégation, fidélité. »
« Sa foi religieuse, a-t-il ajouté, sa mort la proclame — Sa foi politique fut de celles qui com-
mandent le respect à leurs adversaires, et qu'aucune épreuve ne fait jamais défaillir (1). »
« Né dans le sein de l'Église romaine, élevé dans la foi et l'amour de ses dogmes, dans le respect de ses
décisions, dans la soumission à sa discipline, a dit excellemment de lui M. d'Bspinassous, rien de ce qui,
dans nos temps troublés, a fait hésiter tant d'âmes, n'a eu la force de le faire dévier un seul moment de son
devoir filial Dieu, roi, patrie, cité, famille, amis, tant que ce noble cœur a battu, il a tout aimé avec
obstination — Catholique et légitimiste par sentiment, il devait nécessairement en être le type le plus
pur, et il ne pouvait que vivre et mourir dans les bras de l'Église et en rêvant du trône (2). »
A ce splendide hommage aussi mérité que noblement exprimé, il nous suffira d'ajouter que la mort de
Maximin d'Hombres fut une perte irréparable pour sa famille et ses nombreux amis, et un deuil public pour
cette excellente population alaisienne, qui voyait s'éteindre en lui une de ses figures les plus originales et
les plus aimées, un des derniers chroniqueurs de ses mœurs populaires, un des derniers représentants de
ses antiques traditions.
*
Après la mort de notre ami. Madame d'Hombres voulut bien nous confier le soin de terminer l'œuvre
inachevée de son mari : honneur insigne et périlleux, qui nous revenait moins qu'à tout autre et que nous
nous sommes efforcé de justifier, sans espérer d'y avoir réussi aussi complètement que nous l'aurions désiré.
Maximin d'Hombres avait, en mourant, laissé le Z)tWton/ïatre languedocien rédigé et imprimé jusqu'à
la lettre M, inclusivement. Il restait donc à définir, sans autres jalons que la liste incomplète laissée par
M. le marquis de La Fare-Alais, tous les mots correspondant aux douze dernières lettres de l'alphabet.
L'orthographe introduite par M. de La Fare, dans ses poésies, est des plus défectueuses et se trouve en
complète opposition avec les origines et les traditions de la langue d'Oc. Maximin d'Hombres l'avait néan-
moins adoptée, par déférence pour le souvenir de son ami, et, bien que nos préférences soient en faveur
de l'orthographe rationnelle, reconstituée par la renaJssarice provençale, nous avons dû, à notre tour, nous
plier aux mêmes exigences, pour conserver, à l'œuvre à moitié accomplie de nos prédécesseurs, sa physio-
nomie propre et sa complète unité.
Dix ans ont été consacrés à cette tâche laborieuse, dont l'accomplissement nous a été facilitée surtout
par MM. Emile de Firmas-Périès et César Fabre, deux alaisiens de vieille-roche, pour qui le dialecte Cévenol
n'a point de secrets. Nous devons aussi de nombreux renseignements aux trois poètes d'Alais, successeurs
de La Fare, MM. Paul Félix, André Leyris et Albert Arnavieille ; et, d'autre part, M. Emile Reboul, a bien
voulu prêter à MM. Alfred Veirun, .\uguste Brugueirolle et Clodomir Castagnier, imprimeurs du Diction-
naire, le concours de son remarquable talent de correcteur.
Nous nous estimons heureux de pouvoir consacrer ici, à ces bienveillants collaborateurs, les meilleurs
témoignages de notre sincère reconnaissance.
Alais, 27 décembre 1883.
G. CHARVET.
(1) Discours prononcé par M. E. de Roux-Larcy sur la tombe de M. Maximin d'Hombres.
(2) Éloge de M. Maximin d'Hombres, par M. d'Cspinassous.
EXPLICATION DES ABRÉVIATIONS
A ou a
Ace
Adi
Adv
Allem
Anql
Art
Au FiG
AUGM
AO PHOP
Bass. lat
Cant
Cat..
Celt
CÉV
COMM
CONJ
CONTH
CORB
Dat
DÉMONS
Dkr
DiAL
DiCT
Dm
DlPH
Emp
Esp
Etym
Exclam
Ex
F. onf
Fam ;
Fio
Fr
Fréq
Gasc
Gènit
Gr
Imp
— Indique le changement
= Signifie égale. Ex. Àc :
Actif.
Accusatif
Adjectif.
Adverbe OU Adverbialemenl.
Allemand.
Anglais.
Article.
Au figuré.
Augmentatif.
Au propre.
Basse latinité.
Canton .
Catalan.
Celte ou Celtique.
Cévenol.
Commune.
Conjonction.
Contraction.
Corruption OU Corrompu.
Datif.
Démonstratif.
Dérivation OU Dérivé.
Dialecte.
Dictionnaire.
Diminutif,
Dipklhongue.
Emprunt OU Emprunté.
Espagnol.
Etymologie.
Exclamation.
Exemple.
Féminin.
Famille ou Familier.
Figuré.
Français.
Fréquentatif.
Gascon.
Génitif.
Grec.
Impératif.
Ind Indicatif.
Intehj Interjection .
Irrég Irrégulier.
Ital Italien.
Lang Languedocien.
Lat Latin.
LlM Limousin.
LiNN Linnée, naturaliste.
Loc . PRVfl Locution proverbiale.
M. m . on MASC Masculin.
M. SIGN Mime signification.
N . PH Nom propre.
Par EXT Par extension.
Par kx Par exemple.
Part, pass Participe passé.
PÉJ . ou PÈJOR Péjoratif.
Pers Personne.
Phr . F ou FAITS Phrase faite
PlUR Pluriel.
Port Portugais.
Pop Populaire.
Poss Possessif.
Pbép Préposition.
Prés Présent.
Prêt Prétérit.
Pron Pronom.
Prov Provençal.
Prvb Proverbe.
RÈDUP Réduplicatif.
RÉF Réfléchi.
Bel Relatif.
SiNG Singulier.
ScBS. ou S Substantif.
Syn Synonyme.
Thad Traduit.
Triph Triphthongue.
V. G. M Voyez ce mot.
V. ou V Verbe.
V . 1 Vieux langage .
VOY Voyez.
d'acceptions on de sens d'un mot; mais plus souvent les citations et remarques.
= ec, ac égale ec; angue ^ anègue, = anencke : angue égale anègue, égale anenche; etc.
DICTIONNAIRE
LANGUEDOCIEN-FRANÇAIS
BOISSIER DB SAUVAGES! De LA FARE-ALAIS! Deux
noms radieux et sympathiques, que nous sommes heureux
d'inscrire en tête des colonnes de ce Uvre, et qui feront sa
meilleure fortune.
Au premier nous rattachent des liens de famille; an
second est due l'idée première de notre nouveau Diction-
naire languedocien.
L'abbé de Sauvages, parmi les célébrités que noire pays
a vues naître, on l'a dit avec raison, est la plus complète-
ment alaisienne : aucune n'a le cachet du crû comme la
sienne. Géologue, physicien, naturaliste, agronome, litté-
rateur ou lexicographe, soit qu'il consacre ses études à
l'agriculture, soit qu'il dirige ses recherches vers la linguis-
tique, tous les travaux d'une vie bien remplie et toujours
appliquée, les connaissances variées qu'il possède à un
degré distingué, supérieur même en quelques branches, son
expérience et son rare savoir semblent n'avoir quelque prix
à ses yeux qu'autant qu'il peut Içs faire tourner à la pros-
périté et à l'illustration de son pays natal.
Entre tous ses ouvrages, le seul dont nous ayons à
parler ici , le mieux connu peut-être , ne pouvait manquer
de porter l'empreliite de celle pensée de bien public. Dès le
titre même de son dictionnaire , et dans sa préface , le but
du nioilestc savant prend plaisir à s'avouer hautement. Il
se donne pour mission principale d'enseigner à parler cor-
rectement le français à ceux de ses compatriotes qui, accou-
tumés dès l'enfance à formuler leur pensée en languedocien,
n'en donnent, en se servant du français, qu'une traduction
vicieuse et toute hérissée de gasconismes. Il se propose en-
suite d'expliquer les mots du vieux langage dont founnil-
lent les titres et actes établissant d'anciens droits ou leur
exemption. Une pareille conception a pu paraître étrange,
originale : il n'y faut voir que le sentiment exagéré peut-
être mais touchant, d'un noble patriotisme, qui sacrifie au
désir d'être utile même le soin de sa renommée littéraire et
scientifique. Cette préoccupation toutefois a empêché nne
œuvre excellente d'atteindre la portée que l'auteur pouvait
se promettre. Elle lui fait mettre de cdté les mots les plus
usuels, pour ne s'attacher qu'à des techniques; tous les
termes, et souvent les mieux employés, ne se trouvent pas
chez lui, et il les néglige pour en poursuivre d'autres,
hors de son domaine, s'il y peut saisir l'occasion d'un
redressement et matière à sa leçon de français. Restreint
ainsi dans une spécialité, et en même temps entraîné vers
des dialectes étrangers , son plan est incomplet et manque
d'unité, au grand détriment de notre dialecte. Quelle valeur,
en effet, était destiné à avoir, pour l'avenir Uttéraire de
notre pays, un travail de cette importance, exécuté par on
homme comme l'abbé de Sauvages, si, au lieu de se renfer-
mer dans un traité de purisme français , il nous eût donné
un vrai lexique languedocien, embrassant la langue daas sa
plénitude, ne sanctionnant que ce qu'il savait être de pur
sang cévenol, mais légalisant tout notre avoir légitime! Sa
réserve trop timide est d'autant plus regrettable, que pear-
sonne encore n'avait, avec tant de profondeur, de sagacité
et d'érudition , pénétré dans le génie de notre idiome , ne
s'était plus impressionné de ses beautés, de sa limpidité, de
la sève de ses tours , de ses images , de ses figures , de ses
idiotismes. Malgré ces lacunes, Saitvages restera comme la
gloire la plus populaire de nos contrées, et il méritera tou-
jours d'être considéré comme le plus savant et le plus spi-
rituel des initiateurs du languedocien.
Son recueil sera le meilleur à consulter et le plus cu-
rieux quand on voudra remonter aux sources; mais sa
donnée trop exclusive devait nous interdire de le prendre
en tout pour modèle. Le danger qu'il a voulu combattre
n'existe plus d'ailleurs au même degré. Ce n'est pas l'alté^
ration de la langue française par le languedocien qui est i
redouter : l'influence inverse est bien autrement à craindre,
et le péril sérieux est au contraire de voir notre belle et
8
vieille langue d'Oc se pervertir et se corrompre en se fran-
cisant. Notre gi^ntVation qui s'en va et celles qui viennent,
sont vouées au français : elles ne parlent et ne pensent plus
qu'en français. Est-ce à dire cependant que, de notre passé,
dont il ne reste plus qu'une ombre, rien ne soit à regretter?
Faudr»-t-il surtout que le fier et doux parler de nos pères
et de nos mères-grands, pour avoir encore quelque charme
et une valeur, ne se façonne qu'aux belles manières
françaises et aux modes nouvelles, déserte son archaïsme,
énerve sa virile individualité, se renonce tout entier à
lui-même?
Quand la nationalité méridionale s'est fondue dans la
grande nationalité française, notre terre classique des liber-
tés communales, des franchises municipales, a-t-elle perdu
par la conquête et par la centralisation son esprit d'indé-
pendance et ses généreuses aspirations, qu'elle ne prouve
encore par moments qu'il en survit un souvenir? N'en
serait-il pas de même pour la langue d'Oc , qui a régné en
souveraine des Alpes à l'Océan, des Pyrénées à la Loire?
Quinze millions d'habitants, dans vingt départements, l'em-
ploient comme moyen de communication habituel , comme
l'agent le mieux compris dans leurs transactions, dans leurs
besoins journaliers. Elle est partout, et son génie vivifie en-
core nos provinces ; il semble les resserrer entre elles par une
plus étroite solidarité. Elle est divisée en une nombreuse
variété de dialectes, le Cévenol, le Provençal, le Limousin,
l'Auvergnat, le Gascon, le Béarnais; mais elle les rapproche
et les fusionne tous dans son principe unitaire, sous le même
symbole commun et fédératif. L'ostracisme français n'est
point parvenu à paralyser chez elle la fibre spiritualiste et
poétique : elle vient de faire ses preuves éclatantes. On
l'exclut des écoles , de l'enseignement classique et des aca-
démies : elle se venge de la proscription en forçant son
vainqueur à applaudir, à envier les merveilleuses inspira-
tions de sa muse toujours fidèle. Vaincue par les armes
perfectionnées du français, on voudrait la reléguer à la
campagne, à la ferme, parmi les paysans et les laboureurs;
elle s'en échappe pour prendre ses entrées dans les salons
du grand monde et sur les théâtres des premières villes.
Modeste Cendrillon, on la croit réduite aux plus vulgaires
usages de la vie commune, condamnée au rôle de servante,
après avoir été dépouillée de sa part d'héritage par sa su-
perbe sœur d'outre-Loire ; mais elle est restée grande dame
et noble fille du peuple, et elle ne veut pas que son blason
mi-parti soit infecté de la barre ignominieuse de bâtardise.
Elle était littéraire, élégante et polie avant que le français
n'eût secoué son enveloppe tndesque et inculte. Elle n'a
point abdiqué, et se souvient; elle se refuse à recevoir l'au-
mône du français, ce qui pour elle serait consentir à des-
cendre à l'humiliante condition de patois, et dégénérer de
langue savante et de haute extraction en un jargon grossier
et barliare. I^s royautés tombées, comme les démocraties
asservies, ont leurs majestés et leurs fiertés, qui comman-
dent encore le respect, et quelquefois de ces retours de sève
et leurs jours de révolte, qui les relèvent des proscriptions
et des dédains !
Ce n'est pas qu'il y ait à armer en guerre pour reconqué-
rir à la langue d'Oc sa couronne de souveraine déchue , et
{wur la restaurer dans son rang politique et inteniational
d'autrefois. Ses destinées sont changées, elle n'aspire pas si
haut ; mais elle n'est pas tombée si bas qu'elle se laisse dé-
figurer, travestir et outrager sans protestation. Au moins
aura-t-elle bien le droit de vouloir rester en possession
d'elle-même et de son génie, et qu'il lui soit permis, tant
soit-<?lle bafouée et trahie, même par les siens et ses plus
proches , d'espérer que son culte vit encore dans quelque
noble cœur, et que le feu sacré trouvera un coin de foyer
qui l'abrite et le conserve.
Cependant on a pu croire que l'heure de la réhabilitation
était près de sonner pour elle , à voir le mouvement litté-
raire qui se produit en sa faveur à notre époque, si peu
portée vers la littérature. C'est au moment où la langue
d'Oc est proclamée, de par les pédants, morte sous la férule
du français, et dûment ensevelie, que, de tout le Midi, dans
son vieil idiome national, s'élève la plus éloquente des pro-
testations, s'exprimant avec une fraîcheur de poésie, une
jeunesse de verve, une inspiration, une originalité, à rassu-
rer contre de fatidiques et niaises prédictions, à consoler
des écœurements du positivisme matérialiste. Et c'est à ce
moment-là même que les meilleurs esprits, en France et en
Allemagne, — historiens, savants, philologues, curieux et
érudits , doctes et lettrés , — attirés vers les études de la
linguistique , se prennent à interroger nos anciens dialectes
pour y découvrir le secret de leur formation, de leur ori-
gine, des lois du langage , la trace des vieilles mœurs , des
usages , des institutions du pays , que souvent un mot a tra-
duits et conserve dans son étymologie.
La renaissance des lettres méridionales a déjà pour elle
la plus grande puissance du jour, le fait accompli. Elle
s'est affirmée par des œuvres brillantes et vigoureuses; et
aussitôt, sous le charme et l'étonnement, l'attention publi-
que s'est fixée sur ces patois , comme on disait , auxquels
on n'avait pas soupçonné tant d'harmonieuses ressources.
Grâces en soient rendues à la muse de la langue d'Oc ! Dès
qu'on a pu voir l'éclat et la richesse de son écrin , on a
voulu sonder les profondeurs de la mine qui recelait ces
fines pierreries : les travaux de recherche et les fouilles ont
été entrepris avec ardeur. Cette poésie, que l'on pouvait
avouer et qui se faisait applaudir, a commencé par faire
aimer sa langue et le vocabulaire qui en apprenait les déli-
catesses, le tour et l'expression. L'histoire d'un peuple n'est
autre que l'histoire de sa langue ; et à son tour, la science
est venue explorer les sources , les formes , les flexions, les
transformations du vieux langage néo-latin, roman, langue-
docien ; demander aux dictionnaires du jxîuple ce que le
peuple pensait et comment il parlait sa pensée , comme il
la parle encore et la parlera longtemps, et étudier sur le vif
son génie, ses coutumes et ses traditions.
e
La poésie refleurissait au berceau des premiers trouba-
dours; et par un inerveilicux eiitraiiu'inent de patriolisiiie,
tous les dialectes, aussi nombreux et aussi Mii''lodicux (jue
dans l'ancienne Grèce, se réveillaient jiour publier leur
charte particulière, le code local de leurs variétés. Les tra-
vaux des grammairiens et des linguistes, li?s glossaires, les
lexiques, les vocabulaires se sont multipliés |K)ur attester
la vitalité rajeunie de l'idiome languedocien. Des acadéniies,
des sociétés , des congrts , des jeux floraux ont encouragé
cet élan de l'esprit provincial, et tout le Midi a répondu à
des voix aimées et connues, qui l'appelaient dans sa langue
populaire .1 une vie nouvelle.
Certes , tout cela ne va pas faire renaître les temps des
Raymond de Toulouse et des Déranger de Provence, avec
les cours d'amour, avec les fleurs et les joies de la gaie
science. Kous n'allons pas revenir à l'épmjue pour laquelle
écrivait Sauvac.es, où, par tout notre jwys, dans les plus
grandes maisons comme sous les toits les plus humbles, le
patois, c'est-à-dire le langage de la patrie, conservait seul
l'antique droit d'asile, où seul il était admis dans les rela-
tions privées et domestiques, dans les causeries intimes du
■salon du riche et de l'àtredu pauvre, où la famille patriar-
cale ne s'entendait, ne s'entretenait, ne s'aimait qu'en pur
languedocien. >'on; mais tout cela, ce réveil intellectuel de
nos provinces , ce retour de faveur, cet empressement du
monde savant à remettre en honneur l'idiome méridional
donnent la preuve que le flambeau , rallumé par des mains
habiles, n'a rien perdu de son éclat, et qu'il y a mieux que
des cendres mortes à remuer au foyer de la langue d'Oc.
N'est-ce pas déjà quelque chose de bien remarquable qu'une
langue, proscrite et dédaignée, qui revendique d'autorité sa
place au soleil, qui s'impose par des chefs-d'œuvre et se
classe de prime-saut au rang (jui lui a autrefois appartenu
et qui lui revient encore? N'est-ce pas faire acte de force,
sous le régime le plus centralisateur qu'on ait jamais inventé,
d'avoir su persévérer dans son in lépendance, et si bien
garder intactes l'originalité et la pureté de son type natif?
Et quand elle s'est présentée ainsi, de quels artifices a-t-elle
usé pour se faire reconnaître? Quelles habiletés a-t-elle
employées pour être adoptée et recherchée? Son histoire
était là qui disait son passé, ses traditions, ses instincts.
Le charme de sa parole, de sa mélodie, de ses rythmes a
suffi : elle n'a pas exercé d'autre séduction.
Gîpendanl, depuis le commencement de ce siècle, le sys-
tème des prohibitions ne lui a i)as éjwrgné ses rigueurs.
Que de défenses par l'ilits et par arrêts, par lois et décrets,
de se [)roduire ! Et en même temps, comme sur son domaine
les introductions de la concurrence officielle étaient léga-
lisées! Au non\ du progrès et de l'unité, sous prétexte de
belle diction, aucune trahison, aucune rupture, aucun
abandon ne lui ont été ménagés. Elle a été écartée de l'in-
struction primaire de l'enfance; les hautes classes de la
société n'ont plus consenti à la traiter que comme une langue
de luxe, pouvant s'adonner avec quelque succès à la litté-
rature et y réussissant assez bien , et elles l'ont bannie de
leur conversation la plus fanjilière. Mais, sous le coupdecet
injustes réi»rol)atit)ns, auprw des masses populaires, loin des
villes et des écoles, elle a trouvé un refuge. L'attachement
opiniâtre du peuple pour le langage dans le({uel il a appris
à {lenser, qu'il s'est donné conmie l'instrument le plus
facile, le plus commode , le plus actif de ses relations, de ses
nécessités d'habitudes et de mœurs, lui a fait un rempart
inexpugnable. Là est pour elle la vraie patrie; elle est là
en pleine possession d'elle-même. Vivant par les populations
attachées au sol, elle a suivi leur dévelopiicment ; mobile
comme tout ce cjui vit et marche, quand elles avançaient;
s'impressionnant avec elles des influences climatériques,
quand leur organisme les portait naturellement à modi-
fier certains sons, à préférer certaines articulations mieux
appropriées à leurs facultés; se prêtant à formuler les
idées et les connaissances d'une civilisation plus riche,
dans la mesure des besouis et des intérêts qu'elle était
appelée à servir, dans le cercle qu'elle embrassait, selon les
lois et la nature de son organisation, dont le peuple a si
bien le secret et l'iastinct. C'est assurément pour s'être
tenue dans ce milieu , dont on ne l'arrachera pas de long-
temps, où les innovations ont moins de prise et le respect
de la langue mateniellc plus de puissance, qu'elle doit de
n'avoir presque rien [lerdu de son caractère primitif,
du naturel qui distingue son individualité , qui la classe
comme une langue à jKirt, vivant de sa vie propre.
Aussi, plus qu'un autre, l'idiome languedocien est-il en
droit de se montrer jaloux et fier de rester et de paraître
lui-même. Il ne redoute rien tant que l'alliage et la contre-
façon : il réprouve avec horreur tout ce qui ressemble à un
pastiche ou à un calque ; il est dans sa nature d'avoir des
suscciitibilités d'hermine, des délicatesses de sensilive, et
des raffinements de pruderie, qui auraient dû déconcerter
les audaces d'attouchements profanes. A ce point que, pour
vivre dans le mouvement intellectuel et social, quand il est
forcé d'emprunter un mot au français , son voisin et son
rival , il a hâte de protester contre ce servage, et se croit
obligé de défigurer l'intrus par (|uolque métathèse hardie
qui sauve jusfju'à l'apparence de l'imitation. Ainsi encore,
il sent bien que le langage moderne de la politique, des
sciences et des arts, de la philosophie, lui échappe; mais,
dans la sphère où l'a retenu sa défaite, il n'en avait nul
besoin; il repousse l'imjiortation étrangère ou il la dénature
par des procède^ à lui propres, et peut-être aussi par la
crainte d'introduire dans son domaine la plus étrange des
battologies, s'il lui fallait, à l'exemple du français, deman-
der des techniques à l'Angleterre pour la politique, le com-
merce ou l'industrie, à l'Italie pour la musique et la pein-
ture, à la Grèce et à l'Allemagne pour la philosophie.
Le contactcontiimelet forcé du français n'autorise avec lui
ni assimilation, ni promiscuité. Le génie de la langue d'Ocest
en opposition avec le génie de la langue d'Oil. La sonorité de
l'accentuation méridionale, l'euphonie et la cadence de ses
10
désinences et de ses formes, ses tours elliptiques et sa con-
struction ne se plieront jamais au dialecte sourd du >'ord, à
sa précision exacte et compassée. Il ne sortirait de la fusion
qu'une logomacliie sans nom , qui ne serait ni du langue-
docien ni du français, mais du vrai patois celle fois, inin-
telligible aux habitants du pays eux-mêmes, et faite pour
déconcerter les étrangers et les plus savants philologues.
Malheureusement ces incompatibilités entre les deux lan-
gues n'ont pas été toujours bien comprises. Pour quelques
affinités que le latin avait à l'origine apportées dans l'une
et dans l'autre, on n'a pas assez tenu compte de leurs diffé-
rences physiologiques, de tout ce que peut-être le climat,
leur position géographique, leurs tendances avaient mis
d'inconciliable, d'antipathique dans leur nature, dans leur
caractère, dans leur mécanisme, dans leur expression.
C'étaient deux fleuves, ayant une source commune, qui
longtemps avaient suivi une marche parallèle, fécondant
le pays dans leur cours ; mais que depuis des pentes oppo-
sées ont entraînés en sens contraire , et dont les eaux ne
peuvent plus se mêler sans se troubler et se corrompre.
C'est ce qu'il fallait surtout remarquer : c'était à main-
tenir la séparation qu'il importait de s'attacher.
Aujoui-d'hui la langue française, qui ne cesse de se pro-
diguer, de se répandre , do se perfectionner, attire tout à
elle : seule , elle a la parole ; seule , elle est de bon ton et
de bonne compagnie; tout se fait, s'enseigne, se régente,
se discute, se traite en français : sa prééminence est incon-
testable. La langue d'Oc, à ses côtés, depuis qu'elle a perdu
sa nationalité , n'est plus qu'un parler de vaincus. Comme
elle n'a pu se mouvoir que dans un cercle restreint , sa
puissance de développement s'est mesurée à des intérêts et
à des besoins bornés. Émule souvent heureuse du français,
dans la poésie, plus abondante et plus musicale que lui, on
l'a bien vue toucher sans efforts aux conceptions élevées de
la pensée et de l'esprit ; mais rejetée de la vie publique
active, du monde des afl'aires , de la politique et des sciences
humaines, mise en quelque sorte au ban do la civilisation
moderne : toute expansion lui devenait imiwssible. Elle est
restée, avec ses allures familières, vulgaires, un peu rusti-
ques, la langue du peuple, de la famille, des campagnes.
Elle a vécu néanmoins et elle vit encore de son propre
fonds, par la seule énergie de sa constitution.
Mais tous rapports philologiques ont cessé entre les
deux idiomes. Leur co-exisl?nœ sur le même territoire ne
saurait fonder ni alliance, ni association. La transfusion de
l'un dans l'autre ne serait en effet que l'anéantissement du
plus faible, sans profit pour le plus fort.
Sans doute il peut arriver un jour, si éloigné qu'on le
prévoie, où le vainqueur parviendra à étouffer le paria, à
force de l'élreindre. Il le supplantera dans son modeste
empire, mais son pouvoir ne va pas jusqu'à le rayer de la
famille des langues. Que le languedocien soit supprimé et
démonétisé, c'est le lot des proscrits; mais rien ne fera
qu'il n'ait eu cours légal, qu'il ne soit encore une des
gloires de la mère-patrie, qu'il no revendique justement son
individualité distincte, et qu'il ne se refuse à être converti en
un dos patois du français. C'est au moins contre cette
décomposition violente qu'il proleste, s'il est condamné à
mourir. Amis cl ennemis s'achariienl à le transformer en
un argot qui le rendra bientôt tout :"i fait méconnaissable.
Certains puristes, et quelques-uns très-érudils vraiment,
ne sont-ils pas allés jusqu'à professer que le vocabulaire
languedocien n'avait rien de mieux à faire que de mettre
au pillage les dictionnaires français? Ces stériles et humi-
liants larcins, s'ils étaient érigés en système cl innocentés,
ces monstrueux amalgames, s'ils s'accomplissaient, c'en
serait fait de la langue d'Oc, et de sa dignité, et de son génie.
Les empiriques, en infiltrant dans les veines de la pauvre
malade un sang étranger, n'obtiendraient que ce déplorable
résultat de compromettre davantage son existence. A l'arrêt
de mort qu'on n'ajoute donc pas un arrêt de flétrissure.
La réaction intelligente de l'esprit des provinces, dans le
Midi, n'a pas été saluée partout avec tant de sympathie
encourageante pour avorter en plein succès. La langue d'Oc,
qui a repris sa place dans la littérature de la Franco , fait
désormais partie de ses richesses, et sa conservation inté-
resse la gloire nationale, liais que lui faut-il encore pour
vaincre les préjugés , pour avoir raison de tous les partis-
pris? Elle n'y parviendrait pas mieux si elle consentait à
reprendre les formules archaïques du roman des trouba-
dours, avec lesquelles on ne s'entendrait plus, que si elle
était contrainte à recourir à ces faux ajustements d'em-
prmit, qui l'enlaidissent et la défigurent. Jlais tous les suf-
frages lui feront accueil quand elle se montrera dans sa
pureté première, dans sa simplicité vraie et naturelle. Elle
ne doit être jugée que sur son tyi» natal , sur un tableau
correct, complet, entier d'elle-même, telle que le progrès
l'a faite, modifiée, appropriée, avec les accroissements que
son génie lui a apportés et que l'usage consacre. Au prix
d'une épuration sévère, elle méritera de se relever de son
abaissement, et d'attirer les études sérieuses et la faveur
publique.
Sans rien répudier de son passé qui a jeté un vif éclat
dans la littérature, ne peut-elle avoir (juelque orgueil de sa
renaissanœ, qui n'est pas moins brillante? Ce qui était
autrefois do son essence, ne le porte-t-elle pas encore
aujourd'hui en elle? Toutes les langues arrivent nécossai-
reiiient à se transfigurer avec les mœurs, l'esprit public et
les tendances des populations qu'elles représentent. Et de
cela que l'idiome méridional ne s'est pas figé dans l'immo-
bihté, qu'il a éprouvé des transformations, serait- il juste
de conclure qu'il doit être déclaré atteint et convaincu de
mort civile? Ce ne sont point les acquisitions nouvelles,
quand il les a marquées au titre légal , qui {auvent dimi-
nuer son crédit; mais bien cette fausse monnaie, frappée
au coin d'une fantaisie ignorante, qui le déconsidère : et
c'est là que le remède doit être appliqué.
D'autre part, la langue d'Oc est morcelée en une infinité-
11
de dialectes; mais s'en est-elle pour cela affaiblie dans son
principe? Tous ces rameaux se relient par mille radicules
à la souclie-mi^re; les nuances d'intonation et de vocalisa-
tion viennent confondre leurs accords dans l'harmonie
originelle, dans nne gamme commune. S'il n'est pas jiermis
d'espérer, à cause de l'Mendue du territoire et de la diver-
sité (les dialectes, de les rassembler tous dans une compo-
sition unique, qui di'nonce les altérations dont ils ont
chacun plus ou moins subi l'atteinte, et qui les ramène au
thème vrai, ce résultat ne peut-il être obtenu dans une
monographie, qni se rattache ,'i tous par des aperçus géné-
raux, par la fraternité d'origine et de famille? Notre dia-
lecte cévenol, par sa position concentrique entre la plaine
et la montagne, plus abrit*^ que les autres contre les impor-
tations exotiques, ne s'est-il pas montré aussi plus fidèle au
vieux culte, n'a-t-il pas mieux conservé lessaines traditions?
Ne devrait-il pas être préféré pour ce travail d'épuration?
Ce sont ces études qui préoccupaient l'auteur des Casta-
gnados, auxquelles il conviait un groupe d'intimes, animés
comme lui du feu sacré. Il rôvait de rendre à son dialecte
bas-languedocien, cet ami d'enfance tant aimé, sa physio-
nomie vraie. Dans cette pensée fut commencée la nomencla-
ture du nouveau Dktinnnnire langnetlocien : elle nous est
parvenue écrite en entier de la main de M. le marquis db
La Fare-Alais.
A cet émiuent esprit , si versé dans la connaissance de
l'idiome maternel , si familier avec le génie du gai-savoir,
il appartenait, et lui seul avait autorité et compétence pour
cela, de dresser le nobiliaire complet de notre langue, où
ne devaient être inscrits, comme sur le livre d'or de Venise,
que les patriciens de bon aloi , de pure origine ou d'allian-
ces légitimes. Poète, il avait rendu à cette langue populaire
sa grAce et son élégance, sa clarté et son énergie, son carac-
tère joyeux et goguenartl, ses allures franches et agrestes;
il l'avait élevée même jusqu'à l'idéal qu'on lui croyait
inaccessible, jusqu'au sentiment et au pathétique pour les-
quels on l'accusait de manquer d'expression ou de souffle.
Grammairien, il voulait lui garder son purisme natif et son
originalité technique; la sauver du servilisme de l'imitation et
des pollutions de l'invasion étrangère; délivrer son domaine
des excroissances sauvages que le terroir natal n'avait pas
produites et se refusait îi féconder; conserver aux fleurs de
ses champs leur fraîcheur et leur parfum , sans proscrire
toutefois celles que sa culture ou son génie avaient natura-
lisées et dont il avait fait des cx)nquêtes. I^e maître seul eût
pu mener à bien ce labeur délicat : malheureusement il ne
lui a pas été donné de l'accomplir; mais il en a déposé la
pensée dans la nomenclature.
Cette classification, telle qu'il nous l'a laissée , accompa-
gnée de quelques notes trop rares et pieusement recueillies,
qu'il sera facile de rec(mnaitre, forme un tout complet.
Notre système d'orthographe et les règles de notre syntaxe
s'y trouvent en germe : toutes les acquisitions nouvelles du
Cévenol sont légalisées, les néologismes irréguliers condam-
nés; le maître a prononcé. Pour nous, ces listes de mots
sont les tables de la loi : elles fixent notre dialecte, elles
sont notre langue vraie, actuelle, vivante. C'est l'arrêt au-
quel il n'y a rien à ajouter ni à retrancher : le jugement
deniier qui sépare le Ixm grain de l'ivraie.
Il y a plus de vingt-cinq ans du jour où fut écrite la pre-
mière ligne du Vocabulaire et où nous rec/'vions, avec un
ami, hélas! perdu aussi pour nous, la confidence du plan
d'une entreprise trop tôt interrompue. Alors, dans une col-
lalxiration fraternelle, à la({uelle manquait son chef naturel,
le travail aurait pu être suivi; d'autres préoccupations
arrêtèrent nos études, sans jamais cependant nous les
faire perdre entièrement de vue. Enfin, quand au dernier
survivant est revenu ce legs de l'amitié, pour en accepter
l'honneur et les périls il a moins consulté ses forces que
son patriotisme. L'eeuvre avait été inspirée par un senti-
ment qui devait la faire continuer : elle pouvait être utile,
ses difiiculti^ ne devaient pas empêcher d'en tenter les
risques et les écneils. Mais aujourd'hui que la tlche est à
peu près remplie, que nous avons parcouru jusqu'au bout la
voie tracée par les jalons indicateurs, nous jetons un regard
en arrière, et nous doutons. F.a bonne volonté ne nous
a-t-elle pas égaré? L'esprit du maître ne souffle plus; ne
nous a-t-il pas abandonné dans ce long trajet? Et nous en
sommes à nous demander, en le regrettint peut-être, s'il
n'eût pas été préférable que l'esquisse fût restée simplement
au trait qui seul lui donnait tant de vie et d'animation;
s'il n'eût pas mieux valu que la toile eût été laissée vide
dans son cadre d'or. Puisse au moins la gangue abrupte
ne pas trop déparer le diamant que nous avons voulu
mettre en lumière !
Tout d'abord nous devions dire comment était né le
nouveau Dictionnaire languedocien ; maintenant, que son
ordonnance, sa marche et son développement eussent dû
être moins imparfaits, plus conformes aux us et coutumes
et aux règles académiques, nous l'avouons. H y aurait trop
mauvaise grAce A ne pas le reconnaître et trop de présomp-
tion à ne pas s'en excuser. Il va de soi que notre pré-
tention n'a pas été de faire un livre savant, pas plus que
destiné à apprendre la langue à ceux qui la savent; mais il
importait de conserver l'acte de son état civil, nous l'avons
fidèlement enregistré. Nous avons mis toute sorte d'appli-
cation et de désir à bien faire, pour rendre utiles et inté-
ressantes nos recherches, pour maintenirles saines traditions;
s'il ne nous a pas été donné de faire mieux , A nous seul
la faute. Mais que ne nous pardonnera-t-on pas et ne nous
laissera-t-on point passer A la faveur des deux noms si
populaires et si sympathiques qui nous couvrent? Ce double
patronage de Sauvages et de f,A Fark-Alais. nous l'invo-
quons A chaque page. A plus d'un titre nous avions le droit
de nous en réclamer : ici le devoir qui nous tenait le plus
au cœur était de porter l'hommage du souvenir et de la
reconnaissance à ces deux mémoires vénérées et chères.
A
A, j. m. Premièreletuedel'alphabet. Cette lettre n'étant
jamais muette et n'ayant qu'une seule et môme prononcia-
tion, il n'y a pas lieu de lui donner un accent quelconque,
ni au commencement, ni à la fin, ni dans l'intérieur d'un
mot. Cejiendant A prend l'accent circonflexe dans la diph-
thongue : tndou, pâou, âoubé, etc.
A, prépos. et signe du datif il. — Anan à la vito; donna dé
pan à un pâoure. Ici l'i n'est pas considéré comme lettre,
comme substantif; il est préposition. Pour ledistinguer ainsi,
et ne pas le confondre avec le mot suivant, nous lui domions
l'accent grave , qui du reste ne modifie en rien sa pronon-
ciation .
A, 3'^' pers. ind. prés, du \erhe Avédre. il ou elle a.
A, désinence, qui est représentée dans quelques noms
propres d'homme et dans beaucoup de noms de lieu, en
fr. par ac, et en lat. par acus, acum.
Dans aucun mot notre dialecte n'admet ni ne prononce
le C final ; le français, au contraire, le fait fortement sentir;
en cela, et sur la terminaison dont nous traitons, celui-ci se
rapproche davantage de l'ancienne forme. Kos aïeux, les
Celtes, avaient en effet ce sufDxe ac, ak, qui se confondait
avec son équivalent ec, ek, conservés encore dans l'armori-
cain, le cambrique et autres; et ils appuyaient sans doute
sur la finale.
On connaît le rôle des préfixes et des sufiSxes, deux
sources qui fécondent et enrichissent les langues. Ceux-là
précèdent le mot, font les composés et marquent un rap-
port de convenance, de lieu, de distince, de temps, de
différence, etc.; ceux-ci suivent le mot, forment les dérivés
et impriment it la racine un sens particulier de qualité, de
mode, d'action , de substance , d'appropriation , de ressem-
blance, de réunion, de collectivité et autres. Le sulBxe ac,
d'origine gauloise, servait à adjectiver le radical auquel il
s'attachait, en lui apportant une idte de descendance, de
propriété ou do collectivité, quand il s'ajoutait à un nom
propre.
En arrivant dans les Gaules, Rome leur imposa sa langue
et son génie; mais le vieux tronc celtique ne fut pas déra-
ciné et ses rameaux verdissaient dans le langage usuel au
milieu des pousses latines. Les dénominations locales toutes
faites ne pouvaient s'effacer : elles furent latinisées le plus
souvent par la simple addition de la syllabe romaine carac-
téristique us, a, um, selon qu'il s'agissait d'un mansus ou
pagus, d'une villa ou mansio, d'un castrum om prœdium.
Pour les établissements nouveaux à créer et à nommer, le
contact persévérant des deux idiomes amena des modifica-
tions de procédés et de formes. Le latin introduisit son
génitif en i, signe de relation identique au suffixe ac; et
ABA
de là très-probablement les désinences en acius ou ocium,
et par transposition iacus , iacum, et peut-être les flexions
en assius, assium, atius, atium. C'était déjà l'altération,
mais aussi le renouvellement; et pendant les sept ou huit
siècles que dura la décadence du régime romain, (jui allait
s'altérant dans la basse latinité, se faisait en même temps
le travail de formation de la langue d'Oc, prête à jeter
tant d'éclat avec ses troubadours. Il est facile de compren-
dre, dans cette période, les transformations par lesquelles
durent passer les désignations apiwUatives , sans parler des
influences ethniques, qui agissent avec tant de puissance sur
les organes vocaux et sur l'accent.
Les résultats se traduisent en variantes multipliées.
Tandis que, dans le Nord , le suffixe ac se convertit eu é,
ey, ay, i, y, il fléchit, dans le Midi, en a simple, en ec, ex;
vers le Centre, en eu, euj;;un peu partout, en as et at; et
toujours le lalin immobile et uniforme a jxîrsistô dans ses
finales acus et acum, iacus et iacum. Dans cette variété de
produits issus de l'union des formes latines avec les dési-
nencesgauloises, tantôt latinisées, tantôt seulement traduites
de la langue vulgaire et primitive, la combinaison de la
mouillure sur \'i apparaît dans beaucoup do noms ; elle
amène encore comme équivalent le suffixe an, en et autres,
et, il faut le reconnaître aussi, le g celtique mouillant l'n,
qui donne, pour ac et acum ou iacum, dans le Nord, igné,
igni. igny, ignies, qui ne sont pas moins pittoresques que
nos agnac, agnas, anègues, anigues, agnurgues, argue et
orgue, méridionaux, qui ont les mêmes cléments primitifs
et remontent à la même source. En commençant, il fallait
tenir note de ces transformations. — Voy. les articles An,
Argue, et les exemples sous les noms de lieu Aïmargue,
Massïargue, Cand'ia, Sdouvagna, Sdouvagnargue, etc. , elc.
Abadiè, s. f. Abbaye; monastère d'hommes ou de fem-
mes, gouverné par un ablié ou une abbesso.
Dôr. du latin Abbatia.
Ahandoù, i. m. Abandon. — Il ne se prend guère
qu'adverljialement. Laissa tout à l'ubandoù, il néglige toutes
ses affaires.
Abandouna, v. Abandonner. — Ce mot d'origine toute
française est peu employé dans son sens propre, mais il
devient lout-à-fait technique au particii» passé fém. uno
abandounado, une femme décriée et que tout le monde fuit.
Nous remarquerons, en conmiençant et une fois jMur
toutes, que le plus grand nombre de verbes actifs, dans
notre idiome ainsi que dans le bas-breton , se terminent en
A à l'infinitif et au part. pass. masc. Tous ces participes
font ado au féminin.
Abàoucha (s'), v. Tomber sur la face, sur le nez.
ABE
ABE
19
Le radical semble pris de bueca. bass. latin., bouche.
Abàousa, i'. Uetounicr un vase sens dessus dessous.
Atiâousa (s"), t!. Se coucher .'i plat ventre.
Abâousoù (d'), ou d'Abàousoùs, adv. A plat ventre,
face à ti'rrc.
Abarbassi, ido, adj. Barbu, qui laisse croître sa barbe
outre mesure.
Dér. de Barbo.
Abartassi (s'), v. Se couvrir de buissons; dégénérer en
buisson. S<î dit d'un arbre qui a été brouté ou trop fré-
quemment ravalé dans sa jeunesse.
Dér. de Barlas, buisson.
Les verbes dont l'iidinitif est en I , ont la même termi-
naison au part. pass. masc. ; ils font au fém. ido : règle
générale.
Abasani (s'), v. Se flétrir, se rider; devenir vieux, usé,
nii-jwurri. Se dit quel<iuefois des persoimes, mais plus sou-
vent du bois do service qui a été pénétré par l'humidité et
la gelée, et qui jjerd par là son poids et sa dureté.
Abastardi (s'), v. S'abâtardir, se rabougrir, dégénérer.
Se dit surtout des plantes et des céréales qui dégénèrent
faute d'assolement et de renouvellement des semences.
Abataïa, v. Attaquer, poursuivre quelqu'un avec des
projectiles quelconques; jouer de la fronde, jouer à la
bataille, lancer des pierres avec la fronde ; abattre des fruits
à coups de pierre ou de gaule.
Abè, ». »»., dim. Abéqué. Abbé. Ce mot n'est plus qu'une
désignation générique de tout ecclésiastique, n'iuqx)rte son
rang et ses fonctions, jusqu'à celles d'évèque inclusivement.
Dér. du lat. Abb'ts.
Abé, *. m. Sapin, Abie» vulgarii, Linn. Grand arbre de
la famille des Conifères. — Voy. Sapin.
Dér. du lat. Abies.
A-bé-cé-dé, s. m. A-b-c, alwcédaire, alphabet.
Abéïano, s. f. Mélisse, citronnelle, Melissa ofpcinaliê,
Linn. Plante à odeur de citron. Ses feuilles prises en infu-
sion sont un léger stomachique. C'est le thé des paysans.
— Voy. Limounéto.
Etym. de abiio, parce que les fleurs de cette plante, la
mélisse, attirent les abeilles, dont le nom grec est [iÈXmoa,
formé lui-même de [jiiXi, lat. mel.
Abéïè, !!. m. Grand troupeau de moutons composé de
plusieure troujwaux. de différents propriétaires, et que l'on
réunit sous la ganle d'un maitro-berger nommé baile, pour
les conduire en été sur les hautes montagnes. — Voy. Avé.
Ce mot est évidemment une dégénérescence d'douèliê, qui
a la même signification dans le dialecte gascon ou plutôt
bordelais. Ce dernier est dérivé d'àouèlio, brebis, formé du
latin ovis, comme ovile, bergerie, étable à brebis. C'est la
même origine que le français ouailte ou ovaille.
Abéïo, s. f. Abeille, mouche à uikI. Apis mellifica, Linn.
— Mèrdo d'abé'io, miel. Carya coumo uno abéïo, chargé
comme une abeille; ne se dit que de quelqu'un chargé de
butin ou d'objets utiles à soi-même.
Ahél ou Apiè, (. m. Rucher d'abeilles; lieu où sont pla-
cées les ruches à miel; l'ensemble de toutes les ruches.
— Voy. Apiè.
Abéna ou Avéna, t>. Finir, user, éliiuer. Se dit d'an
habit, du linge, d'un meuble; au fig. d'une personne usée
de vieillesse ou de travail. — C'est encore un technique
particulier jwnr les filatures de soie. Chaque jour, à la fin
de la journée, on ramasse les derniers cocons à moitié filés
qui restent dans la bassine, iiour les réunir le lendemain à
des cocons neufs ; mais le samedi il y aurait inconvénient
à les laisser croupir ainsi tout le dimanche dans leur humi-
dité. Pour y obvier, on travaille un |)eu plus longteinj» le
samedi, pour achever de filer ce qui reste de soie aux der-
niers cocons : c'est ce travail sur les cocons ainsi usés, et
sans en adjoindre de neufs, (ju'on appelle Abénn. —
Voy. Avéna.
Abénaduros, ». f. pi. Reste de cocons mi-<lévidés dont
il est parlé à l'article précédent. La soie qui en provient a
moins de force et de nerf, car ce sont les filaments inté-
rieurs et le dernier travail du ver arrivé à sa lin. Aussi
n'est-il pas prudent de dévider cette soie sur la flotte déjà
commencée; elle paraîtrait à l'extérieur et donnerait à
l'œil mauvaise opinion de sa consistance. Pour y remédier
ou prend une roue nouvelle et l'on entreprend une autre
flotte ; alors la soie provcnuc des abénaduroi se trouve eu
dedans et passe ainsi inaperçue.
Abèou (àl'), adv. Eu danger, sur le bord d'un précipice,
sous le coup d'un accident. — Aquà's biin à l'abiou, cela
est fort exposé, bien en danger.
Dér. peut-être du lat. Labes, chute, ruine; mais alors il
aurait dû être écrit Labèou; peut-être du lat. Abytsun,
abime, précipice.
Abéotira, v. Abreuver; mener à l'abreuvoir, faire boire
les bestiaux ; combuger un vaisseau en bois, des futailles.
— 1m lèro es prou abéourado, la terre est assez humectée,
abreuvée.
Dér. de Béoure, boire.
Abéouradoù, ». m. Abreuvoir; auge à cochon; auget de
cage. On dit proverbialement : l'aï tout soûl à l'abéouradoù,
il n'est pas nécessaire de le mener boire, il sait boire tout
seul, en parlant d'un ivrogne. — Cassa à l'abéouradoit,
tendre des filets le long d'un ruisseau où vont boire les
oiseaux.
Abéouraje, ». m. Breuvage. — Il se dit de la pâtée
qu'on sert aux cochons; du b»euvage mêlé de son et de
farine qu'on donne aux chevaux et aux vaches; particuliè-
rement des breuvages médicaux qu'on fait avaler aux
animau.x domestiques de toute sorte.
Abéoure, ». m. Toute sorte de boisson étendue d'ean,
mais dont le vin est la base, soit piquette, soit vin trempé;
abondance.
Abérlénquiè ou Amélan, ». m. Amelanchier, Cratagus
amelanchier, Linn. Arbrisseau de la fam. des Rosacées. Son
fruit se nomme Abérlénquo. — Voy. Amélan.
14
ÂBL
ABR
Le nom propre Abérlén tire de là son origine et sa signi-
fication .
Abérouni, v. Priver un mouton ou un agneau, lui
apprendre à manger dans la main, à suivre son maître, ft
oiiéir à sa voix. Il est dér. de Béroù, agneau privé, llobin-
nioutoii, le favori du berger.
Al)érouni (s'), v. Se vermouler, se garnir de vers. Se
dit d'un fruit qui commence à Être vermoulu, souvent à
force de maturité.
Dér. de Béroii, le ver blanc du fruit.
Abéssi, i'. Émousser, tourner le morfil d'un instrument
tranchant. — La ddio s'abéssis quan arapo uno Uloupinièiro,
la faux émousse son morfil en coupant la terre d'une tau-
pinière.
Abésti, ti. Hébêter, abêtir. — Lou trop manja rèii
abésti, trop manger abêtit.
r» abesii ne signifie point un homme hébété, mais un
homme grossier, brutal, sans mesure, sans convenance.
Dér. de BèsUo, bète.
Abima, v. Friper, salir, perdre, gâter ; déchirer la peau.
— As abima (a vèsto das diménohes, tu as fripé, sali ton habit
des dimanches. M'abimè, il me roua de coups. Mé souï
abima en toumban, je me suis moulu, tout déchiré en
tombant.
Dér. du français Abîmer, quoiqu'il n'ait aucun rapport
de signification avec lui. Celui-ci n'a jamais qu'un sens
figuré et elliptique ; le premier n'est jamais qu'au positif et
au physique.
Abitaïa, v. Ravitailler, fournir des provisions de bouche.
Dér. de Bita'io, victuaille.
Ablada, v. Emblaver une terre. — Aquélo lèro s'ablado
énd'un séstiè, cette terre reçoit un setier de semence.
Dér. de Bla, blé.
Ablanqui, v. Rendre blanc, rendre propre, laver; passer
un blanc.
Ablasi, ido, adj. Usé, devenu souple par usure, avachi.
On le dit surtout du linge qui, pour avoir trop servi, pour
avoir été trop souvent blanchi, a perdu son apprêt, sa
crudité.
Dér. de Blaso. bavure des cocons. Cette substance, émi-
nemment souple et molasse, sert ici de terme de comparai-
son. C'est à tort, pensons-nous, que Sauvages veut donner
à cet adjectif une origine celtique, lorsque la déduction ci-
dessus est si simple et si naturelle. Quant au subs. blaso
lui-môme, il ne saurait être celtique; car à coup sur les
Celles ne connaissaient ni les vers à soie, ni la nomencla-
ture qui s'y rattache. D'ailleurs Sauvages ne cite pas le
radical qui pourrait à toute force , par une analogie quel-
conque, avoir fourni le mot à notre langue. Mais sans
remonter si haut, et ce sera encore une assez ancienne
descendance, Blaso ne \iendrait-il pas du grec ZXa^, qui
signifie mou, lAclie, paresseux? Sa parenté étymologique
avec Ablasi nous parait au moins aussi certaine. —
Voy. Blasi.
Ablasiduro, s. f. Étal du linge ablasi.
Ablasiga, i'. Meurtrir; accabler de lassitude; briser les
es. Au j)arl. pass. seul employé : harassé, moulu de fatigue,
courbaturé. .Vctivomcnt il est inusité.
Mémo dérivation q\i' Ablasi, dont il n'est que la repro-
duction dans un sens figuré.
Ablasigaduro, s. f. Lassitude dans tous les membres,
courbature.
Ablouta, II. Joindre plusieurs sommes ensemble.
Dér. de Blà, bloc.
Abouchardi, ido, a<IJ. Barbouillé, sali, au visage surtout.
Dér. do Bouchur.
Abouminable, blo, adj. Abominable.
Tra;l. du français.
Abouna, v. Abonner.
ïrad. du français.
Abounamén, s. m. .\bonnement.
Trad. du français.
Abounda, i'. Rassasier, et non point abonder. Ce mot
est évidemment dérivé du français, quoique l'acception en
ail été restreinte. C'est seulement de l'analogie : ce qui
abonde par trop est rassasiant. — Mé souï abounda dé i
dire, je me suis lassé de lui dire.
Etym. du lat. ab, et de undo, regorger, déborder.
Aboundivou, adj. de tout genre. Rassasiant, qui gonfle
l'estoinac, comme les mets trop gras. — Yoy. Abounda.
Abouréla, v. Traiter une chose comme le tourreau
traite un patient, c. -à.-d. la torturer, la briser, la déformer,
l'abîmer.
Abourgna, v. Éborgner, rendre borgne, crever un œil,
ou lui faire grand mal ; éborgner l'œilleton d'une greffe.
Dér. de Borgne, borgne.
Abourl, V. Détruire. — Abouri uno hisado, détruire
une nichée. Abouri un caml, défricher un chemin. Uno
vigno abourido, une vigne abandonnée et en friche. Aquélo
modo s' ubourïs , cet usage se perd. Uno fénno abourido, \m&
femme fanée, ridée, qui a perdu ses formes et sa fraîcheur.
Ce verbe parait formé de Boure, bourgeon, bouton, et
de l'a privatif. On ravale un arbre et une plante en lui
enlevant ses boutons à mesure qu'ils paraissent. Les autres
acceptions ne sont qu'une extension de celle-là, primitive-
ment tirée de l'agriculture.
Abouscassi (s'), v. Dégénérer, s'abâtardir; au fig. se
ratatiner, se négliger dans sa tenue et dans son allure.
Dér. de Bouscas, bAlard, sauvageon.
Abraqua, v. Braquer un canon, une lunette, môme les
yeux.
Trad. du français. L'a à'abraqua est purement explétif.
Abrasa, v. Braser du fer ou du cuivre; mettre de la
braise sur un potager, dans un réchaud, dans les sabots.
Cette chaussure, ainsi échauffée quelques secondes, con-
serve longtemps sa chaleur, quoiqu'on aille dans la boue
ou la neige. Cet usage est fort suivi chez les Cévenols.
Dér. de Braso, braise.
ACA
ACA
1»
Abrasaïre ou Estabrasa, s. m. Chaudrontiirratiibalant,
qui va souder, raccommoder le vieux cuivre A domicile, en
s'aiiaouçant par ce cri ; l'eïroulérou-éstubrasa.' Cassérolo
ésiama .' O'Ue phrase est sans doute un mélange corrompu
du languedocien et de l'italien c-dahrais; car la plupart de
ces industriels étaient dans l'origine des Napolitains et
avaient le costume et le clia|ieau conique des lazzaroni.
Abrasqua, v. Elirancher; rompre les branches d'un
arbro en les tirant du bus. — Imus frurhèt l'abrasquoù,
les arbres rorii|)ent sous le poids de leurs fruits.
Dér. de Branquo, branche.
Abrasque, quo, ou Abrasquou, ailj. m. f., de tout
genre. Cassant, fragile, qui s'éliranche facilement. Le châ-
taignier principalement casse au moindre effort de l'homme
ou du vent.
Abri, 1. m. Abri. Ne se dit que d'une exposition à l'abri
du vent ou des gelées, et non au figuré.
Dér. du lat. Apricut.
Abriou, a. m. Avril, i"""" mois de l'aimée. Le proverbe
dit : Mar douroùs, abriou pléjoiis, rènJou lou peisan our-
gutoùs. mars venteux., avril pluvieux, rendent le paysan
orgueilleux. Àou mis U'abriou t'alâoujeïras pas d'un fiou,
dou mes dé mai faï ce que té plaï, amaï éncaro noun sa'i,
au mois d'avril tu ne t'allégeras pas d'un fd , au mois de
mai fais ce qui te plait, et je ne sais trop encore... Bon
conseil hygiénique, (jue les variations de température dans
ces deux mois justifient souvent. — Péïssofi d' abriou ,
poisson d'avril, attra|)e.
Etym. du lat. Aprilis.
Abriva, V. Faire manger un poisson d'avril, attraper.
Abrouqul (s'), v. Se ralwugrir, végéter maigrement, se
dessécher. Se dit d'un arbre brouté ou trop souvent ravalé,
qui pousse faiblement. — Voy. t'Abarlassi.
Dér. de Broquo, bûche, branche sèche.
Abrouta (s'), v. Avorter. Se dit en parlant des animaux.
Du lat. Abortus, part. pass. lï'Aboriri, même significat.
Abusa, V. Abuser de... Traduit du français. Ce mot ne
s'emploie jantais vis-à-vis d'un régime direct ; ainsi on ne
dit pas : Abusa quàouquùs, pour tromper, duper quelqu'un ;
mais abusas dé ïiou, vous abusez do moi.
Açal inierj. Oh çà! Or çà! — Açà véguén, çà, voyons.
Açà vénès? oh çà! venez-vous?
Acaba, v. Achever, finir; se ruiner. — Es acaba, il est
achevé; sa santé est usée; il ne peut plus vivre longtemps;
ou bien : c'est un honinio ruiné. Aquél co l'acabé, ce fut
le dernier coup ([ui l'acheva. Acaba que siègue, sitôt fini,
pas plus tôt terminé, une fois ceci achevé.
Acabado, ». /■. Fin, terme. — Al'acabado! à mon reste!
Cri des revendeurs de rue , lorsqu'il ne leur reste que peu
de marchandise. A Vacabadol Cri de victoire des fileuses
de soie à la fin de la saison de la filature. Ce cri multiple
et poussé de toute la force des poumons se fait entendre
pendant les trois derniers jours de la campagne. Il est
accompagné d'une chanson de circonstance fort ancienne,
et à chaque refrain il recommence à se produire par un
crescendo progressif.
Acabaïre, ro, adj. Prodigue, dissifuteur; un mange-
tout.
Dér. de Acaba.
Acabassi (s'), v. Se biser, se flétrir par l'Age et le tra-
vail. Il ne se dit quo des personnes, et surt<^iut des femmes
à qui quelques aimées de mariage, des couches fréquentes
et un allaitement trop prolongé ont enlevé leur fraîcheur,
leur agrément et le goût de la toilette.
Dér. de Cabas, cabas. On apjwllo cabas, au fig., une
femme malpropre et mal fagotée.
Acagnarda, v. Abriter une plante, l'exposer au soleil,
à l'abri de la bise. — S'acagnarda, prendre le soleil ibns un
angle de mur, comme font les vieillards et les mendiants,
qui n'ont pas d'autre feu que celui du ciel. Au fig. s'aca-
gnarder, s'acotjuiner, s'accoutumer à vivre dans la fai-
néantise.
Dér. de Cagnar, abri ex|)osé au soleil.
Acalouna, v. Échauffer, réchauffer. — Aquéste lén
s'aculouno pas gaïre, ce tciiq» ne se radoucit guère.
Dér. de Caloù, chaleur.
Acamina, v. Mettre sur la voie; mettre une affaire en
train ; mettre en fuite, chasser. S'acamina, v. r. Se mettre
en route, se diriger vers, s'avancer.
Dér. de Cami, chemin.
Acampa, v. Ramasser, cueillir; prendre, gagner; au fig.
économiser, entisser. — Al)cédcr, alMutir, en parlant d'un
apostume qui travaille, qui se forme, qui suppure. —
Acampa dé forças, reprendre des forces après une maladie.
Acampa d'apéti, gagner de l'appétit. Acampa dé sén, pren-
dre de la raison. — }Ioun dé acampo, mon doigt apostume,
il a un mal d'aventure.
Dér. de Camp, vieux mot : champ.
Acampaduro, s. f. Mal d'aventure, aixMtume.
Acampaïre, ro, adj. Ilamiisseur; au llg. économe, thé-
sauriseur. Le proverbe dit : A bon acampaïre bon escam-
païre, à père avare enfant prodigue.
Acampaje, s. m. Action de ramasser, de cueillir; cueil-
lette.
Açan ou Acén, s. m. .\cccnt, accentuation.
La première forme Açan est admise par l'usage : elle se
justifie par son étyin. du lat. ad cantus, que rappelle sa
consonnance. La seconde Acén a reçu ses lettres de natu-
ralisation do Sauvages, et dérive aussi du lat. accintr»,
chanter, qui a donné acctntus. Les deux mots sont régu-
liers et également employés. — Yoy. Acén.
Acanala, f. Diriger l'eau par un canal ou un bief. Une
rivière, un cours d'eau quelconque sont acanala», soit
quand on les canalise, soit même lor8<iu'ils se sont tracés
un lit profond et droit.
Dér. du mot suivant.
Acanâou, s. f. Chéneau de toiture ; toute sorte de con-
duit d'eau en bois, en fer ou en poterie, pourvu que ce soit
16
ACA
ACE
à ciel ouvert ; lorsqu'ils sont ou en forme de tulie , on sou-
terrains, on les nomme Bournèou, bounieau. — Faire
Vacanàou, loc. prvb. pour dire : s'entendre comme lar-
rons en foire, tricher au jeu en s'entendant frauduleuse-
ment avec l'un de ses adversaires pour duper son partner;
signifie encore : ménager la cliùvre et le chou ; nager entre
deux eaux; crier tour à tour vive le roi, vive la ligue;
promettre à celui-là ce qu'on a promis à celui-ci, et
tromper au moins l'un des deux ; car c'est le rôle de celui
qui Ironiiw tout le monde, et à qui, par conséquent, per-
sonne ne peut se fier. VAcandou, le chéneau, comme
nous venons de le définir, est le conduit, primitivement en
bois et ensuite en fer-blanc, placé horizontalement au bord
des toits pour en recevoir l'eau , qui , par de plus petits
tuyaux appelés gouttières ou gargouilles, tombait do là sur
le pavé, avant que les règlements de la police urbaine
eussent prescrit des descentes appliquées contre les murs
des maisons pour amener l'eau jusqu'au niveau du sol.
C'est par ces gouttières assez multijiliées que le chéneau
versait sa provision sur tous les passants, également et
sans faire de jaloux. Dispensateur généreux d'une chose
qui ne lui coûtait rien et ne valait pas davantage, est-il
devenu le type de notre homme qui fait VAcandou, ou
comme V Acandou , en prodiguant ses promesses, ses pro-
testations, marchandise de même valeur, qui n'est aussi
que de l'eau claire? — Tout cela n'est pas certain, peut-
être même n'est pas très-probable; mais, à coup sur, ce
n'est pas impossible.
Acances, s. m. pi. Espace qui reste sans être labouré dans
un cliamp, aux deux extrémiti'S de la ligne des sillons, où
tourne la charrue. A la fin du labour, on reprend toutes ces
lisières par une nouvelle diiection perpendiculaire à la ligne
des sillons : c'est la dernière opération que subit un champ.
Par extension, on donne au fig. ce même nom à la termi-
naison d'une foule de choses. — Sèn as acances ddou carémo,
nous sommes à la fin du carême. Souï as acances dé moun
vi, je suis au fond do mon tonneau.
Serait-il dérivé du lat. ad cakes, aux pieds, au fond?
Acantouna, v. Tirer quelqu'un à l'écart, l'acculer dans
un coin; écoinsonncr un mur, y placer un écoinson, la
pierre angulaire d'encoignure. — S'acantouna, se réfugier
dans un coin, se blottir au coin du feu.
Dér. de Canloii, coin.
Acâou, J. m. Chaux; pierre calcaire cuite ou calcinée
dans un four à chaux. En chimie, protoxide de calcium. —
On la distingue en Acdou grasso, chaux grasse, et Acdou
maigro, chaux maigre. La première est la chaux pure,
sans argile, acide carbonique et chaux; elle foisonne par
l'immersion dans l'eau. Le mortier à chaux grasse se
lessive et se détruit dans l'eau. La seconde est la chaux
argileuse ou siliceuse, qui foisonne peu ou pas. Celle
qu'on appelle chaux hydraulique, qui est une variété de la
chaux maigre, contenant de 8 à 20 pour »/„ d'argile, fait
prise dans l'eau : le mortier fait avec cette chaux prend
de la consistance lorsqu'il est immergé. Les chaux maigres
do il C pour "/o d'argile, sont non hydrauliques ; de 6 ou
8 à 20 pour "/« d'argile, elles sont hydrauliques; de 20 à
26 pour °/o elles forment à elles seules, sans besoin de
sable, le mortier hydraulique connu sous le nom de ciment
romain.
La chaux de la Blaquière, aux environs d'Alais, est
renommée. Celles des Tavernes, de Vézenolires et de Ncrs
ont aussi des qualités remarquables. — Déstrémpa d'acdou,
éteindre et détremper de la chaux. Pasta d'acdou, corroyer
de la chaux, la mêler avec du sable, à l'aide du rabot,
paslo-mourliè .
Dér. du lat. Caix, Calcis. Notre dialecte a ajouté un o
initial , purement explétif et euphonique. C'est ce qui fait
sans doute que dans ce pays , bien des personnes, en par-
lant français, on qui s'en piquent du moins, disent couram-
ment au plur. les uchaux, comme elles font pour les acôlés,
les cùtés. Aucuns vont même jusqu'à les apilaslres, les
■achéneaux, les amuriers, les pilastres, les chéneaux, les
mûriers, etc.
Acapara, «. Accaparer, monopoliser.
Trad. du français.
Acaparur, urdo, adj. m. et f. Accapareur.
Trad. du français.
Acarcavéli, ido, adJ. m. et f. Cassé, ratatiné, branlant
de vieillesse ou de maigreur. Il se dit principalement du
bois desséché et d'un meuble branlant dans ses jointures.
Dér. de Carcavèl, qu'on dit en certaines localités pour
Caseavèl, par terme de comparaison avec le brandillement
bruyant de cet instrument. — Voy. Caseavèl.
Acarnassl, v. ïLibituer à manger de la chair, rendre
carnassier.
Dér. de Car, chair.
Acata, V. Couvrir; joncher. Au fig. Acata, part, pass.,
caché, dissimulé, sournois.
Acatage, s. m. Toute sorte de couvertures de lit.
Acén ou Açan, s. m. Accent : accent tonique, flexion
de la voix sur certaine syllabe des mots; prononciation,
accentuation. Se dit aussi pour accent grammatical, signe
graphique qui affecte certaines voyelles.
Notre langue n'a qu'un substantif pour exprimer les
deux acceptions très-différentes du mot Acén, dont l'une
désigne la prononciation elle-même, et l'autre un signe
accidentel et variable destiné à modifier le son d'une
voyelle. Elle n'a pas accordé droit de cité à ces qualifi-
catifs, inventés par les grammairiens, d'accent rationnel,
oratoire, logique, pathéli(iue et autres. Mais, pour faire de
tout cela comme le bourgeois-gentilhomme de la prose,
sans le savoir, elle ne se reconnaît pas moins si redevable
à l'accent tonique et à l'accent grammatical, que nous ne
pouvons nous dispenser de leur ouvrir un crédit particulier
proportionné à leur importanoe.
Ce qu'on doit entendre par accent tonique, notre défini-
tion, peut-être trop concise, a essayé de l'exprimer en un
ACE
ACE
17
mot. Qu'on nous pprmptte d'emprunter à la préfaœ de»
Caslajnados un cotiiinenlaire qui la complote.
La Faro-.\lais dit de la langue d'Oc « qu'elle est une
musique comme l'italien, plus que lui i)eut-ètr6; c'est du
moins une mi^lopée. Ses syllabes sont des notes, ses
phrases des motifs harmoniques; son accentuation, si
variée, est une viVitahIe gamme, et ses diphthongues, ses
triphthongues , si fréquentes, si multiples, forment des
syncopes chromatisécs d'une mélodieuse expression. Si
cette langue a le larynx limpide et métallique, elle a
aussi, et par-dessus tout, l'oreille chatouilleuse; et sa
susccptihilité à cet égard rappelle ce sybarite que le pli
d'une rose em[Wicliait de dormir. »
On ne saurait mieux dire. C'est bien là, en effet, l'origi-
nalité et le caractère dominant de notre langue d'Oc, que
cette prosodie musicale des mots et des syllabes, qui ne
l'abandonne jamais, qu'elle garde en parlant les autres
langues, et qui est dans sa nature. Et cela n'est autre
chose que son accent propre et l'accent tonique, que ce
culte de la modulation , qui lui est inspiré par l'éclat de
ses voyelles, qui lui fait éviter le redoublement des con-
sonnes et condamner, même dans la plus humble prose, le
choc de deux sons pareils; que ce sentifnent natif de
l'euphonie , d'où lui viennent ses délicatesses exquises
de construction et de vocalisation. L'accent tonique, ainsi
compris, est de toutes les langues ; mais il est, au plus haut
degré, l'essence, l'ftme et le génie particulier des idiomes
méridionaux. Pour eux, qui chantent d'instinct, qui
relèvent plutôt du solfège que de la grammaire, l'har-
monie est la loi souveraine. La langue d'Oc, comme l'ita-
lien et l'espagnol, ses sœurs du même lit, en reconnaissent
si bien la puissance, que la prononciation est devenue la
raison logique de leur orthographe. 11 le fallait bien. ï^
sens d'un mot dépend souvent, — on va le voir par des
exemples, — de la manière dont il est accentué : dés lors,
écrire comme on prononce et comme on entend, et par
voie de conséquence, ne prononcer que conune on écrit et
que ce qui est écrit, c'est-à-dire conformer l'écriture à la
parole, est une nécessité de nos dialectes; car l'unique
moyen de leur conserver la clarté, la grftce, l'intelligence,
consiste à rapprocher l'orthographe de la pensée, à lier la
forme des mots avec leur signification. Dès lors, toutes les
lettres devant être articulées avec le son qu'elles expri-
ment, il n'est besoin de représenter à l'œil que ce qui doit
être entendu par l'oreille.
Les Grecs et les Latins avaient la quantité, qui mesurait
la durt^ des sons : les langues modernes ont l'accent
tonique, c'est-à-dire l'élévation ou la flexion de la voix
sur chaque mot, presque sur chaque syllabe. A Rome,
rapporte Cicéron, le (Kîuple se montrait très-sensible à
l'observation de la mesure. « Tout le théâtre, dit-il, se
soulève et pousse des cris, si une syllalM! est trop brève
ou trop longue, bien que la foule ne connaisse ni pieds
ni rhythme , et qu'elle ne sache point ce qui blesse son
oreille , ni pourquoi ni en quoi elle est offensée : Theaira
tota extlnmant , si fuit una tylUibii brevior aul longior, nec
verà mulliluJo peilei novil nec ulloi numéros tenet, née
illud quod offendit aul rur aul in quo offenrial inlelligit. »
La langue d'Oc a hérité de sa mère latine d'une sensibilité
pour le moins aussi vive. Dans sa vocalisation, qu'une
ronde soit sulratituée à une noire, elle se sent froissée;
qu'une note qui doit être éclatante soit convertie en un
son sourd, qu'une voyelle forte s'échappe comme une
muette, elle s'irrite de la transposition ; e|le est blessée de
la cadence fausse; pour elle le sens se déplace, se dérobe,
se dénature aussitôt. Il n'y a pas ici cependant non plus
d'autre juge que l'oreille. Judicium ipsa nalura m auribus
nosiris eollocavit, dit toujours Cicéron; mais l'accent va
de soi, sans théorie et sans grammaire; il est dans l'air et
dans la voix; notre parler est ainsi fait. Il faut l'accepter
tel quel, se soumettre à ses exigences, on renoncer à se
faire comprendre. C'est de celle accentuation que nous
essayons de donner une idée et de poser les principes.
Il n'existe pas de langue qui n'ait son système propre,
individuel d'intonations, de consonnanccs, di'pendant de la
combinaison, du rapprochement et de la sonorité de ses
voyelles. Pour notre langue d'Oc, rien n'est plus essentiel
que de connaître la clef de sa notation.
Le premier point , et le plus délicat, est de préciser l'in-
flexion , de déterminer le degré d'élévation ou d'abaisse-
ment de la voix, qui constitue l'accent tonique. Dans une
phrase écrite, tous les mots sont séparés par un intervalle;
il en doit être de même dans la phrase parlée. Chaque mot
a sa syllalje tonique, et n'en a qu'iuie, la syllabe finale,
sur laquelle, par une sorte d'insistance, il se fait un temps
d'arrêt imperceptible, cependant appréciable, une modu-
lation distincte, qui peut être classée dans l'échelle de»
sons, insensible presque, mais qui, en appuyant, est mise
en saillie, l'ne seule condition est imposée à celle dernière
syllalK», c'est qu'elle soit de force à supporter l'accent, ce
qui n'arrive jamais avec une muette, une féminine, une
faible , sur laquelle la voix ne s'arrête point. C'est pour-
quoi la tenue ne se fait que sur la finale des mots , quand
cette syllabe est masculine, à consonnance pleine et grave;
ou sur la pénultième, quand le mot se termine par une
féminine, faible ou muette.
Cette règle est le fondement de la prononciation du lan-
guedocien : son corollaire se trouve dans la justesse exacte
du son attaché à chaque syllabe, représenté par une
voyelle. Noire idiome, pour s'écrire avec le même alphabet
que le français, qui fut l'alphabet latin, ne donne pas
cependant à toutes les lettres le son qu'elles avaient en
latin, non plus que celui qu'elles ont en français. A chacun
son lot. La langue d'Oc a des sons qui lui appartiennent
en propre , des alliances de lettres qu'elle affectionne , des
cadences qu'elle recherche; elle ne veut pas en être dépos-
sédée, et elle ne se livre qu'à ceux qui lui sont fidèles ; à
eux seuls elle consent à révéler sa grâce , sa douceur, sa
le
ACB
souplesse, soa énergie, ses beautés entières. La variôtÉ do
ses intonations, la sonorité de ses voyelles rendent sa pro-
nonciation vivement accentuée; et surtout elle diffère
essentiellement du fraufais, qui cultive les consonnances
muettes et sourdes, et qui arrive à de grands effet* par des
procédés tout contraires. Aussi, sur ce chapitre do l'accent,
pas d'accord à établir; point de rapprochement entre deux
pôles opposés. Quand les puristes d'Outre Loire auront
traité dédaigneusement de gascons nos dialectes méridio-
naux, et que ceux-ci auront répliqué par l'épithète corres-
pondante de franchiman, la séparation de» deux langues
n'en restera que plus accusée, et il en sera mieux prouvé
encore qu'une transposition de l'une à l'autre est impos-
sible. La part faite à chacune, elles garderont chacune leur
mérite, et leur accent, et leur caractère, et leur génie; et
lemrs chefs-d'œuvre n'y perdront rien. Mais essayer de
réduire le languedocien à la vocalisation française, de le
prononcer à la française, ne serait que l'assourdir, l'énerver,
le défigurer, et arriver à la cacophonie la plus ridicule et
la plus inintelligible. L'emploi d'un alphabet commun, les
habitudes d'épellation inculquées par l'enseignement sco-
laire peuvent être des causes fréquentes d'erreur et d'hési-
tation à la lecture ou à l'écriture; les plus familiarisés avec
nos idiomes n'y échapperont pas toujours. L'n Dictionnaire
languedocien ne peut donc trop insister sur ce chapitre
si essentiel de l'accentuation, qui fait comprendre son
orthographe et facilite l'étude de sa grammaire. C'est pour
cela que nous résumons , môme en nous exposant à quel-
ques répétitions, nos remarques générales sur la valeur
spécifique dos voyelles et sur la prononciation.
L'accent tonique, avons-nous dit , est une simple flexion
de la voix; il n'a qu'une place dans chaque mot, la der-
nière syllabe , si elle est masculine ; l'avant-dernière , si le
mot est terminé par une féminine. C'est une pure nuance
euphonique, une modulation musicale, indépendante de
tout signe qui l'exprime, mais qui se fait toujours sentir.
Ce qu'on appelle l'accent grammatical est au contraire un
signe apparent, visible, posé sur une voyelle et destiné
seulement à en modifier le son. Comme il se borne à indi-
quer la qualité particulière d'un son, il se place partout où
il rencontre la voyelle à accentuer, et peut par suite se
trouver indifféremment au commencement, au milieu ou à
la fin d'un mot; mais à celte dernière position, il rend
tonique la voyelle qu'il touche, en piquant sa consonnance.
Il est de trois sortes : aigu, grave et circonflexe, comme en
français. Ce dernier ne se place que sur les voyelles a, i, o,
quand elles comi)osent des diph. ou des triph., pour mar-
quer seulement la voix dominante.
Le languedocien a cinq voyelles simples, a, e, i, o. u> et
nne voyelle composée, ou, qui regrette toujours d'être
obhgée d'employer deux lettres pour un son unique et
simple. Cette indication sudït à notre sujet, sans entrer
dans les suWivisions et distinctions de classes.
Toute» les leUres et les voyelles sa pronoacent et
ACB
sonnent à la méthode ancienne de l'alphabet ou suivant-
l'accent graphique qu'elles portent : c'est pourquoi dajoa)
l'intérieur d'un mot polysyllabique, il no peut exister de
syllabe muette, ressemblant à l'e muet français moderne,
A la fin des mots seulement se trouvent les syllabes;
muettes; et là, règle générale, toute voyelle finale, à l'ex.-
ception de l'a et de \'u, est faible, sourde, féminine, si ella-
n'est pas accentuée, ou si elle est suivie d'un s formant le
pluriel; ce qui signifie que la voix doit appuyer sur lat
syllabe précédente, la pénultième, que nous axxentugosL
exprès ici. Ex. : ràbe, pi. ràbes; image, pi. images; ràbUh
pi. rèbles; diménche, pi. diménches; chàri, pi. chàrit,:.,
sèti, pi . sètis ; bàcho, pi . bàchos ; éscèlo, pi . éscdlos ; cà»-'
quou, pi, ciUquoui; flàsçou, pi. flàscous; basségou, pi. bas-
ségouf.
Dans notre dialecte , les voyelles finales o et u ne sont
jamais muettes : elles peuvent donc supjwrter l'économie
de l'accent grammatical, sans en être appauvries ni fémir
nisées. Cependant, par cela que leur position les rend tonir
ques, le repos de la voix, qui se fait alors sur elles, semble
les élever d'un quart de ton. Cette nuance méritait d'être
notée; elle est sensible mêxue dans les polysyllabes com-
posés de lettres similaires, comme acaba, davala, etc., dont
le dernier a est un peu plus éclatant que les premiers. La
prosodie latine du Gradus ad Parnassum classerait ces
mots parmi les anapestes, deux brèves et une longue ; de
même qu'elle aurait fait des iambes de marna ou de chv-
chu, une brève et une longue.
Dans plusieurs localités de l'Hérault et au midi d'Alais,
sans dépasser cependant le canton de Vézénobres, r(/ final
est muet dans les terminaisons caractéristiques du féininia
des substantifs et adjectifs, comme ro»a, musa, bona,
nova, etc. On le prononce comme un a adouci, d'un son
intermédiaire entre l'e et l'o. Cette variété dialectique est
une réminiscence très-rapprochée du latin. Nous ne pou-
vons l'adopter ici ; car pour la même désinence nous enten-
dons o, nous prononçons o,. nous avons du écrire partout o
naturel; et nous no pensons pas que l'étymologie en
souffre.
L'e languedocien a trois sons distincts. Surmonté de
l'accent aigu, il se prononce comme l'é fermé français
dans été, bonté ; avec l'accent grave, comme l'e ouvert dans
accès, succès; privé de tout accent, il no se présente qu'à
la fin d'un mot, et alors il est muet, naturel, non point à.
la manière de l'e muet français, mais comme l'e final italien
de rose, dare.
La pix^nonciation do Vi ne varie que du fort au faible,
du sonore au doux, du long au bref; mais une certaine
aouité se fait toujours plus oil moins sentir. La voyellot
est sonore , naturelle entre deux consonnes : dindo, roun-
dina, dijicinle, n.\cc une légère insistance quiiml elle est
tonique à la pénultième ; cependant nous ne lui accordons^
pas l'accent : c'est affaire de quantité. Nous le Lui rései>
vons, au contraire, pcwir les cas où U pourrait y aroic
ACE
ACB
19
confusion, ti In fin dos mots par exemple, comme loupi.
Éêeupl , énilévéni , ilimini : lA il w» A'-taoliR Clair et net.
■L'accent grave iiHli()nc alors que le son se renforce ; tAiidis
ifue l'i firwl non accentué glisse et tnunnnro faiblement, la
Voix appuyant sur la prôc<HlAntc syllabe. Ëx. : ehàH. HH,
Ùli, téméntrri, jmrgatori.
■Mmb employons l'acceiit circonflexe pour la diphthongue
iou, et il inari|ue l'insistance de la voix se prolongeant :
ealiou, arpiou, réligiou.
Le tréma sur l'ï est un signe particulier de notre accen-
tuation orthographique. Sa fonction est des plus impor-
tantes. Quand il suit une consonne et précède une voyelle,
le tréma sur l'ï a pour but de le faire sentir plus longue-
ment, et d'en faire une syllabe séparée de la voyelle subsé-
quente, comme dans fïo, Tno, m'io, en deux syllabes. Alors
qu'il est placé après une voyelle, et suivi d'une consonne,
on à la fin d'un mot, Tï trématé est doux et faible ; le plus
souvent il forme la diphthongue. Ex. : l'eïr», foire, tout,
réï, galo'i, pantaï. Entre deux voyelles, il remplace à peu
près en certains cas // mouillés' français, sans communiquer
à celle qui le suit la flexion labiale, mais seulement en la
mouillant ; et toujours il empèclie la cohésion avec la
voyelle précédente, ainsi dans païo, ddio, jdio, Bluïo, pulo;
de telle sorte qu'il devient le siège d'une séparation de
syllalx^s, ou ce qui revient au même, qu'il s'oppose à la
formation d'une diphthongue ou d'une triphthouguc, que,
sans lui, le rapprochement des voyelles amènerait, comme
dans les mots presque exclusivement composés de voyelles,
vidouU, aie, euUiri, rouïdoume. Pour scander ces mots et
parvenir à la prononciation juste, le concours de l'ï tréma,
qui est séparatif entre voyelles ou diphthongues dans le
mot, est un des signes les plus essentiels à bien observer.
Nous reviendrons sur son r61e très-important.
L'o et You, voyelles, sont soumises aux mêmes règles.
Le défaut d'accent , quand elles sont finales , indique
qu'elles doi\ent s'échapixT sans articulation, qu'elles
jouent dans le mot à peu près le même rôle que l'e muet
français, caractérisant le féminin des sultstantifs, et que le
point d'appui de la voix se fait sur la pénultième. Ex. :
fangn, manado, bèlo, eénténo, babino, earosso, cagnoto,
fguro, dai^alou, révènou, basségou, manipoit, donou, ttitou.
Surmontés do l'accent grave, ô et oii soiment clairement :
escld, cachd, grétd, vértigi); lavadofi, agassoù, loubatoù;
méchoiis, vérinoùs.
Réi)élons encore que ou entre deux consonnes ou près
d'une voyelle, avec ou sans accent, ne compte jamais que
pour une voyelle, comme s'il n'y avait qu'une seule
lettre.
A l'agencement et ^ la liaison de ses voyelles, la langue
d'Oc semble avoir mis avec complaisance tous les raffine-
ments do son génie mélodique. Parmi les langues de l'Eu-
rope, elle est seule h possiSler dans sa vocalisation ces
trilles brillants qui ne produisent qu'un accord unique,
comme trois cordes de harpe touchées i la fois, \'ibrant
dans la hième c.idonce. I>e français m contente de tfwAt
doux son»; le languedoiieu raweiiiblo dans une «ylhlJS
deux, trois et jn.s(iu'à quatre sons distincte. Ses diphthoh-
gae« se multiitlient à profusion et se présentent unies M
(dparéM, au commencement, dans rintèrienr ou k la fia
d«i mots. Ses triphthongues si originales suivent la mftme
marche el sont presque aussi fré(]nentes : les tètraphlboh-
gues apparaissent dans les vocables les plus asiiels. 0>pe«-
daiit l'orlhograithe, l'accentuation et la prononciation dm
toyelles ne changent point parce qu'elles se rencontreiH
doubles, triples ou quadruples à former, dans un mot, rsm
seule syllalie compow'-e d'autant de sons en une seule énd»-
sion de voix. Si compliquée que puisse être la combi-
naison, le pren)ier et le plus essentiel de leurs caractèwe
est de ne faire jamais qu'un temps, un pied, dirait-OB 0B
versification : la pluralité dans l'unité.
Là est la pierre de touche de cette sorte de tyllabw.
C'est pourquoi nous nous refusons à ranger parmi les
diphthongues les formes un, ué, uï, uo sollicitées i)ar les
consonnes g et q, comme ahra$qua, cargné. Manqué, guin-
eha, quiclia, aquà : ici Vu ne parait que comme explétif;
c'est nn parasite dont l'emploi rend le g dur : il n'y a
pas dualit)^ de consonnance; après ces deux lettres, l'ï»
ne se fait p.as entendre : précédé de tonte autre il doit
sonner : apuia , «uW , etc^, on Uen , tn diphthon(«e,
ittui,jvèt, etc.
Par ces exemples on a pu voir qu'une voyelle suivie
d'une autre voyelle ne fait pas nécessairement alliance
avec elle. En dehors des éléments dont nous allons donner
le tableau, nous ne connaissons pas d'assemblages deletlrr*»
qui puissent en réalité former des dipbthongiies ou des
tripbthongues. Mais la langue d'Oc aime trop k rapprocher
ses voyelles, à les multiplier, a nuancer de tons divers des
combinaisons identiques ; sa vocalisation seule donne son-
vent à ses mots un caractère et un sens trop diB^rents,
pour n'avoir pas une notation qui réponde à ce besoin, qui
représente exactement son euphonie, ses accords, le rhylhme
de ses gammes syllabiques.
Le français se préoccupe moins d'éviter one confusion
qui le rend si diflicile A bien prononcer : sa prose et sa
poésie ont des différences de quantité inexj)licables dans
les terminaisons en ion, ieur, iêux, par ex, (pii reviennent
sans ces.se et qui font tintôt des monosyllabes diphthongues,
tantôt doivent se scander en deux temps : de ce nombre,
avec une infinité d'antres mots, fier, adj. d'un seul jet,
et fier, vcrl)c, dissyllalw. Ceixindant rien n'avertit de cm
changements. Notre orthographe au contraire a voulu les
indiquer au moyen de l'ï tréma, qui disjoint les syllabes,
comme fXo, fille, et fd, feu, mio, amie, mid, mnid, pio,
pillage, pid, dindon, etc.
Un signe spécial étiit indisi^nsaltle; car le langtiedocien
n'a pas le droit de prendre les licences du français. Il n'a
ni grammaire, ni académie jMur commenter et justifier ses
anomalies. Il n'admet pas de lettres inutiles, non arti-
'iO
ACE
culées, 9C prononçant autrement qu'elles ne sont lîotées ;
il professe en principe que sa prononciation est toujours
vraie, réglée sur la valeur propre des voyelles; w qui
ne l'enipùche pas d'accumuler volontiers les accords
sonores, de mêler ses diplithonguos et ses tripiithongues
dans le même mot. Dès lors il lui est imposé plus
striclcmeul qu'au français d'avoir un système d'ortho-
graphe qui mette en pleine lumière la dilïèrence d'accen-
tuation de toutes les lettres et de lettres identiques, et
la séparation des membres d'un même mot où se trouvent
surtout des voyelles avec des diphthongucs. Par la plus
ingénieuse disposition, qui dénote la perfection du senti-
ment mélodique de la langue d'Oc, les complications les
plus ardues deviennent simples et faciles avec les accents
grammaticaux et les ï tréma.
L'accent modifie le son : il l'affaiblit ou le renforce ;
mais il ne transforme pas la voyelle. Le tréma réservé à
r« ne lui fait rien perdre de sa qualité naturelle ; mais il
l'isole en quelque sorte quand il est placé entre deux
voyelles, comme pa-ïo, ma-ïo, pu-ïo, et il mouille celle qui
la suit, comme fait à peu près ill en français.
Par sou interposition il signale, dans l'intérieur d'un mot,
la séparation de deux diphthongues, et adoucit un choc
trop rude ; et il est remarquable que l'ï se trouve au com-
mencement de toutes les tripiithongues : ce qui nous
semble l'indice de la délicatesse d'acoustique de notre
langue, et la preuve d'un sentiment harmonique très-
étudié. Ainsi, quand Vi ne fait que se lier aux autres
voyelles dans la triphthongue U garde sa forme naturelle,
midou, monosyllabe, sidoume, deux syllabes; mais
alors qu'il suit une voyelle ou une diphthongue, ou
qu'il termine une diphthongue ou triphthongue, il prend
le tréma : rou-ïdumé, cadiéïro, risoit-ïeiro , vidou-ïè,
viè-ïé, offrent des exemples des positions les plus diffi-
ciles et démontrent le fonctionnement de Vi simple et
de l'ï tréma dans l'agglutination et dans la division des
syllabes.
Notre dialecte possède trois diphthongues qu'on peut
appeler féminines, et qui pour cela sont dénuées de tout
accent. Cette variété a son importance dans la versification.
Leur prononciation d'ailleurs se conforme aux règles qui
précèdent : le tréma, quand il est nécessaire, ne change
rien à leur nature.
Exemples : en te, vindie, rendis, moïe , ouïe ; en io,
glorio, bè$tio, joïo, fuio ; en iou, énténdiou, maïou, tu'iou,
moiou, ouïou.
La finale diplithonguée de ces mots s'écoule comme une
muette, et comme elle n'est comptée que pour une syllabe
qui est féminine, l'insistance de la voix s'établit par l'accent
tonique sur la pénultième. Ces différences de sons se
trouveront indiquées à leur place. Voy. lettre I et Iou,
diph.
Pour bien comprendre l'effet que produisent les accents,
il ia'y a qu'à comparer à l'oreille les sons muets, purement
ACE
alphabétiques, avec ceux donnés par les mêmes diphthongues
accculuées. Dans la diphlhongue luasculiiic, et dans toutes
les tripiithongues, se trouve toujours une voyelle domi-
nante, celle qui est le pivot de l'intonation sur laquelle se
fait la tenue; les coagulées se font entendre, mais coulent
rapidement : dans les diphthongues féminines, la voix, en
réunissant le double son, égalise les voyelles sans appuyer
plus sur la première que sur la seconde.
DIPHTHONGUES.
ai. -
âou
èï. —
éï.—
èou.-
éou.-
ia. —
ie. —
iè. —
ié. —
io. —
iô. -
iou.
iou.
iu. -
oï -
oua.
ouè.
oué.
ouï.
ôou.
uè.
ui.
— Mai, plus
— Nàou, auge
— Rèi, roi
Créï, croissance
— Lèou, poumon
— Béou, il boit
— Diable, diable
— Vélldie, que je vende.
— Miè, moitié
— Aïé, ail
— Glorio , gloire
— Fiô", feu
— Maïou, mati
— Diou, Dieu
— Béstiu, bestial
— Coï, il cuit
— Coua, eouué
— Voué, holà
— Foué, fouet
— Bouï, buis
— Dôou, deuil
— Gnuè, nuit
— Frui, fruit
Esclaïre, éclair.
Lâouso, dalle.
Pèïro, pierre.
Véïre, verre.
Cisèou, ciseaux.
Téoule, tuile.
Aparia, accoupler.
Moïe, que Je mouille.
Ariè, arrière.
Bèstiéto, petite bêle.
Bèstio, bite.
Cafîo, chenet.
Enténdiou, qu'ils entendent.
Miougrano, grenade.
Méssius, messieurs.
Galoï, gai.
Couacho, calandre.
Espouèr, espoir.
Couéto, queue.
Douïre, jarre.
Cévénôou, cévenol.
Juèl, ivraie.
Estui, étui.
TRIPHTHONGUES.
iaï. — Biaï, adresse Répapiaïre, radoteur.
iftou. — Siâou, coi Viâouloun, violon.
ièï. — Sièï, six Cadiéïro, chaise.
iéou. — léou, je, moi Liéourèïo, livrée.
iôou. — Miôou, mulet Faviôou, haricot.
iuè. — Hiuè, huit Endiuèl, andouille.
TÈTRÀPHTHONGUES.
iuèï. — Hiuèï, aujourd'hui. Cadiuèïsso, cosse,
uièï. — Cuièïsso, cuisse. . . . Cuièïssàou, molaire.
Ce tableau doit faire comprendre la raison de notre ortho-
graphe ; et répétons ce que nous avons dit ailleurs : « On
ne saurait assez recommander l'observation minutieuse de
l'accent; elle est d'une importance radicale. Toute l'intel-
ligence de l'idiome est là ; et sans elle, on nage à pleine
eau dans l'amphibologie. >
I
ACE
Une lisUî à jxîu près complète de mots parfaitement
homographes , .présentera un curieux intérêt à ce point
de vue, et complétera ces ex[)Hcations.
Nous avons négligé les homonymies dans les différents
temps dos verbes, qui seraient irop ncjmhrcuses, comme
rénilie, il reniLiit, et çué réndie, que je rende, etc., etc.,
et quelques autres mots dans lesquels l'accent est iden-
tique sur la finale , mais qu'innuence l'ï tréma ou \'i
naturel, soit pour les divistîr en deux temps, soit pour en
faire des monosyllalx?s, comme pï^, pilier, etpi^, pied, Pucch,
cuïi, cuiller, et cuié, cuit, bie, je serre, et bïé, billet.
Il sera ainsi facile de se rendre compte de ce que peut
l'accent graphique, et comment une simple inflexion sur
une voyelle fait varier le sens et la signification d'un mot.
t FERMÉ ET E NATUREL.
Boufé , soufflet Boufe, je touffle.
Boumbé, bout-d'homme Boumbe, je cogne.
fioaré , brun Boure, bourgeon .
Bourges, bourgeoù Bourges, lu creuset.
Bouté , brin Boute, je mets.
Bravé, gentil Brave, robuste.
Cargué, étui Cargue, je charge.
Césé, n. pr. dim. François. Céae, pois-chiche.
Chaîné, chat sauvage Chaîne, chine.
Coublé, solive Couble, couple.
Coulé, petite colline Coule, je décuve.
Courdouné, ganse Courdoune, je cordonne.
Dévé , devoir Déve, je dois.
Déstré, pressoir à vin Désire, perche (mesure).
Estré , étroit. " Estre, être .
Furé, souris Fure, je fouille.
Gourgué, petite mare Gourgue, je trempe.
Grané, petit grain Grane, je grène.
Lipé, gourmand Lipe, je lèche.
Manqué, manchot Manque, je mianqtte.
Mèrlé, créneau Mèrlo, merle.
Miné, minon Mine, je mine.
Mouïssé, épervier Mouïsse, écourlé.
Paré, paroi Pare, je pare.
Pénô, petit pied Pêne, je peine.
Piqué, pieu Pique, je frappe.
Poudé, serpette Poudo, je taille.
Pougiiô , poing Pougne, je pique.
Quiche , targette Quiche, je presse.
Quinqué, quinquel Quinque, je souffle.
Rèssé, scie à main Rèsse, je scie.
Salle, science Sabe, je tanne.
Sâousé, n. pr. , Sauzet Sâouse, saule.
Séré, petite colline Sère, montagne.
Siblé, sifflet Sible, je siffle.
Tapé, petit bouchon Tape, je bouche.
Télé, sein Tête, je tète.
ACE
Tourné, rouet Tourne, je reviens.
Tràouqué, petit trou TrAftuque, je perce .
Triste, soupente Triste, triste.
l'ïé, œillet Uïe, je sers ce tonneau.
Ë FERMÉ ET È OUVERT, (MUVB.
Après, appris Après, après.
Arésto, arrête Arèslo, halte là t
Espésso, épaisse Espéço, espèce.
Espéro, attente, affût Espère, attends.
Lachén, pourceau Lachén, nous tachâmes.
Jasén, nouvelle accouchée... Jaséu, nous gisons.
Vaïén, actif Vaïèn, lY* valaient
Péro , poire Péro, père.
Fé, foin; foi Fè, fuit.
Se, soif Se, sept.
Sén, saint Séu, nous sommes.
Vén, vent Vèn, il vient.
k GRAVE ET E NATUREL.
Cadè, cadet Cade, genévrier.
Counséiè, conseiller Counséïo, je conseille.
Entré, «7 entra Entre, entre.
Gàouchè, gaucher GÂouche, gauche.
Lachè, il lâcha, laitier Lâche, mal serré.
Mouïè , épouse Mouïe, je mouille.
Récaté, il serra Récate, provision .
Révélé, aubade Révéïe, je réveille.
Roudiè , charron Roudie, je regarde.
Vigè, n. pr., Viger Vije, osier.
i GRAVE ET I NATUREL OU TRÈILA.
Courl, courir Couri, n. pr., Courrtf.
Fasti (faire), faire horreur . . Fasti, aversion.
Garl, guérir Gari, rat.
Péis , pays Péis, poissons .
Sal, panne de porc Saï, l'et dedans.
Trai, trahir Traï, il jette.
Véri, poison, venin Véri, porc.
NATUREL ET Ô GRAVE
AoQSéro, Lozère Aousérù, Loxérien.
Babo , bave Babô, chrysalide .
Balo, balle Balô, ballot.
Bardo, bât Bardô, bardot.
Bigo, bigue Big6, hoyau .
Bïo, biUe Bio, triciA.
Bousso, bourse Bonssù, gousset .
Cacho , cachette Cachô, cachot.
Cagno, dégoût, paresse Cagnô, niais.
91
fS ACE
Capo , manteau Capô, attrapé.
Casso, cheute Cassô, ladre.
Cato, chatte Catô, catin .
Enquo, canelle Enc6, chez.
Faro, mine, visage Farô, élégant.
Fino, rusée Finô, finaud.
Fïo, fille Fiô, feu .
CJalo, gale Galô, galop.
Gigo, cuisse de IxBuf. Gigô, gigot.
Grélo , grêle Grélo, grelot.
Léngndo, coup de langue. .. . Léngadô, Languedoc.
Mancho, manche Manoliô, manchot.
Mïo, amie Miô, tnuiJ.
Palo, pelle Palô, lourdaud.
Pato, patte Patô, brique.
Pégo , poix Pégo, savetier.
Péro, poire Pérô, mouton.
Pilo, pile, tas Pilô, pilote.
Pïo, pillage Piô, dindon.
Rabo, rave Rai», rabot.
Ribo, rive, bord Ribô, n. pr., Ribot.
Salo, salon Sala, malpropre.
Ciro, cire Siro, sirop.
Tantos, s. plur., tantes Tantos, tantôt.
Trapo , trappe Trapô, trapu.
Triquo, trique Tricô, gilet de laine.
on MUET ET où GRAVE,
Ajnstoa, i7j ajoutent Ajustoù, ajoulage.
Apialou, ils étaient Apialoù, état.
Bïou, ils billent Bïoù, trique.
Boutou, i7j placent Boutoù, bouton.
Caladou, ils pavent Caladoù, pavé.
Calou, ils lâchent Caloù, chaleur.
Canton, ils chantent Cantoù, coin.
C&oussou, t7j chatissent Câoussoù, chausson.
Coulou, ils coulent Couloù, couleur.
Escalou, ils grimpent Escaloù, échelon.
Espèrou, ils attendent Espéroù, éperon.
Espirou, f7j suintent Espiroù, soupirail.
Furou, ils furètent Furoù, fureur.
Gardou, ils gardent Gardoii, Cardon.
Jètou, ils vomissent Jètoù, jeton.
Lardon, i7j lardent Lardoù, lardon.
Liquon, »7j lèchent Liquoù, liqueur.
Mascarou, ils noircissent. . . . Mascaroù, barbouillé.
Paslou, i7« pétrissent Pastoù, tas de mortier.
Passèrou, i7s passèrent Passéroù, moineau.
Pélassou, ih raccommodent . Pétassoù, petite pièce.
Piquou, «7» frappent Piqnoù, pic.
Plounjon, i7j plongent Plounjoù, plongeon.
Prison, i7j prisent Prison, prison.
Révéïon, (7* réveillent Rôvéïoù, réveillon.
ACI
Sablon, ils mettent du saUe. Sabloù, sablon.
Sabon, t7j tannent Sabon, savon.
Sénglou, ils sanglent Séngloù, petite torde.
Sénton, ils sentent Sôntoù, odeur.
Sermon, ils trempent d'eau. Sérnioù, sermon.
Snsou, ils suent Susoù, sueur.
Téchon, ils dégoûtent Téchoù, petite gotttte.
Tourtïou, «7s tordent Tourtïoù, craquelin.
Trissou, t7s broient Trissoù, piton.
Valon, î7s valent Valon, valeur.
Véïrou, i7s tournent Vèïroù, menu poisson.
Viron, i7s tournent Viroù, vrille.
La différence à l'oreille, qni, en définitive, détermine le
sens de tous ces mots correspondants à nn mot semblable,
est produite par les accents. Dans ceux où la finale est
accentuée, elle est tonique; c'est sur elle que la voix s'arrête
et pèse : au contraire, pour ceux qui n'ont pas d'accent à
la fin, la tonique est la pénultième et la tenue se fait sur
elle. Par exemple, le dernier mot de cette longue liste,
virou, ils tournent, est composé d'une longue et d'nne
brève; l'inverse a lieu pour virait, vrille, qui est formé
d'une brève et d'une longue, et ainsi des autres. La mesure,
la quantité, réglées par les accents : toute notre langtje
musicale est là.
Acérti, V. Certifier, assurer, rendre certain, aflirmer.
Dér. du lat. Certus.
Acéta , prép. Excepté. Il est visiblement corrompu du
français, mais fort de mise.
Achas I interj. Voyez donc ! Voyez un peu !
Dér. i'Agacha, voir devant soi. C'est" la contraction de
ce verbe à la 2"" pers. plur. de l'impér. Agachas. —
Voy. Agacha.
Achata on Acheta, v. Acheter.
Trad. du français.
Achétur, nrdo, adj. Acheteur, euse.
Trad. du français.
Aciè, s. m. Acier.
Trad. du français.
Acièïra, v. Aciérer, chausser d'acier la pointe d'un outil .
Acimérla, ado, adj. Perché, juché haut.
Dér. de Cimo, hauteur, extrémité.
Acîou, s. f. Action. Il ne se prend qu'en mauvaise part.
— Quinlo aciou m'as fa! quel tour tu m'as jOUé !
Trad. du français.
Acipa, V. Prendre par surprise, saisir, surprendre.
— Nous acipè, et sa! dédin, il nous surprit, et crac! sons
clé.
Dér. du lat. Accipere, recevoir.
Acipa (s'), V. Se heurter, broncher, se rencontrer tète à
tète, chopper. — Nous acipèn, nous nous rencontrâmes nez
à nez.
Étym. du celt. Assoupa, dit Honnorat.
iiOO
ACO
I
Acivada, v. Donner de l'avoine. Au. Sg. et pat ironie,
régaler d'une volte de coups, rosser.
Dér. do Civado, avoine.
Aclapa oa Bésaègre , v. Couvrir de meane pierraille;
recouvrir, le» sillons d'une terre oiublavée, soit à la pioche,
soit à la herse, et briser les mottes pour mieux enterrer la
semenca ou le futnior.
Dér. de Cla ou Clap, pierraille.
Aclapassa , v. Entasser des pierres en nioucean ; antoD'-
celer.
Dét. de Clajiat, tas de pierres.
Adata, v. Baisser, courber; accal)ler sons le poids;
lapider; recouvrir, enfouir sous...
Dét. de Cla, las, amas, monceau.
Acol, s. m. Mur de soutiineinenl en pierre sèche.
Acor, s. des deux genres, ou Acordi, ». toujours
m. Accord, réconciliation, bonne ijitelligence. — Eëtre
dlae»rdi, être cœur a cuMir. — Acor est masculin ou
féminin à peu près ad libitum. On dit : Lacor et facho,
et dé bon acor.
Dér. du L-it. Cor, ccenc.
Acoto , »■ (■ Une cale qu'on met sons le pied d'une table
cbanceL-itile, sous la i-oue d'une charrette pour l'einpècher
de marcher.
Dér. du lat. Co$, eoti».
Aconassa (s'), v. Se coucher comme les poules qui
veulent couver. Au fig. se pelotonner, se tapir, s'accroupir,
se mettre dans toute sorte de posture qui rappelle une
poule couveuse.
Dér. de Coua ou Couga, couver.
Acoubla , V. Accoupler, joindre par couple; joindre des
bœufs ou des chevaux pour le labour. — Àquélo miolo
acoublariè bien la mtou , cette mule s'appareillerait bien
avec la mienne.
Acoucara (s'), v. S'encanailler, fréquenter la mauvaise
compagnie, s'engueuser.
Dér. de Coucarou.
Acoucha (s'), v. Accoucher.
Trad. du français.
Acoucbado , s. f. Accouchée. On dit Jasén en langue-
docien.
Acouchardo ou Aconchuso , ». f. Accoucheuse, sage-
femme. En lang. Lévandièiro, — V. C. n>.
Trad. du français.
Acougassa, v. a. Faire tomber quelqu'un sur le der-
rière.
Acougassa (s'), v. r. Le même que »'ileo«a»»a, s'aceron-
pir. — Y. c. m.
Dér. de Couga, couver. M. sign. que Coua.
Acoogooncha (s'), v. S'accroupir. C'est un explétif du
verbe précédent et il a la raôrae racine. La posture qu'il
désigne est encore plus grotesque : c'est celle des magots
d« la Chine que le XVni« siècle nous a légués avec ses
visiUes. cheminées.
Acoulado, ». (. Accf)lade, embrassement les bras autour
du cou.
Ëtym. du lat. ad collnm.
Acouloubri, ido, adj. Eflarouché, irriié, envenimé-
comme une couleuvre. Au flg. éveillé, déluré ; ss dit d'une
lille garçxtmiière et hardie.
Di>r. de CotUobr*.
Acoumada, v. Raccommoder, radouber; assaisoimer.
Au fig. concilier, convenir.
Dér. de Covnxod».
Acoumadamén , ». m. Accommodement, accord, trans-
action, le mezio termine d'un différend.
Aconménça, v. Commencer. Au fig. cherclier noise,
être le premier à attaquer. — Ce mot, auquel on n'a fait
qu'ajouter l'o explétif, a une origine commune avec le
français commencer, et l'italien eomineiare. Cette origine
se prend dans le latin Cum. initiare.
Acouménçamén ou Couménçamén, ». m. Commence-
ment. Le premier se dit plus particulièrement du com-
mencement d'un livre, d'une histoire.
Acouménçanço , ». /". Commencement d'une histoire,
d'un conte, d'ujie leçon, d'un livre.
Aconmouda, v. Accommoder, arranger, apprêter.
Acoomouda (s'). S'accomiinxier, se contenter de. —
Que t'acoumode , qu'il s'arrange.
Acoomoula, v. Kcmplir par dessus les bords, faii«
grasse mesure; accumuler, combler.
Dér. de Coumoul.
Acoumpagna, «. Accompagner, aller de compagnie. —
Lou bon Viou vmi$ acoumpagne, et té plôou que vous bagne.
Dieu vous accompagne, et s'il pleut soyez trempé.
Étyni. du lat. Cornes, compagnon.
Acouqnina (s"), v. S'acoquiner, prendre des habitudes
de fainéantise et de débauche; s'accoutumer en un lieu, en
certaine compagnie. Il est toujours pris en mauvaise part.
Dér. de Cougui.
Acourcha, v. Raccourcir, rapetisser.
Acourcha (s'), v. Prendre le chemin le plus court.
Dér. de Courcho.
Acourcoussouni (s'), v. Se ratatiner, se recroqueviller
de vieillesse ou de rachitisme.
Dér. de Courconstoit, charançon. Cet animal est plié en
courbe dans l'alvéole on il se blottit ; de là la comparaison
du vieillard qui a à peu près la même posture.
Acourda, v. Réconcilier, accorder ensemble.
Dér. i'Aeordi.
Aconssa (s'), c. Se diriger vers, au pas de course; s'em-
presser de courir ; poursuivre.
Dér. de Cousso.
Acousséîa, v. Conseiller, donner an conseil. — Voi/.
Coussêia .
Dér. de Contsél.
Acousta, t). Accoster, aborder.
Trad. du français.
a*.
ADE
ADR
Acoustuma, v. Accoutumer, habituer.
TraJ. du français.
Acoustumado (à 1'), adv. Selon la coutume, l'habitude;
à l'accoulumée.
Acouta, t>. Caler, mettre une .cale sous le pied d'un banc,
d'une table pour remi)êcher de brandiller, sous une roue
de voiture pour l'einpi^cber de rouler seule ; ôtayer, mettre
un étai. Au fig. arrêter.
Dér. û'Acoto.
Acouti, ido, adj. Tassé, épais, compacte. — Se dit très-
bien du pain trop peu manipulé ou trop levé, qui est
massif et compacte.
Acoutra, v. Accoutrer, parer, habiller d'une manière
ridicule et surchargée d'ornements. — Ce mot, contempo-
rain du français Accoutrer, a une même origine latine :
«d, augment., et cuUuram, culture, soin du corps, parure.
Ce serait donc un superlatif de toilette ; ce qui la rend
ridicule et grotesque.
Acoutra (s'), v. S'enivrer, se griser. Cette dernière
acception n'est que l'extension de la première signification
active ; ne dit-on pas, en fr. familier : se pomponner, pour
se griser?
Acoutramén , s. m. Accoutrement, costume bizarre.
Acro, s. m. Accroc, déchirure occasionnée par un corps
crochu.
Dér. de Cro.
Acrocbi, s. m. Embarras, difTiculté, pierre d'achoppement.
Dér. de Cro.
Acrouchouni, ido, adj. Courbé, ratatiné de vieillesse.
Acrouchouni (s'), v. S'accroupir, se blottir dans un
coin ; se mettre en peloton ; se ratatiner, se ramasser tout
le corps. — Voy. s'Amouchouna.
Dér. de Crouclutù, quignon de pain, auquel un vieillard,
ainsi fait , ressemble par sa masse informe , par sa couleur
bise et la rugosité de sa peau.
Acrouqua, v. Accrocher, suspendre à un croc.
Dér. de Cro.
Acrousti , ido , adj. Se dit du pain qui a beaucoup de
croûte , et des plaies et pustules , où il se forme des
croules, des gales, des escares.
Dér. de Crousto.
Acnl, *. m. Accueil. — Mot tout français, que notre
languedocien s'est approprié et qu'il emploie très-bien.
Acosa, V. Accuser. — Contemporain du français, et
dér. comme lui du lat. Aceutare.
Ade, n. p. Agde, ville (Hérault) : X^otOii, Agaiha.
Adéli, ido, adj. Déjoint, baillant comme un tonneau
dont les douves sont déjointes par la sécheresse. Au fig.
sec, amaigri, exténué.
Étym. du lat. Deligare.
Adéré, adv. De suite, pied à pied; un à un; sans rien
laisser en arrière. — On disait en vieux français dans le
même sens : à la rangetle.
Dér. de l'esp. Arreo, même signification.
Adijà, adv. Déjà.
Dér. de la bas. latin. Dejam.
Adîou ! Adioussias ! interj. Adieu. — Le premier ne
s'adresse qu'("ntrc égaux , ou de sui)érieur à inférieur. Le
second, plus respectueux, s'adresse aux suj)érieurs, ou aux
égaux, à(}ui l'on veut nioiitror des égards. C'est une phrase
faite : A Diou-siasl soyez à Dieu! Le mot Adiou est la
syncope de la môme phrase, et par cela même il est plus
cavalier. 11 n'en est pas de ces deux mots comme du fran-
çais Adieu, que l'on n'emploie qu'en prenant congé d'une
personne, jamais en l'abordant. En languedocien, on s'en
sert avant, pendant et après la rencontre, indistinctement.
Adouar , n. p. Edouard. — Depuis qu'on a raffiné sur
le choix des noms propres, et que le peuple a abandonné
les prénoms de Jean, Jacques, Pierre, etc., il a bien fallu
que son idiome adoptât les noms nouveaux-venus et qu'il
les appropriât à son génie. Depuis lors, Adouar et son
diminutif Douaré sont devenus familiers et très -usuels
dans la langue.
Adouba, v. Accommoder, apprêter, assaisonner; tanner;
raccommoder, radouber; émonder; bistourner; renouer un
membre ; relier des tonneaux ; rosser, écliiner. — Adouba
la soupo, assaisonner le pot au feu. Adouba dé souïés,
raccommoder des souliers. Adouba dé boutos, relier des
tonneaux. Adouba dé pèls, apprêter, tanner des cuirs. L'an
pas mâou adouba, on l'a bien ajusté. Té vôou adouba, je
vais te battre, te rosser.
Toutes ces acceptions procèdent du même primitif, et
représentent directement ou par extension la môme pensée.
Le verbe est dérivé de Adoù, terme ancien, hors d'usage,
qui signifiait : lessive de tanneur, qui a formé Adobare, de
la bas. latin., pour ajuster, armer, préparer, dont la racine
Adob serait celtique. Adouber est du vieux français, qui
s'est conservé comme technique au jeu des échecs et du
tric-trac, quand il s'agit d'une pièce ou d'une dame dérangée
à remettre en place; mais radouber, radoubeur, sont restés.
L'ancien Dauber ou Dober appartient aussi à la môme ori-
gine et rentre dans le môme sens.
Adoubaïre, s. m. Tanneur; mégissicr; tonnelier; save-
tier; renoueur; chàtreur.
Adoubaje, s. m. Raccommodage; apprêt; manière d'ap-
prêter ; réduction d'un membre luxé.
Adoubun, s. m. Assaisonnement, qu'il soit huile, beurre,
lard ou saindoux.
Adoun, adv. Alors, pour lors; en ce temps-là.
Dér. du lat. ad tune.
Adoura, v. Adorer.
Trad. du français.
Adraïa, v. Fouler, battre un chemin, le rendre viable.
Adraïa (s'), v. Se mettre en route, s'acheminer. Au fig.
se mettre en train, se dégourdir les jambes.
Dér. de Draïo.
Adraqua (s'), v. Sécher à demi ; se ressuyer. — On po pat
séména que noun la tèro siègue adraquado, on ne peut pas
AFA
AFA
»
semer avant que la terre soit ressuyée de la pluie. Linge adra-
qua, linge essoré; [roumaje adrai/ua, fromage à moitié sec.
Adré, écho, adj. Adroit, habile.
Di't. iIu lat. Dexter ou ad rectum.
Adré, 5. m. ExiKisition sud d'une montagne, opposée
à Vavèa, exposition nord.
Même dérivé que le précédent, ad rectum, c'est-à-dire
vers le Iwin c6té. Avês est dér. de Adversus. contre, con-
traire, op|)osé.
Adréchamén, adv. Adroitement, avec dextérité, avec
adresse.
Même dér.
Adressa, v. Adresser, envoyer i quelqu'un. — S'adressa
à ijudouquus, s'adresser à quelqu'un, lui demander des
renseignements.
Dér. de la bass. lat. Addirectiare, envoyer directement
à quelcju'un, dont l'csp. a fait Enderezar, et l'ital. Addi-
rizzare.
Adresse, s. f. Adresse, habileté.
Dér. de Adré.
Adrèsso, s. f. Adresse, suscription d'une lettre-missive.
Dér. do Adressa.
Adrissa, v. Dresser, placer debout; rendre droit; faire
tenir droit; relever.
Adrissa (s'), v. Se cabrer; se redresser. — Adrissa-^mut,
levez-vous. Se tiras tro la brido, «a» s'adriua, si vous
tirez trop la bride, il va se cabrer.
1- Dér. de a explétif, et Dré, droit.
Adu, ucho, part. pass. de Adure.
Adure, v. Amener, conduire, apporter.
Dér. du lat. Adducere.
Adusa ou Adésa, v. Atteindre à une chose élevée,
hors de la portée ordinaire. — ty pode pas adusa, je ne
puis y atteindre. Y adnsara pas, il n'y parviendra pas.
C'est la position du renard do la fable, sous les raisins.
Dér du lat. Adiré, Adeo.
Afacha, v. Dépouiller les chStaignes rôties de leur coque
à demi brûlée, les éplucher. — Celte opération se fait d'ordi-
naire en les agitant dans un paillon ou panneton, appelé en
languedocien Païussoù , où on les recouvre d'un torchon.
Afachado, s. f. Châtaigne rôtie au moyen d'une poêle
percilh'*.
Sauvages, qui est parfois admirable dans ses étymologies,
s'amuse sans doute dans celle qu'il donne à ce mot. Il le
fait dériver de l'ital. A/faciato, effronté, sans pudeur,
c D'autant, dit-il, que les chMaignes qu'on fait rôtir ou
griller, [lètent dans les meilleures compagnies. »
Cette plaisanterie accuse du reste la difficulté d'extraire
cette racine. Dans ses notes, La Fare-AIais pensait que ce
mot tenait probablement à quelque circonstance, à quelque
anecdote locale, qui n'étaient pas venues jusqu'à nous , et
qui sont spéciales aux Cévenncs d'Alais; car, dans le reste
desCévennes, on dit Brasucado , dér. de Brato, et c'est
plus naturel.
Sauf le resj)ect du à nos maîtres, la racine ne se trouve-
rait-elle pas simplement dans Affait, Affach, pris du roman
Afaiter, préjwrer, séprer, raccommoder, dér. du lat. Affte-
tare: d'où l'esp. Afeyiar, orner, [«rer, ce qui a donné
Affaitamen, Affackador, A/fachamén, et dans notre vieux
langage Afachomén , une tuerie ; et dans le dialecte gascon
Affaych, préparation; dans le bas-limousin Affachadoù,
atelier où l'on foule les chapeaux , et Affachadïs . criblures
que l'on enlève en vannant le blé? Certaines ressemblance»
sont souvent de grandes présomptions de parenté.
Afaïra, ado, adj. Qui a beaucoup d'affaires; quiest enaflai-
re;su^toutcelui qui a de mauvaist^saffaires, qui a des dettes.
Afaïre, ». m. Péj. Afaïras, dim. Afaïroù. Affaires;
particulièrement procès. — Aquéles afairasses m'émpachou
dé dourmi, ces diables de procès m'ôtent le sommeil.
Aquà's un doutre afaïre, je ne l'entends pas ainsi. Vn
home d'afaïres, intendant, homme d'affaires; un avocat,
un avoué. Aqud's pa'n afaïre, ce n'est qu'une bagatelle.
Din l'afaïre d'un an , dans un an , dans l'espace d'un an.
Aïei d'afaïres, voici bien des difficultés.
Afaïroù, s. m. dim. Un petit outil, un petit ingrédient;
un objet dont on ne trouve pas de suite le nom propre.
Même origine que le mot français.
Aiama, v. Affamer, causer la faim. — En termes
d'agriculture on dit s'afama, en parlant des racines des
arbres arrachés depuis longtemps, exposées à l'air, et qui
ont de la peine à reprendre, quand elles sont mises en
terre. C'est ce qui arrive souvent aux mûriers de pépinière
qu'on transporte d'un marché à l'autre et qui restent sans
vendre pendant longtemps. Le meilleur moyen de connaître
si ces arbres sont trop anciennement arrachés, c'est de
trancher un Iwut do racine. S'il sort par l'incision une
sève glutineuse de couleur de lait, on est assuré que les
arbres pousseront. Du reste le mûrier est une plante très-
vivacc, et il est rare qu'il ne pousse pas même après on
long éventement de ses racines. Le châtaignier et les frui-
tiers sont bien plus délicats.
Dér. du lat. Famés.
Afara, ado, adj. Effaré, qui a la figure farouche et
décomiwséc par la surprise, la peur ou la colère.
Dér. du lat. Fera.
Atasqua, v. Dégoûter, rassasier jusqu'au dégoût, ce
qui est le propre des mets trop gras.
Dér. sans doute du lat. Fastidium.
Afasquoùs , ouso , ai/y. Rassasiant jusqu'au dégoût.
Du lat. Fastidire, Fastidiosus.
Afatiga, v. Lasser, fatiguer; empressé; emlwrrassé. — Es
afatiga coumo un pàoure home qui coula sa trémpo, empêtré
comme un homme pauvre qui coule sa piquette : il y v*
de cul et de tête, comme une corneille qui abat des noix.
Dér. de Fatigo.
Afatoonl, ido, adj. Mou, lâche, usé, avachi, comme le
linge qui a perdu son apprêt par l'usage.
Dér. de Fato.
515
AFO
Afatrassi , ido , adj. Péjoratif du mot précédent : c'est
nn degré de plus. Il est dérivé de Tatras, pi'jor. lui-môme
de Fato. Mais Afatrassi se dit, en outre, des personnes qui
ont perdu leurs forces, et particulièrement des jambes qui
flageolent do faiblesse maladive.
Afécîou, s. f. Zèle, ardeur, application ; vif intérêt qu'on
apport* à un ouvrage. — Y ana d'aféciou, travailler de
tout cœur. — Il n'a rien de commun avec Vaffeciion en
franfais.
Dér. du lat. Àfflcere, exciter, émouvoir.
Afénadoù, s. m. n. pr. Petite hôtellerie de route
où l'on ne fournit que du foin. — Ce mot a vieilli et
n'est connu que par le nom d'une maison, ou d'un quartier
par extension, sur la route de Nimes à Moulins, près de
Portes.
Dér. de Fé, foin.
Afénadoù, ». m. Trappe par laquelle on jette le foin du
grenier dans l'écurie.
Afénaïra, v. Faner le foin, le tourner, l'apprêter au
soleil , le mettre en meule ; faire tout le travail qu'exige
cette récolte quand elle est fauchée.
Dér. de Fé, foin, et Ènaïra. donner de l'air.
Afénaïraïre, aïro, adj. Faneur, faneuse.
Afénaje, s. m. Nourriture en fourrage donnée au bétail,
soit dans une écurie , soit dans un herbage , sans peser le
foin; sorte de pension. — Métré soun chival à V afénaje,
mettre son cheval en pension, fourrage à discrétion.
Afénassa, v. Ensemencer un champ en pré, y semer de
la fénasse, de la graine de foin; vendre du foin en botte.
Dér. de Fé, foin.
Aféta(s'), i'. S'affecter, prendre un air affecté.
Trad. du français.
Afiança, i'. Se promettre en mariage, passer des pactes
de mariage. — Ce verbe est actif en languedocien. —
Afiancè uno tèlo, il s'engagea avec une telle.
Dér. du lat. Fidentia, confiance, foi.
Aficha, V. Afficher.
Trad. du français. Dér. de Àfflgere, attacher à.
Aiicho, s. f. Affiche, placard.
Trad. du français.
Afincha (s'), w. S'appliquer à... avec zèle ; mettre toute
son attention, toute son intelligence à quelque chose; y
appliquer sa finesse et sa vue.
Dér. de FI, adj., fin, rusé, attentif.
Afina, v. Ruser, cajoler dans l'intention de duper; affi-
ner, polir, rendre plus fin un objet, faire la pointe.
Dér. de F), adj.
Aflaqui (s'), v. S'affaiblir, se relâcher, s'amollir; devenir
faible, mou, flasque.
Dér. de Fia.
Afoola (s'), V. S'affoler, s'engouer, se passionner.
Dér. de Fol.
Afonrti , v. Assurer, affirmer opiniâtrement.
Dér. de For.
AGA
Afourtuna, ado, adj. Qui a de la fortune; bien partagé
des biens de la fortune; favorisé du sort.
Dér. du lat. Fortuna.
Afourtuna, v. Ce verbe n'est employé que dans cette
phrase intcrj. Diou m'afourtune.' Diou vous afourtune!
Que Dieu m'assiste! Que Dieu vous soit en aide! Cette
expression n'est communément qu'explétive , sans que la
circonstance soit assez importante pour nécessiter une pieuse
éjaculation. On le dit lorsqu'un enfant pleure ou qu'il fait
du tapage , qu'une chose dérange ou importune ; lorsqu'on
veut souhaiter bon voyage à un ami ou même à un indif-
férent.
Dér. du lat. Fortuna.
Afraïra (s'), v. S'associer; proprement se faire des dona-
tions réciproques entre mari et femme, entre parents ou
amis.
Dér. de Fràire.
Afréjouli (s'), ti. Se refroidir, tourner au froid. — Lou
tén s'és bien afréjouli, le temps est devenu bien froid. Souï
tout afréjouli, je suis tout transi de froid. Lous viéls soun
afréjoulis, les vieillards sont frileux.
Dér. de Fré.
Afrésqua, ado, adj. Empressé, alléché, la gueule enfa-
rinée. — Il a son origine dans le mot frés, frais. T. c. m.
Afrésqua (s'), v. S'apprêter vivement; se hâter.
Afri, ido ou iquo, adj. Avide, empressé, affriandé ; ardent,
âpre à la curée. — Es afrl dou traval, il est affectionné à
l'ouvrage.
Dér. du lat. Apricus, ardent.
Afriquèn, èno, adj. Africain, d'Afrique.
Afrique, s. f. Afrique, partie du monde. — Depuis la
conquête d'Alger, l'Afrique est devenue populaire et réveille
d'autres intérêts que ceux de sa géographie.
Dér. du lat. Apricus, chaud, ardent ; ou selon Roquefort,
de l'arabe Aphrah, séparer.
Afronn, ». m. Injure, outrage, affront.
Dér. de l'ital. A/fronto, ou du lat. ad frontem. L'affront
est une injure en préâfcnce de celui qui la subit : ad fron-
tem ejus.
Afrounta, v. Affronter, rencontrer de front; mais sur-
tout injurier, donner un démenti.
Afrountur, s. m. Affronteur, insolent, trompeur.
Afroùs, ouso, adj. Affreux, horrible, épouvantable.
Dér. du grec ippi;, frayeur.
Agaboun, s. m. — Voy. Agôou.
Agacha, v. Regarder devant soi ; regarder avec attention,
considérer, admirer. — Agachas! Voyez donc! V. Achas.
Dér. du grec àyéS^w, admirer, regarder avec surprise,
être frappé d'étonnement.
Agaci, s. m. Cor, durillon, calus; excroissance dure et
douloureuse qui vient aux pieds.
Agafa , v. Prendre à la volée; saisir avec la main ou
avec un chapeau, un tablier, ce que l'on jette de loin;
attrapper.
AGI
AGN
3T
Étym. du vieux mot lang. Gaff. qui signifie Croc, dont
le fr. a tiré et conservé gaffe, gaffer.
Agalanciè, *. m. Eglantier, rosier sauvage; Rota rubi-
ginosa, I.iiin. — Sa fleur se nomme Eglantine. Son fruit,
qu'on app»>lle gratte-cul, sert à faire les conserves de cynor-
rliodon, dont il se fait un commerce d'exportation consi-
dérable dans la petite ville de Meyrueis (Lozère).
Nodier dit que le savant Périon fait venir ce mot du
grec ifî-avToî, arbre ou fleur épineuse.
Agalavardl, v. Afl'riander, accoutumer à la friandise. —
Au particiix; passé, Agalavardl, se dit surtout du bétail
mal gardé et qui a trop accoutumé d'aller brouter dans
les blés ou les vignes.
Dér. de Galavar.
Agalls (en), adv. En biais, en biseau, en talus, en diagonale.
Dér. (le aval, par le cbangement du v en g, qui est fréquent .
Agalousses, s. m. plur. — Voy. Agdoutset.
Aganl, ido, adj. Retrait, mal-venu, mal nourri, par
vice d'origine. Au Og., chétif, exténué, rachitique.
Dér. de l'ital. ingannare, tromper, frustrer. Son étym.
remonterait-elle au sanscrit aghan, exténué?
Aganlo, s. f. Moix de galle. Elle est fournie par le chêne
des teinturiers.
Étym. du lat. G alla.
Aganta, i'. Prendre, saisir, empoigner. — On dit égale-
ment : té vôou aganta, je vais l'agripper; té t'agant», si je
te prends, et aganlo aqud, attrape ceci ; aganlé un tapas,
il reçut un soufllet ; ce qui est prendre.
Dér. do Gan, de l'allem. tcand, ou du lat. vagina, gaine.
Agàousses, s. m. plur. ou Agalousses. Ouonix ou
arrètc-bœuf épineux; Ononit tpinota, Linn., plan te ligneuse
èf^ famille des Légumineuses, commune dans les blés.
L'étym. du mot, selon les uns, se trouve dans le celt.
aga, bois ; selon d'autres, dans l'arabe, et aussi, par cor-
ruption, dans le lat. aculeata, aculeota.
Agaracha, t>. Donner une œuvre aux champs laissés en
jachère ; laisser reposer une terre.
Dér. de Gara, guôret.
Agas, s. m. Erable, arbre; Acer, Linn.
Ce mot parait d'origine ligurienne.
Agasso, ». f. Pie; en v. it.agatte; Corvut pica, Linn.,
oiseau de l'ordre des Passereaux, commun dans nos
climats et connu par son caquet. — Au fig., se dit d'une
personne au babil étourdissant.
Du bas-br. Agac, dit Sauvages.
Agassoù, t. m. dim. Le petit de la pie. — Tramblo
coumo lou quiou d'un agassoù, il tremble comme la feuille.
Agérbassi (s'), ou Agérbl (s'), «. Se gazonner, devenir
herbeux, se couvrir de graminées; se taller.
Dér. de Girbo.
Aginouïa (s'), v. S'agenouiller , se mettre à genoux.
Aginouïa, v. Terme de vigneron : couder, coucher un
sarment dans la fosse pour le provigner.
Dér. de Ginoul.
Aglan, >. m. Gland, fruit du chêne. — Voudrifi istrt
un aglan, qu'un /«orm^ man^^iM, je voudrais Mrc un gland
et être mangé par un porc : c'est une expression d'an-
goisse quand on se trouve dans une situation malheureow
et sans issue; mais le plus souvent le |)euple, qui est tou-
jours hyperbolique, l'emploie pour une simple contrariété.
Dér. du lat. Clans, glandis.
Agiana, v. Ramasser des glands, faire la glandée; don-
ner, distribuer du gland aux pourceaux.
Agnano, ». f. n-, pr. de lieu, .\niane, i)etite ville, chef-
lieu de canton de l'Hérault. — Une célèbre ablaye d'hom-
mes de l'ordre de Saint-Benoit y fut fondée du temps de
Charlemagne. Les bâtiments qui restent encore ont été
transformés en maison de correction.
Un vieux dicton languedocien dit : Inoucén d' Agnano.
Quelle est son origine? Le français dit bien dans le même
sens : Niais de Sologne, qui ne se trompe qu'à son profit.
Les habitants de la Sologne passent pour avoir d'autant
plus d'intelligence qu'ils en font paraître moins, et ils
mettent dans les affaires qu'ils traitent une habileté secrète
qui les fait toujours tourner à leur avantage. On a dû
trouver dans nos contrées que, tout en contrefaisant le
simple, l'habitant d'Aniane était aussi extrêmement adroit
et alerte sur ce qui regarde ses intérêts ; de la le dicton,
naturalisé bien avant qu'il y eût des détenus à Aniane,
qu'on ne jieut pas traiter d'inoucén, même en commettant
un jeu de motsà la française ; car il s'applique à tout individu
de l'acabit du niais dont il est question, en sous-cntendant
la dernière partie de la phrase qui complète le sens.
Agnèl, ». m. Augm. Agnètas, dim. Agnilé on Agnèhù.
Agneau, petit agneau. — Les moutons changent de nom
en changeant d'Age; ils sont d'abord agnél depuis leur
naissance jus<iu'au retour de l'amountagnajé, à la fin d'août ;
alors ils deviennent bédigas. L'an d'après, A la même époque,
ils sont doublén, ensuite tèrnén, et ainsi de suite. — Agnil di
la, agneau de lait, qui n'a été nourri que de lait. Agnél dé
can, agneau qui a mangé aux champs. Es un agnél. il est
doux comme un agneau. Quinte agnélas! Quel grand
agneau, quel Iwn diable ! Aquà's la sournéto dé l'agnél blan,
c'est toujours la même répétition. Ce proverbe tient à un
usage des conteurs de sornettes. Lorsqu'ils sont ennuyés des
demandes qu'on leur adresse pour en conter une nouvelle,
ils disent : Vôou vous dire la sournéto dé l'agnél blan. — Ah/
voui, diga-la, s'écrie l'assemblée; et le conteur : Se vouUi
que vous la digue, vous la dirai. — Voui ! voui ! diga-la,
insiste-t-on de plus telle. Mais le conteur se renferme
dans son éternel : Se voulis que vous la digue, vous la dirai,
jusqu'à ce que, fatigué de cette vaine répétition, le cercle
d'auditeurs passe enfin condamnation. On dit en français,
pour la même chose : c'est la chanson du ricochet.
Agnèl, agnèlé , agnéloù sont des termes de cajolerie
enfantine, de tendresse mignarde.
Dér. du lat. Agnus, din). Agnellus, qui vient lui-même
du grec i-pii, pur, chaste.
28
AGN
AGN
Agnèla, v. Agneler, raellre bas, en parlant des brebis.
Agnèlado, i. f. Le croit d'un troupeau, sa portée
d'at;uoau\ dans l'année.
Agnèlo, ». f- Agneau femelle.— Se dit parliouliùreinent
d'une brebis qui commence à porter avant d'être à l'état
de béUiyasso. Cet animal souffre de cette précocité; il
ne peut se développer, vit dans un état rachitique, si tou-
tefois il ne meurt pas en mettant bas. Les éducateurs ont
plusieurs ])roc<:tlés jwur prévenir cette nubilité trop liàlive.
Agnèlo, s.f. Nielle des blés; Agrostema githagn, Linu.,
plante de li famille des Cary ophy liées. Son grain mêlé au
blé rend le pain noir et amer.
Dér. du lat. Migellas, noirâtre.
Agno, désinence, en fr. Agne.
Par ordre alpliabétique, Agno est le premier d'une série
de suffixes, qui se sont formés sur toutes les voyelles en
igno, égno, igno, ogno, ougno, ugno, qui tous présentent
des particularités curieuses dans l'bistoire de la formation
de la langue. Ces finales entrent en composition de noms
connnuns, substantifs ou adjectifs, et d'un certain nombre
de noms propres d'Iiommes et de lieux, avec un caractère
spécial. Elles ont été d'ailleurs soumises à tant d'altéra-
tions diverses, qu'il n'est pas sans intérêt de faire ici
connaissance avec elles, en leur consacrant un môme
article.
Dans toutes les langues, les noms se forment en quelque
sorte par des procédés systématiques. L'élément rudimen-
laire reste à peu près invariable, et c'est au moyen des
suffixes qu'il se modifie suivant les acceptions auxquelles
il est destiné à s'appliquer. Chaque pays, par une disposi-
tion particulière, obéissant aux influences de son orga-
nisme vocal, adopte de préférence la formule qui convient
le mieux à ses facultés d'articulation et de vocalisation ;
et dans ses vocables appellatifs surtout, parce qu'ils sont
sujets à se répéter plus souvent et doivent être plus fixes,
il rapproche les lettres et les combinaisons les plus faciles
pour lui à prononcer.
Ainsi , étant donné un radical, il est nécessaire de lui
imprimer une certaine forme stable et commode pour en
étendre le sens ; il faut ajouter une désinence caractéris-
tique pour lui faire signifier que l'objet désigné par lui doit
s'unir à un autre objet ou qu'il n'en est qu'une partie,
qu'il en dérive, qu'il en provient ou qu'il doit s'incorporer
à lui, pour préciser sa descendance, le qualifier plus expres-
sément, et pour déterminer ses dimensions, son étendue,
ses propriétés. C'est l'adjectif tiré du substantif; le quali-
ficatif joint au significatif; le diminutif ou l'augmentatif
venant mixlifler le simple, ce qu'on nomme la dérivation:
c'est le fonctionnement des sulfixes.
Cette loi est universelle: partout mêmes proa''dés pres-
que mécaniques, en ce sens que, les mots représentant les
idées, l'accessoire suit le principal, la désinence supplétive
étend la signification du radical. Ce qui fait la variété des
idiomes à base commune comme le celtique et le latin,
d'où sont issues nos langues modernes, n'est en définitive
que la différence de prononciation. Les rapports sont sou-
vent cachés, inappréciables à l'analyse, mais ils existent.
Ils se sont dénaturés par des raisons inconnues, mais des
points de contact vérifiés laissent voir leur rapprtichement.
Chaque groupe de population a, en cft'et, des tendances de
langage qui lui sont propres, des habitudes qui le portent
à rechercher certains sons et à en éviter d'autres ; les dia-
lectes naissent de ces convenances toutes locales, et de
cette manière se lie et se décompose l'ensemble général,
sans perdre ses affinités, mais en les laissant s'oblitérer et
en les écartant plus ou moins de la source comnnuie. C'est
pourquoi, dans ces recherches qui remontent quelquefois à
des origines lointaines, il y a à tenir compte de l'état des
idiomes voisins et de la philologie comparée. C'est faire
une tentative dans cette voie que d'essayer, sur les mots
de notre langue, de surprendre le secret de leur formation
originelle ; de savoir par quel instinct naturel ou quel tra-
vail prémédité, la pensée et son expression s'est plue à
revêtir certaines formes plutôt que d'autres , et de démêler
sous l'empire de quelles propensions et de quelles antipa-
thies particulières quelques-unes de ces expressions sont
arrivées jusqu'à nous, etontété adoptées. Pour cela, l'étude
des désinences est d'une importance considérable; car ce
sont ces syllabes, insignifiantes en apparence, qui donnent
à une langue son type individuel, son cachet et son carac-
tère. Du petit au grand, le dialecte a sa valeur; si modeste
que soit sa part, il a droit de se présenter au concours.
De la langue la plus anciennement parlée dans les
Gaules, le celtique, nous n'avons que des notions impar-
faites, réduites à quelques centaines d'expressions éparses
dans les écrivains latins ou grecs, et à quelques lambeaux
d'inscriptions lapidaires; il n'a été recueilli aucun monu-
ment écrit d'une sérieuse portée. Kien n'est resté dans l'air
de son accentuation. Cependant, avec les mots qui nous
ont été conservés, avec les appellations géographiques et
les noms d'hommes, que la stabilité naturelle de leur signi-
fication et de leur structure a protégés davantage, si l'on
n'est point parvenu à composer un vocabulaire complet, il
a été possible de discerner sûrement ce qui appartient dans
nos langues modernes à l'idiome primitif, et de lui attribuer
toiles formes, telles locutions, telles racines qui, ne se
retrouvant pas ailleurs, n'ont pu lui servir de modèle et
remontent nécessairement à cette source. Cet élément pri-
mordial mérite d'être relevé avec prudence, sans doute,
mais avec un soin minutieux.
Les colonies grecques, établies sur le littoral méditerra-
néen, eurent des rapports de commerce et d'échange avec
les populations voisines ; mais bien que florissantes et d'une
civilisation plus avanciie, elles ne se mêlèrent jamais avec
le corps gaulois au point d'exercer une influence, qui n'eut
pas le temps d'ailleurs d'être bien profonde. Les mots grecs
que nous avons retenus nous ont été apportés presque tous
par l'intertnédiaire des Romains.
AGN
AGN
3»
Le latin doit être considéré comme le vrai générateur de
nos idiomes. Il avait pénétni dans la Gaule et dans la Nar-
bonaiso, avant l'arrivée de César. Après la conquête, il s'y
naturalisa avec une absorbante énergie, et tout œncourut
à favoriser sa prétloiiiinana; et i» en prolonger la durée :
les lois, l'administration, la civilisation, la religion, même
l'esprit national. Le cliristianisme vint encore seconder son
inflttena'. Les invasions germaniques des Francs et des
Visigoths, loin do comprimer cet essor, accrurent sa popu-
larité : les barbares l'adoptèrent, et leur conversion à la
religion cbrétienne, leur orthodoxie ne contribua pas peu
à le maintenir, bien (ju'ils eussent versé un élément nou-
veau dans le langage |)ar leur prononciation. Mais il faut
dire que ces altérations furent plus sensibles au nord qu'au
midi de la France ; et nous n'en avons que plus tard res-
senti les effets par le français d'Outre-Loire.
Mais la langue im{X)rtée jwr les vainqueurs de la Gaule
et par les colons à la suite n'était pas le latin classique et
cicéronien : c'était le langage déformé de Rome, familier
aux soldats et au bas peuple, hérissé de barbarismes. La
latinité gauloise se forma d'abord sur ce modèle; et encore
la nouvelle langue, pour se répandre dans le pays con-
quis mais toujours indompté, dut-elle se soumettre à une
foule d'altérations néologi(]ue$ , se plier à des exigences
dont la masse de la nation puisait le principe dans son
indépendance. Qir, tout en acceptant un langage qu'ils
n'avaient pas appris dans leur enfance, les indigènes ne
renoncèrent pas à leurs habitudes de prononciation, et
firent violence au latin pour l'approprier aux formes natu-
rellesde leur pensée.
Ces témoignages les plus certains attestent que le vieux
gaulois, en pleine possession de son territoire au VU" et
au VIII" siècle, se maintint longtemps encore; môme au
Xni« siècle, son extinction n'était pas complète. Mais déjà
tous ces ferments de celte , de latin , de tudescjue avaient
commencé à se fusionner. Puis, qu.ind ce pêle-mêle se
réorganisa sous le souille d'mi esprit différent, après de
longues élaborations , une langue véritable était créée.
Elle fut d'abord qualifiée de ruttique, comme si elle
n'eût été qu'une dégénérescence d'idiomes corrompus;
mais une dénomination plus juste, qui est un souvenir, ne
tanla pas à prévaloir : elle est appelée Romqn ; et c'est le
roman qui a donné naissance à la langue d'Oïl et à la
langue d'Oc, ces deux fdies si glorieusement régénérées.
— Fby. Léngadà, Patouès, Rouman.
L'œuvre de recomposition fut lente : elle suivit les phases
de la grandeur romaine, qui mit du temps à mourir. Dans
le priiiciiw, elle était inconsciente, irréfléchie, ignorant sa
voie, mais entrevoyant un but; elle s'inspirait et se gui-
dait par mi vague souvenir, qui n'avait jamais piVi et qui
ramenait peu à peu le peuple, lui qui fait la langue, vers
des inflexions qui lui avaient été familières. En acceptant
le latin, il l'avait soumis, par une sorte d'instinct méca-
niqi'c, aux aptitudes les plus conformes à son organisme
vocal ; en le transformant, il ne cherchait qu'à porter dans
la prononciation les prédilections ou les anti|ia(hie8 qui
étaient dans sa nature.
Un resi)ect traditionnel entourait les racines, ((ui sont
l'âme des mots : les modifications s'accomplirent donc plus
volontiers sur les désinences. Elles s'adressèrent surtout à
celles qui avaient le cachet romain, d'almrd parc; qu'elles
étaient moins dans les prédisjnsilions organiques de la
voix, puis (urce que ces finales, sans signification par elles-
mêmes, n'affectaient qu'accessoirement la substance du
mot, que le changement ne voulait pas atteindre. Le génie
national reprenait les coneessions arrachées par les vain-
queurs : c'était l'affranchissement qui s'annonçait. Co
retour à l'ancien esprit gaulois offrirait des coïncidences
qui vont plus loin que les formes du langage.
Mais les signes de cette réaction se manifestent clairement.
Le premier besoin est la rapidité de la parole répondant à
la promptitude de la conception : et la contraction des mots,
la simplification des modes et des cas marquent des écarts
d'indéjiendancc qui protestent contre l'ampleur et la régu-
larité latines. L'accentuation se reprend à des cadences et i
des agencements de syllabes qu'une bouche et une oreille
romaines n'avaient pas inventés : et il s'ensuivit la nécessité
de combiner autrement la forme d'une foule de mots. On
le voit : si les fondements latins restaient encore solides,
un édifice plus jeune s'élevait sur eux.
Les éléments de cette révolution du langage se trouvent
dans le changement de formes, dans les modifications des
désinences, qui obligent l'appareil phonétique à prendre
d'autres flexions plus en harmonie avec ses tendances et
ses habitudes natives. C'est ce qu'il faut constater par des
applications et des exemples. Qu'on en juge à l'œuvre.
Chez nos ancêtres gaulois la forme du sullîxe était AC =
EC; nous l'avons déjà signalé. — Voy. A, tuff. Son accen-
tuation, forte sans doute, à cause de la lettre ûnale, devait
cependant être adoucie ou assourdie jwr un son guttural,
ressemblant à celui du X grec, qui lui servait d'expres-
sion dans l'écriture: et ce qui le prouve, ce sont les
variantes dialectales, conservées dans la néo-celtiqnc en
ach-^ iac = aue = oeh =eeh; nuances ménagées pour
estomper des tons trop durs. Les permutations opérf-es plus
tard en S doux, en J ou G doux, comme é({uisonnants,
seraient aussi un indice de quelque valeur.
Ces désinences étaient employées à ailjectiver les mots,
à former des termes ethniques, patronymiques, géogra-
phiques, à marquer la possession, la filiation, l'apparte-
nance, la collectivité. En voici quelques exemples : Bron,
tristesse, bronach, triste; bod, touffe, boilec, touffu; karad,
amitié, karadee, aimable; «ut/, œil, tuilech, qui ades yeux;
«(an,' salut, steinech , salutaire; plum ou plwm, plume,
p/umauc ou p/umaujc,emplumé,dial.corniqueoucambrique.
En gaélique : Albanach. Écossais; Erionnach, Irlandais;
Sacsanach, Anglais; en bas-breton : derv, tann, chêne,
derv^, lannec, lien planté de chênes, abondant en chênes;
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AGN
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ounn, frêne, ounnek , frênaie, etc., etc. — Voy. Zeuss,
Gram. celt.; Le Goilidec, DM. brel.
Mais, arrive la domination étrangère, et les mots cel-
tiques n'entrent plus dans le langage usuel qu'à la condi-
tion de revêtir la forme romaine. Le latin avait sa termi-
naison caractéristique générale en tts, a, «m; partout où
un ternie gaulois se rapprochait d'un des siens par le sens
ou la consotmance, dans les noms propres qu'il ne tenait
point par politique à défigurer, dans les dénominations
locales qu'il importail de ne pas débaptiser, il s'appropriait
le mot et se contentait d'adjoindre sa formule propre à la
désinence vaincue. Maisàpartsa finale en acus, aca, acum,
la plus proche, qui a été la plus durable et qui donne en-
core à bien des noms propres, dans la moyenne latinité,
une physionomie gauloise , il avait aussi ses suffixes en
anus, a, «m ; aneus, a, um ; anius, assius, enus, inus,
mus ; de la même catégorie, et exerçant de pareilles fonc-
tions adjectives, jwssessives ou collectives. Les Gallo-
Romains adoptèrent ces désinences dictées par le vain-
queur, et ils les vulgarisèrent en les étendant en anicus.
enicus, inicus, onicus, a, um, employées généralement au
plur. fém. : anicœ, enieœ, inicœ, onicœ. Suivons la gradation
sur les noms d'hommes et de lieux. On trouve dans César :
Divitiacus, Dumnacus, Valetiacus, ■ Aa.ns TàCile : Galgacus,
Caractacus; Sidoine- Apollinaire cite AvUacum, prcedium
Avili, Prutianut; Grégoire de Tours, Brennacum; l'Itiné-
raire d'Antonin, Juliacum, Tiberiacum, Solimariacum ; les
chartes, Flaviacum, Aureliacum, Pompeiacum, Pauliacum;
et en même temps , à cette dernière période, on rencontre
Martiniacum et Martinhanicœ , Colonia et Colonicœ ,
Condacum et Condusonicœ, Salvanum et Salvanicae, Alsonum
et Alsonicœ. Veranum et Verananicœ, et ainsi d'une foule
d'autres. De sorte que la progression pourrait être celle-ci :
Brenn, primitif celtique, donne directement Brenn m; puis
Brennac, Brennacus, œlto-latin, fils ou descendant du
Brenn ; et dans les noms communs, devenus noms de lieu,
collectifs, cass, cass-ac, cass-ec, forme celtique; cassacus,
tassanut, casnus, forme latine ; Cassanicœ, forme gallo-
romaine, etc., etc. Les transformations se firent sur ce
modèle; inutile d'en détailler l'interminable nomenclature.
Tel était le produit du mélange du gaulois et du latin,
parlés simultanément, à côté l'un de l'autre sur le même
sol. Les désinences ac = ec affaiblies en ach, aue, ech,
furent donc soumises à la prononciation romaine, qui don-
nait toujours le son dur au C, semblable au K rude,
même sur les voyelles douces e, i, et qui articulait forte-
ment le N, dont il ignorait le son mouillé. Les Gailo-
Romains avaient surenchéri en redoublant les deux sons
de CCS consonnes dans anicœ, enicœ, inicœ, onicœ.
C'est contre la dureté et la sécheresse de ces intonations
•que devait protester la langue romane en France, comme
le firent tous les idiomes dans les pays où les Celtes avaient
séjourné, une fois que la puissance romaine eut cessé de
peser sur le langage.
Aussi, ac = ec, la forme première, représentée par
acus, ecus, icus, ocus, um, perd-elle d'abord sa finale
latine ; puis le c s'amoindrit et coule; il permute avec le
ch ou le j et g doux ; il disparaît même entièrement de nos
appellatifs, où il ne se fait jamais sentir. A part quelques
exceptions, qui localisent une dénomination, il se trans-
forme de vingt manières différentes, selon les influences
auxquelles il obéit. Tandis que la géographie ancienne
garde ses acum ou anum immuables, à tous les points de
l'horizon, les terminaisons nominales se sont changées en
a, as, at, é, ei, ie, ier, ière, ies, y, eux, ieux, etc. II faut
encore comparer, pour ces métamorphoses du ac =ec,
dans la signification adjeotivée, nominative, collective ou
diminutive, les variantes qui paraissent autant formées sur
le suffixe celtique que sur le correspondant latin ou sa
latinisation, comme édo, iè, ièïro, et leurs dérivations ou
leurs analogies sur les différentes voyelles, et les affinités
et les permutations de lettres. — Voy. lettres C, G, et Èdo,
Iè, etc.
Dans les finales anus, anum; enus, inus, onus; aneus,
enius, inius, onius, au masc. et au neutre, d'importation
latine plus marquée peut-^tre ou du moins plus éloi-
gnée des suffixes celtiques, le roman, pour les traduire,
supprime également la caractéristique latine; il garde an,
en, in, on, avec ou sans i antécédent, et souvent même il
efface le n dans les noms communs, au moins de notre dia-
lecte, comme bo, cousi, matï, etc.; et dans ceux où la consonne
persiste, elle prend, dans le Midi surtout, une expression si
fortement nasalisée qu'elle devient un caractère typique de
notre idiome. — Voy. An, suff.
Les désinences féminines ana, ena, ina, ona, una, et
surtout ania, enia, inia, onia, unia; anea, inea, onea,
unea, se reproduisent plus particulièrement dans le vieux
languedocien et dans le moderne par nos finales agno, égno,
ègno, igno, ogno, ugno, qu'emploie le français sous diffé-
rentes formes transmises par le roman, en agne, aigne,
eigne, oigne, ogne. — Voy. aux mots : Cassagno, Gamégno,
Gascougno, etc., etc.
Et encore sur tous ces suffixes, à peu près indifférem-
ment, tant sur ceux où le c est la consonne dominante que
sur ceux où l'n se rencontre, il intervient fréquemment
une autre combinaison très-répétée en aje, éje, èje, ije, oje,
uje, le J remplaçant le G doux, — et en acho, écho, écho,
éncho, icho, ocho, qui dérivent du même principe et qui
vont reparaître sous un autre aspect.
Les Gallo-Romains avaient, disons-nous, représenté les
désinences principalement en icus, a, um, en les latinisant
plus durement, par anicœ, enicœ, inicœ, onicœ, où se rap-
prochaient les deux consonnances fortes de l'N et du C.
C'était une transformation qui voulait peut-être rappeler
le suffixe primitif des aïeux et le mettre en contact avec
ceux des vainqueurs ; mais cette finf.le de la moyenne lati-
nité, à dur redoublement, devint particulièrement antipa-
thique au roman et aux autres langues néo-latines qui se
AGN
AGN
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recomposaient. La malheureuse terminaison en nicuj, nica,
nieum, quelque voyelle qui lui serve de véhicule, a le don
d'horripiler tous les idiomes en voie de rénovation, et
cause les écarts de prononciation les plus étranges.
En France, le roman en fait anègues, enègues, inègues,
onègues, et aniches, anénches, anges, enget, ingei, onge.
Le languedocien emploie là-dessus sa voyelle féminine propre
0, mais la forme en est conservée. Dans l'espagnol et l'ita-
lien, comme dans la langue d'Oc, se retrouvent des procé-
dés identi(]ues ; et il est remanjuahle ({u'en Espagne, à
propos de l'altération apportée plus tard par le languedo-
cien sur ces désinences anigues, onègues, etc., venant de
anica, enicœ, onica, se montre une articulation conforme
à nos argues, ergues, orgues. — Voy. Argue, Canounje, OÙ
des exemples sont cités.
Cette variété anègues, enègues, etc., ne débarrasse pas la
désinence d'une certaine rudesse, qu'amortit à la vérité la
présence de l'e ou l'o atone ou muet, sur lequel elle tombe
en languedocien comme eu français ; mais nous présutnons
que la flexion forte du g n'est ici que le résultat d'une
exigence orthographique, quand il précède les voyelles a,
0, u, dans nos dialectes. L'exactitude de cette induction
nous est démontrée par ce qui existe de pareil en français,
et aussi dans la prononciation du languedocien des llautes-
Cévcnnes. Ainsi, pour traduire le lat. ventât, nos monta-
gnards disent : que végno, et dans la plaine ou prononce :
que vèttgue. Le preipier est plus pur ; mais cette diUé-
rence a peut-être amené une autre combinaison : celle
du g suivant \'n au lieu do la précéder. La mouillure est
moijis sensible : cependant ng n'est qu'un équivalent. C'est
une imnortation du germain par les Francs ou les Visi-
goths, qui n'avaient aucune facilité à articuler notre gn, et
qui l'ont démontré en changeant prescjue toujours nos dési-
nences agne, aigne, eigne, igné, ogne, en ange, inge, onge,
dans les dénominations. Quoi qu'il en soit, la formule ré-
pond exactement, par la suppression de la voyelle e inter-
médiaire, à cella des romanes anègues, enègues, onègues,
et ne sort pas d'une autre provenance. Dans le roman et
au nord, où l'influence germanique se fait plus sentir, on
trouve, comme formes analogues dans la langue du moyen
âge : fi dunge, dogner et duner, doner et dogner ; aviegne,
avegne, avienent ; espreigne, preigne ; et venge, lenge, donge;
et viengne, tiengne, dongne, qui sont aujourd'hui : donner,
advenir, prendre, venir, tenir; sans compter encore d'au-
tres variantes qui ne laissent pas d'être frappantes et fort
congruentcs k notre sujet.
Dans cette généalogie de désinences, ce qui est essentiel
à retenir, c'est l'introduction dans l'accentuation d'élé-
ments toul-à-fait nouveaux et inconnus au latin. Le G
guttural et souvent doux se substitue au C toujours dur
du latin ; le Cil chuintant, qui est celtique, aspire aussi à
reprendre ses droits; enfin, dans les suffixes qui font le
sujet de notre article et dans beaucoup de leurs variantes,
sur toutes les voyelles s'articule le GIS mouillé, une des
flexions de la plus incontestable origine gauloise. El ce
n'est pas mi phénomène des moins rentarquables que U
reproduction de ces mouillures gutturales et nasales dans
tous les idiomes celto-latius au moment où ils se renouvel-
lent. Elles s'étendent même à U mouillé, que le fr. et l'esp.
adoptent, baiaitle, baialta, etc., que l'ital. représent*' vargli,
figlia, bataglia, et notre dialecte parl'ï tréma, (ïo, bata\o.
En résumé, quand on suit à la trace ces transformations,
et qu'on étudie leur dégénérescence graduelle dans ses prin-
cipes et dans ses causes, il est diOicile de ne pas recon-
naître, à voir leur identité d'emploi et de destination au-
près du radical, que tous ces suffixes de même famille sont
égaux entre eux, et que, depuis les primitifs AC ^ EC en
passant par le latin, ils peuvent être ramenés, par une
équation logique et rigoureuse, jusqu'à la forme usitée
dans nos idiomes modernes, si originale qu'en paraisse
l'expression au premier aspect. La singularité de physio-
nomie qu'affectent parfois certaines désinences n'est pas,
au reste, sans avantages : elle signale et met dans un relief
plus frappant le membre sur lequel il faut d'abord opérer
pour arriver par la dissection jusqu'à l'os, c'est-à-dire an
radical. Dans la recherche des ëtymologies, il est bon
d'avoir affaire à un mot ainsi surchargé, dont on peut da
premier coup-d'œil dégager l'appendice à tournure connue
d'avance. Mais la parité significative ou l'équipollence des
terminaisons de même catégorie a une portée bien plus
étendue : car si elle permet d'établir entre les mots et les
noms, des analogies (jui les font équivalents les uns aux
autres, malgré la différence de leurs formes, quand ils pro-
cèdent d'une racine unique, elle empêche encore et le pins
souvent de confondre, avec un mot qui parait dérivé d'une
langue de formation, comme le latin par exemple, une
simple désinence, qui lui ressemble par sa physionomie,
mais qui n'est en définitive que le produit d'une combi-
naison régulière ou d'une altération successive. Ceci soit
dit en passant pour notre finale Argue, à laquelle nous
renvoyons. Mais que de ceci surtout ressorte clairement
la loi d'affinité, de concordance, d'égalité de valeur dans
les désinences supplétives, ce résultat obtenu sera fécond ;
et nous tenions à en consolider les bases. Les citations
sous chaque mot feront mieux comprendre son impor-
tance majeure. — Yoy. Argue, suff., Canounje, Cassagno,
Sdouvagnargue, etc.
Notre but ici, au moyen de ces observations générales,
était encore de démontrer qu'au moins une partie de
l'ancienne prononciation s'était conservée dans les Gaules,
et qu'au moment de la rénovation de la langue qui devint
notre idiome roman, tout imprégné de celte et de latin,
qui ne faisait encore que se parler et se pa^parait à s'écrire
en devenant la langue d'Oc, cette tradition était assez
intense, assez enracinée pour constituer un de ses attributs
essentiels, comme il arriva pour le français, l'italien et
l'espagnol. La prononciation obligea l'alpltabet à se com-
biner autrement, avec la même énergie que la contractioa
3-2
AGR
AGR
qui resserrait les mots ; ce furent les premières tendances
de l'esprit nouveau. Cependant, le plus souvent, l'expression
significative, dépendance respectée du radical, se maintint,
et l'accent lonicjue persista, comme en latin, sur la der-
nière syllal» forte ou sur la pénultième. L'intonation, ce
sentiment mélodiiiue représenté par la mesure et la quan-
tité, garda même dans la langue d'Oc de ces réminiscences
qui en ont perpétué l'euphonie presque matérielle en longues
et en brèves, dont nos dialectes ne se sont jamais séparés.
Sans doute, il est difficile de bien apprécier la nature de
ces diverses modifications à la distance où nous sommes de
ce mouvement intellectuel et euphonique de notre langue,
quand les changements peuvent être le résultat de circon-
stances fortuites ou de particularités d'origine, de sol, de
climat, ou de tant d'influences ignorées ; mais nous essaie-
rons de les distinguer et de les débrouiller avec patience,
et à l'aide de tout ce que nous pourrons recueillir de
lumières et d'enseignements.
Nos indications, si insuffisantes qu'elles soient, ne servi-
raient<lles qu'à faire entrevoir la communauté d'extrac-
tion de la langue d'Oil et de la langue d'Oc, leur contem-
poranéité de formation et de progrès, à montrer que celle-ci,
déchue politiquement, mais aussi littéraire que jamais,
n'est pas un des patois corrompus du français ; ces études,
que de plus habiles compléteront, ii'arriveraient-elles qu'à
jeter une lueur bien faible sur nos origines et notre his-
toire, qu'à sauver leur aridité technique par quelque uti-
lité et un peu d'intérêt et de nouveauté, que nous persiste-
rions encore à les suivre, et nous ne croirions pas notre
labeur perdu.
Agnuè, adv. Cette nuit, ce soir. — En vieux français,
on disait : anuit.
Dér. du lat. ad noctem.
Agnuècha (s'), v. S'anuiter, se mettre en chemin la
nuit, voyager de nuit. — Kous agnuèchan, la nuit se fait,
la nuit nous gagne. En v. fr. s'anuister.
Dér. de Gnuè.
Agôon, s. m. plur. Agôousses. Le petit chêne-vert épi-
neux; Quercus coccifera, Linn. Plante ligneuse sur laquelle
on cueille le kermès animal ou vermillon.
Agourini (s'), t>. S'acoquiner; prendre des habitudes de
paresse et d'ivrognerie; fréquenter mauvaise compagnie.
Dér. de Gourin.
Agoustén, quo, adj. Du mois d'août, d'arrière-saison.
Dér. du lat. Augustut, qui lui-même a formé août, qui
n'en est qu'une contraction.
Agrada, t>. Plaire, convenir, être au gré; agréer, ap-
prouver. — Aqaéles éfans sagradou, fôou tous marida,
ces enfants s'aiment, il faut les marier. Safaçoun m'agrado,
ses manières me conviennent. S'aquù vous agrado, si vous
approuvez cela.
Dér. de Gra, gré.
Agradèlo, s. f. Épine-vinette; Berberis vulgaris, Linn.
Arbrisseau épineux dont on forme des haies vives. Son
fruit en grappes est aigrelet et rafraîchissant. Agradèlo est
évidemment la corruption à'Aïgradèlo, qui n'est qu'un dimi-
nutif A'uïgre; c'est comme si l'on disait : l'Aigrelette.
Agrâoutouni {s'), v. Se recroqueviller, se ratatiner,
comme des cretons ou graisillons, connus en languedocien
sous le nom de grdoutoù.
Agrava, v. Couvrir un champ de sable, de gravier, par
inondation. — Gardoii agravo tous pras, le Gardon couvre
les prés de gravier.
Dér. de Gravo.
Agrévou, s. m. IIoux, arbre toujours vert, à fleurs mo-
nopétalos en rosette, hérissées de piquants, à baies rouges,
et dont la seconde écorce sert à faire la glu. De ses bran-
ches flexibles on fait des baguettes, qu'on appelle pour cela
des houssines. — Ilex aquifolium, Linn., de la famille des
Frangulacées ; assez commun dans nos bois.
Étym. du grec àfflu, qui est le nom du même arbris-
seau, dér. de iypioç, sauvage, farouche, à cause des épi-
nes longues et fortes de ses feuilles^
Agriable, blo, adj. Agréable.
Trad. du franc.
Agrimouïè, s. m. Groseiller à maquereau, arbuste épi-
neux, dont les fruits sont assez gros, mais moins doux que
ceux du groseillersauvage ordinaire; liibes grossularia,L[nn.
Son nom lui vient sans doute du goût aigre de ses fruits.
Agrimouïo, s. f. Groseille à maquereau, fruit de l'ar-
brisseau précédent.
Agrïoto, s. f. Griotte; variété de ce qu'on appelle à
Paris la cerise, à laquelle notre griotte ressemble beau-
coup, au goût prés. La cerise est fort douce et la griotte
est fort aigre. — Aquà's vrai coumo manjan d'agrïolos, cela
est vrai comme il neige des boudins. Badinan ou manjan
d'agfioios ? Mot à mot : plaisantons-nous ou mangeons-
nous des griottes? Est-ce pour rire ou tout de bon ? Tel
est le sens. Dans notre dicton, les griottes se trouvent mê-
lées par la raison que leur goût âpre et acide fait faire à
celui qui les mange une grimace qui "ressemble au rire,
une sorte de rire aigre-doux, sardonique, laissant le choix
entre le rire ou la grimace.
Agroumandi, v. AfTriander, apâter, affrioler. Le même
que Agalavardi. — V. C. m.
Dér. de Grouman.
Agroumïa (s'), ou Agroumouli (s'), v. Se blottir; s'ac-
croupir; se mettre en peloton; se tapir dans un coin; se
ramasser comme pour rentrer en soi-même.
Dér. du lat. grumus, grumeau, qui a donné aussi gru-
tnèl, du primitif grum, grain, d'où grumo, etc.
Agroutiè, s. m. Griottier, arbre qui porte la griotte.
— Voy. Grïoto.
Agruméli, v. Pelotonner, former des caillots, mettre
en grumeaux. — Se dit des choses, jamais des personnes,
pour lesquelles on se sert de Agroumouli.
Dér. de Grume/.
Agninas, s. m. Prunellier ou prunier sauvage ; Prunus
AGU
AIA
tpinosa, Linn., arbrisseau de la famille des Rosacées. Son
fruit est d'une acidité et d'une âpreté reinanjuables. —
On dit également ; Agrugnè et Agrunéiè. — Yoy. Bouïtioù.
Étym. do i^pio;, sauvage, champêtre; le celt. avait
aigr, aigre.
Agrunèlo, s. [■ Prunelle, fruit de X'agrunai, dont on
fait de l'eau-de-vie.
Môme étym.
Agu, part. pas», du v. Avédre, avoir; eu, possédé.
Agnè, 3' pers. iing. du prêt, du v. Avédre. Il ouelleeut.
Agnè (i. V), adv. Aux aguets, à la piste.
Dér. du grec i-^iw, considérer attentivement.
Agoi'ado, a. f. Aiguillée de fil ; aiguillon du laboureur :
le bout pointu sert à piquer les bœufs, l'autre extrémité
est armée d'une [jctile pelle, qui sert à racler la terre du
soc et qui s'appelle Bourboussado.
Dér. ii'Aguïo.
Aguialas, ». m. Aquilon , vent du nord-est. Il souffle
pour Alais des Alpes piémontaises. — Il y a sans doute
bien loin du latin Aquilo au langued. Aguialas, cepen-
dant on ne peut méconnnaitre entre les deux mots un air
de famille. Le 9 du premier se change souvent en g par
euphonie : c'est ici le cas. Quant à la terminaison, elle
exprime évidemment un péjoratif caractéristique, car on
ne parle de ce vent qu'avec aversion. I.« grec alyiaX6^,
rivage, bord de la mer, veut de terre, a peul-ètru aussi
contribué à sa formation.
Agniè, s. m. Porte-aiguille; pelotte, sorte de coussinet
ou de bourrelet destiné à piquer les épingles et les aiguilles,
recouvert et barriolé de morceaux de drap ou de velours.
AutrefSS'Ies femmes de noblesse ou de bourgeoisie en fai-
saient un ajustement de toilette qu'elles portaient suspendu
à leur ceinture à côté de l'aumônière ou du claviè. ( K. c. m.)
Aujourd'hui des breloques remplacent ces deux symboles du
travail et de la charité : la pelotte a aussi perdu sa place.
Le mot lui-même commence à être hors d'usage : affaire de
mode, trait de mœurs, signe du temps.
Odde, de Triors, dans ses Joyeuses Recherches de la langue
tolosaine, do 1378, décrit comme suit ce petit bijou:
« Aguillier est à dire vn petit peloton de drap que les fem-
mes coustumicrement tiennent pendu en leur ceinture, en-
semble auec leur bource, auquel elles mettent et ficlient
leurs cspiiigles, et doit estre tousiours beau, ioly, et s'il
est possible neuf et la bource semblablement, autrement
cela n'a point de nez, principalement quand de iennes
femmes le portent, car il n'est guicre beau et séant à vne
ieune femme de prendre vn vieil Aguillier, non plus qu'il
est beau de chausser quelque vieille sabatie, groulte, ou
escarpin dans quelque belle pantoufle, toute ncufue, ou
mettre quelque vieil petas et pièce de drap vsée sur de belles
chausses toutes neufues. Et jx)ur preuue décela, ie mettray
icy en auant ce nouueau et assez vsité prouerbe en cesto
ville de Tolose disant ainsin : A bourçn nauuo non cal
aguillier vieil ; et hœc tint dicta nemine nominando. >
Aguîo, (. f. Aiguille à coudre, à tricoter; aiguille de
montre; pièce de fer pour planter les vignes ou le» saules.
— Mentis pas dé la pouneho d'uno aguio, il ne ment pu
d'un iota.
Dér. de Acus, ûs, aiguille.
Aguincba ou Guincha, v. Viser, prendre pour point de
mire.
Dér. de GuincKe ou guineh», louche, parce qu'en visant
ainsi, on ferme un œil pour mieux régulari.ser la ligne
visuelle, et on a l'air de loucher. Peut-être encore ce verbe
tire-t-il son origine de l'esp. <;uinar, regarderda coin de l'œil,
eta-t-il la même communauté de sens avec le franc, guigner.
Agnsa, v. Aiguiser, rendre aigu; pointu, tranchant.
Étym. du Int. Acuo; acus, aculut.
Agusadooïro, ». f. Pierre à aiguiser. — Voy. Chafrt.
Ah I interj. Ah !
Ah 1 bé I interj. Ah ! pour le coup !
Aï, 1" pers. sing. ind. prés, du v. Avidre; yû.
Aï, interj. Aïe, cri de souffrance, de plainte, de sur-
prise. — At! dé ma dén! Ah ! la dent! Ai! mé fat màou!
Aïe ! tu me fais mal. Ai! çnï ses ? Ah ! vous voilà?
Aï, diphthongue, c'est-it-diro réunion de deux voyelles
produisant un double son par une seule émission de voix.
L'articulation de cette syllabe, dans la langue d'Oc, se fait
en appuyant sur la première voyelle, tandis que la seconde
reste laiblc: la voix dominante ici porte sur l'a, elle s'adou-
cit et s'efface presque sur l'i final.
En vertu du principe que toutes les lettres se prononcent
et se font sentir, nous aurions pu éviter de marquer l'ï
d'un signe particulier. L'italien et le grec n'en emploient
jws : ils écrivent simplement farni, veirai; ÇXait^ç, >lix«i,
xa(, et tous les infinitifs passifs; et leur diphthongue ai a la
même consonnance que la nôtre. Cependant le tréma nous
a paru nécessaire, d'abord pour marquer une différence
dans la prononciation de l't entre ses variétés d'inflexion
(K. la lettre /); puis, pour sauver une exa'plion que nous
étions forcé d'admettre. Voici le cas : le fraiiçiis a la diph-
thongue simple, sorte de voyelle, formée des deux lettres at,
qu'il prononce tantôt comme «fermé, j'aïmai, tantôt comme
è grave, j'aimais; or dans notre dialecte se rencontrent
certains mots d'origine toute française, mais impa Ironises et
consacrés depuis longtemps parmi nous, (juoique en assez
petit nombre, notamment, pour les citer presque tous :
air, Alais, mais, conjonc. Pour ceux-là nous demandons,
en faveur des 4ecteurs habitués à lire à la française, de leur
conserver leur physionomie orthographique à la française.
Certes, ils ne perdraient rien à être écrits comme ils se
prononcent: ér, Aies, mé; cep*>ndant le moindre trouble
à la lecture résulterait-il de cette configuration puriste, et
il reviendrait souvent, ce serait assez pour justifier une
exception si peu exigeante d'ailleurs. L'emploi du tréma
sur r«' après o devient ainsi tout à fait logique, et la règle
se trouve mieux confirmée, en rendant sensible la distinction
et en maintenant invariablement le son diphlliongué sur m.
m
AIG
AIG
.yado, t. f. Sauce à l'ail, aillade; coulis du paysan, fait
avec de l ail, du persil et du poivre. En Provence, cette
sauc*! s'ap|)elliî aïoli, parce qu'il y entre aussi de l'huile.
Dér. de Aïé.
Aïçaï, aiiv. Çà, deçi», de ce côté, niais un peu plus loin.
— Tira-vous aïçaï, passez do çà, dfi Ce côté.
Di'^r. du lat. //de.
Aïçalin, adv. Ici-bas, ci-dedans.
<ii Conip. de Aïci et alin.
'i Aïçamonn, adv. Cà-haut.
Coinp. de Aïcî et amoun.
Aïçainoundàoa, adv. Çii-haut, mais plus haut encore
que la place occuikVj par l'interlocuteur.
Conip. de Aïci et amounddou.
Aïçaval, adv. Çà-bas. Il est presque synon. de Aiçalin.
Comp. de Aïci et aval.
Aïçi, adv. Ici, dans cet endroit. — D'mei-'n-laï, doré-
navant. D'atci-'n-foro, en sortant d'ici, de ce pas, doréna-
vant.
Dér. du lat. Hic.
Aïçà, pron. démomt. Ceci. — Que sera tout aïçd? qu'ar-
rivera-t-il? que sera-ce que tout ceci? Aï pôou quaiçà vi-
rara mdou, j'ai peur que ceci tournera mal.
Dér. du lat. Hoc.
Aïçii-Aïlj, pkr. faitt. Ceci-cela, des si et des mais.
Aïé, s. m. Ail, plante de la famille des Liliacées, AlHum
taiivum, Linn. — Son oignon se divise en plusieurs gousses
nommées beségno. L'assemblage de ces cai<;ux forme une
tète qu'on nomme bouisèlo.
Etym. du lat. Allium.
Aïècha (s'), v. Saliter, garder le lit.
Dér. de U.
Aïèïro, s. (. ou Aïguïèïro, s. f. Evier, conduit, égoùt
des eaux de cuisine.
Dér. dn lat. Aquarium. — Aïèïro n'est que la contrac-
tion euphonique de aïjuïJïro.
Aïgadino, ». f. Ondée, pluie subite d'orage peu vio-
lente; une faible inondation, ou plutôt l'inondation d'un
petit torrent, d'un ravin.
Dér. ai Aïgo.
Aïgagnâou, ». m. Rosée, serein, vapeur exhalée de
l'hunms terrestre et condensée par le contact de l'air froid
de la nuit. Malgré la démonstration physique, on dit :
tomba d'ùïgagndou. comme si la rosée tombait d'en haut.
Le languedocien, passe encore; mais le français, qui doit
être et qui est en effet plus docte, dit à merveille : tonU>er
da larotée, li serein tombe; et personne ne s'en émeut.
Dér. de Aïgo et d" gnui, eau de nuit.
Aïgaïè, ». m. n. pr. de lieu. .Vigaliers, AquUerium, com-
mune du cantjn d'L'zàs. — Voy. Aïgoùs, et liïro, suff.
Aigaie, s. m. Ce mot a le même sens que aïgagndou,
mais il est plus générique; il désigne seulement l'humidité
des prés, du terrain, de la feuille de mûriers, trempés de
roeéc.
Aigarado, ». f. De l'eau rougie, du vin trempe outrç
mesure et qui n'a conservé qu'une teinte rosée; de la rin-
çure, de l'abondance. C'est aussi une ondée d'eau de vais-
selle.
Aïgardén, ». m. Eau-de-vie, alcool, liqueur plus ou
moins spiritueuse et incolore.
Formé de Aïgo et du lat. ardens, brûlant. En esp., agua
ardiente; en ital. anc. acqua ardente.
Aïgardéntiè, ». m. Marchand, débitant, distillateur
d'eau-de-vie; particuliorenu'nt les marchands ambulants
d'eau-de-vie, qui la débitent i)ar contrebande dans les vil-
lages et hameaux, loin des agents de la régie.
Aiigasso, s. f., péjor. d'Aïgo. Eau sale, de mauvais goût,
et même do l'eau pure, eu égard au mépris que lui témoi-
gnent les ivrognes.
Aïglo, ». f. Aigle, oiseau de proie, de l'ordre des Ra-
paccs; Falco fulvus, Linn. Aquila fusca. Le français fait
une distinction de genre lorsqu'il s'agit de l'oiseau, animal,
qui est masculin, ou de l'emblème, insigne, qui est alors
féminin ; le languedocien n'admet pas cette différence;
seulement, lorsqu'il parle de l'aigle romaine ou napoléo-
nienne, il francise tout à fait et prononce èglo. L'un et
l'autre mot sont d'origine française.
Aiigo, ». m., dim. Aïguéto; péj. Aïgasso. Eau. — F6oa
pas dire d'aquél' aïgo noun béouraï, il ne faut pas dire :
fontaine, je ne boirai pas de ton eau, pour : il ne faut jurer
de rien. Yôou pas iaïgo que béou, il ne vaut pas l'eau
qu'il boit; c'est un homme de peu de valeur. Aï pantaïsa
d'a:igos trébous, j'ai fait un mauvais rêve. Pér avédre dé
bono aïgo, fôou ana à la bono fon, pour avoir de bonne
eau, il faut aller à la bonne source ; qui veut bon conseil,
s'adresse à bon conseiller. Faire las aïgos, se dit des eaux
qu'une femme prête à accoucher rend aussitôt que le pla-
centa s'entr'ouvre pour laisser passage .1 l'enfant. Escampa
d'atgo, verser de l'eau, uriner, pisser. Las aïgos li vènou
as ièls, les larmes lui viennent aux yeux. Aïgo que coure
faï pas mdou dou moure ; en franc, du XV' siècle, on
disait dans le même sons : Esve {eau] qui court ne porte
point d'ordures {Prov. Gall., ms. cité par Le Roux de
Lincy). AquH vièl a éncaro bono aïgo, ce vieillard est en-
core vert, il a bonne mine. Donna l'aïgo , ondoyer un
enfant. L'an batéja émbé d'aïgo dé mérlusso, il est mal
baptisé, c'est un pauvre chrétien.
Aïgo-boulido, s. f. Eau bouillie, potage à l'eau, au sel,
à l'ail et à l'huile.
Aïgo-ddou-méïnage, s. f. Eau de vaisselle, lavure.
Aïyo-courén, eau courante, rivière ou ruisseau. — L'adj.
reste au masculin, comme dans le mot suivant, seulement
pour l'euphonie.
Aïgo-for, s. f. Eau forte. — On donne cette qualification a
l'acide nitrique ou sulfurique, àcause de sa force dissolvante.
Aïgo dé sardos, saumure de sardines. La saumure s'exprime
aussi par Aïgo-sdou, composé de digo et de sdou, avec sup-
j pression de l'article, comme dans les deux mots suivant%.
Ate
AIM
Aïgo-nafo, ean de fleurs d'oran^r, eau de naffe. Dulat.
'Aqua napklha, m?me sens.
Aïffo-roan, eau-rose, de fleurs de rosier.
AVgo-iignado, eau bénile. Signado, marquée du signe de
la croix.
Étym. du lat. Aqua; du rad. celt. Aa, ae, ag, eau.
Aïgo-Morto, j. f. n. pr. Aigues-Mortes, ville, arrondis-
sement (If Mrrips.
Ce nom est composé avec l'adjectif qualificatif et le
représentant languedocien du celt. aa, aq, aqua, eau, trans-
formé par le roman eve, ave, ive, euve, et ses nombreuses
variantes. Il est entré de même dans Aïgo-Vivo, Aigues-
Vives (dard), et autres.
Aïgo-pouncho, s. f. Bourge-épine, espèce de nerprun ;
Kamnus caiharticus, I.inn. Arbrisseau de la famille des
Frangulacées, dont la feuille, l'écorce et surtout les baies
sont purgatives. — Avec le suc épaissi des baies de ner-
prun et un peu d'alun, on prépare la couleur verte connue
sous le nom de vert de vessie.
Aïgoùs, ouso, adj. Aqueux, de la nature de l'eau, qui
Contient de l'eau, alwndant en eau.
Dér. du lat. Aquosus, formé du rad. celt. Aa, ae, ag,
ayg, eau.
Il n'est pas peut-fttre de radical qui soit entré dans la com-
position de plus de mots, avec plus de variantes. !Nons ne fai-
sons pas ici un dictionnaire géograpbique, pour le relever dans
tous les noms de lieu qu'il a formés ; mais nous le signalons
dans quelques localités les plus rapprochées, pour constater
certaines analogies étymologiques il l'appui de ce que nous
disons des noms propres locaux. Ainsi Aïgouso, Saint-Lau-
rcnt-(r^gouze (Ganl), et Aiguéso, Aiguèze (Gard), ASgaiè,
Aquiterium, Aigaliers (Gard), identiques entre en», léseront
encore avec Agusargues, Agusanicœ, -Agusargues (Hérault),
avec Aguzan, communede Conqueirac (Gard) ; avec Aguessac
(Aveyron), Aguillan (Drôme), comme avec Eyguières, Aqua-
ria, et Eygaliéres, Aquaria (Bouches-du-Rhône) ; et de même
avec Guzargues ( Hérault), et Gnzan (Hérault), par apocope de
l'a initial. Tous ces noms sont dérivés de la même source,
et la différence de leurs désinences n'ôte rien à leur com-
munauté d'origine et de signiflcation. — Voy. Argue.
Aïgo-vès, s. m. Ean-versant, les eaux-versantes d'une
montagne, terme de cadastre : l'arête, l'angle supérieur du
prisme de la montagne ou de la colline.
Dér. de Aïgo et de vès, en bass.-lat. Aqui-vergium.
Aïgre, ». m. Coin de fer, outil quelconque faisant levier,
quelquefois même une pierre plus dure que les autres, qu'on
donne pourpoint d'appui au piod-de-biche d'un levier, quand
on veut soulever une masse, ou débiter un banc de pierre,
on faire une pesée. C'est ce qu'on nomme en français :
orgueil. — Ce mot, qui n'est guère usité que chez les carriers
et les chauffonrniers, a donné naissance à un verbe fort
employé, aïgréja, et dont l'acception figurée est classique
et multipliée dans ses applications.
Dér. do Aigre, à étym. lat. aeer, aerU.
Aïgre, gro, adj. Aifre, acide, piquant an goût ; au flg.,
piquant, fAcheux, mordant.
Aigréja, v. Aigrir, sentir l'aigre, tourner k l'aigre. —
Vog. A'igre, adj.
Aigréja, t:. Au prop. secouer fortement, soulever avec oh
levier, faire une pesée. Au flg., mettre en mouvement,
mettre en route, décider. S'nigrèja, commencer à se remuer,
se secouer, s'aviver, se mettre en train. Un enfanl t'ai'grijo
quand il se réveille, qu'il se démène et qu'il commence 'à
pleurer.
Dér. de Aigre, t. m.
ASgrétO, i. f. Oseille ; Rumex atetota, Bumex icutalus,
Linn. Plante champêtre et potagère à saveur très-acide.
Dér. de Aïgre, adj.
Aigri (s), v. S'aigrir, devenir aigre, passer à l'aigre.
Aïgaéja, v. Laver souvent; arroser, mouiller, baigner;
passer du linge à l'eau simple.
Dér. de Aïgo.
Aïgnlèïro, ». f. Evier. — Voy. AïHro.
Aîlaï, adv. De ce côté-là, de l'autre côté. — IMetai
aqud aïlaï, laissez donc cela; brisez-là; n'en parlez plu.
— Voy. D'aïlaï, En4aï.
Formé du lat. Ad et illà, ou illàe.
Ailamonn, adv. Là-haut, au-<lessn8, amont.
Formé du lat. tllà, et ad montem, vers la montagne, do
côté d'en haut.
Aïlamoandàca, adv. Bien plus haut. C'est an augmen-
tatif d'Aïtamoun, en y ajoutant dâou, haut, qui est on
réduplicatif de amoun.
Aïlaval, adv. Là-bas, aval.
Formé du lat. Ittà et de ad vallem, vers la vallée, ven
le bas.
Aima, v. Aimer, prendre plaisir à, se plaire à, désirer.
Dér. du lat. Amare.
Aimable, blo, adj. Dim. Aïmablo^, aïmabléto; péjor.
A'imablas, sa. Aimable. — Le péj. aXmablae ne se dit qoe
par contre-vérité. — Ses aïmablas / vous êtes gentil! repro-
che-t-on à quelqu'un qui fait ou dit quelque chose de
désagréable, de mauvais goût.
Aimargne, ». m. n. pr. de lieu. Aimargues. qni s'écri-
vait aussi Aymargues, commune et petite ville dans le can-
ton de Vauvert (Gard).
Le nom A'A'imargue, parmi ceux qni portent la même
finale, se prête moins qu'aucun autre à la combinaison fan-
taisiste qui voulait que toutes ces dénominationsdésignassent
des maisons de campagne ayant appartenu dans l'origine aok
pins nobles familles patriciennes de Rome, ou tout an moins
à leurs riches affranchis établis autour de la métropole db
Nimes. Dans la composition du mot, il n'entre ni le nom
d'homme ^miliut, ni même le latin ager, domaine.
Pour s'en convaincre, il suffit de dégager d'abord la
désinence adjective argue, sur le sens et l'origine de la-
quelle nous nous expliquons. — Voy. Argue. Reste h
corp du mot ; et remarquons qu'il a subi bien des trankfor-
3C
AIN
AIS
mations, et quo sa lortiic la plus rôœntc n'a pas pu d'évi-
dence autoriser sa plus ancienne dérivation.
Or, le premier titre latin qui mentionne cette localité,
est de l'an 81 3 ; elle y est apiwlée Armasanica in littora-
ria. En 961, ni dans les actes publics depuis celte époque,
on écrit tantàl Armasianici, Armatianicœ, lanlèt Armada-
nicar, Armazanicoe, qui se fixent enfin en Armasanicœ .
Dans le môme temps, comme pour tous les noms à finale
identique, la langue vulgaire disait Armasanigues, qui se
trouve dans les vieilles chartes, et plus tard Emargues,
Morgues, Aimargues.
En latin, comme en roman, on le voit, le radical est le
même; et il s'est conservé en languedocien. Armas ou
Ermas, qui signifie, dans notre vieil idiome, marais, ter-
rain marécageux, vague, inculte, s'approprie très-bien à la
situation d'Aiinargues, encore in littoraria au IX' siècle,
et à plus forte raison quand l'appellation dut lui être ap-
pliquée. Armasanica ou Armasanègues supposent le pri-
mitif Armas-ac ou Armas-ec, ayant passé par Armas-ana
ou Armas-aca, latin, et n'ont pas d'autre sens que, champ,
domaine, propriété, villa de l'Armas. Ce qui est modeste,
et moins flatteur peut-être que la descendance romaine ou
gallo-romaine de jEmilius, mais plus certain et plus naturel.
— Yoy. Agno, suff.
Il est vrai (jue, dans la forme nouvelle, la substitution,
sur la première syllabe, de la lettre t à la consonne r est
étrange; mais le fait n'est pas isolé, on le dirait même sys-
tématique dans la composition de noms de ce genre dans
notre pays. En effet, pour le Gard seulement, on trouve
Goudargues, représenté par le lat. Gordanicus et Gorda-
nica; Boussargues, par Brossanicœ; Bassargues, par Bar-
sanica; Goussargues, par Gorsanicm ; Massargues, par
^arsanica.
Malgré les variétés de désinences qui se sont attachées
à la racine, il convient de rapprocher les analogies qu'in-
diquent et que justifient les changements eux-mêmes du
nom ù!Aimargue que nous venons de signaler. Ainsi nous
trouverons les mômes mots dans : Arman (Basses-Pyré-
nées) ; Armeau (Isère); Armens (Gironde); Armons et
peut-être Armagnac (Gers) ; Herm (Landes et Basses-Pyré-
nées) ; L'IIerm (Gironde) ; L'Herm (Ariége, Haute-Garonne,
Lot); Hermaux (Lozère); Armes (Isère); Arinissan, Arrael-
lan (Aude); Armilhac (Lot-et-Garonne). Que ces dénomi-
nations ethniques viennent de notre armas, langued., ou du
gr. ?pri(io«, qui a fait le lat. eremus, leur identité est incon-
testable, et justifie notre système du formation des noms.
Aïna, ado, s. et adj. Aîné, ée , le premier né des en-
fants ; par ext. personne plus âgée qu'une autre. — Dans
les familles villageoises, il est d'usage de distinguer le fils
aine en l'appelant l'aïna, le puiné cadé, et les autres, de
leurs prénoms. — Faïre un aïna, faire à son fils aine tous
les avantages que permet la loi. Ses moun aïna dé quatre
ans, vous êtes plus Sgé que moi de quatre ans.
Dér. du lat. antè natus, né avant.
Air ou Èr, s. m. Air, fluide qui entoure le globe ter-
restre; vent, vent-coulis; mine, manière, physionomie,
façon, allure; chant. — Anas préne l'air; allez prendre
l'air. Faï d'air, un pdou d'air, il fait de l'air, il fait un
peu de vent. A prés un air, un co d'air, il a pris froid, il
a une fluxion, une transpiration arrêtée. Prén un air, il
prend des airs de fierté. A un air dé se ficha dé ièou, il
semble vouloir se moquer de moi. Dono d'air à soun pèro,
il a un air de ressemblance avec son père, c'est tout le
portrait de son père. N'a pas l'air, il ne parait pas. Canta-
nous un air, chantez une chanson.
En l'air, adv. En l'air, en haut.
Dér. du lat. Aër.
Aïradé, s. m. Airelle ou myrtille, Vaccinium myrtillus,
Linn.; petit arbuste de la fam. des Bruyères ou Ericacées.
— Il croit sur les hautes montagnes, et ses fruits sont assez
agréables au goût.
Dér. du gr. AîÇ, ai^iç, de chèvre, plante de chèvre.
Aire ou Ère, s. m. dim. de Air. Petit air; air, mine,
tournure. — Un aire rharman que noun saï, un petit air,
une tournure charmante et gentille comme on ne peut
mieux.
Aïréto, s. f. Petite enclume de faucheur pour rabattre
la faux, pour étirer son morfil.
Aïriè, s. m. Chef d'une aire à battre le blé; celui qui en
dirige les opérations.
Dér. de Aïro.
Aïro, s. f. Dim. Aïréio. Aire, plate-forme pour battre le
blé ; plate-forme pour les tuiliers, les potiers.
Dérivé du lat. Area.
Aïrôou, s. m. Dim. Airoulé. Airée, la quantité de
gerbes qu'on foule à la fois sur l'aire ; jonchée de diffé-
rentes choses répandues sur la terre. — Ramassa ta pas-
turo à bêles aïrôous, ramasser du fourrage trop clair-semô
par jonchées de quelques pouces d'épaisseur.
Dér. de Aïro.
Aïsa, do, adj. Aisé; mais il n'emprunte à cet adj. franc,
que cette seule acception relative à l'aisance de fortune.
Appliqué aux personnes, il signifie : douillet, délicat, qui
aime ses aises, qui plaint sa peine. Dans ce sens, il se
rapproche de Coumode. V. cm. — Aquà po se dire un
Iwme aïsa, voilà un homme qu'on peut dire jouir d'une
honnête aisance.
Dér. de Aise.
Aiisanço, s. f. Commodité, faculté, convenance. Par
ojjposition au mot précédent, aisanço n'est jamais employé
pour aisance do fortune. — Aquà's une bèlo aisanço, cela
est fort commode, cela évite de la peine, des corvées.
L'aïsanço d'un ousldou, la bonne distribution, les facultés
d'une maison, un arrangement commode où chaque chose
esta portée.
Dér. de Aise.
Aïse, s. m. Dim. Aïsé, augm. iron. Aisas. Aise, con-
tentement, commodité, repos heureux, satisfaction, sans-
Aïs
AJU
37
gène. — Soui m aïie dé vaut viUre, je suis charmé, bien
aise de vous voir. Aquél home é$ à toun aise, cet homme
jouit d'une lionnfttJî aisance. Faraï aquà à moun aUe, je
ferai cela à loisir, sans trop me presser. JUarcha à soun
aUe, marcher à pas lents, au pas de promenade. Y-ana
d'aïse, aller doucement, avec précaution, sans se presser.
Préne tout a'iseï, se prélasser, se dorlotter : c'est le far-
nieitte des Italiens. Vaï à toun a'uai, moun home, ne te
gène pas, mon garçon.
Étym. du gr. ATsa, convenance, bienséance, d'où aîato;,
heureux, favorable.
Aïses, ». m. pt. Êtres d'une maison, d'une contrée. —
Sa tout aïscs, se perdra pat, il connaît la maison, le pays,
il ne s'égarera pas. Un chasseur doit connaître iou$ aïtei,
les allures, les mœurs, les remises du gibier.
Aïsl, ido, adj. Commode, facile; bien à la main. —
Aquét oustdou et bien aïti, cette maison est fort commode.
Aquélo piolo et bien aitido, cette cognt^> est bien à la
main. Sa fénno et patgaïre a'itido, sa femme est d'humeur
revôche et peu facile à vivre.
Dér. à'AXt».
Aïsino, (. (. Nom générique que l'on donne à tout
ustensile, ou meuble, ou vase, qui sert à contenir soit un
liquide, soit un solide. Ainsi, un panier, un plat, on seau,
un tonneau, sont tout autant d'aïtmoi.
Dér. de Atii.
Alssado, t. f. Diin. Aïttadéio. Marre, houe, outil de
jardinier. — Dans les Ilautes-Cévennes et dans le Vivarais,
cet outil a un manche assez court, sa lame est triangulaire
et légèrement recourbée en-dedans; c'est la môme forme
que la ny)M« ou maiglc de Bourgogne et la chèvre de Lor-
raine. A Alais et dans les environs, le manche en est long,
la lame large en cari"é-long et tranchant au bout; sa sur-
face est plate; elle décrit un angle de 45 degrés avec son
manche, qui s'y joint |>ar un anneau ou oeil et non par
une douille comme la pelle. Vaïtiado ou trénquo jardi-
gnUro est plus large de lame; l'angle de la lame et du
manche est plus aigu que dans le précédent outil. Celui-ci
sert particulièrement aux jardiniers pour faire les semis ou
plantations à raies dans un terrain meuble, et à creuser les
canaux d'irrigation.
VAïstadéto est ime serfouette, petit outil à lame pointue
du bout, à l'usage dos jardiniers et fleuristes, pour gratter
la terre autour des plantes jeunes et délicates.
Dér. du lat. Atcia.
Aïssadoù, t. m. dim. Le môme que le précédent Atuadéto.
Aïsséja, t'. Se plaindre, geindre, soupirer.
Formé de l'interj. Aï/ — Ces sortes de formation des
verbes fréquentatifs sont un des caractères particuliers de
la langue d'Oc. Les augm., les dira., les péjor. appartien-
nent à un même ordre d'idées. Il est peu de mots dont on
ne puisse faire un verbe, et peu de verbes qui ne puissent
recevoir et admettre la désinence éja, qui amoindrit, adou-
cit ou renforce même le sens primitif.
Aïsséiaïre, ro, adj. Douillet, qui aime à m plaindre,
qui ne cesse de gémir ; malade imaginaire.
Aïsséto, I. m. Aissettc ou aisseau, petite hache de ton-
nelier et de sabotier, dont le manche, d'environ six ponces
de long, porte un fer qui a d'un calé un large tranchant
recourbé, et de l'autre une panne, un marteau, et quelque-
fois une douille simple.
Étym. du lat. Atcia, hache.
Aïsséto, t. f. Plainte faible; soupir continu d'un enfant
qui soufl're, propre particulièrement à la fièvre. — Aquil
éfan méno uno aïtiéto que dévigno pat rit di bo, ce pauvre
enfant a une manière de se plaindre qui n'est pas de bon
augure.
Môme rac. que Auséja.
Aîtabé, Tabé, Aïtambé, També, adv. Aussi, aussi
bien, à cause de cela.
Formés de Tan ou aïtan, autant, et de bé, bien.
Aïtan, adv. et t. m. Autant, tant. — Vn âoutre aïtan,
une autre fois autant.
Aïuèncha (s'), v. S'éloigner, s'écarter d'un lien, d'une
personne.
Dér. de luên.
Aja, ado, adj. Agé, qui est avancé en ige.
Trad. du franc.
A-jal interj. Cri de commandement d'un charretier pour
faire obliquer son attelage à gauche.
Ajassa, v. Coucher par terre, ou sur un lit. —Bla
ajaua, blé versé.
Ajassa (s'), v. Se coucher, s'étendre. — En parlant des
vers à soie, il signifie : entrer en mue, se coucher sur la
litière {jat). — Lou» magnat couménçou dé t'ajaua; t'ajat-
tou à lat quatre, les vers commencent à entrer en mue ; ils
sont à la quatrième maladie.
Dér. de Jat.
Aje, t. m. Age. — Il semble une simple traduction
du franc. C'est un de ces roots qui, manquant à la
langue, ont dû être empruntés à leur voisin. En bon
languedocien, on l'évite autant que possible. — On dit
très-bien cependant : Un home d'aje, un vieillard. Et
éncaro d'un bon aje, il n'est pas encore trop igé.
Se faï adija din l'aje, il commence à être d'un Age assez
avancé.
Ajouqna, v. Jucher, percher, accrocher en haut.
Ajouqaa (s'}, v. S'accroupir, s'assoupir, s'endormir sur
sa chaise ; en parlant des perdrix, se raser, quand elles
aperçoivent l'oiseau de proie.
Etym. du lat. Jugum, perche, juchoir, ou tïeJacere.
Ajougne, v. Atteindre, attraper, joindre quelqu'un qui
marchait devant.
Dér. du lat. Adjungere.
Ajuda, V. Aider, secourir, venir en aide. — Les villa-
geois, lorsqu'ils invitent à diner un ami, ne manquent
jamais de lui annoncer le mets principal du repas. Ainsi
on lui dit : Vendra» m'ajuda à manja uno ttpanléto, lu
38
mA
ÂLA
viendras prendre Ui jwrt d'une éclanclie. Diou m'ainde,
Dieu n)0 soit en aide.
Dér. du lat. Arljuvare.
Ajudo, i. f. Aide, secours, assistance, protection ; celui
qui aide dans un travail. — As «no bono ajudo émbé ta
fénno, tu as un bon associé avec ta femme. Siès dé jAouro
ajudo, tu es d'un faible secours. Un pdou d'ajudo faï
gran bé, l'rvh, un peu d'aide fait grand bien. On dit alter-
nativement : Bon dré a besoun ou n'a pas besoun d'ajudo,
le bon droit a ou n'a pas Ijcsoin d'aide. Le premier sens
est rassurant; il ne faut pas toujours se fier an second.
Dér. de Adjuvar».
Ajusta, V. Ajouter, joindre, ajuster, additionner, mettre
quelque chose de plus ; viser pour atteindre un but en
tirant. — Les premières acceptions dérivent de adjungere,
joindre ensemble ; la dernière est formée du lat. ad-justum,
juste, droit.
Ajustoù, s. m. Petite pièce de bois ou d'étoffe, ajoutée
par assemblage ou par couture à une autre trop courte ou
trop étroite.
Dér. du lat. Adjungere.
Al, artic. mase. sing. dat. Au, roman-languedocien ; inu-
sité aujourd'hui dans notre dialecte, mais encore employé
dans la région montagneuse des Cévennes, et même dans
une partie de l'Hérault. 11 est formé par la contraction de
« lou, qui a donné dot». — Voy. Aou.
Al est aussi l'article arabe qui s'est incorporé à quelques
mots lang. et fr., tels que alambi, etc.
Aladèr, ». m. Alaterno sauvage; Hhamnus alaternus,
Linn. Arbrisseau de la famille des Frangulacées, toujours
vert, qui croit sur nos collines et surtout parmi les bruyères,
auxquelles il se trouve môle quand on s'en sert pour ramer
les vers à soie ; sa feuille ressemble à celle de l'olivier.
Son nom lat. alaternus est probablement une altération de
altemus, parce que les feuilles de Yaladèr, alateme, sont
alternées sur leurs branches .
Alafan, i. m. Eléphant; Elephai maximui, Linn. Mam-
mifère onguiculé de la fam. des Pachydermes. — Alafan
est une pure corruption du français ou plutôt un purisme
languedocien, dont le génie tend à s'éloigner du type fran-
çais, alors qu'il est obligé de lui faire un emprunt.
Étym. du lat. Elephantus, dér. du grec EXé^aç.
Alais ou Aies, ». m. n. pr., Alais, ville. — Ce nom a
exercé bien des fois les investigations des étymologistes. On
a prétendu l'expliquer par les armoiries de la ville, puis par
sa configuration et môme par son orientation. L'écusson
porte, en effet, un demi-vol d'argent sur champ de gueules;
mais avant l'époque incertaine où cette aile lui fut donnée,
avant que la science du blason eut été mise en honneur, la
ville et son nom existaient, et n'ost-il pas naturel de penser
que le nom fil naître l'idée de prendre une aile comme armes
parlantes, au lieu d'imaginer que les armoiries inspirèrent
le nom? 11 parait tout aussi difficile d'admettre les antres
systèmes. La rose des vents n'était pas inventée avec ses
indications d'Kï( et A'Ouest, quand le baptême se fit. D'ail-
leurs la forme Ahst dérivait de Alestum, traduction latirte
à l'usage des tabellions, du nom roman Aies, de beaucoup
plus ancien. Enfin, comme la ville ne s'était pas impro-
visée d'un seul jet dans un moule tout tracé, comment
cette figure d'aile aurait-elle été assez nettement dessinée
dès sa première phirne, alors qu'il fallut la nommer, pour
déterminer l'allusion V Le mot de l'énigme n'est pas dails
ces découvertes, plus ingénieuses que vraies. Une autre
solution du problème se présente.
C'est au mot lui-môme qu'il faut s'adresser pour trouver
sa racine. Or, l'histoire fait remonter le nom à' Alesia aux
Ages les plus reculés. Elle raconte que, treize siècles envi-
ron avant l'ère chrétienne, les Celtes, sous le nom de Voloes
Arécomiques, qui occupaient le littoral méditerranéen de
la Gaule, eurent .'t lutter contre une invasion de naviga-
teurs phéniciens , descendus sur leurs rivages. La colonie de
Tyr venait explorer ces contrées inconnues et y apporter
sa civilisation et le commerce. Son but était d'exploiter les
mines de nos Cévennes, où l'or et l'argent se rencontraient
alors presque à fleur de terre, et de faire l'échange de ses
produits. Elle établit deux stations commerciales, à proxi-
mité l'une de l'autre, pour se prêter un mutuel secours. La
première, plus voisine de la mer, s'appela Kamauz, de
Nama, en celtique, fontaine, ou de Neimheish, gaélique,
qui se prononce Nemese, d'où on a fait IS'emausus, Kismet
et filmes. La seconde, plus haut, au centre de l'exploita-
tion et du trafic, fut nommée Alesia.
L'attribution est certaine pour Nimes; les plus graves
historiens ne la mettent pas non plus en doute pour Alais.
S'il en était autrement, il serait au moins singulier de
trouver, après tant de siècles, les deux noms s'appliquant
aux deux localités désignées par les anciens géographes
grecs, dans les mêmes conditions topographiques, avec la
même raison appellative, et une pareille communautéd'orî-
gine et d'existence.
Au reste, cette Alesia primitive, malgré l'opinion de
M. de Mandajors aujourd'hui abandonnée, n'a rien de com-
mun avec V Alesia àQ Vercingétorix, que la ressemblance
de son nom, tiré du même radical et exprimant une posi-
tion semblable. L'invasion d'Hercule dans les Gaules,
ses conquêtes et ses voyages ne sont que le symbole de la
marche et des progrés de l'antique civilisation phénicienne,
et ce n'est que par une flatterie imaginée sous Auguste,
pour honorer la mémoire de César, vainqueur d'Alesia,
que la fondation de la grande cité gauloise fut rattachée
aux aventures du demi-dieu mythologique. Mais la confu-
sion n'est pas jwssible; car les commerçants de Tyr n'au-
raient pu pénétrer si avant dans les terres, ni s'éloigner
des Cévennes, où leur exploitation de l'or les avait attirés
et les retenait.
Campement fixe, station commerciale on ville, il importe
peu; rien n'est resté que les deux noms. Voilà pour !el
inductions historiques.
ALA
ALA
39
Coratne dcmi(^n! épanive, le nom a Ixssoiii d'élire aouinis
à l'analyse daii9snco(ii|Kiiiilioii. Il lient au c<?lti(iu<>, puisqun
la langue du paysoù il étail employé |X)Uvail seule servira
la déiiuiiiin.'itioa; etdans uel idiouio il doit être gigiiificttif.
Coiislatf)ris d'alwrd la forme la plus ancienne : c'est
celle qui, dans les noms propres et de lieux, rend le mieux
compte de leur l'orination, qui les suit et s'attache à eux
avec le plus de ix-rsévérana-. Pour Alais, le mot est écrit
dans les vieilles chartes Alè$ ou AtUz. Alesia ou Alexia est
composé stîlon le génie du grec; mais la désinence explé-
tive ta laisse facilement apparaître le radical primitif.
Les deux syllalws du mot appartiennent au celtique.
Al ou tUl. cité par Virgile et expliiiué par Ausonne {Al
Celiarum), signifie : hauteur, élévation, sommet, montagne.
Il est reproduit par le latin cUtus, cornisponilnnt à ej-celtiu;
et dans toutes les langues dérivées, il emporte égalciiteat
l'idée de liauteur. £< ou èz final est aussi d'origine gau-
loise. U est fréquf!nt dans les noms du Midi , où on le
retrouve pour dt'^signer une portion de territoire, une région.
Il imprime à la racine al, en s'y joignant, comme une
idée, de provenance, de dérivation. Dans ce sens, le mot
entier ne pourrait que signifier : pays élevé, contrée haute,
vers la montagne. C'est là, en effet, la dé»ignatioa la plus
caractéristique, celle qui exprimait le mieux la position,
qui s'appliquait exactement à un certain territoire. Quand la
ville, plus Uird, vint à se bâtir, il était luturel de la dési-
gHerpar le nom appliqué au |i.iys sur lequel elle s'emplaçait.
Ses commencements furent si faibles, qu'ils ne méritaient
pas d'abord d^îénomination spéciale de ville. Mais tout
concorde et se réunit [wur reiulrc ces faits et leurs circon-
stances vraisemblables ; il n'en faut i>as davantage pour que
notre étymologio soit juste.
Après les diverses altérations que nous venons d'indi-
quer, le nom était revenue sa forme primordiale; il s'écri-
vait AUt ou Alez, en francs, au commencement du
XVllh siécli!. Alors, pour éviter la confusion avec une autre
ville du Midi, son orthographe définitive fut fixée en Alaii.
Nous la maintenons ainsi ; mais sans vouloir pom cela
que sa prononciation languedocienne soit altérée, pas plus
qu'elle ne devrait l'être en français. Les habitants du Nord
nous chicanent un peu sur ce point. Ils prononcent Alais
comme Calais, palais, etc., et s'étayant de l'analogie, ils
trouvent ridicult; qu'en Languedoc nous fassions sentir, en
parlant, le s final. Serait-ce vraiment un gasconisme que
l'on aurait le droit de nous repi-ocher, et une contravention
au Iwau langage, dont tout le Midi se rendrait coupable?
Mais si les puristes ont raison de bl;\mer cette manière de
faire sentir ici la consonne finale sifllinte, poun{uoi l'ado])-
tcnt-ils lorsqu'il s'agit de Reims, do Sens, d'Aix, (jui, à
coup sur, ne se prononcent pas comme reins, saits, faitt,
ai» ?■ Pour vivre et parler de bonne intelligence, ne vau-
drait-il pa« mieux se monti-cr moins difllciles? Il est inu-
tile d'aborder une discussion sur les noms propres et de
lieux , mais il nous semble qu'on ferait bi«a. d« rèsoodre
la question en faveur de la prononciation locale, qui doit
être généralement adnptiVî : car c'est la seule manière de
s'entendre partf^mt, et même de parler corn'cteiiienl.
Alanda ou Alandra, t<. Ouvrir une |)orte, une fenêtre â
deux battimts. — De même qu'on dit : Alamla la porto,
ouvrir tout à fait la porte, on dit au.ssi ; Alawla lou troupil,
licher le troupeau, le faire sortir de la liergeric grande
ouverte ; Alanda lou fid, faire briller le feu , et AtanJa
ta mérchandiso , étaler sa marchandise. Dans toutes CM
acceptions, il se trouve un certain mnl-Tct, une sorte de
rapprochement qui peut servir à expliquer la racine da
mot. Ne viendrait-il pas de ad laium, au largeT
Alanda (s') v. S'étendre par tern>, tomber de son tong.
Alangtd, ido, aJj. Triste, languissant; abattu, affaibli
par le chagrin ou la maladie.
Dér. de Langui, venant du lat. Languere.
Alâongèïri, v. Décharger, alléger, rendre plu» léger. —
S'alâoug^r), se dévêtir, prendre des habits plus légers. Ix
proverbe dit :
Aou mes d'abriou
Talâougèïres pas d'un flou ;
Aou mé» dé mai
Faï ce que té plaï,
Amaï éncaro nonn saï :
Au mois d'avril, ne te dévêtis pas d'un fil ; an mois de mai,
fais ce qu'il te plaira, et je ne sais encore si c'est prudent.
Dér. de Làougi.
Alàouso, t. f. Alose; Clupea alosa, Linn. Sorte de
(wisson de mer qui remonte le Hhàne par grandes bandes
pour aller déposer son frai. Sa chair est fort bonne après
qu'il a vécu quelque temps dans l'atu douce, tandis que,
pris dans la mer, elle est sèche et de mauvais goût.
Alapas, s. m. Bouillon-blauc ; Verbascum lapsus, Linn.
Plante cotonneuse, à fleur bLinche ou rote, agreste, adoo-
cissante, vulnéraire, détersive. — Voy. Boutoun-blan.
Alapédo, s. f. Asphodèle ; Asphodelus, Linn. — Vala-
pédo à fleurs blanches est fort commune dans nos bois. De
la pulpe de sa racine, on fait une espèce de pain assez
mangeable. Cette qualité était sans doute connue des
anciens : car les Romains avaient fait de l'asphodèle une
plante des tombeaux; ils la plantaient autour des mo-
numents funèbres, pour donner aux morts ou à leurs mânes
le moyen de se substanter. — Voj/. Pouraquo.
Alarga, v. Elargir, faire sortir un troupeau de la ber-
gerie. — S'alarga, s'étendre; devenir libéral. — Quan-t-un
vilin s'alarga, tout y va'i, il n'est rien de tel qu'un vilain
qui se met en train.
Dér. Ao. large.
Alari (Sent-) , n. pr. Saint-Hilaire, oom commun Jt pla-
sieurs villages.
Du lat. miaris.
Alarja, v. Elargir, nendre plus large, un vêtement, on
champ, un meuble, un canal, une fenêtre, un trou.
Dés. ia. Large.
40
ALE
ALI
Alarmo, j. f. Tocsin. — Ce raot n'a pas d'autre acception.
Il est formé de à l'armo, aux armes, cri pour courir aux
armes à i'approclie de l'ennemi. En ital. on dit : Aliarme.
Mata, i'. Elargir un troupeau, lui donner la clé des
champs. — Le môme que Alarga.
Dèr. du lat. adlata, sous-ent. ileJucere.
Alcovro, j. /■ Alcôve. — Corr. du fr., m. sigu.
Étym. : al koba ou el-kauf, en arabe, cabinet où l'on
dort, tente. En esp. Àlcoba et alcova.
Alédro ou Anédo ou Coutèlo ( K. c. m.), s. f. Narcisse
blanc des prés, fiarcissus poetieus, Linn.
Dér. du lat. Albeio, blancheur.
Alègre, j. m. n. pr. Allègre, commune du canton de
Saint-Ambroix , arrondissement d'Alais, et nom pr. de
plusieurs autres villages. Il est aussi quelquefois nom pr.
d'homme. En lat. on le trouve écrit dans les anciens titres,
Àlegrium et Alergium.
Ce nom est assez répandu; mais sa désinence n'est pas
commune, car on ne la rencontre, dans notre langue, que
dans pécègre, persica, et iègre, sequi, avec ses deux composés
coussègre etpérsègre. Cette circonstance, etsurtout la variante
latine, semblent être l'indice d'une altération ou d'une trans-
position de lettres dans la terminaison. En ce cas, un primitif
en èrge se laisserait soupçonner, et, par la prononciation du
g dur, on arriverait à argue, finale adjective identique à
argue. Les exemples de ces inversions ne sent pas rares.
De là, le corps du mot ne présentant d'ailleurs qu'une
variété d'orthographe bien connue et insignifiante, l'ana-
logie serait directe entre Alègre, Alèrgue, et Aleyre, et
Aléirargues, qui ne sont eux-mêmes qu'une forme de
Alairac {.\ude); Aleyrac (Drôme, Hérault, Haute-Loire);
Alèira, Alleyrac (Gard) ; Alleyras (Haute-Loire) ; Allerand
(Marne); Allaires (Morbihan); Alayrac (.\veyron, Tarn);
Alairas "(Ardèche); AUeyrat (Corrèze, Creuse); Allières
(Sarthe) ; qui auraient produit, par apocope de l'a initial,
Layrac (Haute-Garonne et Lot-et-Garonne) ; Leyrat (Creuse) ;
Lirac (Gard) ; Leran (Ariége) ; Leren (Basses-Pyrénées); Laires
(Pas-de-Calais); Lairargues (Hérault). Tous ces mots ont, en
effet, pour racine le at gallicum, de Virgile, al Celtarum d'Au-
sonne, pour indiquer l'altitude, l'élévation, les montagnes.
La conformité du nom de notre Aies, Allez, Alais, semble
encore le ranger dans la même famille étymologique.
Alémagno, n. pr. Allemagne. — On donne le sobriquet
i'Alémagno à un Allemand, ou même à quelqu'un qui a
voyagé et séjourné en Allemagne.
Aléman, ando, aJj. Allemand. — Las Alémandos est
devenu le nom d'un quartier où se trouvait une ancienne
taverne; c'est aujourd'hui une tuilerie à un kilomètre
d'Alais, sur l'ancienne roule de Saint-Ambroix. 11 doit y
avoir un siècle à peu près, deux femmes, des Alsaciennes
peut-être, vinrent là établir une buvette qui attirait les
chalands. Elles se firent peindre sur la façade de la maison
par un barbouilleur de l'endroit; cette image, à demi effa-
cée, se distingue encore : de là le nom, qui s'est conservé.
Alénga, ado, ailj. Grand parleur, beau diseur ; qui a
la langue bien pendue, bien affilée ; qui a réjwnse à tout.
Dér. de Lèngo.
Alèrto, ailj. seulement fém. Alerte, éveillée, vive, dé-
gourdie.
Trad. du fr.
Aléstl, V. l'répart'r, apprêter; disposer; mettre en état.
Dér. de Lèsie.
Aléva (s'), V. Se lever. — Ne se dit que du temps quand
il tourne au beau, qu'il se lève.
Algarado, s. f. Algarade; mercuriale, réprimande; re-
proches bruyants et publics.
Étym. de l'arabe et de l'esp. Algarada, qui signifie :
course sur l'ennemi brusque et imprévue.
Aliboufiè, s. m. Aliboufier ou alibousier, storax, styrax;
Styrax officinalis, Linn. Arbre de la fam. des Ébénacées.
Il découle de cet arbre, dans les pays chauds, un suc bal-
samique connu sous le nom de storax, que l'on conserve
ordinairement dans des roseaux, calamus ; de là le nom
de calamité appliqué à cette résine.
Son étym. serait-elle prise de Aie, haleine et de boufa,
souffler, à cause de son odeur d'encens ?
Aligna, v. Aligner, ranger sur une même ligne droite.
— S'aligna, se battre en duel.
Dér. du lat. A pour ad, et linea.
Aliiuâou ! interj. Péj. Alimàoudas l Animal! butor!
grosse bêle! — Il n'est employé qu'interjectivemeut et
presque jamais comme subst.
Corrupt. du fr. Animal.
Alimase, s. m. Limace, limaçon sans coquille, mol-
lusque rampant, visqueux. — Marcha coumo tm alimase,
il marche à pas de tortue.
Dér. du lat. Umax, venu lui-même du grec XelaaÇ;
Xsc[X(ûv, pré humide.
Alin, a:lv. Là-bas. — C'est à tort, selon nous, que Sau-
vages le traduit par là-dedans. C'est sans doute la termi-
naison, qu'il a prise pour la'préposilion latine in, qui a
causé son erreur. 11 est bien certain que alin veut dire là-
bas, bien bas, plus bas encore que ava// jamais il n'a
signifié : là-dedans. Il est formé du lat. Ad et imum, au
fond.
Aliroù, s. m. Aileron, extrémité de l'aile à laquelle
tiennent les grandes plumes. — Le mot est formé de même
que le fr., mais non pas d'après lui : car ici le languedo-
cien est au moins son contemporain.
Dér. de Ah.
Alisa, V. Polir, lisser ; ratisser ; enduire un mur à la
truelle. Au fig., flatter, cajoler, flagorner quelqu'un pour
en faire une dupe. — T'alise, Bdoussièïro ! dit-on prover-
bialement quand on voit faire des compliments à perte de
vue. Sàoussiëiro, qui est un nom propre, la femme de Bois-
sier, est mis génériquement; peut-être le dicton faisait-il
allusion à une anecdote réelle.
Dér. de Lis, uni, poli.
ALU
AMA
41
Alisaire, ro, adj. Flatteur, cajolear, cmbauchear.
DiSr. du procèdent.
Alisaje, i. m. Enduit d'un mur au mortier fin.
Alisiè, J. m. — Yoy. Ariguiè.
Alisqua [s'), V. Se farder, s'ajuster, s'adoniser ; ta pour-
lôclier comme font les chats.
D6r. de Liqua .
Alo, 5. f. Diin. Aléto; pi^j. Àlasso. Aile. — Se dit par
analogie de choses très-diverses ; Alos d'un capil, bords
d'un chapeau, dont la forme et l'envergure autrefois, dans
les cha[)caux à la française, justifiaient l'acception. Àlo dé
rasin, grapillon, brin qui s'en détache, figurant par à pou
près une aile. — Voy. Sounglé.
Dér. du lat. Ala.
Alongui, s. m. Retard ; délais, lenteurs affectées. — Dé
qu'anas cirqua tan d'ahnguis? qu'avez- vous besoin de tant
chercher des retards ?
Dér. de Long.
Alor, adv. Alors, en ce temps-là. — Ator .' dans ce cas-
là ; oh ! s'il en est ainsi. Pér alor, pour lors.
D6r. de l'ilal. Allora.
Alouèto, s. f. Alouette ordinaire, alouette des champs ;
Alaudaarvensis, Tcmm. Oiseau de l'ordre des Passereaux.
— Syn. Ldouséto. Lou Couléloù, la Couquïado, la Calan-
dro sontdes variétés de l'Alouette. — V. c. m.
Dér. du lat. Alauda et de son dim. Alaudetta, qui a la
raCme sign.
Alounga, ^'^llongcr, prolonger; retarder, différer;
rendre plus long. — Aquàfdi pas qu alounga loupoutaje, lou
pastis, cela ne fait qu'entraîner des retards. — Alounga lou
pastis, allonger la courroie, perdre du temps volontairement.
Alounga (s'), v. Prendre le chemin le plus long; tomber,
s'étendre de son long.
Dér. de Long.
Aloongaîre , s. m. Mauvais payeur ; qai prolonge le
terme du paiement ; conteur, discoureur verbeux qui n'en
finit pas.
Dér. de Long.
Aluïasses , s. m. plur. Compliments intéressés ; belles
paroles ; détours de paroles, ambages. — Fàou pas ana cérqua
tant d'aluïasses, il ne faut pas tant de circonlocutions.
Contr. de Alléluia.
Alnma, v. Allumer, enflammer, mettre le fen. — H
parait spécial aux deux locutions suivantes : Aluma la
clédo, commencer à faire du feu au séchoir à châtaignes ;
et Aluma lou four d'acdou, garnir le four à chaux. Ce
qui prouverait sa légitimité languedocienne. Mais on ne
dirait pas bien : Aluma lou /un, {ou fà, pour lesquels il
faut préférer Aluba ou Aluqua. — V. c. m.
Formé du lat. Ad lumen.
Alnméto, Brouqnéto, Luqnéto, t. f. Allumette, petit
brin de bois soufré par le bout. Au fig., chercheur de noises,
boute-feu. — Koy. Brouquilo, Luquéto.
Dér. de Aluma.
Aluqna, v. Allumer le feu ou h lampe. — Voy. Aluma.
On le dit quelquefois pour appeler de l.)in une personne,
lui crier : ILAtil il.i I la héler. Oa no voit pas trop le rap-
port entre ces deux significatisns.
Aluqna (s'), v. S'animer, s'échauffer, en parlant aveo
feu.
Dér. du lat. Allueere, on du gr. Xuxvt&u, parf. XcXuj^vcuxa,
éclairer.
Alura, ado, alj. Fin, rusé; éventé, étourdi; Inron. —
Tislo alurado, tête à Tôveut. — Yoy. Lvra.
\>iT. de Luro.
Ama, aro, ou Amare, alj. Amer, qui a de l'amertume.
— Que 6<!ou ama, po pas iscupi dou$, prvb., qui boit
amer, ne peut pas cracher doux.
Dér. du lit. Amrirus, qui lui-même vient do mar, mer;
l'eau de mer étant le type de l'afflcrtumo.
Amadou, ». m. Amadou.
Emprunté au fr.
Amadura, v. Mûrir, rendre mûr; devenir mûr, aboutir,
apostumer, en parlant d'un abc(>8; s'apprétor, s user. —
Lou sourél ama luro la frucko, lous blas, le suleil fait
mûrir les fruits ou les blés. Aquél rouJaïre ama luro,
est al)cès va alx)Utir. Atçà s'amaturo, ceci s'apprête, dit«a
quand on commence à être a bout do patience et près
d'éclater. Mas bra'iot s'amaJurou, mes pantalons s'usent.
Dér. du lat. Maturare.
Amadnmn ou Hadnnm, t. m. Maturité, état de ce qui
est niiir. — Aquélo psro tomba d'amaturun, cette poire
pourrit d'excès de maturité. Aquéles magnas si foundom
d'amadurun, y a lon-lén que déouriéou rèstre imbrugas,
ces vers à soie dépérissent de maturité, on devrait les avoir
rames depuis longtemps.
Formé de Malu, venant du lat. Matutare ou mafurut.
Amaga, v. Choyer, réchauffer, abriter; cacher; couvrir.
— Amaga un éfan, envelopper un enfant, le dorloter, le
serrer dans ses bras on sur le sein de sa mère. Lou fid ii
amaga, le feu est couvert.
Amaga (s'), v. Se tapir, se blottir dans lue cachette;
se pelotonner dans un coin ; s'envelopper pour se défendre
du froid. — Voy. S'amata.
Dér. du lat. Magale, magalia, mot punique, cabane,
huttes. Le radical est probablement magus, maga, magi-
cien, sorcier, fée ; parce que dans l'antique superstition, oei
êtres fantastiques habitaient les cavernes et les grottes.
Amaî, adv. Encore; aussi; de plus; davantage; avec;
même, quand même. — Amaï-maï, bien plus, encore
davantage. Amaï-maH gn'aguèsse, quand même il y en
aurait davantage, y eneùt-il plus encore. Amat que, pourra
que, quoique. Vivo l'amour, amaï que dine, vive l'amour,
pourvu que je dine, dit le proverbe. Amaï fasen, aossi
faisons - nous. Amax à vous/ i vous aussi : c'est une
réponse aux civilités ordinaires entre gens qui se rencon-
trent ou s'abordent. Bonsouir à touto la eoumpagno. Bon-
soir à la compagnie, dit le premier interlocuteur; Amai à
Il AIHA
vous, lui n^ponil-on, à vons aussi, nous vous disons de
même. Amaï tus.' Toi aussi, fu quoque! Amaï vendra pas,
et mfinc il ne viendra pas, vous verrez qu'il no viendra
pas. Amaï la cassibruto, la canaille avec. Homes, fénnos
tt lout drôles amaï, hommes, femmes et les enfants avec,
et môme les enfants.
Dôr. de Mai, plus.
Amaigri (s"), i'. Maigrir, se dessécher, dépérir.
Dér. de aiaïgre.
Amaira, v. Au prop. réunir un enfant ou le petit d'un
animal à sa môre. C'est le contraire de Uésmdira. — Y. c. m.
Au fig. réunir, associer, rassembler. Se dit d'une gerbe,
d'un fagot, de toute espèce de tiges, qu'on assemble régu-
lièrement en plaçant tous leurs gros bouts du même côté
pour les lier plus facilement.
Dôr. de Maïre.
Amaïsa, v. Apaiser, adoucir, calmer. — ÀmaXsaùh éfan,
endormir un enfant, l'apaiser, le consoler, l'empêcher de
«irier ou de pleurer. Amaïsa la fan, apaiser le premier
aiguillon de la faim, la calmer. Amaïsa-vous, calmez-vous,
radoucissez- vous. Lotilén s'amaïso, le temps devient calme.
L'Aouro t'es amaïsado, le vent s'est calmé.
Dér. de l'ital. Ammausare, adoucir, apprivoiser.
Amalâoati, ido, adj. Qui est bien malade, bien exté-
nué, bien affaibli.
Dér. de Malâou.
Amaln, s. m. Hanche, et proprement la tête supérieure
du fémur.
Dér. de l'arabe Amaluc, l'os-sacmm ; c'est parext. qu'on
l'applique à la hanche.
Amalnga, v. Au prop. déhancher, déboiter le fémur.
Au fig. froisser, meurtrir, éreinter.
Dér. sans doute à'Amalu, mais le lat. ad malum pour-
rait bien ne pas y être étranger.
Amana, v. Rassembler ; amonceler; amener en un même
tas; cueillir à pleines mains; serrer, empoigner. — Es pa'
qui éncaro bien amana, il n'est pas là encore bien en main,
Wen exercé. Ta fïo s'és pas éncaro amanado, ta fille n'est
pas encore rentrée à la maison.
Dér. du lat. Ad manum, soit que manut se traduise par
main, soit par foule, peloton, botte .
Amare, ro, adj. Amer. — Voy. Ama.
La formation du lat. est encore plus sensible dans Amare,
qui vient de ad et mare.
Amaréja, v. Etre un peu amer, avoir un léger goût
d'amertume. — C'est un fréquentatif formé A' Amare.
La plupart dos substantifs et même des adjectifs sont
susceptibles, en languedocien, d'être ainsi transformés en
Terbes. Les verbes eux-mêmes, en prenant la désinence éja,
se dédoublent presque tous, et deviennent fréquentatifs on
diminutifs.
■ Sauvages dit dans ses proverbes : Que plaxdéjo, maldou-
lijo et tout ce que manjo amaréjo, le plaideur est comme
le malade, tout ce qu'il mange a de l'amertume.
AWA
Amarëlo, t. f. on Amaroù, Thiaspi , Jberis ou Thlaspi
amara, Linn. Plante de lafam. des Crucifères siliculeuscs,
qui croit dans les blés, et dont la graine, lors<ia'elle s'y
mêle, coiniimnique de l'amertume au pain qui eu provient.
— Voy. Amaroù.
Dér. de Ama, amer.
Amarignè, s. m. Souche ou pied de l'osier franc et
jaune, dont ou coupe les jets chaque année qui servent do
liens pour les treilles et vignes; Salix amerina, Linn.
Dôr. d'Amarino.
Amarinén, énquo, adj. Flexible, pliant comme l'osier.
— Se dit des diverses cspjces de bois de service qui ont
la nervure longue, Hexible et non cassante.
Dér. d'Amarino.
Amarino, j. f. Osier ; c'est le nom générique. — Vno
émarino, un jet ou un scion d'osier, coupé pour servir de
ligature.
Dôr. du lat. Salix amerina, qui lui-même vient de Ame-
ria, ville de l'Ombrie, en Italie. C'était dans l'origine le
Saule d'Ameria, comme l'on dit : le peuplier de la Caro-
line, le peuplier d'Italie.
Amaroù, s. f. Amertume, saveur amère.
Dér. do Amare.
Amaroù, s. m. ou Amarèlo, Thlaspi, Tlaspi amara,
Linn. Plante qui croit dans les blés, et produit une petite
graine qui, mêlée ensuite à la farine, donne au pain ttne
amertume prononcée. — Yoy. Amarèlo.
Dér. de Amare.
Amarougnè, s. m. Marronnier d'Inde, marronnier des
jardins, arbre magnifique de grandeur, de port, de feuil-
lage et de fleurs.
Amarouno, s. f. Marron d'Inde, fruit du marronnier
d'Inde. — Ce fruit, qui est d'une amertume extrême, n'a
rien de commun avec le marron, qui est si sucré et si
savoureux, que par sa couleur et sa formation dans un
hérisson; le dernier se nomme exclusivement : Dâouphi-
nénquo. — V. c. m.
Ici se présente une difficulté d'étymologie que le lecteur
jugera lui-même.
Amarouno vient-il A' Amarougni, l'arbre qui produit ce
fruit, ou bien vient-il de cette amertume, amaroù, qui forme
son principal caractère et qui fait qu'aucune espèce d'ani-
mal ne peut s'en nourrir ? Celte dernière solution semble
si naturelle qu'on serait tenté de l'adopter; cependant il
devient difficile d'expliquer que l'ainaroujnè et {'amarouno,
son fruit, aient deux origines différentes.
D'autre part encore, comment admettre que Xamarougnè
et le marronnier d'Inde, le môme arbre très-certainement,
avec leur physionomie si fraternelle de noms, ne pro-
viennent pas d'une racine comnmne? Or, le marronnier
d'Inde n'est qu'une variété du marronnier ordinaire, du
châtaignier à marrons ; et le mol marron, frère et contem-
porain de l'ital. marrone, vient comme lui du grec dû
moyen âge (iapp(5v.
mw
^m
Hais, comme il est impossible que le grec, l'italica e^ le
français, à la fois, soient venus puiser leur étyraologie
dans II! languedocien omorouno, qui lui-même no représente
pas du tout le marron doux dont ces diverses langues ont
voulu parler; il faut en conclure qn'amarougnè dérive du
fr. marronnier, qui doit w nom à snn fruit, marron, et
que ce dernier le tient de l'italien et du grec. Àmarougni,
à son tour, a créé le mot amarouno, qui, du reste, va ft
merveille à sa nature et n'enlùve pas l'amertume, au con-
traire, pour n'en pas être issu : le mot signifie innocem-
ment la chose.
AmuToxmo se dit aussi : Castagno amaro. — V. c. m.
Amassa, v. llamasscr, cueillir, faire un amas; mettre
ensemble ; réunir beaucoup do monde ; entasser, tliésaa-
riser ; aboutir, abcéder, apostumer. — Voy. Acampa.
— Amassa d'hèrbos, ramasser des herbes. Amassa la fiêïo,
cueillir de la feuille de mûriers. Amassa foço argén, deve-
nir très-riche, amasser une grande fortune. Moun dé amassa,
mou doigt apostume; le mal que j'ai au doigt aboutit.
Le lang. amassa, le fr. amasser, l'it. ammassare, dériv.
tous du lat. massa, masse, amas, ou plut<^t du gr. dtjxsuD,
j'amasse.
Amassa (s'), v. S'attrouper, se rassembler. — S'amat-
sara proù, dit-on d'un absent, il se rendra bien, il reviendra
au gite. S'amasse un fun dé mound«, il 80 fil un grand
rassemblement.
Amassaïre, ro, adj. Entasseur, thésauriseur, quand il
est etnploy^ s^h#» Lorsqu'il est question de vers à soie, il
signifie : les gens qui cueillent la feuille de mûriers, quoi-
qu'on n'y ajoute pas le mot fièïo.
Amassaje, s. m. Action de ramasser, de cueillir; frais,
coût de la cueillette. — Voy. Acampaje.
Amata (s'), v. Se tapir, se blottir, s'aplatir; s'humilier
de crainte ou de respect. — L'aï amata, je l'ai confondu,
je l'ai maté, aplati. S'amatou dé pôou, ils se cachent de
peur, ils se tapissent de frayeur. — Voy. S'amaga.
Dôr. de Mato.
Amatl, ido, alj. Dru, épais. — Se dit d'an pré bien
gazonné, bien tallé, et aussi du pain massif et gras-cuit.
Dér. de JUato.
Amatina (s'), v. Se lever matin; se mettre de bonne
heure à l'ouvrage ou en voyage.
Dér. de Htati.
Ambre, s. m. Amble, allure du cheval entre le pas et
le trot.
Corr. du fr., qui dér. lui-même du lat. Ambulare.
Ambre (Leva 1'), v- Être fin et rusa au dernier degré,
an-dcia même de la délicatesse. — C'est une phrase faite,
contraclive d'une plus longue. On sait que l'ambre, quand
il est échauffé par la friction, soulève et attire môme d'as-
sez loin une paille. I>c peuple, qui croit voir 1,1 un signe
de sa finesse, dit proverbialement : Es fi coumo l'ambre,
lèvo la païo^ puis, dans l'usage particulier, il a syncopé la
phrase, et pour exprimer la finesse poussée à l'cxUême,
quand le fr. «e contentait de : fin comme l'ambre, le lan-
guedocien a exagéré et a voulu dire : plus fin que l'ambre,
une finesse qui lèverait l'ambre lui-mémo. On comprend
que, jouant sur le mot, il s'agit ici de finesse morale, et
c'est de celui qui la possède à un très-haut degré qu'un dit:
Uvo l'ambre.
Dér. de Ambra, bass.-lat. ; ambre, eu catal. ; anbar, eo
arabe.
Ambrièi (Sent), i. m. n. pr., Saint-Ambroix, ville,
commune et canton de l'arrondissement d'Alais. — Voy.
BUiou.
Dit. de Sanctus Ambrosiut.
Améchi, ido, adj. Qui a les cheveux plats et embrooillés;
mal peigné. — Sauvages, qui écrivait à ime époque où 1»
coiffure était relevée, retapée, boncléc, crêpée et poudrée,
concevait la négligence des cheveux améchis par leur apla-
tissement sur le front, d'où ils retomliaient en mèches sales
et irrégulières. La coiffure actuelle a dû amener une entente
différente du mot améchi, qui n'est au fond que le désoidrs
dans les cheveux.
Dér. du fr. Mèche. Il ne peut venir du subs. méeho, qai
ne signifie quo la morve du nez.
Amélan, s. m. ou Abérlénquië, Amelanchier, CraUtgut
amelanchier, Linn. Arbrisseau de la fam. des Rosacées,
dont le fruit est nne petite baie, nommée abérlmquo, iff^
au goût. — Voy. AbérlénquU. .,
Dér du gr. ixrjXta, pomme, et i^tX'"* étrangler; ponuni
qui serre la gorge.
Amèn, s. m. Fin d'une chose; ainsi soit-il. — Dirp
amèn à toutes cdousos; consentir a tout ce qu'on propot^
accepter toute condition, approuver le bien et le mal. Jut-
qu'amèn, jusqu'il la fin des fins, sans fin, jusqu'à l'éter-
nité ; de jusqu'à amén.
Reproduit du mot hébren : Amen, fiât, ainsi soit, ainii
soit-il, qui termine toutes les oraisons latines de l'Eglise.
Amende, s. f. Amende, punition pécuniaire au profit
du fisc, qui n'a rien de comniim avec les dommages et
intérêts dus à la partie civile.
Dér. du lat. Emendare.
Améndri, v. Abaisser, diminuer le prix. — N'a pas da
tout le sens du fr. amoindrir, et ne s'emploie guère qn*
pour exprimer un abaissement de prix d'une marchandiaft.
— An améndri /ou pan, le prix du pain est diminoé. ,
Dér. de Méndre.
Aménla, (. m. Sorte de marbre commun dans le Gard ;
brèche, sorte d'amygdaloïde; poudingue composé de pl«-
sieurs cailloux cimentés ensemble par un gluten aussi dur
que la pierre.
Dér. A'Aménlo, parce que ces différents cailloux ressen-
blent anx amandes qui sont noyées dans le ciment da
nougat.
Aménliè, 5. m. Amandier; Amygdalus commiinif, LioA.
Arbre de la famille des Rosacées. ,
En esp. i(mcn(/ro, du lat. Amygdalus ; du gKC fy^tàok».
44
AMI
AMO
Aménlo, i. f. Ammdn, fruit de l'amandier.
Même diT. que le prie.
Aménloù, ». m. dira. d'AmirUo. Petite amande. C'est
propremenl la pulpo de l'amande, le fruit dans la coque.
Il est également applicable à l'amande de tous les fruits à
noyau. — Lorsque quelqu'un, après avoir fait de grosses
pertes au jeu ou dans le commerce, réalise un menu gain,
on lui dit ironiquement : Éngriisso-té, perlé, aqui un
aménloù, engraisse-toi, avare, voilà une amande. Peut-être
le mol perlé, qui est devenu une qualification usuelle de
l'avare, prend -il son origine dans ce dicton. Peut-être
vient-i' au-ssi d'un idiome quelconque, où, dans un temps
donné, perlé signifiait à la fois cochon et avare. Le fait est
que dans la formule de ce proverbe, il semble que c'est
d'un porc qu'il est question, comme le mot éngraïsso-té
l'indique.
Aménuda, v. Couper à plus petits morceaux ; amincir ;
émincer, amenuiser; retailler, recasser. — Yoy. Aprima.
Dér. de Sfénu.
Amériquèn, èno, adj. Américain ; qui concerne l'Amé-
rique.
Trad. du fr.
Amériquo, s. f. Amérique, partie du monde. — On dit
d'an homme trop fin, trop rusa eu affaires, trop âpre à la
curée, trop peu délicat : A pas bésoun d'ana en Amériquo
pir faire fourtuno, il n'a pas besoin d'aller en Amérique
pour faire fortune.
Amérita, v. Mériter, être ou se rendre digne de. —
Âquà i amerito, il a bien mérité son sort ou sa punition,
cela lui va bien. Aquà t'amérito, ta as bien gagné ce qui
l'arrivé.
Dér. du lat. Uereri, meritus tum.
Amérites, t. m. plur. Mérite, ce qui rend digne d'estime
et de considération.
Dér. de Amérila.
Améstïo, j. f. Amnistie, pardon, exemption de peine.
Corr. du fr.
Ami, igo, $. et adj. Dim. Amigué, amigoù, amigouné,
amigueto, amigouno, amigounéto. Ami, amie ; petit ami,
cher petit ami. — Sfoustù moun ami, est une phrase
explétive qu'on ne peut traduire par : monsieur mon ami,
qui n'a aucun sens en fr. ; elle revient à celle-ci : ah ! certes ;
ab 1 oui vraiment ; ah I je vous en réponds !
Dér. du lat. Amicui.
Amiada, v. Caresser; flatter; pateliner, amadouer. —
Toy. Lavagna.
Dér. de Ami.
Amiga (s'), v. Se lier d'amitié avec quelqu'un; se faire
nn ami.
Dér. de Ami.
Amigué, éto, t. et adj. dim. — Toy. Ami, de même
que pour les autres dim. et doub. dim.
Aminça, o. Amincir, rendre plus mince; émincer, cou-
per par tranches minces; menoiser.
Aminça (s'), v. Devenir mince; maigrir.
Dér. du lat. lUinuere.
Amistanço, i. f. Amitié, attachement ; affection ; rap-
ports d'amitié ou d'amour. Au plur., Àmistanços signifie:
caresses, amitiés, cajoleries.
Dér. de Ami.
Âmistoiis, oaso, adj. Dim. Amistousé, éto. Amical,
caressant; doux; qui témoigne de l'affabilité. — Et pa$
gdire amistoùs, il est d'humeur revêche, brutale.
Dér. de Ami.
Amitié, s. f., ou mieux : Amitiés, au pi. Amour, affec-
tion, attachement, tendresse. — Ne se dit que de l'atta-
chement entre personnes de sexe différent. C'est cette
affection douce, raisonnable et matrimoniale qu'éprouvent
les gens simples du peuple, après une assez longue fréquen-
tation. Il est fort singulier qu'en languedocien AmitU
signifie amour, et que Amour signifie amitié.
Dér. de Ami.
Amo, I. f. Ame; esprit; cœur; conscience. — Rendre
l'amo, mourir, expirer, rendre l'àme. Par une alliance de
mots assez bizarre, on dit ; Vn sacre-moun-amo, pour :
im tapageur, hardi, audacieux, effronté. — T-a pat amo,
pas âme qui vive.
Dér. du lat. Anima.
Amouchouna, v. Mettre en tas, réunir des objets épars
en monceaux ; froisser, friper; mettre en bouchon du papier,
du linge, etc.
S'amouchouna. Se blottir dans un coin; se ratatiner;
se pelotonner ; se courber comme fait un vieillard. — Yoy.
S'acrouchouni.
Dér. de Mouchoii.
Amoula, v. Aiguiser, émoudre, avec une meule tour-
nante et non avec la pierre à aiguiser ; rendre tranchant
ou pointu sur la meule.
Dér. de Molo.
Amoula, v. Agir lentement, lambiner; lanterner.
Dér. de Mol.
Amoolaire, ro, s. et adj. Remouleur, ëmouleur ; lambin,
lent, qui va, parle ou agit lentement.
Amoulè, t. m. Remouleur, gagne-petit. — Ce mot est
plus technique que Amoulaïre. Celui-ci se dit de toute per-
sonne qui aiguise ; Amoulè est le nom particulier de la pro-
fession.
Dér. de Amoula.
Amoulouna, v. Amonceler, mettre en tas, en meule;
entasser ; rassembler, réunir en masse. — Ce mot entraine
l'idée d'une plus grande dimension que Amouchouna ;
comme sa racine mouloii est plus grande que mouchoù,
qui n'est qu'un petit tas, un bouchon.
S'amoulouna. S'amonceler, en parlant de la foule,
s'entasser ; et aussi se rabougrir, se recroqueviller, se mettre
en peloton, en parlant d'une seule personne.
Amonn, adv. Là-haut; au ciel; vers le nord.
Dér. du lat. Ad montem.
AMO
AMO
if>
Amoandâoa, adv. Là-haut; an ciel. Augmentatif cl
réduplicalif de Amoun, couiiiio si l'on disait : là-haut au
haut.
Amounéda, ado, adj. iUcbe en espèces ; lain., en gros
sous ; pùcunicux.
DéT. de Mounédo.
Amounina (s'), v. Dovcnir effronté. — Se dit d'une nile
trop délurée, trop hardie, trop gar^nniôre pour son Âge.
Dér. de Mounino.
Amountagna, v. Envoyer ou conduire un troupeau dans
les hautes iiiuutagnes pendant la canicule. — On fait une
différence dans les foires entre le bétail qui a passé l'été
dans les montagnes, et celui qui est resté dans le pays.
Celui-ci a la laine plus mate, moins de vigueur, et les brebis
■ont moins précoces à mettre bas que celles qui tout
amountagnadoi .
Amoantagnaje, $. m. Action ou habitude d'envoyer
les troupeaux dans les montagnes ; frais de pâturage des
pacages; et aussi frais que l'on paie au raaitre berger ou
batte qui garde plusieurs troupeaux sous sa respousabihté.
Amour, t. m. En poésie, ce mot répond bien au fr.
Amour dans ses diverses acceptions; mais dans le style
ordinaire, il exprime : Affection, attachement, tendresse,
pris d'une manière générale ; on ne l'emploie jamais avec
la signification française de Atnour. On dit d'un homme,
d'an valet, d'un chien : Èi $ant amour, il n'a nul atta-
chement, il ne s'attache à rien ; il ne consulte que son
intérêt, son big^tre, son égoïsme. La poésie a ses privi-
lèges et ses licences : elle a fait d'amour une passion, un
sentiment, tandis que dans le langage commun, amour ne
l'entend que des attentions, des soins affectueux, de ces
préférences souvent personnelles et de cet empressement
sympathique, mais plutôt naturel que passionné.
Pér amour dé, prép. A cause de ; en considération de.
— Pér amour dé vous, à votre considération. Pér amour
d'a^à, en considération de cela. On supprime quelquefois
le mot pér : Amour dé rire, amour dé parla, comme on
dit en fr. histoire de rire, histoire de parler.
Amoara, v. Emousser ; faire perdre la pointe ou le tran-
chant à un outil, à un clou, à tout objet pointa ou tran-
chant.
Dér. de Uouru.
Amoara, v. Rapprocher, joindre ; mettre nez-à-nez, l'un
contre l'autre. — Aquélo p^ro amouro pat prou, cette
pierre ne joint pas suffisamment.
Dér. de Mouri.
Amoara (s'), o. Boire à même ; donner du nez à terre;
tomber sur la face ; se heurter du nez en se rencontrant
avec quelqu'un inopinément; ou contre une porte, un
arbre ou un mur. — S'amoura dou fiatquou, boire aa
goulot de la bouteille; dou fera, en trempant la bouche
dans le seau ; dou vala , au ruisseau , en se coudiaut i
plat ventre.
Dér. de Moure.
Amoaracha (s'), v. S'amouracher de.. S'engager en une
folle passion. Tout comme en fr., ce terme ne s'emploie
qu'en mauvaise part. Il exprime une inclination de liaul
en bas, à l'cnuoiitrc d'une personne inférieure, soit en con-
dition, soit en considération ]icr8onnc!le.
Formé eiitièrcinent du fr.
Amoorèléto, i. f. Morelle; Solanum nigrum, Linn.
Plante du la famille des Solanècs, commune le long des
murs ou sur le bord des chemins. La même que lu Pùso-
ean. — V. C. m.
Ëtym. du gr. <i|uiup^, sombre, noir&tre.
Amoariè, <. m. Mûrier; Uoruê, Liiui. Cet arbre, qoi
joue un rôle principal dans les préoccupations du pays,
offre deux espèces et un tms-grand nombre de variétés.
Le mûrier noir, JUorut nigra, Linn., qui se plante dans
les terrains les plus arides, est impropre à l'éducation des
vers à soie, à cause de la dureté et de la grossièreté de sa
feuille, dont les fibres et les nervures sont trop ligneoses
à sa maturité. Il produit la inùro noire employée à faire
les conserves et les sirops de mures. Les Cévennes avaient
autrefois beaucoup de mûriers noirs qui ont dit céder la
place au mûrier blanc, if oru<a/ia, devenu si populaire et si
vénéré denosjours.Cependantlecnlte, ou laculturedu mû-
rier, est suivi avec moins de ferveur et est menacé d'aban-
don, Uuilla persistance des maladies des vers àsoie, l'insucoës
des éducations ontjcté de découragement dans les pays séri-
cicoles. Il n'y a pas vingt ans, même dans les montagnes,
le moindre coin de terre, une aiifractuosité de rocher étaient
utilisés, et un mûrier était planté, cultivé, élevé, et pros-
pérait dans la plus petite place ; aujourd'hui on a des pré-
férences pour la vigne, et l'agriculture de nos contrées
cévenoles semble tendre à se modifier profondément.
Amouro, *. f. Mûre, fruit du mûrier et de la ronce. —
Celle du mûrier blanc est blanche, douceâtre, fastidieuse ;
les porcs en sont friands ; mais elle est rare, parce qu'on
la fait tomber avant sa maturité en cueillant la feuille.
Elle ne mûrit que sur quelques arbres qui restent sans être
dépouillés. — L' amouro d'aroume , la mûre de la grande
ronce; l'amouro dé bariat, la mûre de buisson : elle vient
presque par grappes, noire et douce ; l'amouro dé damt,
la mûre de la ronce rampante, qui croit dans les champs :
elle est aigrelette et agréable au goût.
Étym. du lat. Uorum, mûre, dér. du gr. à^uivpit, sombre,
noir.
Amoaroiis, oaso, adj. Mollet, souple, moelleux ; doux ;
aimable. En lang. l'acception de : Amoureux, qui a de
l'amour, ne vient que par imitation du fr. — Amouroùt
eoumo un bartas, par contre-vérité, doux comme an fagot
d'épines.
Amoarousl , o. Rendre souple, ramollir ; assouplir ;
adoucir. — Dé part amourouti, du pain ramolli par l'ba-
midité.
Dér. de Amouroùi.
Amoartl, «. Amortir; calmer; éteindre; enlever la
4«
Mi
^m
vivacité, l'ardonr, la violence; reodre plus faible. —
Àmourti un co, affaiblir, amortir la portée d'un coup. La
bulo s'amourligué sus soun mantèl, la b,llle ne put tra-
verser son manteau, elle fU balle-morte. Amourii soun co,
appesantir un coup de hache ou de houe sans tirer à soi la
terre ou l't'clal de bois.
Diir. du Mort.
Âmourtièïra, v. Garnir de mortier, fixer avec du mor-
tier. — Bien amourliiira, âmourtièïra à pérpàou uno bas-
tisso, en)j)loyer sudisainment do mortier, noyer convena-
blement les moellons dans le mortier, de manière à ne pas
laisser des vides dans les joints.
Dér. de Slourliè.
Âmoussa, v. Eteindre; calmer; maler; réduire au
silence, faire taire. — Amoussa lou fid, lou lun, éteindre
le feu, la lampe. Fasiê bi dé soun crano, mais Vaguer» lèou
amoussa, il faisait le crâne, mais j'eus bientôt rabattu sou
caquet.
Dér. de l'it. Amorsare.
Âmoustéll (s'), V. Maigrir; devenir fluet; prendre un
visage pointu comme une belette.
Dér. de Moustèlo.
Amoutéli, ido, adj. Grumelé; foriqé en grumeaux, ep
caillots.
Dér. de iloutél.
Amoutà, ido, adj. Gazonné; devenu herbeux; tallé. —
Se dit d'un pré qui est assez foulé, tassé, pour pouvoir Être
lirrosë.
Dér. de Mouto.
Amusa, u. Amuser, divertir; occuper an jouant; faire
prendre le change ; tenir le bec dans l'eau ; ' distraire quel-
qu'un pour l'empêcher de voir clair à ce qui se passe.
Dér. de l'allem. Musen, être oisif.
Amusamén, s. m. Amusement ; cp qui amuse; passe;
temps; action de tympanisor quelqu'un. — ; Fâou paf
préne a(juù en amusamén, il^ne faut ,p^ h prendre en
plaisanterie.
Amusan, anto, qdj. Amusant, divertissant ; qui fait
passer le temps.
Amuséto, J. f. Jouet; bagatelle. — Saïqueméprénespér
toun amusHo? tu veux sans doute faire de moi ton jouet 4
An, suffixe qui provient du lat. anus. anum.
Notre langue doit beaucoup au latïn : elle lui a pris dos
inots et presque toutes les désinences qui s'ajoutent au^
radicaux pour constituer des mots. Mais le celtique, qui
fut son élément natif, lui a laissé a\issi certaines de s?s
formes, d^ ses inlonatiops, 4e ses constructions. Nous aurons
plus d'une occasion de signaler cette fusion des deux languesi
leur existence parallèle, et de suivre à ces" lueurs la marché
qui les a fait arrivera notre languedocien moderne; surtout
dans les suffixes, ces syllabes accessoires qui s'attachent
à un radical pour en étendre et en modifier le sens; et.dans
les noms propres de lieu, toujours significatifs ,' plus
inaltérables qu'aucun autre qaot. — Yoy], Agno.
Pour adjectivcr un substantif, pour marquer le rapport
d'une personne ou d'une chose à l'objet auquel elle appar-
tient ou dont elle dérive ou fait partie, les Gaulois se ser-
vaient de la terminaison ac ou ec ajoutée au mot ; les lan-
gues néo-celtiques, le bas-breton et l'armoricain ont
conservé cette forme. Rome victorieuse , en iiuposant sa
langue à nos contrées méridionales, les premières soumises,
et à toute la Gaule, n'abolit jias ceppudant l'idiome national.
Elle avait surtout à respecter les aiipollations locales, sous
peine de ne pouvoir plus ni s'entendre ni se reconnaître ;
mais, par droit de conquête, elle leur imprima le cachet
propre de son génie. Sa formule générale était dans le?
finales us et um avec la même portée que ac et ec; mais
elle avait plus particulièrement anus et anum, d'une iden?
tité très-rapprochée. Ainsi commença à se latiniser le gau,T
lois. Dans la catégorie que nous étudions, un nom ou un
mot se rencontrait-il en même temps dans les deux idiomes,
de signification et de structure pareilles, la terminaison
caractéristique latine était jointe i sa finale locale, par luitJ
sorte de pléonasme de suffixes ; était-il purement celtique,
à radical barbare, sans correspondant latin, on le traduisait,
ou bien le vainqueur se l'appropriait par l'addition du suf-
fixe, à lui propre, en anus et anum. Les mômes procédés
de formation et de composition des noms comnmns et des
noms propres persistèrent tant que dura le contact et la
promiscuité des deux langues. C'est pour cela que l'emploi
de l'une ou de l'autre de ces formes ne détermine ni l'âge
ni la date d'un mot, non plus que d'une dénomination
locale. Mais par là aussi se compremient assez bien le^
variantes qui s'attaquent à la finale en laissant partout invar
riable le corps même des mots. On trouve, dans le Midi,
la désinence ac, abrégée pour nous en a simple, ailleurs
changée en at, qui représente le celt. ac ou ec, en lat. acuf
cl acum, à. côté d'une localité à finale en an. altération de
anu,s et anum, analogue aux précédentes. Ici encore cette
dernière finale est souvent reproduite par anicœ. dériva-
tion directe ; et la langue vulgaire, au moyon-âge, traduij-
sait en anègues, doux notre languedocien a fini par faire
qrflue, pans le nord de la Gaule, le latin ayait aussi ses
finales constantes en acuni et anum ; nvjis le roman et le
français leur ont substitué des finales en e, y, ies, etc. Oif
en conclut avec raison que tous ces suffixes sont de môme
valeur et égaux entre eux. — Yoy. l'art. Agno, et ppur
les çxejnples, Iç^ Ba,ots Jf<(ir<j^a,^Jf^r%nar3ues, S4oi*y
vagna. et autres. , , ,,,■■/
Le suffixe an = anus, anum, = ac. ec, == acus, acnm,
marquç une idée de collectivité, de provenance, de pro-
priété. Lou fédan, lou pian, lou fémélan, lou mioulan sont
4es substantifs col^ecliJ's pour dire : les brebis, les fillt^
}es femmes, Iç^. b^te^ de Irai^ et de soinrae, en général,
Comme expression 'du sens de propriété, toutes lesvariantes
5je reproduisent flans beaucoup do noflis de lieu. -— Yojfj
Martignargue, Massïarguo, Pâouia, Sdouvagna . Qlo„
Lédignan, Poumpignan, et autres.
ANC
AND
47
Ad, s. m. An, année. — L'an dé dai-ldi, l'aïuiéc avant-
derniôre ; il y a deux anâ. Anlau, l'an dernier. — V.c. m.
Ùavah antan , il y a deux ans. HiuSi fui un an, aujour-
d'hui il y a un an. Couménço sous ans pér calémlos, il
COniptc ses anniîcs à partir de la .Noël. L'an ddou bissés,
l'année bisscxlile. — Voy. Bissés.
D6r. du lat. Ânnus.
An, 3""' pers. plur. indic. prés, du verbe Àvédre; ils ou
elles ont.
Ana, V. Aller; marcher; avancer; se mouvoir; se trans-
porter d'un lieu dans un autre ; changer de place du point
où l'on est i un autre ; s'étendre an loin ; être contenu,
renfermé ; entrer. — Vùou à la mésso, je vais à la messe.
Vas à Paris, tu Vas à Paris. Va» vite, il marche vite. Anén
plan, allons lentement. Anas-y, allez-y. Anérou dou mazé,
ils allèrent à la campagne. Y-anan ana, nous y allons \
l'instant, nous nous y rendons sur l'heure. Faï pas gu'ana
et Déni, il ne fait qu'aller et venir. Vaï d'aïcl dou pn foun,
il s'étend d'ici au fond. Vai bas, il plonge profondément.
tout aqud anara pas dinc aquél sa, tout cela n'entrera pas
dans ce sac, ne peut être contenu dans ce sac. Aquélo rolo
txiV pas, vai mdou, ce rouage ne marche pas, manœuvre
mal.
S'ih-aha. S'en aller; partir; disparaître; quitter lui lieU;
et quelquefois simplement aller. — La taquo s'és in-anado,
la tache a disparu. La couloù s'én-vaï, la couleur s'clTace,
se ternit. On dit d'un malade : S'én-vaï tant que po, il
dépérit à vue-d'œil, il marche à grands pa4 vers la fosse.
Lou ta s'én-vaï en aïgo, le lait tourne en petit-lait. On dit
d'Un domestique à gages : s'én-vai, il quitte ses maîtres ou
il est renvoyé. Lou fia s'én-vaï, le feu s'éteint faute d'ali-
ment. Aquél éfan couménço à s'én-aha soulé, cet enfant
commence à aller, h marcher seul. Tout soun bon-sén s'és
én-ana, tout son bon sons est parti. Coumo n'én-van lout
o/"a'»rej ? comment vont les affaires? Coumo n'én-vàiT quelle
tournure cela prend-il ?
D6r. de l'ital. Andare.
Ana, s. m. Manière d'être, de vivre; étal de santé. —
Aqud's soun ana, c'est sa manière d'être ou de faire. Mé
démundè moun ana, il me demanda des nouvelles de ma
santé. — On dit aussi subsl. faï l'ana et lou véni, il fait
l'aller et le retour ; lou vai et lou vèn, le va-et-vient.
Anchoïo, s. f. Anchois; Clapea encrasicholus , Linn.
Petit poisson do mer, sans écaille , que l'on sale pour man-
ger cm. Il ne faut pas confondre Vanchoïo avec la sardo,
qui n'a rien de commun avec la première que la saumure.
' — A lous mis bourdas d'anchoïo, il a les yeux rouges,
diassieux et éraillés. Esquickas coumo d'ancho'ios, pressés
comme harengs.
Étym. du cclt. Anchova.
Ancien, èno, aJj. Vieux, vieillard; ci-devant, ancien.
— Moun ancien, mon père ou mon aïeul. Es vn ancien,
c'est nn vieillard.
Emprunté an fr.
Anciènéta, s. f. Mode ancienne, et non ancienneté ou
antiquité.
Foririé de Ancien.
Ancro, ». f. Encré, liqueur noire pour écrire. — M4 fat
sùsa l'ancro, il me donne une peine horrible.
Dér. de l'ital. Inchiostro.
Ancro, t. f. Ancre de navire, instrument de fer, i bran-
chi?s aiguës, qu'on jette an fond de l'ean pour arrêter les
vaisseaux.
Dit. du lat. Anckora.
André, n. pr. m.; au féin. Andrèïo. Dim. m. Andréné.
Andrissé; dim. f. AndrSiélo, Andrènito. — H est &
remarquer que te fém. Andrè'io ne se donne qu'à la femme
d'André, et non point pour prénom à une fille. On appelle
Andréïéto ou Andrènéto la fille ainée d'André, lorsque
celui-ci est On nom patronymique.
Andrion (Sent-), n. pr. de lieu. Saint- André : nom
connnun à plusieurs villages.
Andronno, i. f. Cul-de-sac; plus particulièrement la
petite ruelle, ou espace vide, qu'on est obligé de laisser
entre deux maisons qui ne veulent pas de mitoyenneté, et
par où s'écoulent les eanx des toits. C'est ce qu'on appelle
en termes de coutume : le tour ou le pied de l'échelle. Oii
lui donne aussi le sens de : latrines, privé, lieux d'aisance.
Dans cette acception, étym. du grec ivSpùv, lieu écarté,
petite salle réservée aux hommes, qui est traduit aujour-
d'hui dans les gares de chemin de fer par : Côté des hommes,
même sign. Dans la bass. lat., Androna.
Andusén, énquo, adj. D'Anduze ; qui habite on qui con-
cerne Anduzc.
Anduso, s. f. n. pr. Anduzc, ville du département du
Gard. — Si l'on voulait se contenter de la forme latine de
ce mot pour expliquer sa dérivation et sa forme actuelle,
rien ne serait plus simple que de rapprocher du lat. Anda-
tia, le fr. Anduze, et le lang. Anduso, et l'analogie démon-
trerait seule la parenté et la descendance en ligne directe.
Le mot, quoique venant de loin, n'a pas assez changé sor
la route pour n'être pas d'abord reconnu. Sur un petit
monument en marbre, conservé au musée de Mmcs, se
trouve inscrit à la tête d'un groupe de plusieurs noms de
localités gallo-romaines, le nom à' Andusia, sur l'attribu-
tion duquel à l'Anduze moderne aucune contestation ne
s'est élevée. Depuis cette époque, le nom est fidèlement
reproduit par les plus anciens cartullaircs , et presque
sans altération il est arrivé jusqu'à nous. Ix;s Romains
avaient donc un poste militaire, un campement d'une
certaine importance qu'ils appelèrent Andusia, sur l'empla-
cement de la ville actuelle, on un peu an-dessus vers le
sommet dit de Saint-Julien : d'anciennes constructions,
des médailles et des antiquités trouvées sur ce point
ajoutent à la dénomination elle-même la certitude de l'occu-
pation.
Mais la difficulté étymologi(ine n'est pas résolue. Les
vainqueurs de la Gaule se montraient surtout jaloux d'im-
48
ANE
ANI
poser aux noms de lieux des pays soumis la forme qui con-
venait au génie de leur langue : do \^ celte terminaison
latine qu'ils donnèrent à ce mot. Or, la localilt;, comme
toutes les autres inscrites sur le monument antique du
Musftp, faisait partie du territoire des Volces An'ioomiquos,
qui avait des villes ou des bourgs assez nombreux. Par con-
séquent, elle avait aussi, comme les autres, son nom gau-
lois ou celtique, quand les Romains vinrent l'occuper et
la classer : et c'est dans le plus ancien idiome national que
sa racine doit se retrouver.
Heureusement ici se rencontrent des similaires qui peu-
vent mettre sur la voie, et faire déterminer sa forme pri-
mitive. Sur deux autels votifs découverts dans le Midi, et
qui portent des inscriptions, on lit : Andosso et Andose;
une autre inscription, remarquable par ses noms gaulois,
mentionne également la forme Andos. Enfin, un cippe
funéraire du Musée de Nimes rappelle encore mieux le
nom latinisé, en écrivant : Andus. Ce ne sont là, sans
doute, que des rapprochements, dos termes de comparaison ;
mais ils permettent d'admettre avec la plus grande proba-
bilité que la forme celtique d'jlnf/us/a al Andos o\i Andus.
Le premier radical and, haut, élevé, se retrouve avec cette
même signification dans beaucoup de langues anciennes.
La désinence os et «j serait réduplioative avec le même
sens. Les deux montagnes d'Anduze, entre lesquelles coule
le Gardon, l'emplacement de la ville, nous paraissent auto-
riser parfaitement cette étymologie et lui donner une signi-
fication caractéristique. L'origine antique du nom et son
application ne peuvent pas être douteuses.
Anédo, s. f. — Voy. Alédro.
Anèl, s. m. Anneau, bagne, boucle d'oreille.
Sén-Jan-das-Anèh, n.pr. Saint-Jean-de-Marvéjols, com-
mune de l'arrondissement d'Alais, canton de Barjac. On
l'appelle aussi : Saint-Jean-des-Anneaux, parce qu'autrefois
on y fabriquait quantité de bagues de crin, qui étaient un
des principaux objets de commerce à la foire qui s'y tient
le 29 août.
Dér. du lat. Anellus, dim. de annulus.
Anéla, v. Boucler; anneler; tourner en volute. — On
dit proverbialement d'un homme qu'on ne peut décider à
terminer une affaire : A lou màou dé la qud d'un por,
anèlo toujour et Jamaï noun nouso, il est comme la queue
d'un porc qui s'entortille et ne se noue jamais.
Dér. de Anèl.
Anèlo, j. f. Anneau de rideau ; virole de tonte sorte
d'outils. — Anèlo dé pèout, boucle de cheveux.
Dér. du lat. Anellus.
Anéqnéll (s'), ». S'exténuer, s'amaigrir de faim, de
froid, de manque de soins ; devenir à rien.
Dér. du lat. Nihil, ou de née alere, nec alitus.
Anén, ^" pers. plur. impér, du v. Ana. Allons. Se prend
souvent comme interjection. — Anén à la fon, allons à la
fontaine, .inén.c/tu, allons! silence. ^Ins'n/ xou.' pirvétre,
idiotisme : fa! voyons donc ! Anén/ vendra pas, il ne viendra
pas; il faut en prendre son parti. Anén/ moun home, ou
fas bii)n, c'est cola, mon garç m, tu le fais bien.
Anfèr, *. m. Enfer; lieu où les damnés éprouvent un
supplice éternel; diable, diablotin; fosse d'un pressoir \
huile, où l'on fait écouler les eaux de la cuve, après en
avoir enlevé l'huile à la surface. Ces eaux ainsi rejetées
contiennent encore do l'huile, que les employés du moulin
recueillent quand elles sont repjs^es ; mais cette huile der-
nière est toujours plus ôpaiss?, plus chargée et de qualité
inférieure; on l'appelle : OH d'an/èr.
Dér. du lat. Inferi.
Anfln, alv. Enfin ; à la fin, en dernier lien.
Formé du lat. In fine.
Anfla, t) Donner, appliquer un soufflet ; souffleter.
Dér. du lat. Iri[i;gsre, appliquer, frapper violemment; ou
peut-être de inflare, faire enfler, grossir, parce qu'un souf-
flet très-fort fait enfler la joue.
Anfle , t. m. Soufflet sur la joue.
Angle, s. m. Angle, ouverture de deux lignes qui se
rencontrent ; coin, recoin. — Angle dé ro, couches et veines
de terre végétale qui se trouvent dans les diverses assises
d'un rocher.
Dér. du lat. Angulus.
Angles, s. m. Créancier ficheux, importun. — L'origine
de ce mot vient évidemment d'un temps où, en France,
on ne connaissait pas de rencontre ou do vue plus déplai-
sante que celle d'un Anglais, maitre du territoire.
Angles, éso, adj. Anglais, anglaise, qui est d'Angle-
terre.
Angléso, s. f. Redingote, dont la forme et la coupe ont
été importées sans doute d'Angleterre.
Anguièlén, énquo, adj. Qui tient de la forme et de la
naturjde l'anguille. — Se dit au prop. et au fig. de quel-
qu'un ou de quelque chose, long et menu, qui échappe
facilement , qui glisse en se tordant, qu'on ne peut saisir.
Dér. de Anguièlo.
Angnièlo, s. f. Anguille, lUurœna anguilla, Linn. Pois-
son, de la famille des Pantoptères et de l'ordre des Holo-
branches, qui habite non-seulement la mer, mais les lacs,
les étangs, les rivières et les ruisseaux.
Dér. du gr. fyysXu; , d'où le lat. anguilla, ou de
anguis.
Anlmâon, àondo, adj. Péjor. Anim&oudas. Grosse bête;
grossier, brutal. — Alimâou n'est que la corruption de ce
mot, et il ne s'emploie que par interjection. — V. c. m.
Dér. du lat. Animal.
Anls, s. m. Anis, Pimplnella anisum, Linn., delafamille
des Ombellifères. Plante aromatique originaire d'Egypte,
dont la graine est une des semences chaudes. — Le»
semences, plutôt que la plante elle-même, sont ainsi
nommées.
Dér. du gr. Svmow.
Anisèto, ». f.. on mieux Nisèto. Anisette, eaa-de-ris
anisée. — C'est l'absinthe des gens du peuple. Étendue d'eau.
ANN
ANU
4»
elle est exlrêmcment rafraichissanle cl désaltère beaucoup.
— Voy. Kisèto.
Dér. (le Anis.
Anisses, s. m. pi. Laine ou poil d'agneau, qui sert à
faire les chaiwaux de feutre les plus grossiers, qu'on nomme
cha|XMu\ de laine.
Dér. (lu lat. Agni, gi^n. d'agnus.
Anitor, 5. m. Crosson des jardins, cresson alënois, nasi-
tort; Lepiilium salivum, Linn. Plante do la famille des
Crucifères, iwtagère, qu'on met daus le bouillon et dont
on mélange la salade de laitue.
Corr. du fr. Naiitori , peut-être aussi dér. d'Anh, dont
il a un i^u la saveur.
Anje, ou mieux Anjon, ». m. Dim. Anjouné. Ange,
créature spirituelle d'un ordre sup<'!rieuràriiumanité. Petit
ange, se dit souvent des petits enfants. — Anjou boufaril,
c'est une de ces tôtes d'ange, sans corps, avec des ailes,
qu'on trouve dans les tableaux et dans l'architecture
d'église, toujours Ixiuilies et qui semblent souffler, comme
les têtes de vent qui viennent du paganisme. On dit d'un
enfant joufflu et vermeil : Sembla un anjou boufarèl, et
d'un joueur qui a tout perdu et se retire de la partie, nu
et déjwuillé : Anara coucha émbé lous anjout.
Dér. du lat. Angélus.
Anjèlus, s. m. Angélus, prière que les catholiques fon*
en l'honneur de la sainte Vierge, le matin, à midi et le
soir. Désigne aussi le point du jour et la nuit tombante ;
la sonnerie qui .innonce l'heure de cette prière.
Dér. du lat. Angélus.
Anjou, s. m. — Voy. Anje.
Anjouné, ». m. — Voy. Anjt.
Anjounén, énqno, adj. Angélique, qui tient de l'ange,
qui appartient ou qui est propre à l'ange.
Dér. de Anjou.
Annadiè, dièïro, adj. Qui n'est pas pareil, qui ne pro-
duit pas également ch.ique année ; casuel. — L'ouliviè es
bien annadiè, l'olivier ne produit p<is tous les ans, il est
soumis k bien des éventualités. — Dans le même sens, on
dit d'un homme d'humeur inégale, qu'es joumàii, il est
journalier.
Dér. de Annado.
Annado, ». f. Année; annuité. — Ce mot n'est pas
employé comme synonyme de an pour le comput du temps,
mais simplement pour l'ensemble des récoltes de l'année. —
Aourén uno bono annado dé bla, nous aurons cette année
une bonne récolte de blé. L'annado dàou fanfaroù, fou
péïsan béguè prou ; celle phrase proverbiale, empruntée à
la sagesse des anciens, signifie que lorsqu'il y a abondance
de fanfaroùs au printemps, il y aura une bonne récolte
de vin. fy'oy. FanfaroiiJ. L'annado se présenta bien, il y
a bonne apparence de récolte cette année.
La bono annado, la bonne année ; souhaits du premier
jour de l'an, dont le protocole est : Vous souhète la bono
annada, acoumpagnado dé fosso d'àoulros. La plupart du
I
temps on supprime cette finale, et l'on dit simplement : La
bono annado acoumpagnado.
Dér. du lat. .innus.
Anno, s. f. n. pr. Dim. Annélo, Kanoun, Kanéto. Anne,
Annette, n. pr. do femme.
Anoonça, v. Annoncer, faire savoir; publier; pronos-
tiquer, présager. — S'anounçabièn, se produire avec avan-
tage; s'exprimer avec facilité et élégance.
Em|>riinlé du fr.
Anonncies, ». m. pt. Bans de mariage; publication de
mariage. — An erida sous anouneits , on a publié ses bans.
Dér. du lat. Nuntiare.
Anqnado, s. f. Fessée ; claques; coups de la main sur
le derrière. — Ficha uno anquaJo, donner une fessée ; fouet-
ter avec la main sur les fesses. Cette expression n'est usi-
tée qu'à rencontre d'un enfant.
Dér. de Anquo.
Anquo, ». f. Au sing. Fesse; au plur. Lat anquos sont
les hanches, partie latérale du bassin située au haut de la
cuisse.
Dér. de la bass. lat. Anca, m. sign., ou du gr. itp^y,
angle saillant.
Ansin, adv., ou Énsin, Énsindo. Ainsi, de cette ma-
nière, de celte façon; c'est pourquoi, de même. — Pir
ansin, par conséquent, partant. — Aquà's pas ansin qu4
fôau faire, ce n'est )as la manière de faire cela. Ansin
siigue, ainsi soit-il. Crise que siis un pàou ansin, je crois
que tu rêves, que tu radotes : euphémisme délicat.
Dér. du lat. In et sic.
Antan, adv. L'an dernier; autrefois, jadis, ancienne-
ment. — En vieux fr., on disait antan, comme on le voit
par ce dicton encore admis : Je m'en soucie comme des
neiges à'antan. — Davan-antcm, adv. L'année avant-der-
nière. Mas amours d'antan, mes vieilles amours.
Dér. du lat. Antè annum.
Antièno, ». f. Antienne; mauvaise nouvelle, commis-
sion fâcheuse ; demande pénible. — Paurta l'anlièno, faire
une commission désagréable pour celui à qui elle s'adresse;
solliciter.
Empr. au fr.
Antifo (Batre 1') , v. Battre la campagne, courir les
champs. — Phr. faite, mol d'argot français.
Antignargne, ». m. n. pr. de lien. Antignargues, ha-
meau dépendant de la commune d'Aigremont, canton de
Lédignan, arrondissement d'Alais. En lat. Antinhanica et
Entrinnanicœ : roman , Entrinnaniguts.
Dér. du cclt. Ant, and, anti, devant, en avant; avec la
désinence lat. anica, transformée par la langue vulgaire
en anègues et argues. — Voy. Argue. Ses analogues se
retrouvent dans Antignac (Hérault, Cantal, Haute-Garonne):
dans Antignate (Lombardo-Vénétie) ; dans Antigni ou Anti-
gny (Vienne, Vendée, Côte-d'Or), et dans Antin (Hautes-
Pyrénées).
Annïa ou Anuèja, v. Ennuyer, causer de l'ennoi; fati-
1
50
AOU
AOU
guer. — Tout aquà m'anuïo , tout cela m'ennuie, me
fatigue.
Anoïa (s'), v. S'ennuyer, languir d'ennui; perdre le
goût d'une chose dont on a usé longtemps.
Dér. du gr. ëvvoia, tension d'esprit, application forcée.
Anuè, adv. — Voy. Agnttè.
Annècha (s'), v. — Yoy. Agnuècka fs'J.
Aou, particule et art. sing. masc. au datif. Au. Il est
la contraction de à lou pour former le datif. Aou s'emploie
quand le subst. auquel il s'applique, commence par une
consonne. Au plur. datif, il fait eu, contraction de
à tout, aux; comme le dat. sing. fém. à la, donne o
las, aux, pluriel. — Aou puple, au peuple, as puples,
aux peuples ; à la fénno, à la femme , à las fénnos , aux
femmes.
La chute de 1'^ du radical primitif al a produit la con-
traction dou, dipht., qui se prononce par une seule émis-
sion de voix, et dont la première voyelle est tonique pa r
l'accent circonflexe. Ce qui motiverait assez bien, au moins
pour l'article, la manière d'écrire que nous préférons . —
Foy. M.
Mais cette forme, qui est également appliquée aux
voyelles e, i, o, alors qu'elles deviennent aussi diphthon-
gues par l'adjonction de la consonnance ou, a été l'objet de
vives critiques. Avant de justifier des motifs qui nous font
rester réfractaire aux réformes en vogue, qu'il nous soit
permis de présenter, in limine litis, un exposé de quelques
principes généraux sur la matière, préliminaire indispen-
sable de toute discussion.
Notre Dictionnaire, par droit de naissance, avait son
orthographe toute faite dans la nomenclature dressée par
La Fare-Alais. Ce catalogue, patiemment élaboré sous le
contrôle d'une critique que l'intimité rendait plus rigou-
reuse parce qu'elle était plus libre et plus familière, n'avait
pas seulement en vue de relever un à un tous les mots de
notre dialecte, de juger de leurs droits à l'admission ou de
prononcer leur rejet définitif. Il avait encore fallu, pour
les enregistrer dans un ordre régulier, déterminer exacte-
ment la forme et la structure de chacun : leur classement
posait donc les bases de notre méthode orthographique. Le
savoir du maître et son goût éprouvés donnaient à ce pre-
mier travail une irrécusable sanction. Nous pouvons dire
cependant que cette nomenclature nous était imposée
moins par déférence pour son autorité, que par une con-
viction réfléchie de suivre, en l'adoptant, la système le
plus clair, le plus rationnel et le meilleur.
Avec une langue comme la notre, qui n'a ni alphabet
propre, ni règles précises, ni syntaxe bien arrêtée ; qui est
beaucoup parlée sans avoir presque de prose écrite ; qui
ne s'est produite an dehors que par une merveilleuse poésie
partout chantée; mais qui veut se faire lire et comprendre,
■et qui mérite d'être étudiée ; un dictionnaire n'a qu'une
voie à prendre, celle qui rapproche autant que possible
récriture de la prononciation. Par cela que, dans notre
idiome essentiellement musical et euphonique, le sens d'un
mot dépend le plus souvent du son qui lui est imprimé en
parlant, il est nécessaire que la lettre écrite soit la pein-
ture de la voix entendue. Chaque terme, chaque syllabe,
figurés par les signes convenus et usuels, doivent se pré-
senter avec un relief tel qu'ils puissent d'abord être ôpelés
sans hésitation, puis liés régulièrement, enfin prononcés
comme l'usage demande et vent qu'ils soient articulés.
Saisir rapidement l'œil, la voix et l'oreille pour arriver par
le plus court chemin à l'intelligence, c'est le but que se
propose notre Lexique. L'orthographe phonétique est donc
la seule que comporte notre idiome : voilà le principe.
Seulement la règle est dans la mesure et ne peut se sou-
tenir que par des tempéraments. Une rigidité absolue n'a
rien-de pratique dans les conditions de l'idiome méridional;
et l'éclectisme large et simple que les Castagnados ont for-
mulé, lui convient mieux de tous points. Certes, si nous
avions à mettre en œuvre les richesses enfouies de l'an-
cienne langue d'Oc , avec ce trésor-là, et en dépit des acces-
sions nouvelles que le temps et les mœurs nous ont impo-
sées, nous n'aurions pas hésité à relever le vieux pavillon,
à proclamer une syntaxe et une orthographe spéciales, à
arborer des principes radicaux et inflexibles. Mais nous
n'en sommes pas à avoir une langue-maitresse et, comme
on dit, suijuris; nous ne sommes plus le roman. Il n'y a
pas d'illusion patriotique à se faire : notre idiome s'est
transformé ; sa configuration doit se ressentir du change-
ment, s'il y a progrès. Soit que, remontant aux mômes
origines, le français et le languedocien aient gardé l'em-
preinte de leurs éléments primitifs ; soit que l'action des
mêmes influences ait agi sur eux d'une manière presque
identique au moment de leur seconde formation, dans leur
passage du roman au langage actuel; soit que, par le
contact forcé, des infiltrations aient pénétré de l'un dans
l'autre ; le fait certain est que bien des mots se retrouvent
dans les deux langues, sans qu'il soit toujours facile de
reconnaître à laquelle appartient la primauté de composi-
tion, ou si la greffe n'a pas une date contemporaine. Celte
catégorie de vocables ne saurait manquer d'engendrer cer-
taines conformités d'orthographe. Il s'en rencontre d'autres
que l'usage a mis dans la circulation, qui se sont natura-
lisés et qui ont actjuis droit de cité. Si nous voulons un
Dictiomiaire complet, nous devrons leur faire place.
Cet état de choses était de nature à mitigcr notre rigo-
risme. Sauvages, il y a cent ans, avait déjà été amené à
faire des concessions. Nous avons une instinctive antipa-
thie, égale au moins à la sienne, pour les travestissements
à la française de nos techniques ; mais la crainte de nous
confondre avec le français nous préoccupe moins. Surtout
le désir de donner à notre langue originale une physio-
nomie plus originale encore, ne nous conduira pas à défi-
gurer certains mots, au point de dérouter l'œil le plus
exercé, ni à compliquer certaines liaisons de syllabes par
l'introduction de lettres parasites ou biz^-res, pour la seule
AOU
AOtt^
«elisfactlon de ne pas créer des ressemblances graphiques,
quand il y a au fond analogie de provenance et de consan-
gainitc.
Si, avec Sauvages, nous reconnaissons que toutes les
lettres doivent être prononcées, encore faut-il, croyons-
nous, n'écrire que colles qui se prononcent, qui sont suffi-
santes, de par l'alplinliet, à constituer le son juste. En tout
ce qui ne lilesse pas le génie de la langue, il n'y a pas péril
ft se montrer facile, et nous indiquons comme exemple la
dipht. ai. — Voy. Ai.
Mais à.part cotte exception, c'est toujours la prononcia-
tion vers laquelle converge notre orthographe et qui loi
sert de guide.
Nous entendons les docteurs és-grammaire s'écrier :
mais les étyniologies que vous sacrifiez avec votre sys-
tème phonographiqne ! mais les homonymies qui vont
pulluler, semer partout la confusion et nous précipiter
dans le chaos ! Nous tomlx)ns dans l'abomination de la
désolation prédite par Ch. Nodier.
Ces anathèiiies no seraientjias effrayants, ni ces griefs
très-sérieux, n'étaient le pédantisme et le paradoxe qui les
ont parfois éloquemment enflés ; mais que les timorés se
rassurent.
La part des étymologies est largement faite dans notre
lexique; au-dessous de chaque vocable est, autant que
possible, plact5e sa dérivation. Les lettres étymologiques
savantes ne disparaissent-elles pas on parlant? Pourquoi en
surcharger le mot écrit? Ne serait-ce pas le plus sur moyen
de le rendre inintelligible à la lecture, introuvable à. la
recherche la plus obstinée, et d'en fausser l'épellation ?
Dans les cas si fréquents d'apocope et d'aphérèze, de syn-
cope et de métathèse, de mutation, de transposition, d'ad-
dition ou de suppression de voyelles et de consonnes, quel
serait le parti à prendre pour éviter le barbarisme en écri-
ture ou la cacophonie dans la parole? Les savants auraient
bien fait de commencer par résoudre ces difficultés.
Quant aux homonymies, avec une orthographe pure-
ment phonique, elles existent au môme degré dans l'écri-
ture comme dans la prononciation , pour la vue et pour
l'ouïe. Eh bien! après? Dans le langage parlé quelle est la
confusion possible? Dans la phrase écrite d'où peut nnitre
l'incertitude ou l'obscurité? Avec notre méthode d'accents
et de tréma, il n'y a pas de mot absolument homographe.
Sur les mômes lettres, la notation donne le sens; tonte
amphibologie est prévenue par l'accent. 11 n'y a, pour s'en
convaincre, qu'à le voir fonctionner, par exemple, dans
babo et babd, béou et bèou, coulou et cou/où, tén et tèn,
vin et vèn, fto et fia, léngado et léngadà, etc., etc. — Voy.
au mot Acén.
Là est, en effet, le point capital. L'accentuation est le
vrai génie de la langue d'Oc. C'est par l'accent que se
module la gamme harmonique de sa vocalisation ; l'accent
qui marque la tonalité de ses cadences brèves ou longues,
sonores ou muettes : il est l'àme de notre langue.
Comme disait le maître, notre idiome c vocalise platàt
qu'il n'articule. > Sa parole est une musique et une mé-
lopée : il ne faut pas l'oublier. .Mais son chant, si doux à
l'oreille, a pour se traduire aux yeux une notation : poor
son parler écrit, cette notation est l'alphabet.
La langue d'Oc n'a pas un instrument fait exprès pour
elle ; elle a partagé avec la langue d'Oil l'usage de l'aa-
cien alplialiet latin ; les mômes combinaisons de signes
produisent à peu près les mêmes effets. Nous no voyons,
pour notre ])art, aucun mal à ce qu'elle s'empare et se
serve d'un bien qui lui appartenait un peu aussi ; n'eùt-
elle même pas été la première à le posséder. Aujourd'hui
c'est peut-être pour elle la seule condition possible de
vivre, de se faire comprendre et étudier, de se ré|)andre
par le monde et d'y faire figure. Elle a donc sagement agi
d'en adopter les formes ; elle a fait mieux encore de suivre
son mouvement, de mettre à profit sa valeur et ses perfec-
tionnements. Quel regret aurait-elle de cette communauté,
si les caractères de l'alphalMt français en usage peuvent
représenter tous les sons languedociens et reproduire fidè-
lement sa prononciation ? 11 sera môme facile de prouver
qu'elle y a gagné d'exprimer certaine consonnance qui lui
était particuUère et qui n'existait pas en latin. — Voy.
lettre V.
Maintenant, à la question de notre article, que ces pré-
mices auront simplifiée. Comment faut-il écrire les diph-
thongues ou triphtbongues dans lesquelles se rencontre la
consonnance ouf Nous ne parlons que de la première
forme sur a ; les autres e, i, o viendront en leur lieu : elles
ont toutes d'ailleurs les mômes raisons d'être. — Voy. Eou.
diphth.
11 s'agit d'tine diphthongne, ce qui signifie une syllabe
unique composée de deux sons. La voyelle a, éclatante,
sonore, n'est pas en litige; mais comment doit être repré-
sentée la seconde, voyelle sourde et aphone?
Rien ne parait plus simple quo la réponse, s'il est bien
convenu, une fois pour toutes, que les mots doivent être
figurés tels que dans l'usage on les articule; que la pro-
nonciation doit être rendue de la manière la plus facile, la
plus perceptible au plus grand nombre ; qu'enfin le seul
véhicule connu et pratiqué doit ôtre l'alphabet français. Il
n'y a pas à vouloir se soustraire à cette loi do la nécessité,
ni à s'en humilier. Ce n'est point an tribut de vassalité
payé au français , mais le partage d'un héritage commun.
Que l'on s'en plaigne, à la bonne heure : ce peut ôtre un
agréable exercice d'esprit. Que l'on trouve une regrettable
imperfection à ne pouvoir exprimer chaque son simple par
un signe unique, et que, par exemple, dans la conjoncture,
l'abréviation grecque u (ou) qui ferait si bien , ne soit pas
admise chez nous; nous nous gardons d'y contredire. Mais
nous n'en serons pas moins tenus, quel que soit notre dia-
lecte, de nous servir de ce que nous avons et comme nous
l'avons ; et il faudra bien s'en contenter. Il semble donc
qu'il devrait suffire de savoir comment l'alphabet fran-
52
AOU
AOU
çais traduit en lettres le son qui se fait entendre nette-
ment, isolément, à la finale de notre diphthongue, pour
décider que la langue d'Oc doit l'écrire de même. Or, la
voix u est représentée par un seul caractère : la vocale ou
a besoin de deux signes, mais n'en est pas moins une : et
l'une et l'autre ont leur son spécifique, particulier. Nous
entendons et nous prononçons u et ou, voyelles, sans les
confondre ; écrivons donc et notons avec des signes diffé-
rents des sons distincts. L'orthographe vraie de la syllabe
sera donc dou.
La déttuclion est rigoureuse et logique. Elle avait frappé
sans doute Lien des auteurs et des plus recomniandables,
glossatcurs et poètes , qui professaient la nécessité d'écrire
comme on prononce, lorsque de notre temps on a essayé de
changer tout cela, non pas en attaquant le principe, mais
en imaginant une exception qui le renverse.
l'ne nouvelle école proclame que la voyelle « se pro-
nonce, en effet, toujours comme en français, hormis les
cas ou elle suit immédiatement une autre voyelle ; car alors
elle doit prendre le son ou; et il faut écrire au, eu, eu, tu,
du, diphthongues, et tau, iéu, ièu, iàu, triphthongues, au
lieu de àou, éou, èou, iou, ôou, et idou, iéou, iûou.
Voilà l'inéluctable Schibholeth en écriture, posé d'auto-
rité à l'entrée du cénacle, où nul ne pénètre sans sou-
mettre, au culte et à la pratique de ce symbole, son esprit,
sa foi et sa plume. C'est l'heureux commencement, le pivot
fondamental de l'unité orthographique des dialectes de la
langue d'Oc, ont décidé les puristes réformateurs.
Ce dogme, d'assez fraîche date, est soutenu à la vérité
par des hommes d'un incontestable talent, sinon par des
arguments bien solides ; mais il n'est pas si absolu qu'il ne
souffre des atténuations, ni si vrai qu'il ne se contredise
souvent lui-même. On lui a fait une histoire, ce qui donne
toujours un certain crédit ; il a trouvé des partisans, ce
qui ne manque jamais aux plus étranges doctrines. Ne
parlons pas des convertis du premier degré, qui longtemps
avaient écrit ces diphthongues comme ils les articulaient,
»ans doute avec la conscience de bien faire et la certitude
d'être compris, et qui depuis, illuminés par un rayon d'en-
hant, se corrigent eux-mêmes, et dans leur ferveur de néo-
phytes, affrontent le douloureux martyre de ne plus pou-
voir être lus. Ne relevons pas chez les adeptes du second
degré ces scrupules qui leur font admettre l'application du
système à la voyelle a, tandis qu'ils la rejettent pour les
autres. Les résipiscences conmie les divergences prouvent
ceci: que l'orthographe dou a eu et aura toujours sa raison
d'être, et qu'il n'est pas aussi sur que la réforme par au
puisse également bien justifier de la sienne.
Nous regardons cette prétendue innovation comme une
hérésie grammaticale de la plus grosse es{)èce. Elle mène
tout droit à la cacophonie, ce que notre langue redoute le
plus; elle introduit forcément l'exception dans l'exception,
ce qui est un danger et un signe de décomposition pour
B» idiome [ elle se met en révolte ouverte avec l'usage et
le sens commun, et finit par ne tenir aucun compte de»
lois de la liaison, du rapprochement, de la combinaison et
de la valeur des lettres.
Il est facile de poser en théorème que la voyelle u prend
le son ou, quand elle se trouve placée après une autre
voyelle ; mais rien n'est moins réfléchi, ni moins véritable.
U existe une famille nombreuse et très-intéressante de
mots dans lesquels l'euphonie caractéristique de Vu simple
ne peut pas disparaître. Nous ne tenons pas compte de
quelques noms propres, comme Esaii, Danaiis, Emmaiis,
Antinous, etc. ; mais Marins, si commun en Provence ;
mais Darius, Durius, Vius, etc., fréquents dans le Bas-
Languedoc, mais tant d'autres à désinence identique, qui
reviennent si souvent dans les traductions des anciens
auteurs, il n'est pas aussi commode de s'arranger avec eux
si l'on veut prononcer correctement et suivre les préceptes
des novateurs. De quel droit sacrifier encore cette classe
de substantifs communs, d'adjectifs et de participes, ter-
minés en aiu, èïu, èïun, ïun, aïur, ïur, ïus, ïuro, ïuso, etc.,
comme douréïu, oreillard ; béstiu, bestial ; caXHus, chétif ;
iscouhïun, balayures ; éscafouïun, écrasement ; aïul, aïeul ;
iuèl, œil ; maliuga, rompre ; méssius, messieurs ; hiuèt,
aujourd'hui; liuèn, loin; huiél, bourgeon, œil; s'aïuêncha,
s'éloigner ;6aïuérno, étincelle ; ;)ar£uro, gageure; cadiueisso,
cosse de pois; taïu ou aia:iu, bière, cercueil ; tfiun, éplu-
chures; triuèjo, truie ; vièïun, vieillesse, etc., etc. ? Certes,
s'il en fut, ceux-là ont un u qui suit immédiatement la
voyelle ; et personne ne s'avisera jamais de faire entendre
ou en les prononçant. La conclusion est claire.
Cependant comment une erreur de ce calibre a-t-elle
pris naissance et crédit ? Simplement parce qu'on a évo-
qué le souvenir des troubadours classiques, qu'on a démon-
tré qu'ils n'avaient pas écrit autrement ces syllabes diph-
thonguées, et qu'on a voulu s'autoriser de leur exemple
constant.
L'argument, pour être le seul qui se soit encore produit
en faveur de ce système, n'est pas heureux. Son moindre
défaut est d'avoir trop oublié que les troubadours écri-
vaient avec l'alphabet latin et qu'ils prononçaient à la
mode latine. La langue romane employait les formes et
les lettres romaines. Or, le latin qui ne connaissait point
le son de Vu simple, avait cependant ce signe u qui son-
nait partout et invariablement ou, isolé, précédé ou suivi
par une voyelle ou une consonne. En italien, en espagnol,
en portugais, langues néo-latines. Vu français, qui n'existe
pas non plus, a conservé la prononciation qu'il avait chez
les Romains. Au contraire, dans la langue d'Oc, le son u
est ancien : on le fait remonter aux Gaulois. Il est dans
son génie, et il est impossible de ne pas le maintenir. Mais,
comme pour exprimer ce son u, la langue d'Oc manquait
d'un caractère spécial, ou, pour mieux dire, n'avait à sa
disposition, dans l'écriture, qu'une lettre destinée à repré-
senter deux voix différentes, force était bien à ceux qui
écrivaient de mettre un u dans les mots dont la pronon-
AOU
AOU
53
ciation devait faire entendre ou, comme dans ceux, où la
voyelle avait le son actuel. Cet usage s'est prolongé long-
temps : il expli(iue l'ancienne manière d'écrire des trou-
badours , mais il est loin de prouver qu'on doive la préco-
niser et la reprendre.
Aujourd'hui, en l'état des conventions et des combinai-
sons aliihahéliques (jui n'-gisscnt la langue d'Oc, il n'est
plus jwruiis do revenir aux. vieux errements. A moins de
réformer l'alphabet adopté, et nous n'en sommes pas là, si
la langue d'Oc veut se faire lire et se faire comprendre à
la lecture, elle sera tenue d'écrire par le signe convenu la
voyi'llo qui devra être prononcé.! comme l'u français, et de
même pour la voyelle ou, formée de la jonction de deux
signes, mais ne produisant qu'un son simple, entier, indé-
pendant ; et ce sera une règle générale, sans exception, bien
que l'mio ou l'autre vocale soit précédée ou suivie d'une
voyelle ou d'une consonne. — Voy. Eou, diphth., /, Ou,
V, voyelles.
Que l'on consulte donc l'oreille et la prononciation, c'est
tout ce que demande notre idiome, essentiellement eupho-
nique. Sauvons son autologie, sans cesse menacée par les
envahissements du ÎSord ; mais soyons de notre époque, et
sous prétexte d'unité, ne faisons rien do rétroactif, la pire
des conditions. N'essayons pas de ressusciter des formes
surannées, ne latinisons pas notre orthographe, si nous
voulons prouver que notre langue d'Oc est toujours vivante
et qu'elle produit encore des chefs4'œuvre.
Aou, 5. m., au plur. Aousses. Toison de mouton on de
brebis ; rcnscmble de la dépouille d'une bèto à laine prise
isolément. — L'dou ne comprend que cette partie do la
toison qui se tient toute et ne forme qu'un corps, déduction
faite do la laine du ventre, des jambes et do la tête, qui se
coupe en détail, par flocons et se nomme : Flouquarii.
Dér. du béarn. Àoulha, brebis, du lat. Ovieula, et Ovit.
— Voy. Àbé\è.
Aoubado, ». f. Aubade; concerts, musique, sérénade au
point du jour sous les fenêtres d'une jeune fille ou d'une
personne que l'on veut honorer. — 11 se prend souvent,
par antiphrase, pour une insulte publique ou une scène de
moquerie ou de reproches. — Voy. Bév&è.
Dér. de Aoubo.
Aoobala, v. Dévider la soie, la doubler et la tordre fai-
blement, lui donner un faible apprêt, sur des bobines qui
tournent fixées à un grand métier, Vdoubalo, mis en mou-
vement par l'eau, la vapeur ou des chevaux, et qui est de
forme ovale.
Dér. du fr. Ovale, qui est le mot technique de ce métier.
Aoubalaïre, airo, adj. Celui ou celle qui sert un métier
de soie dit ovale.
Aoabalaje, s. m. Œuvre que donne à la soie le métier
dit ovale ; moulinage de la soie destinée à la confection des
bas de métier.
Aoobaléstriè, ièîro, subst. et adj. Étourdi et maladroit
i la fois; jeune gars sans frein et sans mesure.
Ce terme de mépris est une suite du décri où étaient
tomt)és nos archers qu'on nommait au moyen Age, en langue
romane, doubaléttriés, arbalétriers. Comme la guerre, à
cette époque, se faisait principalement au moyen de ia
cavalerie, les hommes d'armes, les archers , milice à pied,
étaient peu considérés, mal exercés et partant peu utiles,
ce qui devait seul étouffer chez cc.s soldats tout germe de
courage et tout désir de se distinguer. Leur nom et jusqu'ft
celui de mairai qu'on donnait à leur flèche, devinrent en
Languedoc des termes d'injures ; tandis que chez les Anglais
les archers étaient la meilleure et la plus utile de leurs
milices, témoins les batailles de Crécy et de Poitiers.
Aoubaléstriè, (. m. Arbalétrier, pièce de char|)enterie
d'un comble; ferme on assemblage qui soutient la couver-
ture, formé de deux pièces obliquement placées, qui vont
s'emmortaiser du haut avec le poinçon ou pied-droit et par
le bas avec la ferme décrivant avec elle un triangle.
Dér. à' Aoubaléitro.
Aoobaléstriè, t. m. Grand uiartùiet, martinet à ventre
blanc Cypselus alpinus. Temm. Oiseau de l'ordre des
Passereaux et de la famille des Planirostres. Gris uniforme
sur toutes les parties sui)érieures, la gorge et le ventre
blancs. Son nom lui vient de ce qu'eu déployant les ailes
il rappelle la forme d'une arbalète.
Aoobaléstro, s. f. Arc d'acier monté sur on fdt, qu'on
tend au moyen d'iuie corde, servant à lancer des flèches
nommées matrai.
Dér. de la bass. lat. Arbalitta, formé de arcu-balitta.
Aoubalo, (. f. Ovale, métier à doubler et à tordre la
soie.
Empr. an fr.
Aoubé, inlerj. Oui ; oui vraiment. — Aoubi tant ! oh I
certes oui ! Aoub'aquà ! pour cela, oui 1 je vous le promets.
Aoubé taHque ! oui, sans doute.
Formé par syncope de Oui ou ha et de M.
Aoubécho, j. f. Aubier d'un arbre, couche ligneuse
entre l'écorce et le cceur de l'arbre ; elle est plus blanctie,
plus tendre et plus poreuse que ce dernier, parce qu'elle
est plus récente de formation. Les planches prises dans
l'aubier sont plus sujettes à ia vermoulure. — Voy. Aou-
béneo.
Dér. du lat. Alburnum .
Aoobél, V. Obéir; agir selon un ordre reçu; céder,
plier.
Dér. du lat. Obedire.
Aoubéîssén, énto, adj. Obéissant, soumis ; maniable.
Aoubéïssénço, t. f. Obéissance, soumission ; habitude
d'obéir.
Aonbénas, t. m. n. pr. Aubenas, ville du Vivarais.
dans le département de l'Ardéche. — On remarquera que,
pour tous les noms de heu qui commencent par un a, on
ne place pas au-devant la préposition à, correspondant an
lat. ad, et l'on ne dit pas à AlaU, à Aoubtnat, à Avi-
gnoun, parce que cette réduplicatioa de la même voyelle»
54
AOD
AOU
quelque chose de heurté pour l'oreille languedocienne.
Mais on emploie la préposition en, répondant au lat. in, et
l'on dit : Ydou en Alais, en Aoubénas, en Anduso, en
AHe. Il n'en est pas de même pour les noms de lieu com-
mençant par une autre voyelle ; car on dit très-bien : à
Vsèt. à lousé, à Vchâou, à Orléan.
Le mot languedocien Aoubénas est exactement reproduit
par son équivalent latin Albenacium ou Albenassium. C'est
pour la première syllabe, le changement, très-commun
dans notre idiome, de al en âou, rendu par au en fr., ce
qui ne se fait pas non plus sans une certaine réciprocité.
Quant à la terminaison as, ce n'est pas ici un fréquentatif,
mais une variante du suffixe celtique primitif ak, vulga-
risé dans la forme latine acum, assium. Le mot lui-même
est le gaulois alb, le même que alp. signifiant sommet,
haute montagne, et blanc, couleur de neige ou couvert de
neige. Sa parenté est nombreuse ; aux désinences près, on
la reconnaît dans les noms identiques : Albénas, en Pro-
vence; Aoubénas, arrondissement de Forcalquier (Basses-
Alpes) ; dans Aubeignan (Landes) ; Aoubigna (Gard), en fr.
Aubignac; qui se retrouve dans Aubignac ou Albignac,
Albiniacum. arrondissement de Bourges; Albignac, Albi-
niacum (Vauclnse) ; Aubignas, en Vivarais ; Aubigné, en
Bretagne, Poitou, Maine, Anjou, Touraine ; Aubigny, Albi-
niacum, dans le Berry, la Brie, la Picardie, le Bourbon-
nais, le Poitou, Touraine, Champagne, Bourgogne, Laon-
nais, Normandie, Franche-Comté, Nivernais, Artois; et
encore dans Aubeinges ou Aubinges (Berry); et enfin dans
noire Aottbignargue, Aubignargues, Albanhanicœ (Hérault).
Tous ces noms présentent dans leur radical et dans la
version latine une analogie directe, et s'appliquent à des
localités, comme Aubenas, sur des plateaux élevés ou
remarquables par les montagnes qui les entourent. —
Toy. Aoubussargue, etc.
Aoubénco, «. f. Aubier, couche ligneuse extérieure et
ordinairement plus blanche, qui se trouve entre le cœur
de l'arbre et le liber ou couche intérieure. — Voy. Aou-
bécho.
Dér. du lat. Alburnum.
Aoubérjèïro, s. f. Pêcher qtii produit l'alberge ou pavie-
alberge, à chair adhérente au noyau. Cet arbre a de nom-
breuses variétés.
Dér. de Aoubèrjo.
Aoubérjino, s. f., ou Vièdase, fam. Aubergine, mélon-
gène ; Solanum melongena, Linn. Plante potagère de la
famille des Solanées.
Aoubèrjo, i. f. Auberge ; hôtellerie ; lien où l'on donne
à manger et où on loge pour de l'argent.
Dér. de la bass. lat. Alberga ou il/isrjum, logement, on
de l'ital. Albergare. Au reste, il est emprunté au fr. Le
mot propre d'hôtellerie, en lang., est cabaré; mais comme
cabaret, en fr., signifie une mauvaise hôtellerie, ou plutôt
encore l'échoppe du marchand de vin, débitant à bandière,
on a cru qu'en lang. aussi il fallait distinguer l'hôtel-
lerie bourgeoise de la taverne du peuple, en appelant la
première Aoubèrjo, et la seconde Cabaré.
Aoubèrjo, j. f. Pavie, alberge ; sorte de pêche ferme,
dont la chair adhère au noyau ; fruit plus connu dans le
midi de la Franco que dans le nord. On en distingue trois
espèces : la Pavie, qui a la chair très-blanche et qui est
la plus savoureuse ; la Pavie Jaune, et une dernière dont
la pulpe est d'un rouge très-foncé, dure et peu aqueuse.
Dér., d'après Ménage et Roquefort, du lat. Albus, parce
que l'espèce principale a la cliair blanche ; selon Saumaise,
de l'art, arabe Al, le, et Beg, fruit.
Aoubéto, s. f. La petite pointe du jour; le premier
rayon lumineux qui précède l'aurore.
Dim. de Aoubo.
Aonbicoù, s. m. Sorte de figue précoce, longue et noire,
qui mûrit à la Saint-Jean.
Dér. du lat. Albicans, qui signifie blanchâtre, sans doute
parce qu'en séchant, cette figue passe du noir au blanc.
Aoabièïro, s. f. Lieu planté de trembles , peupliers
blancs, âoubo. — V. c. m.
Aoubignargue, ». m. n. pr. de lieu. Aubignargues,
dans le département de l'Hérault. — Voy. pour l'étym.
Aoubénas, Aoubussargue.
Aoublida, v. Oublier, perdre le souvenir, la mémoire ;
laisser quelque chose par oubli. — Aï aoublida moun
couièl din lou pra, j'ai laissé mon couteau au pré.
Dér. du lat. Oblivisci.
Aoublidoùs, ouso, adj. Oublieux; qui a la mémoire
courte.
Âoubligacîon, s. f. Obligation, engagement qui lie, qui
impose le devoir qui nait des services rendus; billet ou
acte par lequel on s'oblige. — / aï fosso âoubligacious, il
m'a rendu bien des services, il m'a souvent obligé. Passa
uno doubligaciou, passer un contrat notarié, portant obli-
gation ; prêt hypothécaire.
Dér. du lat. Obligalio.
Aoublija (s'), v. S'obliger pour quelqu'un, lui servir de
caution.
Aoublisè, indécl., locution proverb., phr. faite, pour
dire : Merci, bien obligé ; s'emploie surtout quand on refuse.
C'est ce qui s'exprime en fr. fam. par : Merci, non.
Contr. et corr. du fr.
Aonbo, s. f. Aube, le point du jour. — La primo Aoubo.
la première clarté de l'aurore. D'uno âoubo à idoutro,
toute la journée, de l'aube du matin à l'aube du soir ou au
crépuscule.
Dér. du lat. Albus, alba.
Aoubo, s. f. Peuplier blanc, Populus alba, Linn., et
aussi Peuplier-tremble , Populus tremula, Linn. Arbres
communs dans nos contrées, de la fam. des Araentacées.
Dér. du lat. Alba.
Aoubo dé mèr, s. f. Algue-marine, ou Algue des vitriers ;
Zostera marina, Linn. Plantedela fam. des Aroïdes, abon-
dante sur les côtes de la Méditerranée; la même que la
AOU
Mouiso-<Ié-mer, vermifuge bien connu. — Voy. Mouuo-di-
mér.
Aoubo parait Être une corr. de Aougou, employé aussi
dans notre dialecte et qui avait son étymologie dans le lat.
Ad et ligare, parce qu'elle s'attache aux pieds de ceux qui
marchent dans la mer. — Voy. Aougou.
AonboTi, ». m. Vigne-blanche ou Viorne à larges feuilles,
Clematis alba, Linn. Plante de la fam. des Uenonculacées,
caustique et vénéneuse, espèce de Clématite, autrement
dite : Herbe aux gueux.
Dér. du lat. Allia et de viii$, ou uva.
Aoubrado, ». f. Quantité de feuilles qui se trouve sur
un seul mûrier. — Aqul y-a uno bravo douiraio, ce mûrier
fournira beaucoup de feuille, il est bien garni.
Dér. de Aoubre.
Aonbre, ». m. Arbre, plante ligneuse et vivace dont la
tige, épaisse et nue à la base, s'élève à une hauteur remar-
quable; le plus grand des végétaux. — On disait dans l'an-
cienne langue romane : Albre, atber.
Dér. du lat. Arbor.
Aoubre, ». m. Arbre, pièce de bois, posée horizontale-
ment ou verticalement, sur laquelle tourne toute une
machine et d'où dépond son principal mouvement.
Aoubre dâou tnouli d'oli, le mouton, la presse d'un pres-
soir à huile, énorme pièce de bois qu'on fait peser par une
vis sur la pâte d'olives.
Aoubre dri, arbre-droit d'une charpente, d'un puits-à-
roue, etc. — Faire l'doubre dré, se tenir en équilibre, en
chandelle, sur la tétc, les pieds en l'air. Au lîg., faire tous
ses efforts, faire l'impossible, employer tous ses moyens
pour prouver sa bonne volonté ; se mettre en quatre.
Aoubre jasén, pièce de bois horizontale dans laquelle
tourne l'arbre droit d'un puits à roue.
Aoobré, ». m. dim. Petit arbre, arbrisseau.
Aoubréspl, ». m. — Voy. Aougréspi.
Aoubréssa, ». m. Havresac. C'est particulièrement ce
sac d'ordinaire en peau et à divers compartiments, dans
lequel les chasseurs et les ouvriers terrassiers à la journée
portent leurs provisions de bouche.
Formé de l'allemand Haber, avoine, et take, sac. D'après
cette étym., celte sorte de sac aurait été dans l'origine &
l'usage dos soldats de cavalerie, pour porter la provende de
leurs chevaux en campagne, ce que l'on appelle aujour-
d'hui : musette.
Aoubricô, ». m. Abricot, fruit de l'abricotier.
Dér. de l'arabe Albercoq.
Abricoutiè, ». m. Abricotier, Prunut armeniaea, Linn.
Arbre de la famille des Rosacées, originaire de l'Arménie,
comme son nom latin l'indique.
Acobussargne , ». m. n. pr. de lieu, Aubussargncs,
commune du canton de St-Chaptcs, arrondissement d'Uzès.
Son nom est en latin Albussanieoe. Il peut absolument
avoir eu pour radical un nom d'homme, comme son ana-
logue Aoubigriargue, en lat. Albinhanica, et la seule diffé-
AOU
99^^
I rence serait alors entre les noms Alban, Albain, ou Albin,
Albanut, on Albinus ; mais, soit nom d'homme ou nom de
lieu, l'origine est ccrt-iinement dans le c«ltiiiue Albnn Alp,
montagne, blanc de neige, et les procédés de formation ap-
pellative sont ici les mêmes que nous signalons aux art.
Argue et Aoubénas, etc. Ainsi se vérifient les identités de
racine, et l'équivalence des terminaisons, quand on rapproche
successivement les noms. Celui-ci se n'produii, pour ea
donner un nouvel exemple, dans Albussan (Creuse; , dans
Albuss.ic, Aubusson (Creuse et Puy-dc-D^^me;; et dans ce*
similaires, comme dans tous ceux cités sous le mot Aoubt-
nat, il s'applique à une situation sur des montagnes ou
caractérisée par le voisinage de montagnes.
Aoncnpa (s'), v. S'occuper ; travailler ; mettre le tempe
à profit ; ne pas rester oisif. — Aquèl iravaïadoù et pat
d'un gran és-avan, mais t'Aoueupo toujour, cet ouvrier
n'est pas très-habile, il ne fait pas rapidement son travail,
mais il ne perd pas un moment, il est toujours ft l'ouvrage.
Dér. du lat. Occupare.
Aoufénsa, adj. tans fém. Atteint d'une hernie. — Le mot
eréba est le technique le plus usité, mais il est familier et
ignoble ; quand on veut y mettre de la décence, on se sert
de Aoufénsa ou de rélassa. — K. c. m.
Dér. du lat. Offensus.
Aougou, ». m. Algue ou mousse-marine. — Voy. Aoubo-
dé-mèr.
Aougréspi, ». m., ou Aoubréspl. Aubépine, épine
blanche, noble épine; Cratagut oxiacaniha, Linn. Arbris-
seau épineux de la fam. des Hosacées.
Dér. du lat. Alba et spina.
Aongnmo, ». {. Augure, pronostic, présage. — Ce tech-
nique, qui a vieilli, s'emploie encore parmi les vieillards
et les bonnes femmes. — JV'aï pas bono àougruno, j'en ai
mauvais augure, je n'en augure rien de Iwn.
Corr. du fr.
Aouja, ». m. n. pr. de lieu. Aujao, commune du
canton de Gënolhac, arrondissement d'Alais.
Ce nom, en lat. Aujacum, offre un exemple intérsHont
de la composition des noms dans nos pays, qui confirme ce
que nous disons à l'art. Argue. Inutile d'abord de remar-
quer que, selon la règle invariable de notre dialecte, le c
final est supprimé. Mais, auprès de ce hameau, se trouve
un écart qui est indifféremment appelé Aoujagué ou Aou-
j'argué, petit Aujac. Le premier diminutif est dans la
forme ordinaire et régulière de tous les noms propres en
a, le second présente cette particularité que, par l'ad-
jonction de la consonne r, il entre dans la catégorie des
appellations en argue, et se montre en complète analogie
avec le nom Aoujargue, Aujargues, commune du canton
de Sommières, arrondissement de Nimes. Ce sont bien là
les mêmes noms sous différentes finales, et ils sont rendus
par la môme forme latine; mais en même temps ils sont
identiques à Aoujan, ruisseau près d'Aujac, à Augy (Nord),
et à Aujon (Haute-Marne).
56
AOU
AOU
Quant h l'étymologie, comme Auj.irgncs se disait autre-
fois Orjargues, il est probable que la même altération
a eu lieu pour Aujac. Si donc Orjargues dérive du lat.
Âurum, Aujac doit en venir aussi, avec d'antant plus de
raison qu'il est situé, comme Orjargues, sur un de ces ruis-
seaux qui roulent des paillettes d'or.
Aoujourdhiuèï, adv. ou Hiuèï, Aujourd'hui. Aoujour-
dhiiièi est plus grave que Hiuèï : celui-ci désigne plus par-
ticulièrement le jour même où l'on parle ; le premier s'étend
i toute l'époque, à tout le régime actuels.
Dér. du lat. Hodiè, et formé du datif âou, et jour, hui.
Aoulivastre-bonscas, s. m. Troène, Ligustrum vulgare,
Linn. Arbrisseau de la fam. des Jasminôes, commun le long
des baies.
Aoumédo, ». f. Ormoie, lieu planté d'ormes.
Dér. du lat. Ulmarium, ou de Oume.
Aonméléto, s. f. Omelette, œufs battus et cuits dans
la poêle. — Vous la révira coumo uno douméléto, il vous
l'a rebiffé comme on retourne une omelette. — Faire l'dou-
méléto, faire la fête, le repas du lundi de Pâques, dont
l'omelette forme le plat de fondation, le mets tradition-
nel. Cette coutume tient aux. anciens rits de l'Eglise pri-
mitive, où les œufs mêmes étaient interdits pendant le
Carême. La jubilation pascale se traduisait par le rappel
des œufs longtemps proscrits.
Du fr. Omelette, de œufs mêlés.
Aonménta, v. Augmenter; croître en valeur ou en
quantité. Se dit principalement du prix des denrées en
hausse , et aussi d'une rivière dont les eaux commencent à
te gonfler par de fortes pluies.
Trad. du fr.
Aouméntacion, s. f. Augmentation de prix , hausse do
prix ; augmentation du nombre des mailles dans un tricot.
Aoumorno, t. f. Aumône, ce qu'on donne aux pauvres
par charité. — Démanda l'âoumorno, demander l'aumône.
Faïre l'âoumorno, faire la charité.
Dér. du gr. i).:7)(i.o<rJv»i.
Aouno, ». f. Aune, mesure ancienne de longueur. — Ce
mot est peu usité dans le style vulgaire, parce que cette
mesure, venue de Paris, n'est connue dans le Midi que
depuis peu. Comme les marchands s'en sont servis jusqu'à
l'emploi exclusif et obligé du mètre, force était au peuple
de connaitre la valeur de l'aune et de la comparer à sa
mesure vulgaire, lou pan. L'aune représente cinq pans
moins un quart. — Voy. Pan.
Trad. du fr.
Aoupila (s'), V. Se passionner maladivement pour cer-
tains aliments même insalubres ; s'adonner avec ardeur à
leur usage ; désirer se nourrir de substances terreuses comme
la cendre, la suie, leplitrc, le sel. Cette maladie, à laquelle
les jeunes fdies sont particulièrement sujettes, se nomme
en fr. malaise.
Dér. du lat. Oppilare, fermer, boucher, venant du gr.
aù.6io, je serre.
Aouquo, J. f. Oie domestique ou sauvage, Ânas anter,
Linn. Oiseau de l'ordre des Palmipèdes. — Marcha coumo
uno douquo crébado, il marche comme une oie crevée,
phrase proverbiale qui correspond à : il marche lourdement
et les jambes écartées. En vieux français du moyen âge,
on disait auque pour oie, témoin l'histoire fabuleuse de la
reine Pédauque, nom que l'on a donné à la reine Berthe,
mère de Cliarlemagne, dont on voit les statues sur quel-
ques monuments gothiques, avec des pieds d'oie, traduction
du nom.
Les Joyeuses Recherches de la langue tolosaine, de Cl. Odde
de Triors, publiées au XVI« siècle, sont curieuses à con-
sulter sur notre article. Elles disent : Auque (Aouquo) idem
sonat gallico sermone quod Oye , hinc illud en cesie cité,
estre coumo las auquos de Blagnac, que se leuan de m.ay-
tis per beoure. Et dicuntur hœc à l'endroit de ceux qui
naturellement sont altérez comme vne esponge, et lesquels
escase poyne ne sont pas sourtis du licl qui crient à layguo,
à layguo, ie voulois dire au vin... Est et aliud vulgare
dictum en ceste cité de Tholose sur ce mot d'auquo, ainsin :
Non quai pas parla sinon quand l'auquo pisso ; et hœc à
l'endroict de ceux qui n'ont que babil. Le diminutif d' au-
que est auqueto, hinc illud, en ceste mesme cité : à la
Sant'Anneto, taston liœu à l'auqueto.
Dér. selon certains étymologistes du celt. Auca ; suivant
d'autres, du lat. Avis ; mais il y avait sans doute à la suite
quelque épithète spéciale, que la contraction subie par le
mot ne laisse pas deviner. En ital. Oca.
Aouraje, s. m. Tempête, grand vent. — Ce mot n'a
aucun rapport de signification avec le fr. orage, qui a
cependant une origine commune dans le lat. Aura, vent.
Le français a dévié du sens primitif, le languedocien y est
resté fidèle.
Aouréïado, ». f. Action de tirer les oreilles; correction
donnée ou reçue en tirant les oreilles.
Dér. de Aourèio.
Aouréïéto, ». f., on Bongnéto. [V. c. m.) Beignets
sucrés, faits avec de la fleur de farine, du sucre et de la
fleur d'oranges. — C'est un dim. d'doureïo, et les teignets
susdits sont ainsi nommés, non pas à cause de leur dimen-
sion, qui dépasse de beaucoup celle de l'oreille, mais à
cause de leur forme et de leur plus ou moins de ressem-
blance avec l'oreille.
Aouréîo, ». /". Oreille, organe de l'ouïe. — Es du d'àou-
rêio, il a l'oreille dure. Pénja l'douréio, porter l'oreille
basse, être tout honteux. Pouda éndouréio dé lèbre, tailler
la vigne ou un jeune plant de mûrier à oreille de lièvre,
c'est-à-dire lorsque deux des scions que l'on conserve se
réunissent en angle aigu par leur base. C'est un défaut
pour la bonne direction à donner à l'arbre dont l'enfour-
chure devient trop serrée.
Dér. du lat. Auricula, dim. deauri».
Aouréïo-d'ase, ». f. Grande consoude, Consonde offi-
cinale, Symphiium consolida, Linn. Plante vulnéraire de
AOU
AOU
57
la fam. des Burraginécs , commune dans les prairies
humides.
Son nom lui vient de la forme de ses feuilles.
Aouréïu, udo, adj. Oreillard, qui a de longues oreilles.
Dér. de Aouriio.
Aonréja, v. Donner de l'air; secouer à l'air, pour faire
perdre l'humidité; essorer, faire séclier à l'air.
Dèr. du lat. Aura.
Aoarénie,5. m. n.pr. de lien. Orange, ville du Comtat,
dans le département de Vauclusc. — On doit dire : Ana
in Aourénje, pour : aller à Orange. — Voy. Aoubénai.
Aonriolo, *. f. Chardon étoile ou Chausse-trappe, Cen-
taurea calcitrapa, Linn. Plante qui croit dans les champs
à lilé, et commune sur le bord des chemins, dont la
semence est enfermée dans une espèce de bërissoa trés-
piquant. — Voy. Cago-lrépo.
Dér. du lat. Aumlus, qui est couleur d'or, parce que sa
fleur a cette nuance.
Aouripèlo ou Aouripènlo, s. f. Erysipèle, inflamma-
tion supcrnciullc de la peau, avec rougeur, chaleur et une
très-légère tuméfaction.
Con-. du fr.
Aouristre, s. m. Ouragan, coup de veut subit et de peu
■ do durée.
Dér. du lat. Aura.
Aouro, s. f. Vent, soufllo; grand vent, génériquement.
Aouro d'dou, ou douro drécho, bise, vent du nord ; mistral.
Aouro folo, coup de vent impétueux. Aouro rouito, ou Rou-
véryasto, vent du nord-est, ou qui vient du côté du Rou-
erguc, relativement aux Cévenncs ; c'est un vent chaud et
malsain pour les vers à soie. — Dé t'douro, en terme de
cadastre, à l'aspect ou du côté du nord.
Dér. du lat. Aura.
Aouroùs, ouso, adJ. Venteux, qui donne du vent ; qui
est exposé au vent. — Voy. Abriou.
Dér. du lat. Aura.
Aoùs, >. m. .\out, huitième mois de l'année. — Prvb. : Se
pldou en aoùs, tout oli ou tout mous, s'il pleut en août,
bonne récolte d'huile ou de vin.
Dér. du lat. Auguslus.
Voici un de ces mois sur lesquels se fait le mieux sentir
l'influence de l'accent dans la prononciation et par suite
dans la Bigniflcation : sa contexlure le rapproche beau-
coup de la particule dou, dipht. ; son accentuation l'en
écarte absolument, en en faisant une dissyllabe par le seul
déplacement de la tonique. Ces petits incidents, qui sont
très-essentiels à observer, tiennent de trop près au méca-
nisme de notre orthographe et se présentent trop souvent
pour que nous négligions d'y insister. — Voy. Aeén.
Au commencement ou dans l'intérieur d'un mot poly-
syllabique, toutes nos voyelles gardent leur son naturel,
et c'est pour cela qu'il serait inutile de les accentuer.
Cependant l'E, à cause de ses intonations différentes,
mérite une exception, et il a besoin d'un signe qui marque
sa consonnancc grave on aiguë, ouverte ou fermée ; nous
n'avons pas cru pouvoir nous en dispenser même dans les
monosyllabes fVoy. lettre F.J. Pour les antres voyelles,
quand elles forment diphthongues ou triphthongues, quelle
que soit leur place dans le mot, la dominante est tou-
jours distinguée par l'accent circonflexe.
Mais c'est surtout i la flnale des mots que se fait U
cadence, que se produit la modulation propre aux idiomes
méridionaux. C'est là, sur la dernière syllabe ou sur la
pénultième, que repose l'accent tonique, cette inflexion
qu'aucun signe n'indique le plus souvent, mais qui bien
des fois aussi est signalée par la présence de l'accent gram-
matical. Nous rappelons cette règle.
Dans notre dialecte, les voyelles AelV exceptées, tontes
les autres, y compris la composée ou, sont féminines ou
muettes quand elles se trouvent à la fin d'un mot polysyl-
labique, seules ou suivies d'un s, ou en composition d'une
diphlhongue ou triphthongue, à moins toutefois qu'elles
no soient accentuées.
Ce principe est général et absolu. Aussi qu'arrive-t-il
dans la prononciation ? La tonique, qui est dans chaque
mot, et seulement à la fin, ne peut s'appuyer que sur une
syllabe pleine, forte ou masculine; la tenue est donc ame-
née sur la dcmiérc, grave de sa nature ou marquée d'un
accent. Sur celle syllabe se module la note, se condense
l'imperceptible repos prosodique. Les syllal)cs pn'xédentes,
quelle que soit d'ailleurs leur qualité ou leur nature, son-
nent de leur son naturel sans doute, mais se prononcent
plus rapidement, plus légèrement en quelque sorte, la voix
s'arrêtant sur la syllabe accentuée, sur la voyelle domi-
nante, quand il y a diphthongue émise d'un seul jet.
L'application en exemples est saisissante. Ainsi A natu-
rel, toujours éclatant, est néanmoins bref dans barda, bar-
dot; tantàs, tantôt; iscaloù, échelon ; Léngadà, Languedoc,
tandis qu'il est long et grave dans les mots homographes,
bardo, bat; tantos, les tantes; iscalou, ils grimpent; Im-
gado, coup de langue, etc., etc. Toute la dilTérence est dans
l'accent final, qui convertit la syllabe tonique de brève en
longue, d'une noire fait une blanche, et produit cette inver-
sion musicale et un sens nouveau. Il en est de mémo
pour les autres voyelles. Le secret de la prononciation
vraie et juste, comme la raison de notre orthographe, ne
tient qu'il l'observation de cette règle.
Pour en revenir maintenant à notre article, il est facile
de comprendre sur le mot Aoùs la nécessité et l'eiTet de
l'accent. Si la finale n'était pas accentuée, elle resterait
muette féminine, et par son contact avec la voyelle forte
a, elle serait absorl)éc, et deviendrait diphthongue, se
confondant avec elle. L'accent grave la dégage, et avertit
qu'elle doit servir d'appui à la voix : il décide du son et
du sens. Dans la versification, l'épreuve est bonne à faire :
{ou mis d'aoùs, le mois d'août, ne rime pas avec hut di-
ddous. les dés à coudre, pas plus que, par une raison sem-
blable, ne rimeraient 'ou* maoùs, les carreaux de terre
58
AOU
AOU
cuite, avec tous mdou», les maux. Pourquoi ces différences
d'assonnances dans des mots où les mêmes voyelles se
reproduisent ? Simplement parce que ici ou là la position
de l'accent a été intervertie. La tonique est fixée dans les
premiers sur oui accentué, qui fait un mot dissyllabe de
a-où< et ma-oùs, et dans les derniers déddous et mdout, il
y a diphlhongue, et la voix pèse sur l'd.
Au moyen de cette simplification et sans préjudice pour
l'intelligence du mot, on arrive à cet autre principe du
languedocien, de n'écrire que comme on prononce, avec les
seules lettres nécessaires, et toutes devant être articulées.
La parasite h pourrait donc être sacrifiée dans bien des
mots sans que le sens eût à en souffrir. Maoù servirait
d'exemple, et dans le même cas se trouverait irai, trahir,
dissyllabe par l'accent, qui ne se confondrait pas non plus
avec trai, il jette, monosyllabe par la diphthongue.
Ces observations se répéteraient également sur les autres
voyelles. Elles viendront à leur place, mais il est déjà
facile de les pressentir par l'épellation des mots : Sai,
panne de porc, et saX, céans ; mïoù, meilleur , et miou,
mien ; fid, feu, et fïo, fille ; péis, pays, et péis, poissons, et
dans la longue série des homographes que nous avons
cités, que l'absence ou la présence de l'accent sur une
des lettres de la syllabe finale modifie si profondément.
L'harmonie de notre langue se compose de ces nuances
de tons et de demi-tons, qu'il est indispensable de noter
distinctement dans l'écriture. C'est la quantité prosodique,
la mesure, que l'orthographe a charge de marquer. Nous
avons essayé de poser quelques règles, qui se complèleron t
d'observations successives, principalement en traitant des
voyelles et de leur assemblage dans les diphthongues. L'in-
telligence de notre dialecte est toute dans la prononciation
juste; la notation écrite doit tendre à s'en rapprocher autant
que l'alphabet usuel, adopté, classique, peut le permettre.
Aousa, t). Oser, avoir l'audace ; s'enhardir.
Dér. du lat. Âusus, part. pass. de audere.
Aousar, s. m. Hussard ou housard, corps spécial de
cavalerie légère.
Corr. du fr.
Aousardo (à 1') , adv. A la housarde, à la mode des
housards; cavalièrement.
Aouséro ou Làouséro, ». /. Lozère, chaîne de monta-
gnes qui donnaient autrefois leur nom à toute la contrée,
et le donnent aujourd'hui à un département. Les princi-
paux sommets de la Lozère sont granitiques, mais son
extrémité orientale, qui est dans le département du Gard
et se nomme la Tête-de-Bœuf, est composée de schiste mi-
cacé, comme la plupart des montagnes secondaires qui
suivent sa direction. Il parait que c'est de cette espèce de
pierre, qu'on appelle Idouso dans le pays, que le mot Ldou-
*éro aurait été formé, et l'usage actuel la contracté par
celui de Aouséro.
Aouséro, oto, adj. Lozerot, habitant de la Lozère ou
du départ, qui porte ce nom. — On ne sait pourquoi ces
habitants, lorsqu'ils se répandent dans la France, sem-
blent vouloir renier ce nom de Lozerot et le remplacer par
celui de Lozérien, qui est antipathique au génie de leur
langue originaire. Si on les ajjpelle Lozériens, k Paris, sur
parole, ils restent LozeroCs pour leurs voisins du Lan-
guedoc. — Yoy. Gavd.
Aousl, V. Ouïr, entendre ; percevoir les sons ; écouter.
— Aouses? m'entends-tu? entends-tu? Ce temps de verbe
appartient à un dialecte au-dessus d'Alais; car ici il ferait :
dousisses ? Il est cependant très-adopté. Ou save pas gué
pér àousi dire, je ne le sais que pour l'avoir ouï dire, je ne
l'ai pas vu. K'aï pas âousï dire aquà, je n'ai pas entendu
parler de cela. Aquà faï bon dousi dire, c'est bon à savoir.
Sé^vène, m'àousiras, si je viens, tu m'entendras. Dlou
vous dousie ! Dieu vous écoute ! J'en accepte l'augure.
Dér. du lat. Audire.
Aousido, t. f. Oul'e, l'un des cinq sens ; faculté d'ouïr.
— I-a leva l'dousido, il l'a étourdi du coup. Parti d'dousido,
prendre feu à la première parole; être prompt et vif; se
décider étourdiment et sans réfléchir.
Dér. du lat. Auditus.
Aousidoù, s. m. Tympan, orbite auriculaire; oreille.
Dér. de Aousi.
Aousidouïros, j. f. pi. Oreilles; organe auditif.— S'em-
ploie pour ouïe et oreille, en poésie et style trivial.
Dér. de Aousi.
Aousino et Eousino, s. f. Gland du chêne vert. — Car
d'dousino, chair ferme et de boime qualité, telle que celle
des porcs qui se nourrissent de glands. On pousse la com-
paraison jusqu'à l'espèce humaine : quand on pince les
joues rondes et fermes d'un bel enfant, on dit : Aquà's di
car d'dousino. — Voy. Eousino.
Dér. de Eouse.
Aoussé, s. m. Troussis ; plis qu'on fait au bas de la
robe des enfants et qu'on découd pour l'allonger à mesure
qu'ils grandissent. — Va;/. Hdoussé.
Dér. de Hdoussa.
Aoussèl,». m. Dim. Aoussélé, Aousséloù ; Angm. el péj.
Aoussélas. Oiseau, animal vertébré et ovipare, ayant un bec,
des plumes et des ailes. — L'doussèl dé Séti Lu, l'oiseau
de saint Luc, le boeuf, parce qu'on le représente ailé ; se
dit ironiq. d'une personne lourde, pesante, qui ressemble
par sa marche et sa tournure à un bœuf.
Aoussélé est proprement un petit oiseau ; doutséloù, un
oiseau de nichée; ûoussélas, un oiseau de proie, un gros et
vilain oiseau.
Aoussèl, t. m. Instrument pour porter le mortier; sorte
de benne en planches, ouverte d'un côté et à deux man-
ches, que l'on porte sur le cou, pour monter le mortier
aux maçons sur leur échafaudage; on l'appelle en fr. oiseau
ou mieux augeot, qui parait être une corruption de angéot,
petite auge.
Dér. de la bass. lat. Aucellut, dit pour avieellut, dim.
de Avit.
AOU
APA
59
Aonsséla (s'), v. S'ébonrifTer, comme font lei oiseanx
en colère; se hérisser. Au fig.se mettre en colère, s'irriter,
s'emporter, hausser le ton, monter sur ses grands chevaux.
Dèr. de Aouttti.
Aonssélino, t. f. La gent volatile, qui porte plumes ;
les petits pieds. Quelquefois se dit fam. et par contre-
vérité d'un gros oiseau de rapine.
Dér. de Aoussèl.
Aonssén, s. m. Absinthe, armoise-amère, Artemisia
ahtinthium, Linn. Plante de la fam. des Composées corym-
bifères ; elle croit dans les montagnes des Cévennes. — La
plante n'a de commun avec la liqueur du môme nom,
fabriquée aujourd'hui, que le souvenir de ce baptême pri-
mitif, où les feuilles de la tige macérées entraient pour
quelque chose, au moins pour leur parfum. Aussi le vieux
nom Languedocien n'est plus connu qu'en botanique, et les
amateurs du breuvage dont nous parlons, en ont fait bra-
vement : Arsénto, et s'empoisonnent pour faire la mode,
tout en parlant mal leur langue.
Aonssuro, s. f. Hauteur, éminence, cime d'une mon-
tagne; tout endroit comparativement plus élevé qu'un
autre. — Sus l'âoutiuro, sur la hauteur, au sommet.
Dér. de ^'doussa, nàou.
Aouta, t. m. Autel, table destinée aux sacrifices et par-
ticulièrement h la célébration de la messe. — Lou gran-
t'âouta, le maitre-antel.
Dér. du lat. AUare.
Aoutouna, V. Automncr ; jeter du bois dans l'arrièrc-
saison; mûrir en autommc. — Se dit particulièrement do la
pousse que fait le mûrier après avoir été dépouillé de sa
feuille et taillé au commencement de l'été. C'est au prop.
pousser en automne.
Aontoono, $. f. Automne, troisième saison de l'année,
entre l'été et l'hiver.
Dér. du lat. Autumnus.
AontooT, mieux : A l'éntoar, adv. Autour, à l'entour,
aux environs. — E$ âoutour de mièjo gnué. il est environ
minuit.
Formé de Aou, article, et de tour.
Aoutre, âoutro , pron. et adj. Autre. — D'doutre-tén,
autrefois, jadis. Âoulre mdou noun y ague! Que tout le
mal se réduise là ! Oh ! pour cela, c'est un petit malheur !
Coumo disii l'àouire, comma disait cet autre : sorte de pré-
caution oratoire pour commencer une phrase proverbiale.
Tout un ou tout àoutre, tout blanc ou tout noir, point de
milieu. F^s toutânutre, il est singulièrement changé, on ne
le reconnaîtrait pas. Un co l'un, un co iâoutre, tantôt
l'un, tantôt l'autre; alternativement. Vno âoutro fés, une
aulrc fois; pas cette fois-ci, une antre.
Dér. du lat. AUer.
Aoutromén ou Aontramén , adv. Autrement , d'une
autre manière ; sans cela ; sinon. — Paras ce que té dis»,
àouiromén! . . . tu feras ce que je te dis, sinon!... Dans le
dialogue familier, on l'emploie d'une manière explétive, et
sans qu'on lui attache un sens positif : Aoutromén disia*
qui..., vous disiez donc. C'est uitc formule \>o\u changer
de propos, pour ramener à la question.
Aoutros-fés, adv. Autrefois, jadis, au temps passé.
AouEoù, s. m. n. pr. de lieu. Auzon, hameau de la
commune d'Allègre, arrondissement d'Alais; et Alzon,
chef-lieu de canton, arrondissement du Vigan.
Les deux appellations sont les mêmes en languedocien,
et se trouvent aussi mentionnées dans le dénombrement des
feux de la sénéchaussée de Bcancaire et de Nimes, en 1384,
avec la même orthographe latine, Alsonum. On sait la faci-
lité de a< à se transformer en au et à s'exprimer par
âou dans la langue vulgaire : le français n'a pas eu de pré-
férence; mais la communauté d'étymologie dcs'deux mots
n'en est pas altérée. Il est à remarquer que la fmale ou en
lang., on en fr., provenant du suOQxe lat. ou onus, onum,
est quelquefois diminutive, mais elle marque aussi l'abon-
dance et communique à la chose représentée par le radical
une idée de dérivation, de conformité de nature ou de
ressemblance, en mémo temps que de quantité [Voy. Ou,
suif.). Quant au corps même du mot, la forme au pluriel
aouz, auz, als, semble ne pas être tout à fait insignifiante:
elle n'aurait pas été employée pour indiquer simplement
une localité placée sur une élévation et comme isolée, mais
plutôt une localité entourée de hauteurs, dans un pays de
montagnes, où s'élèvent de nombreuses colUnes. C'est avec
cette signification que le sens du suffixe lui conviendrait
en donnant plus d'énergie au radical, et que l'application
serait exacte pour les deux villages.
Apaîa, V. Garnir de paille; faire la litière aux che-
vaux ; jeter de la paille sous les animaux pour leur litière.
Dér. de Pdio.
Apanll (s'), V. Pâlir, devenir pâle ; se faner, s'étioler.
Dér. de Panl».
Apàonii, V. Appauvrir, rendre pauvre ; rendre moins
fertile ; devenir mauvais ; épuiser. — L'doumorno apàourU
pas, l'aumône ne rend pas plus pauvre. Lou tén ê'apâou-
ris, le temps se gâte, il se couvre.
Dér. de Pâoure.
Apâonsa (s'). Se poser, prendre pied, comme fait le
gibier après une remise. — S'apdousa, dans le sens du fr.
s'opposer à..., n'est qu'une corruption, mais il se dit
quelquefois. Il n'a pas la même étym.
Dér. de Pdouso.
Apâousado, *. f. Reposée, lieu où le gibier se repose pen-
dant le jour ou après une remise. — Tira à l'apdoutado,
tirer à la reposée, an gite. — Yoy. Pdousado.
Dér. de Pdouso.
Apâonta (s'), t<. Tomber sur ses mains ; se mettre sur
les mains.
Dér. de PAouto.
Apâoutoùs (d'), adv. A quatre pattes ; sur les pieds et
les mains.
Dér. de Pdouto.
60
APE
APE
Apara, v. Défendre, protéger, prendre la défense. —
S'aparo coumo un catévès, il se défend de bec et d'ongles.
S'apara dou [ri, se garantir du froid. Po pas t'apara dou
prouf'i, il ne peut pas se défendre contre la fortune ; il a un
tx>nheur insolent ; tout lui réussit. Apara lai mouscot,
chasser les mouches.
Dér. du lat. Apparare, armer pour la défense. En ital.
Parare, en esp. Parar.
Apara, o. Tendre, présenter un récipient quelconque
pour recevoir ce qu'on y jette ; attraper au vol ce qu'on
vous jette. — Aparo toun fantldou, lou pagnè, lourt capèl,
ta man, tends ton tablier, le panier, ton chapeau, ta
main.
Dér. du lat. Àperire, ouvrir.
Aparamén, adv. Probablement, apparemment, sans
doute.
Empr. au fr.
Aparéïà, v. Accoupler, appareiller; ranger deux à
deux.
Dér. de Parél.
Aparénço, s. f. Physionomie extérieure d'un objet, ses
apparences, ce qu'il semble être ; vraisemblance, proba-
bilité. — Aquél bla a bono aparénço, ce blé en herbe pro-
met beaucoup. Y-a pas aparénço que partiguén hiulK, il est
peu probable que nous partions aujourd'hui.
Dér. du lat. Apparere.
Aparénta, ado, adj. Apparenté, allié. — Vous ses pas
mdou aparénta, vous voilà bien apparenté ; vous avez des
parents dont vous pouvez être fier.
Aparénta (s'), v. S'apparenter, former par un mariage
des liens d'affinité avec une famille.
Dér. du lat. Ap pour ad, et parens, parentis.
Aparia, ti. Egaliser, -rendre égal; unir, ajuster. — On
apario les vers à soie de différents âges, en donnant aux
plus jeunes plus de chaleur et de nourriture. — Aparia las
lélros, assembler les lettres quand on apprend à lire. Y-a
pas rés qu'aparle aquà, il n'y a rien de pareil à cela ; tel
homme ou tel objet n'ont pas leur pareil.
Aparia (s'), t>. S'apparier, s'accoupler, se réunir par
paires ; se comparer, se mesurer.
Dér. du lat. Par, d'où parél.
Apartémén, s. m. Appartement. —C'est un emprunt au
fr. pour désigner un appartement de luxe, la chambre
d'honneur ou le salon de parade ; le terme générique est
Membre. — V. c. m.
Aparténl, v. Appartenir, être dans la possession de
quelqu'un. — Aquà l-appartèn hé, émb'un home dé soun
ispèço, dé faire lou déspicholis, il convient bien à un
homme de sa sorte de faire le dédaigneux.
Dér. du lat. Pertinere, pertinet.
Apèl, j. m. Appel ; recours exercé devant tine juridic-
tion supérieure. — Faire l'apèl, faire son compte.
Empr. au fr.
Apéla, V. Appeler, nommer ; faire venir à soi, attirer.
— Lous valas apèlou la barbasto, les cours d'eau attirent
la gelée blanche. Lou marin apèlo la pléjo, le vent du
midi amène la pluie. Aquà s'apèlo parla/ voilà parler,
voilà qui est parler. Aquô s'apèlo un home, voilà nn
homme de tête et de cœur. Aquà s'apèlo .' dit-on souvent
comme interj. pour exprimer l'admiration : voilà qui est
bien ! voilà qui est beau !
Dér. du lat Appellare.
Apéna (s'), v. S'appliquer, apporter ses peines et ses soins.
Dér. de Péno.
Apéndris, drisso, s. e( adj. Apprenti, qui fait son
apprentissage.
Corr. du fr. Apprenti.
Apéndrissage, s. m. Apprentissage.
Avec une légère variante qui vient du génie de la lan-
gue, empr. au fr.
Apéns (Lous), s. m. pi. Hameau de la commune de La
Melouze, arrondissement d'Alais. La prononciation du mot
est la même en fr. qu'en lang.
Dér. du celt. Pen, cime; sommet, pointe d'une mon-
tagne. La lettre a qui le précède n'est que l'augraent ini-
tial. La situation de ce hameau explique son nom. En
allem. pinn, et pfin, haut, élevé, hauteur, sommet. En
ls^,. pinna, créneau de mur; pinnaculum, faite, pinacle,
ont la même origine du gaulois pen. L'Apennin, les Apen-
nins, célèbres montagnes d'Italie, Alpes penninœ, Apen-
nins, sont le même mot que notre Apéns.
Apénsiouna, v. Bailler à emphytôose, ou à bail emphy-
téotique, ou à locaterie perpétuelle. C'est aliéner un im-
meuble quelconque moyennant le service d'une rente con-
stituée et perpétuelle, dont le bailleur ne peut exiger le
remboursement tant que la rente est régulièrement servie.
Dér. de Pénsiou.
Apèou, s. m. Appeau; toute sorte de sifllot avec lequel
on contrefait la voix des oiseaux pour les attirer dans
les filets ou à portée du fusil. Le même que Souné. — V.
c. m.
Dér. de Apéla.
Apérési (s'), v. Devenir paresseux, mou, lâche au tra-
vail; s'accoquiner.
Dér. de Péréso.
Apésa, V. Prendre pied; appuyer le pied; donner du
pied à quelque chose, comme à un sac, à une échelle, à
une planche, qu'on place debout et que l'on apéso pour les
rendre plus solides.
Dér. de Pè, au plur. pèses.
Apéti, *. m. Appétit, besoin on seulement désir de
manger. — Es pas l'apét). que manqua, ce n'est pas faute
d'appétit si nous ne mangeons pas.
Dér. du lat. Appetere.
Apétoui, ido, ou Apétounl, ido, adj. Apprêté. Ne se
dit que du pain et no se prend qu'en mauvaise part. On
ne dit pas en effet : Dé pan bien apéioui ; mais : Aquél
pan es mdou apéioui, ou apélouidat, qui est le péjor.
APL
APO
61
L'étym. est-elle dans ApM, ce qni contrarierait an peu
le sens de ce mot, toujours appliqué à un pain qui ne
l'excite guère ; ou bien serait-elle dans sa formation, a grec
privatif, et une altération du mot pdte, arrangé euphoni-
quement, ce qui ne serait pas sans exemple 7
Api, s. m. Céleri, Apium graveoltns, Linn. Plante pota-
gère de la famille des Ombeiliféres. — Api bouscas, Ache,
lorte de céleri à feuilles et à côtes plus menues, qu'on
n'emploie que par brins dans un potage. Son arôme est
beaucoup plus fort que celui du céleri franc.
Au commencement de ce siècle, on raconte qu'un de nos
concitoyens, obligé d'aller à Paris, se promit bien d'y faire
ample récolte de découvertes qu'il publierait au retour.
Dans ce but, à son premier diner au restaurant, il cherche
sur une longue carte un de ces mets inconnus sur les bords
du Gardon ; il le trouve enfin et demande des céleris au
jos. On ne les lui fit pas attendre ; mais à peine y eut-il
goûté, qu'il s'écrie : A%/ saeridi I tous eilérit toun d'apii I
Le mot est resté.
Dér. du lat. Apium, formé de apit, parce que sa fleur
est recherchée par les abeilles.
Apialoù, s. m. Etai, étançon; appui; jambe de force
pour soutenir les cintres en bois d'une voûte. — L'apiodoit
est un étai posé verticalement ou obliquement, quand il
soutient un pan do mur qui menace ruine ; {ou pincil est
ce même étai placé horizontalement, quand il est destiné
à prévenir l'éboulement d'un mur ou d'une tranchée de
terre. — Voy. Pincél.
Dér. du lat. Pila, pilier.
Apialouna, t>. Etançonner, étayer, étrésillonner ; poser
on étai.
Dér. d' Apialoù.
Apîè, s. m. Rucher; ensemble, collection des roches
dans un même lieu. — Yoy. Abél.
Dér. du lat. Apis, abeille ; aparium.
Apignéla, ado, adj. Serré comme les écailles ou comme
les amandes d'une pomme de pin.
Dér. de Pigno.
Apitança, v. Ménager le mets que l'on mange, en y
ajoutant beaucoup de pain, en sorte que le mets ne serve
que de véhicule, d'ass;iisonnemeut à celui-ci qui, selon les
règles d'une bonne hygiène et surtout de l'écouoinie domes-
tique, doit être le principal aliment. Les enfants, qui sont
naturellement gourmands, font tout le contraire ; aussi est-ce
parliculioremeiit pour eux que le mol apitança est employé.
Dér. de Pitanço.
Aplacarda, v. Placarder ; mettre ou alTiclicrun placard ;
appliciuer contre un mur, y lancer un objet quelconque de
nature i y rester appliqué, à s'y coller. — Aplacarda qudou-
quiis, lancer quelqu'un contre..., le coller au mur, l'y fixer
en le tenant par le cou ou la jwilrine.
Dér. de Plucar, pris pour affiche.
Aplana, v. Aplanir; niveler ; rendre uni, rendre lisse.
Dér. de l'adj. Plan, du lat. Planas, txplanare.
Aplanaje, i. m. Action d'aplanir, aplanissement.
AplaU, II. Aplatir, rendre plat ; lancer avec force contre
un mur, contre la terre, contre un corps dur.
Dér. de l'adj. Pla.
Apléj! (s'), V. Devenir pluvieux, tourner à la pluie.
Dér. de Plèjo.
Apliqoa (s'], o. S'appliquer: porter toute son attention,
son zèle, son savoir-faire. — Il est principalement employé
pour exprimer l'application d'un écolier studieux.
Empr. an fr.
Aploon, s. m. Aplomb; ligne verticale, équilibre résul-
tant pour un corps de l'observation de cette ligne. — AquU
mur es pas gaïrt sus soun aploun, ce mur n'est guère
d'aplomb.
L'aploun est un outil de maçon en forme de triangle
rectangle, à l'angle droit duquel est fixé un cordon qui est
terminé par une boule de plomb. Cet instrument sert i
reconnaître le nivellement des assises d'un mur ou du gise-
ment d'une pierre de taille, c'est-à-dire son parallélisme
avec l'horizon.
D'aploun, adv. D'aplomb. — Seditpour ; fortement, avec
décision, sans hésiter.
Dér. de Ploun.
Apotro (Bon) , adj. m. Bon-apôtre. — Faire /ou bon-
apotro, se faire meilleur qu'on n'est, affecter la probité, la
générosité. Es un bon-apolro, se dit ironiquement soit
d'un homme faux, hypocrite; soit d'un libertin, soit d'an
homme peu obligeant ou de mauvaise foi.
Dér. du grec 'Vo'iTroXoî, envoyé, messager.
Apouénta, v. Pointer, ajuster vers un but. — Terme de
jeu de boules ; c'est lancer sa boule modérément, terre &
terre, de manière à approcher le plus près possible du bat
ou cochonnet. C'est le contraire de tira, qui signifie :
lancer sa boule avec force contre celle de l'adversaire pour
la déplacer, ou l'éloigner du but. On dit au fig. et pro-
verb. : Tiro, que iiou apouinte, passe devant, je te sui-
vrai. On le dit surtout des filous ou fripons, qui s'enten-
dent pour duper quelqu'un.
Dér. de Pouèn, (Kiint, qui est l'expression reçue au jeu
de boules pour désigner le gain du coup. On dit : Es iiou
qu'ai lou pouèn, c'est moi qui gagne le coup. — Voy.
Pouên.
Apoolidi, V. Enjoliver, rendre joli; embellir.
Dér. de Pouli, adj.
Apoulina, v. Dresser un jeune cheval, faire son éduca-
tion; le niaquignonner. Au fig. former par la flatterie;
amadouer ; tiabitucr ; déniaiser. — Vno fio apouUnado, une
fille délurée, bien maniérée, qui a toutes les ruses de la
coquetterie, ou bien une jeune fille bien apprivoisée, dont
l'éducation amoureuse est faite.
Dér. de Pouli. poulain.
Apooloun, 5. m. Casaquin, sorte do spencer de femme,
d'une étoffe ou d'un dessin différent de la jupe. Cette mode
de nos grand'mères a duré longtemps , elle revient ai^joar-
m
APR
AQU
d'hui. Il est probable que ce nom lui est venu du fr.
Apollon, en usage dans le grand monde, toujours savant
et fort en mythologie. En arrivant au peuple, il y est resté
pour représenter génériquement toute sorte de vêtements
justes à la taille et ne formant qu'un corsage sans jupe.
Cependant le renouveau de la mode a introduit de nou-
velles dénominations, et il est douteux qu'elles soient plus
heureusement trouvées : ce qui a dû faire conserver l'an-
cien nom.
Apounctaa, v. Rendre pointu; donner de la pointe, for-
mer la pointe d'un outil en fer ou en bois. Au fig. Apoun-
cha d'argén, mettre l'argent au bout des doigts ; payer
comptant. — Tout aquà apounchariè pa'n fus, tout cela
n'aboutit à rien. Apouncha dé joun émb'uno masto, faire
un travail de dupe, une œuvre sans objet.
Dér. de Pouncho.
Apoupounl, V. Choyer, dorloter, comme tine nourrice
fait pour un enfant en le berçant sur son sein.
Dér. du gasc. Poupos, sein, mamelle; ou du h. Poupon.
Apouridl, v. Faire pourrir, réduire en dissolution, en
décomposition. Au flg., gâter un enfant.
Dér. de Pouri.
Apourta, «. Rapporter, comme fait uti chien qui rap-
porte ce que son maitre a jeté, ou laissé, ou caché même
pour éprouver son intelligence et la finesse de son odorat.
C'est là la seule acception de ce mot, qui ne reproduit
aucune de celles du verbe apporter dont il est cependant
le dérivé.
Apoustïos, s. fém. plur. Attelles, terme de chirurgie ;
minces et petites planches pour maintenir les fractures d'os.
Dér. et dim. de Pos.
Apoustoumi ou Apoustémi, v. Apostumer, venir à sup-
puration; abcéder.
Dér. du gr. '.\i34!jTriu.ot, abcès.
Apouticari, ou mieux Pouticari, 5. m. Pharmacien,
apothicaire. — Aquos un conte d'apouticari, c'est un
compte d'apothicaire, un mémoire enflé à plaisir.
Dér. du gr. 'AcioOiixr], boutique.
Apradl, v. Gazonner, semer un champ de graine de
foin ; mettre en pré. — S'apradis dé pér él, il se garnit
lui-même de plantes fourragères.
Dér. de Pra.
Apréne, t». Apprendre, acquérir quelque connaissance
qu'on n'avait pas ; retenir, graver dans sa mémoire ; être
averti, prévenu ; instruire, enseigner. Dans le sens d'ap-
prendre, il signifie : apprendre une leçon, un métier ; mais
non point apprendre une nouvelle, uu ouï-dire. — Ai après
ma liçoit. j'ai appris par coeur ma leçon. Aprénguè d'istre
maçoù, il apprit le métier de maçon. S'ou es après, il s'est
formé lui-même sans maitre.
Apréne se dit aussi des plantes ou arbres transplantés,
<iui poussent de nouvelles racines, et d'une greffe qui com-
mence à pousser ; reprendre.
Dér. du lat. Prehendere.
Aprèts , s. m. pi. Apprêt ; préparatifs ; préparation en
général. Il signifie aussi : apprêt, raideur d'une étoffe pro-
duite par sa préparation ou par la teinture.
Empr. au fr. En ital. Appresto.
Après, adv. et prép. Après, ensuite. — Après la mort,
lou mèje, après la mort, le médecin ; c'est de la moutarde
après diner. M'es toujour après, il m'est toujours après.
Après, éso, adj. et part. pass. de Apréne. Appris.
— Quand il s'emploie adjectivement, ce n'est guère qu'en
mauvaise part; alors il signifie : élevé, éduqué. — Siès bien
mdou après, tu es bien mal élevé, mal embouché. Un
mdou-aprés, un mal appris, un insolent.
Aprèsta, v. Apprêter, préparer, disposer; assaisonner,
faire cuire; tenir prêt.
Dér. de l'ital. Appretare.
Aprima, v. Amincir, rendre mince; amenuiser; émin-
cer [Voy. Aménuda). — S' aprima, maigrir, s'user.
Dér. de Prim.
Aprivada, v. Apprivoiser, priver; rendre plus doux,
plus traitable un animal ou une personne d'humeur sau-
vage et farouche.
Dér. du lat. Privatus.
Aproucha (s'), v. S'approcher de quelqu'un ou de quel-
que chose.
S'aproueha est employé particulièrement pour : s'appro-
cher des sacrements, communier. — A Pasquo fôou s'aprou-
eha, faire soun dévé, il faut faire ses Pâques.
Empr. au fr.
Aprouchan, adv. Approchant; environ; à peu près.
Formé do Aproucha.
Aproufita, ti. Profiter; économiser; ne pas laisser per-
dre. — Aproufita sas fardas, user ses bardes jusqu'à la
corde. Aproufitè cent éscus davan soun mariage, il ramassa
cent écus avant son mariage. Aproufiio bien dou coulèje, il
profite bien des leçons qu'il reçoit au collège.
Dér. de Proufi.
Aproumés, èsso, part. pats, de Aproumétre. Voué, pro-
mis.
Aproumétre, v. Promettre, donner l'assurance; s'en-
gager ; vouer ; engager sa foi ; passer des pactes de ma-
riage. — • T'aprouméle que m'ou pagaras, je te réponds que
tu me la paieras. — Vous aprouméte qu'éspasvraï, je vous
assure que ce n'est pas vrai. Aï aproumés moun éfan dou
blan, j'ai voué mon enfant au blanc : c'est-à-dire j'ai fait
vœu de l'habiller tout en blanc en l'honneur de la sainte
Vierge. Mé soui aproumés, je me suis voué, j'ai fait vœu à
Notre-Dame.
Dér. du lat. Promitlere.
Apuïa, i>. .\ppuyer; étayer; soutenir; protéger.
Dér. de la bass. lat. Appodiare.
Apuïage, s. m. Droit d'appui, de mitoyenneté. — Té
farai pngii l'apuiage, je te ferai payer la mitoyenneté.
Aquél, élo, pron. dém. Ce, cet, celte, celui, celle. — •
Aquél d'aqui, celui-là. Es pas aquél que déouriè rèstre, il
AQU
ARA
ii
n'est pas tel qu'il devrait être. Oh l aquélo laï èro pa'nearo
iitado, oh ! voill un propos que nous n'avions pas entendu !
en voilà Lien d'une autre ! Soui pa$ aquél que mé crises, je
ne suis pas l'iiomme que vous croyez.
En ital. Quelto; en esp. Aqueste, aquello.
Aquéste, ésto, pron. dém. Ce, cet, cette, celui-ci.
celle-ci. — D'aquéstes ans, il y a quelques années. D'à-
quéste tin, par ce temps-ci .
En ital. Quéslo; en esp. Aqueste.
Aqnl, adv. Là, dans cet endroit ; près du lieu où l'on
est. — Pér-aqul, de ce côté-là, par là. Yen dé passa pér
aqui, il vient de passer de ce côté. Coumo vaï voste pèro?
— Pér-aqui , Comment se porte votre père ? — Coussi,
coussi, par ci, par là. D'aqui-aqui, d'un moment à l'autre,
de là là. S'en souvèn pas d'aqui-aquI, il ne s'en souvient
pas d'ici là. D'aqui et d'aïti. de çà et de là, à droite et à
gauche. Aïli n'est pas de notre Dictionnaire : c'est un de
ces mille mois inventés pour l'euphonie. Le languedocien
aime surtout à procéiler par consonnance ou rime dans la
plupart de ses dictons. Aquél d'aqui, celui-là. Aquù d'aqui,
cela même. Es aqttù d'aqui, c'est bien cela. Aqul-dri, vis-
à-vis d'ici, en droite ligne. Mais celte expression est le
plus souvent explélive. Les gens de la campagne, surtout
à l'est d'Alais, ce qu'on nomme les Gounèls, s'en servent
sans aucune espèce d'à-propos, sans besoin. Ses ana à la
fèiro hier ? — Aqui-dré y anère bi, Avez-vous été hier à
la foire î — Ma foi oui , j'y fus. Ce n'est réellement qu'un
moyen d'allonger la phrase, de se donner le temps de
répondre catégoriquement.
En ital. Qui; en esp. Aqui.
Aquîoula, v. Acculer ; pousser et serrer dans un coin
on contre un mur; empêcher de reculer; faire pencher
une voilure, une charrette sur son arriére ; faire tomber
sur le derrière.
Dér. de Quiou.
Aqiiis, s. m. Acquit , quittance. — Un bé dé bon aquis,
dé michant aquis, une fortune bien ou mal acquise.
Empr. au fr. Dér. du lat. Acquirere.
Aquissa, v. Haler des chiens pour les faire battre ; exci-
ter deux ennemis, deux rivaux l'un contre l'autre. — Le
même que Atissa. — F. c. m.
En celto-brelon, Atizar, m. sign. Le mot est-il formé par
onomatopée de quis-quis, cri d'excitation, ou bien le verbe
»-t-il inspiré l'onomatopée 7
Aqoita, v. Acquitter , solder, payer intégralement. —
Quàou s'aquito faï cabâou, qui paie ses dettes s'enrichit.
Empr. du fr.
Aqno, pron. dim. Ça, cela, celte chose-là. — Coumo
aquù, comme cela, ainsi. Aquà d'aqui, cela, cela môm;.
AquMo, mol-à-mot : cela bon, signifie une liqueur quel-
conque moelleuse et sucrée, on toute autre friandise.
Vn piehà véïre d'aquù-bo, un petit verre du meilleur. Un
d'aquà, une chose, une affaire dont on ne se rappelle pas
le nom. Emb'aquà ou End'aquà, avec cela, pourtant, cepen-
dant. D'aquà, de cela, de cette chose. A fosso d'aquà, il a
beaucoup de biais, d'esprit, de subtilité, d'adresse. A d'aquà,
il a du quibus. F<tou d'aquà. il faut de l'argent. Aquà's,
contraction do aquà es, c'est. Aquà's aquà, c'est cela, c'est
bien cela. Aquà'ro, contraction de aquà iro, c'était. Aquà
vaï aqui, c'est la conséquence naturelle do cela. .4 fud tomba
bien, cela arrive bien, à propos, à point nommé. Aquo uni
bien, cela va bien. Qu'es aquà? qu'est-ce que c'est ? Aquà's
aquti, c'est cela. Aquà's p'aquà, ce n'est pas cela. .4» vit
aquà? as-tu vu cela ? Vèiras aquà, tu verras, tn me la
paieras. Aquà si dis, cela se dit ; on en parle.
Aquà se prend quelquefois comme prépos. pour éncâ.
chez. — Anan aquà dé moun pero, nous allons chez mon
père. — Voy. Encà.
Dér. du lat. Quod.
Ar, s. m. Arcade, arceau, constmction en courbure de
voûte. — Au plur. Lous ars, les arceaux, les arcades. Le
marché à Alais était entouré de portiques ou arcades. L'éta-
lage des légumes et autres marchandises, dans le temps
des foires et des marchés, se fait souto lous ars. L'ar
dé Vius, l'Arc-des-'Vienx , carrefour à Alais, formé en
voûte à la rencontre des rues Valanrie, Bouquerie et Ray-
mond Pellet : il vient de disparaître. Vius nous parait être
ici un nom propre : l'art, dé au sing. l'indique. On aurait
dit das vièls si l'on avait dû traduire par l'.4rreau des
vieillards. A moins qu'il ne s'agisse d'une corruption fran-
cisée. — Voy. Vius.
Dér. du lat. Areus.
Ara, V. Donner des arrhes, s'assurer d'une vente, d'un
achat moyennant des arrhes; arrher. — Se dit généralement
pour retenir d'avance un objet chez un marchand. C'est
une promesse d'acheter une chose qui n'est pas encore livrée .
Dér. de ^ro, arrhes.
Araïre, s. m. Araire, charrue à deux bêtes, et même i
une seule, sans roue et sans coutre. — Cette fois c'est bien
évidemment le fr. qui a emprunté au languedocien le mot
araire, qui figure assez nouvellement dans la nomencla-
ture technique de l'agronomie.
Dér. du Ut. Arare.
Aran, s. m. Fil d'archal : fil de for ou de laiton. — En
esp. on l'appelle : Uilo de arambre. — Voy. Fiou dé
richar.
Dér. du lat. Aramen, airain, enivre.
Arapa, v. Prendre, saisir avec la main ; empoigner, accro-
cher. — Arapol attrape! Arapa-lou, empoignez-le. Se
t'arape, si je te pince. Tarapardil je t'y prendrai.
S'arapa, se coller, s'accrocher. — La pégo s'arapo à las
mans, la poix s'attache aux mains. Aquél chival s'arapo
bien, ce cheval tire à plein collier. Aquél Iwme couménço
dé s'arapa, cet homme commence à bien faire ses affaires,
à prendre dans son commerce. On le dit aussi d'un con.
valescent qui revient en santé après une longue ou dange-
reuse maladie.
Dér. du lai. Arripere.
64
ARC
ARD
Arapo-man, s. m. Grateron, galiet grateron; Galium
aparine, Linn. Plante do la famille des l\ubiac(?es, ram-
pante, rude au toucher et qui s'accroche aux mains quand
on la saisit. De là lui vient son nom. — Voy. liéboulo et
HéjislH.
Arapo-pèon, i. m. Bardane, Aretium lappa , Linn.
Plante de la fam. des Composées Cynarocéphales, floscu-
lense, et dont la semence est renfermée dans un hérisson
dont les piquants sont terminés en crochets; ce qui fait
que, lorsqu'on les mMe dans des clicveux un peu longs,
on ne peut plus les débrouiller et l'on ne s'en débarrasse
qu on coupant; son nom dérive de cet effet.
-• Arasa, «. Terme de maçon, couronner un mur, égaliser
« dernière assise, la niveler.
Dér. de Bat.
Arboùs, s. m. Arbousier, Arbulus unedo, Linn. Arbris-
seau do la fam. dos Ericacéos, toujours vort, qui porte à la
fois des fleurs et des fruits. Ces derniers sont d'une belle
couleur aurore foncée, mais fades, d'une saveur plate.
Dér. du lat. Arbulus, m. sign.
Arboussé, i. m. Lieu planté d'arbousiers.
Arbousso, ». f. Arbouse, fruit de l'arbousier. — Ce mot
et les deux précédents ont fourni un assez grand nombre
de noms propres et de lieux, comme : Arbous, Darboux,
Larbous, Arboussé, Arbousset, Darboussier, etc.
Arbontan, s. m. Pied de biche, bras de fer qui sert à
fermer l'un des vantciux d'une porte cochére. Il n'a aucun
rapport de signification avec Yarc-boulant fr., dont il est
pourtant dérivé probablement.
Arcanje, s. m. Archange, ange d'un ordre supérieur dans
la hiérarchie céleste.
Empr. au fr.
Arcèli, s. m. Lavignon, Tenus decussala, Linn. Coquil-
lage marin, bivalve, bon à manger, du genre des Cames.
Dér. du lat. Arcella, petit coffre.
Arcbavésque, ». m. Archevêque, prélat métropolitain
qui a des évêquos pour suffragants.
Dér. du lat. Arehiepiscopus, formé du grec ^^çf^, pri-
mauté, et 2ciiiTxoj:o;.
Arche , s . m . Cavalier de l'ancienne maréchaussée ; archer,
soldat armé d'un arc et de flèches.
Dér. de la bass. lat. Archeriut.
Arche, ». m. Archet, baguette aux extrémités de laquelle
sont attachés en saillie des crins qu'on tend à volonté et
qu'on passe sur les cordes d'un violon ou d'une basse pour
en tirer des sons ; instrument pour faire tourner un foret ;
sorte de piège fait avec deux branches pliées en arc et
rattachées par un fil double, pour prendre les petits oiseaux ;
en terme de moissonneur, étui de la faucille, qui en a par
conséquent la forme recourbée.
Dér. de Ar, dim.
Archiban, ». m. Banc à dossier, banc d'honneur, chez
\2s bons paysans des Cévennes, placé au coin de leurs im-
menses cheminées : c'est le siège des chefs de la maison et
des étrangers de distinction. L'archiban est aussi un long
coffre en forme de banc, fixé auprès de la table à man-
ger, Sauv. — Le mot et la chose sont des demeurants
do l'ancien régime : ils représentent ces mœurs patriar-
cales, qui conservaient avec rcsjiect les traditions de la
famille et de l'hospitalité, l'amour du père assis au foyer
domestique ou à la table frugale, à la place d'honneur. Le
progrès ne trouve plus là que des ais vermoulus qui ne
sont bons qu'à jeter au feu.
Dér. du grec \yf\, primauté, puissance, et Ban.
Archimpo ou Archipo, ». m. Etuvée, viande hachée,
hachis.
Dèr. du gr. 'Apx'^?. premier, principal, grand, et du
lang. Po.
Arcialoùs ou Arcièloùs , ». m. Bolet, a'pe, potiron,
champignon gris , très-bon à manger ; Iwlet comestible,
Boletus edulis ou esculentus , ou bovinvs. Fers., Linn.,
Roques. — Cet excellent champignon se roconnait aisément
à son chapeau plus ou moins large, un peu ondulé sur les
bords, d'une couleur fauve, quelquefois d'un rouge de
brique, brunâtre, couleur noisette. Sa substance intérieure
est ferme, d'un beau blanc qui ne s'altère pas à l'air, à la
cassure. Le pédicule est épais, tubéreux, renflé à la base,
court ou élevé. Il est essentiel de ne pas le confondre avec
le pissagd, qui lui ressemble beaucoup et qui est très-véné-
neux et malfaisant. C'est cette espèce de champignon, très-
abondante dans les Cévennes, qu'on fait sécher et qui est
livrée au commerce. Au nord d'Alais, on le nomme Céhùi;
ce n'est qu'une contraction de 'notre vocable. — Voy. Cé-
loùs ; Pissagd.
Dér. de l'it. Araceli, m. sign.
Arcisoùs ou Artisoùs, ». m. pi. Ver, mite ou ciron du
fromage, Acarus siro, Linn. Insecte du genre des Aptères
et de la fam. des Parasites. On le nomme également JJ/aram).
— Voy. Artisoùs et Marano.
Le second de ces noms, dont le premier n'est qu'une
variante, est évidemment parent du fr. Artisan, qui est
aussi un petit insecte rongeur.
Arculo, ». m. Un homme fort, robuste, un Hercule.
Empr. au fr.
Ardécho, ». f. Ardéche, département dont le chef-lien
est Privas ; rivière qui y prend sa source et lui donne son
nom, affluent du Uhône.
Dér. du lat. Arduesca.
Ardïoù, ». m. Ardillon, dard on pointe d'une boucle.—
— Sara un ardïoù, serrer sa ceinture d'un point, se ser-
rer le ventre, au prop. et au fig.
Ce mot est au moins contemporain du fr. ; il est dér. dn
celt. Darl, pointe, ou du grec "Apoiç, L'ital. a Artiglio,
orteil, ergot, serre.
Ardoù, ». f. Grande chaleur, chaleur brûlante, parti-
culièrement celle qui est produite par la fermentation ; viva-
cité avec laquelle on se porte à quelque chose.
Dér. du lat. Ardor.
ARE
AlU-l
65'
Are, *■ m. Bt'licr, le màlo non ch.ltré de la LrcLU-
Dér. du lat. Anes.
Arèdre, v. Lasser, fatigncr, harasser; rendre; mettre
sur les dents. — Se dit surtout de la fatigue procurée par
une marche foro'^.
Dér. du lat. Radueere.
Arédu, udo, pari. pass. de Aridre. Rendu, lassé, ha-
rassé.
Arcgacha, v. Regarder; fixer attentivement en arrière.
— So J.i aus.'ii geni'riijueuient pour: regarder, considérer
de toute maiiiiM'e.
Fonnii du I.U. Aetrd, arrière, et du gr. 'Ayoio, admirer.
ArémouU, ido, ou Arémoolu, udo, udj. Avide, âpre à
la cuivc; qui n'a pas de puJeur dans si'S vues intéressées ;
alTroiilcur ; insatiable. — Voy. Bemouta.
Arémouliie, s. m. Avidité du bien, désir insatiable d'en
acquérir, uiéle de jalousie ; cffroMterio intéressée.
Aréna, v. Tenir en bride; raccourcir les rênes. — Arina,
ado, part. pass. Au fig. Rengorgé, qui relève la tête, qui
,«0 rengorge.
Dér. du lat. Retinaeulum, ou de l'ital. Pedina, rêne.
Arénadoù, $. m. Terme de bitier ou de iKiurrelicr, Ar6-
lioir; bouton ou baguette fixés au-devant du UM ou d'une
, barde ou bardelle, pour y accrocher les rèujs du bridoa oa
la longe du licou.
Dér. de Arma.
Arénda ou Arcnta, v. Prendre et bailler à ferme,
prendre et donner à loyer; affermer, louer.
Dér. de Rendo.
Aréndamén ou Aréntamén, s. m Bail à ferme oa à
loyer ; le prix du ce bail. — Mi fâou ana paga moun arén-
damén, il me fnu[ aller payer mon loyer.
Dér. de Rendo.
Arénja, t). Arranger, disposer, mettre en ordre; accom-
moder, ajuster, ranger; raccommoder, concilier, accorder,
faire transiger ; arranger une affaire. — Arénja sous afaï-
res, mettre onlrc A ses affaires. Arénja soun p^u. jieigner,
lisser ses cheveux. Aquà m'arénjo bien, cela me va, cela
m'arrnuge à merveille ; s'accorde avec mes intentions ou
mes iiilt'ièts. Lou jugt tous arénjf, le juge les réconcilia,
les fil transiger. Fdou arcnja aqaet proucès, il faut arran-
ger cotte affaire.
S'aimij.i, se parer, s'ajuster, s'endimnncher ; se ranger ;
•'arranger, prendre des arrangements, se mettre ^ son aise.
— Suïqué t'arénjarus un pdou, sans douto tu t'habilleras
convenablement. Lou lén s'arénjo, le temps devient serein,
ou bien, il se radoucit. Aquél home s'arénjo démpiii qu'es
marida, cet homme est devenu plus rangé, moins dissipé,
moins prodigue, depuis son mariage. Se voulès , m'arénja-
raï d'uqudo pièço, si vous voulez, je me chargerai de ce
champ, je m'en arrangerai, je vous l'achèterai. Aquélo drolo
s'arénjo bien, cette jeune fille s'ajnstc bien. Arenja-vous,
sans fnçoun, mettez- vous il votre aise, sans cérémonie. Aïçù
f'arénjur-a, tout ceci s'arrangera, se raccommodera. Bouto i
bouto I farenjartiï, va! va ! je t'arrangerai d'importance,
je te châtierai de la lionne manière.
Dér. de l'allem. Ring, rang, d'où est venu rén.
Arénianién , s. m. Arrangement , transaction ; ordre
dans la teime d'une maison ; esprit de conduite dans se*
affaires. — Vn michan arenjamen frtou maX qu'un bon prou-
eis, mauvais arrangement vaut mieux que bon procès.
Aréscle, i. m. CiTcle en bois refendu, dont on reliait
les anciennes mesures de capacité, telles qne les minots,
quartes et boisseaux ; dans les mesures du nouveau sys-
tème, ce cercle est en fer. L' Aréscle est encore le cerceau
d'un tamis, d'un crible, des tours à filer la laine et le
coton, des caisses de tambour, etc. — Pif uo tant sut l'aréscl»
eoum'o sus lou tambour, il parle ab hoc et ab hae, sans me-
surer la portée de ses paroles ; par comparaison avec un
tambour maladroit qui frapperait tantôt sur le l)ois, tantôt
sur la peau de sacaisse. — Aréscle dé tnouli, archnres d'an
moulin à farine ; elles sont recouvertes par les converseaux
et forment ensemble le tamboar : terme de meunier.
Dér. du lat. Arculum. En roman areset», cercle mince,
éclisse. éclat de bois.
Arcsouna, v. Demander raison; discuter; interroger;
faire rendre compte.
Dér. de Résoà.
Arésta, v. Arrêter, retenir, empêcher d'aller oa dédire :
faire cesser, réprimer; attacher; déterminer; régler; saisir
par autorité de justice ; engager pour servir ; décider, con-
venir de faire. — t'aréttire Uou, je le retins, je l'arrêtai
bien vite; je le réprimai. Arésta lou san, étancher le sang.
Arésto aquélo bœho, calle cette boule. Avin arésta lou Jour,
nous avons fixé le jour. L'an arésta, on l'a mis en prison,
on l'a écroué. Aï arésta un méssaje, j'ai retenu un domes-
tique, je l'ai arrhé. Avèn arésta dé faire uno pérménado,
nous avons décidé d'aller à la promenade. AquH ehï aristo
bien, ce chien a bon nez, arrête ferme le gibier.
Arésta, ado, part. pass. et adj. Sage, réservé, retenu,
posé, quand il s'agit des personnes ; arrêté, fixé , concla ,
en parlant d'une chose, d'une affaire, d'un marché. — Vn
Jouïne home arésta, uno fio aréstado, un jeune homni8
sage, posé, une fille vertueuse, réservée.
Dér. du lat. Restare.
Aréstamén, ». m. Arrêt, arrestation; saisie d'une per-
sonne ou des biens. — Faguèrou un aréstamén dé soun bé.
on fil contre lui une saisie immobilière. — On se sert dn
mot banimén, quand il s'.igit d'une saisie-arrêt ou mobilière.
Aréstiè, s. m. Arêtier, pièce de bois qui, dans un toit,
part de l'extrémité du faite et va en descendant reposer
sur l'angle du bâtiment, divisant les eaux à droite et k
gauche dans les toitures à deux égoùts.
Dér. de Arésto.
Arésto, ». f. Arête de poisson, os long et pointa qui
lient lieu de côtes dans les poissons; crête d'un toit; angle
saillant d'un prisme, d'un mur, d'une voûte.
Dér. du lat. Aritta, barbe de blé.
ARG
ARG
Aréstoù, ». m., ou Cabi. Chabot, mpunier, chcvane;
Cyprinus dobula, Linn. l'oissoii de rivicro, qui a la lète
large et plate, la guoiile fort ouverte et s:ins dents. Sa
chair, peu estimée, est toute parsemés d'arèles, ce qui lui
a valu son nom lang. — Yoij. Cabù.
Argèlo, ». /". Argile; terre grasse; terre do poterie. —
Pasta U'argèlo, pi>trir de l'argile.
Dér. du lat. Argilla.
Argéloùs, onso, aJj. Argileux, qui tient de l'argile.
Dér. de ArgUn.
Argén, ». m. Argent, métal ; monnaie en général. —
iiino d'argén. cuU d'argén, mine d'argent, cuiller d'ar-
gent. Plago d'argm es pas mourlèlo, plaie d'argent u'esl
pas mortelle. Gagno vir l'argén, se dit d'un animal domes-
tique quelconiiue, qui est encore d':lge à augmenter de
valeur en grandissant, ou d'une bête qui a Ole malade et
qui se rétablit cli.Kjue jour : dans ce dernier sens, on l'ap-
plique même aux iwrsonnes. Gagnan vir Vurgcn, disons-
nous à un malade pour lui donner do l'espoir ou du cou-
rage. Aquos d'argén dé mnun gagna, c'est de l'argent de
mon pécule, g.igné par mon travail ou mon industrie, et
non advenu par héritage. Au (ig. Aquo's d'argén de soun
gagna, se dit aussi d'un malheur arrivé à quelqu'un p.nr
sa faute ; c'est un malheur qu'il a éle chercher lui-même.
L'argén es roun, fônu be que rounle, la monnaie est ronde,
pour qu'elle circule; l'argent est fait pour rouler, jwur
courir d'une main à l'autre. D'argén blan, eu monnaie
d'argent, en pièces d'argnnt. Pugan argen counian, nous
payons eu espèces sonnantes. Ana bon jo, bon argen, agir
loyalement, franchement, sans ménagement.
Dél. du lat. Argentum.
Argénta, ti. Argenter; passer une couche d'argent ;
donner une couleur argentée.
Argènta, ado, pari. pass. du v. préc. et adj. Le même
que ArgéntoilS. [V. c. m.) — Sèn pas biùn argénias pér
lou moamen, nous ne sommes pas riches, pas chargés d'ar-
gent pour le moment.
Argéntariè, ». f. Argenterie, vaisselle ou autres meu-
bles et ustensiles d'argent. — C'est le nom d une rue il
Montpellier, i'Argeuterie , oii était autrefois l'ilôlcl des
monnaies.
Argéntoùs, onso, aitj. Pécunienx, riche en espèces;
qui a beaucoup d'argent; qui produit de l'argent. Ne se
prend guère que négativement.
Argén-viou, ». m. Vif-argent, mercure. La propriété de
cette substance métallique, blanclic et fluide, d être conti-
nuellement en mouveiasnt à la moindre agitation, l'a fait
prendre pour emblème des personnes vives et renmantes.
— Sembla qu'a d'argén-viou din sa4 mans, ses mains s'agi-
tent comme si elles étaient du vii-argent.
Argnè, ». m., ou 'Vèrdé. Marlin-péchenr, oiseau. — On
l'appelle Argné parce qu'on avait cru longleiiips qu'en le
mettant desséché dans une garde-roi», son mieur en chas-
tait les teignes, arnot; mais, loin de préserver sou voisi-
nage, on a vu. dans les cabinets d'histoire naturelle, l'ar-
jjiJ èlr.' puMii les oiseaux cmpràLéj un des premiers atteint
par \'À'n iii.-.'ictes.
Vo^. \\n''e.
Argue, on fr. Argues, terminaison d'un grand nombre
de noins de lieux dans le 13as-Lauguedoc, départ, du Gard
et de llli'rault.
La finale Argue a été longtemps considérée comme repré-
sentant le lat. agir, champ, domaine. Cette ingénieusef
interprétation, niise en crédit par le savant liisl'ricn M6-
naril, élait coinbaltue par les Bénédictins de l'ilisloiro
générale du Langin'doc; elle fut adoptée à titre de conjec-
ture par Sauvages ; aujourd'hui, battue en brèche au sein
même de l'Académie du Gard, elle parait abandonnée par
la plui)arl des élyinologistes.
Argue, dans la langue vulgaire, le languedocien, est, en
cITet, de dernière formatiin ; elle n'apparaît iju'au XIV' siè-
cle, où elle devint parliculi to au territoire qui avait été
autrefois le pays des Volœs Arécomique*.- Au moyen âge/
les noms ainsi formés avaient pour finale anègues, ani-
gués ou unicités ; dans le priiaiiic c'était le radi.-al celtique'
eli ou son analogue contempirain ak , qui s'attachait aux
mômes noms pour leur donner la signification de pro-
priété, un sens, une idée de provenance.
Quand, avec la conquête, le latin s'imposa à la Gantof
il ne changea jinsles appellations locales existantes; seule-
ment il l'Mir iinprima le cachet de son génie et de sa
langue, et il ajouta ses finales caractéristiques eu u», a,
um. selon qu'exigeait l'accord avec mansus, villa , cas-
trum ou pritdium. Pour les établisssemenls nouveaux qui
se créèrent dans la suite, les mêmes procédés de dénomi-
nation furent employés. De là les terminaisons en aeut,-
aca, ucum; puis les variantes enanj'ws, aneus, atius, assiui,
a, um, etc., désinences correspondantes adjeclivcs.
Les Gallo-Romains, nos ancêtres, adoptèrent donc soit
pour l'euphonie, soit pour se rapprocher de la forme latine,
les finales celtiques latinisées ou purement romaines. Enfin,
lorsque du mélange se forma la langue romane rustique,
plus tard quand se fit la division en langue d'Oil et en lan-
gue d'Oc, comme le latin se conserva toujours à titre de
langue officielle des actes publics, les altératioiis se multi-
plièrent, par une sorte de marche parallèle. Les influence»
elliniques, qui ont tant de puissance sur l'intonation, agi-
rent à leur tour piur modifier les terminaisons. Ainsi,
tandis que le latin disait ucus, aca, ucum, le roman répon-
dait par ac,as,at, par préférence au niidi et au centre de la
France, et p.ar e, y, ey, ieux, etc., dans le Nord. Les ten-
dances à la contraction, à l'adoucissement de la prononcia-
tion se mani:estèrent ; et alors que le basjalin écrivait
acus, anus, a, iiiii, le roman siipijrimait la terminaison et
il avait an, en, ane, enne, et ainsi de suite sur les autres
voyelles.
Peu a peu, par le mftme sentiment, la consonnance ton-
jours dure du t se transforma en ck chuintant, et l'on arrivs
ARG
ARI
67
MX désinences mèMos en ache, anehe, ineht, tneh«. L'or-
tbogra|ilie ne resU pas d siiiUîn.-ss'e dans la question: le
latin WMiplaçait souvent !'« pir j. Or (junnd les (lallo
Romains, de aniut, aneus, onius, », um, eurent fait
anicus, inicui , onlcus, a, um, et anica , au plur. .
l'inversion par anjcus, anjus, aliailde soi dans l'iHiriiure:
la chute du c dur s'ensuivit et l'on eut unjus, enjus, a,
um, et les nuln's, qui par la suppression de la linnle carne-
lérisliqiio pr.")iluisiri"nt do leur oi)l<i unje, en je, iuje. L'on
comprend euoure (|(ie la suliStitution du g doux, au j soit
arrivée tout uaturellemcui, cuiiMue celle du c doux ou du
ch au c latin sonnant k dc^vant toute voyelle. Ces conjbi-
naisons amènent également le <jh mouillé et aussi la inéta-
thése ng. — Yoy. lus articles Agno, Canounge, Catsagno,
et autres.
De là sont issues les finales en agna, igna, agnae, ignae,
ailleurs igné, igné;;, ignies, igny, etc., qui se prononcent
en nasalisant et en inouillant. Et ce pliénoinéue, dans notre
pays, avait passe d'abord par un'guat, oniguei, aniches,
inigtus, onich.es, etc., du moyen ;ige fDinan, désinences
exprimées en lat. anieœ, enicce, onicw, et qui sont enfin
devenues orgue, ergue, orgue, d.ins bien des ap;iellatiaus
de ni:s jours.
Mais il est facile de saisir, !i travers ces pi-riniitations
de lettres, les altérations qui se sont produites de la l'urme
romane priuiilive aux furines d'MInilives de notre dialecte.
Toutes ces variétés do finales, depuis ac = ec = aeus,
anus, aniut, jusqu'à an, anche, ènche, anj'e, ange, agne,
elles autres, comme uncx = anègues = argues, etc.. ont
donc nue source commune et sont é(|ui]Hjl lentes ; et
ce qni le prouve, c'est que le latin, langue plus fixe,
plus fidèle au radical premier, les exprime, ([iiello que
soit leur diversité, au midi et au nord, par sa formule i
peu prés uniforme acum on anum; et que, dans les noms
de lieux, d'un bout de la France à l'autre, des corps de
mots identi(|ues, portant suivant les pays des terminai-
sons différentes, en langue vulgaire , se retrouvent dans
le latin des chartes, des diplômes, des anciens titres,
avec la mémo fiii.ile InvariaLle. Pourquoi ces différences
cnr des mots siiiiilaircs, souvent inéiuc à des distances
trés-rapprocliées?
Sic voluére patres, stc Toluit usus.
Question de latitude ; loi de permutation ; recherche
d'énergique euphonie; toutes ces caiis.-'s ont pu amener
une coiiibinaison qui a donné lieu à de si singulières inter-
prétations.
Pourquoi encore, pour nos contrées, près de nous, an
milieu de ces syllabes fluides de la terminaison latine, s'est
introduite la consonne ruJorde notre orjMg? Comment 1'»
doux a-t-il disparu? Il n'y a pas peut-être d'autre raison,
et il faut bien s'en contenter, que celle qui, du latin pasti-
naea a fait notre pasténargo: de ilominicus, domirgue; de
dies dominica, dimCrgue (v. lang), et diménche actuel ;
qui a converti le Pugus rutenicus en Uoucrgue ; canonicus,
chanoine, en canounge; villa eononica en La Canonrgua
(Lo/,ère),et le même, nom d'une place à Montpellier; comme
mnnica, religieuse, s'est transformé en mourgo, les Mour-
gués, nom d'une de nos rues, et les dim. mourguéto et
mounjéio. {V. c. m ) Ce qui est remaniuablc néanmoins,
c'est que la même forme se rencontre dans l'espagnol
et dans l'italien, langues néo-latines de mèrae origine que
la nôtre. — Vog. Canounge.
Il nous parait donc évident que la finale argue n'est
qu'une désinence purement explélive, adjeclive, qui em-
porte de soi un sens de provenance, une idée de propriété,
à peu prés comme agir, mais qui n'en est pas on dérivé ni
une traduction. Ce qu'il fallait démontrer.
Ari, inierj. Haie! commandement qu'on adresse aux
ânes, chevaux ou mules pour les faire avancer. — On dit
d'un paresseux, d'un ouvrier nonchalant : tôou loujour i
dire: ari, il faut toujours lui dire : allons donc!
Habelais s'en est servi dans ce sens : Ari, bourriquet/
En ilal. on dit aussi : arri; on esp. port. arre. Les
Anglais ont, avec h même sigiiilication, le verbe to harri.
Uarre est un mot arabe d'origine ; il signifie proprement :
marche, avance. En celt. uri désigne un âne. Tous ces
mots et le nôtre dériveraient-ils du celtique ? Le latin aurait-
il contribué de moitié \ sa composition, en combinant et
élidant aro, maintenant, avcci, impératif, va, marche? En
étymologie, il ne faut jurer de rien.
Ariala, w. Canaliser, oinduirc les eaux d'.arrosage par
de |)elits canaux. — La ribié'iro s'és touto arialado d'un
eousia, la rivière s'est creusée un lit étroit sur l'un de ses
bords.
Dér. de liial.
Arias, J. m. n. pr. de lieu. Arias, nom de ruisseau dans
plusieurs communes du Gard.
Dér. sans doute, comme le mot préc, de Itial, avec l'a
explétif ; peut-être aussi le mot riassos n'est-il pas étranger
à sa formation. — Voy. Riassos. Toutes ces idées se rap-
prochent et se tiennent.
Ariba, V. Donner à manger aux animaux ; jeter de la
feuille aux vers à soie; appâter un enfant, un vieillard, on
infirme, qui ne peuvent faire usage de leurs mains. —
Ariba, sans n^gimc, s'applique, par excellence, aux vers i
soie : A guinio houro ariban 1 à quelle heure donnons-
nous la feuille, le repas de feuille aux vers à soie ? Ariba
Jou reinar, app\tcr le renard, faire une tramée d'appât
qui le conduise dans le piège. Tôou ana ariba sas gnèiros,
il faut aller donner à manger aux puces, c-â-d. fam. se
coucher. Ai;ibo sans fiAo, répond quelqu'un à qui l'on
demande une chose impossible ou trés-difiicile à faire:
donne à manger à tes vers sans le moindre brin de feuille.
Aribado, i. /". Repas, ration qu'on donne aux animaux,
particulièrement aux vers à soie. — Quant donnas d'ari-
bados? combien de fois par jour donnez-vous à manger aux
vers 7 Lus manguo pas qu'uno aribado perlous ajassa, il ne
manque à ces vers qu'un léger repas pour les faire dormir
68
ARL
ÂRM
Aribaïre, aîro, adj. Ouvrier qui donne à manger aux I
vers à soie.
Ariè, interj. En arrière! commandement pour faire
reculer un cheval.
Formé du lat. Retrù ; en esp. Arriédro.
Arles (es) , aJv. En arrière, en reculant, derrière. —
Porto loun eapêl et ariès, il porte Son ch-ij^au eu arrière.
Yaï M ariès, il marche en arrière ; il porte, il incline der-
rière.
Dér. du lat. Ad retrd.
Ariguiè ou AUgniè, par corr. Alisiè, ». m. Alisier,
Cratœgut aria, Linn. Arbre de la fam. dtisUosacées, com-
mun dans les bois. Son fruit se nomme Alise en fr.
Ariuè)e, s. m. Salsepareille du Languedoc, d'Europe,
Smitax aspera, Linn. Plante de la fam. des Asparagées,
sarmeiiteuse, à baies rouges, rampante el épineuse. — On
dit proverbialement : Bama coumo un ariuèje, de ce qui
est touffu, épais, même d'un mensonge.
Dér. du gr. !\pî;, lime, râpe, cette plante étant toute
hérissée de pointes.
Arira, v. Arriver; aborder, parvenir dans un lieu où
l'on voulait aller ; advenir ; survenir. — Faï pas que d'a-
riva, il vient d'arriver, il arrive à peine. S'aquà m'arivo
tourna, si l'on m'y prend encore. Se t'ar>'vavo, si lu t'avi-
sais de cela, s'il t'arrivait. T'arivara matur, il t ea advien-
dra malheur. Y-és ariva, il y est parvenu, au prop. et
au fig.
Ce verbe, en languedocien comme en français, a été tech-
niquement approprié, dans le principe, à l'arrivée d'un
voyage sur eau. Son étymologie de rive ou de ribo, quand
on prononçait ariba au lieu de ariva, le démontre assez.
Les deux dérivations se confondent dans le lat. liipa, ad
ripam.
Arivado, i. f. Arrivée; venue de quelqu'un on de quel-
que chose en un lieu.
Dér. du lat. Ad et ripa.
Arjalas, ». f. Genêt épineux. Spartium scorpius, Linn.
Arbuste de la fam. des Légumineuses, à fleurs jamies ;
ajonc.
Sauvages prétend que ce mot est d'origine arabe; ne
viendrait-il pas plutôt du grec 'VpfaWoî, difficile, fâcheux,
incommode, qui est pour l)eaucoap dans le lat.. argutus ;
à cause des longues épines de cet arbrisseau î
Arialassièiro, ». f. Lieu couvert d'ajoncs, de genêts
épineux.
Dér. de Arjalas.
Arjéïrolo, ». f. Azerole. fruit de l'azerolier, arjérouU.
Arjérouïè, ». m. Azerolier, Mespilus, Linn. Arbre de
la fam. des Néfliers, dont le fruit ressemble a une petite
pomme el a dos noyaux comme la sorbe.
Arle, ». m. Arles, ville de Provence ; sous-préfecture du
départ, des B3uclies-du-Ilhônc. — On dit : en Arle, à Arles,
et non à Arle. — Voy. Aoubénat-
Dér. du lat. Arelas.
Arlén, énquo, adj. Arlésien, ienne; d'Arles; qui est
d'Arles.
Dér. du ht. Arelas.
Arlènde, s m., n. pr. de lieu. Arlende, hameau dépen-
dant do la coiiiiiiune d'Allègre, canton ds S.iint-A!iibroix,
arrondissement d'.\lais. Dans le voisiinge, se trouve une
belle source du même nom : La fon d'Arlèwle.
Ce mot est écrit dans le dénombrement de l.a séiié.îhaus-
sée de ÎSimes, ArlempJe. Sa denirh'e partie fonin-'e de linde,
clair, transparent, traduit le lat. Lmpixlus. Sa première
syllalje est-elle l'article armoricain ar, la, que l'on trouve
dans bien des noms commençant ainsi : Ar-leux (Nord),
très-rapproché de notre mot; Ar-cenay (Côte-d'Or); Ar-
dennes (Aveyron), et autres ? Serait-elle préposition repré-
sentée le plus souvent par le lat. ad, vers, ou h particule
celt. intensive, jointe à l'adjectif pour lui donner plus de
force et mieux exprimer la beauté et la limpidité des eaux
de la font.iiue d'ArUnde? — Voy. Zeuss, Cramm. celt.
On pourra choisir.
Arlequin, s. m. Arlequin, homme léger, peu sûr ; bouf-
fon, farceur.
Ce nom est le surnom d'un bouffon de théâtre qui vint
d'Italie à Paris s ms le règne de Henri III. Comme il allait
souvent chez M.M. de Harlay qu'il amusait beaucoup, ses
compagnons le nommèrent Barlaiquino, petit Harlay ; et
ce nom est demeuré à tous ses successeurs dans l'emploi.
Il a fini par passer dans l'usage comme adjectif.
Arléquinado, ». f. Arlequinade; tour d'arlequin; bouf-
fonnerie; l.tziii; niche.
Anna, «. Armer, donner des armes ; mettre sous les
armes; disposer une machine, un fusil à tirer, à faire
feu.
Dér. du lat. Armare.
Armado, ». f. Armée ; troupes en corps sous la con-
duite d un chef; grande foule, grand nomlire. — F sian
uno armado, nous y étions en foule, en grande multi-
tude.
Armagna, ». m. Almanach, calendrier.
Altér. de Almanach.
Armas, ». m., augm. de Erme, grand tènement de terre
en friche, de lande. Autrefois il avait la signification de
marais, terrain marécageux, et les an.;iennes clinries latines
le reniliient par Palus, paludis. Sauvages lui donne pour
synonyme Garigo, qui a le sens de marais. — Voij. Erme,
Aimurgue.
Armasi, ». m., ou Cabine. Armoire, placard, buffet;
meuble où l'on tient du linge et des bardes, et où le
paysan serre ce qu'il a de précieux.
Ce mot vient, comme armoire, son correspondant fran-
çais, de ce qu'on y ren.'ermait autrefois les armes, les
armures, et dans les châteaux les titres et les armoiries.
— Cérquo la gnuè pér tous armasis, il clierche midi
à quatorze heures, il cherche des faux-fuyants.
Armitaje, ». m. Ermitage, habitation d'un ermite; au
ARO
ARP
6fl
fig. lieu solitaire, maison isolée; nom d'une montagne qui
domine Alais, où était un ancien ermitage.
Dér. du lat. Eremita.
Armito, i. m. Ermite, solitaire qui s'est isolé du monde
pour servir Dieu. — Démpièï qui l'armilo es mort, arivo
toujour quicon, dit-on chaque lois qu'il arrive un malheur
ou un événement étrange, comme si l'ermite était une
•espèce de Providence qui éloignait les malheurs d'un pays.
An fouita l'armilo, aquà i-amérilo, chantent les enfants
autour d'un camarade qui a été puni par ses parents, ou
qui a été justement houspillé par un compagnon plus fort
que lui.
Dér. du lat. Eremita.
Armo, I. f. Arme; tout ce qui sert à armer, soit potir
l'attaque, soit pour la défense. — N'y douriè pér n'en
prine las armas, il y en aurait pour prendre les armes,
pour s'insurger, au prop. et au fig. Pourta l'armo. la*
armos, porter les armes.
Emp. du fr. dér. du lat. Arma.
Armol, (. m., ou Armôoa. Donne-Dame on Arroche
des jardins, Àtriptex hortensis, Liun. Plante potagère et
sauvage; quand on la cultive dans les jardins, elle devient
haute et ligneuse, et on la nomme alors épiuard d'Es-
pagne.
Dér. de l'esp. Armuellas, m. sign.
Armorié, t. m. Armurier, arquebusier; qui fait des
armes.
Emp. au fr.
Arna, ado, aij. Rongé, percé par les teignes, piqué des
vers; vermoulu.
Dér. de Amo.
Amaduro, s. f. Blangeure de vers ou de teignes; le trou
percé par elles.
Dér. de Amo.
Arnavès, ». m. Argalon, paliure, nerprun, Bhamnus
paliurus, Linn. Arbrisseau qui ressemble au jujubier et
qui est bien plus piquant, de la fam. des Frangulacées. Un
savant botaniste suédois, qui avait voyagé en Palestine,
dit qu'il n'y a, dans tous les environs de Jérusalem, que
cette espèce de paliurus qui ait pu servir à faire la cou-
ronne d'épines de N.-S.-J.-C.
Astruc affirme que ce mot nous vient de l'arabe.
Arno, s. f. Teigne, en lat. Tinea, petit insecte, vériuble
chenille qui se change en phalène, de l'ordre dos Lépidop-
tères, trop connu par les dégAts qu'il fait sur les étoffes, les
pelleteries et le papier. Sa phalène est ce petit papillon,
d'un blanc un peu gris mais argenté, qu'on voit voler
l'été dans les appartements où l'éclat de la lumière l'attire.
Au fig., importun, parasite, solliciteur dont on ne peut
se débarrasser.
Sauvages prétend que ce mot vient du celtique.
Aro, s. f. Are, mesure de superficie contenant 100 mè-
tres carrés.
Emp. du fr. dér. du lat. Area, surface.
Aro, adv. A présent, d cette heure, maintenant, en ce
moment. — Tout aro, tuut à l'heure, bii;ntàt, dans un
moment. Ak ' per-arot Ah ! pour le coup ! Gna prou pèr
aro, c'est Assoi \m\iT l'instant. Un p<ioià aro, un pdou jiiti,
un peu après l'autre; par moments. Aro mèméto, tout à
cet instant, il n'y a qu'un bien pelit moment.
D>-r. du lat. Uora, ad lu>ram, ou dt kar. horà. En ital.
Ora, en esp. ahora, en cat. ara.
Aros, s. f. pi. Arrhes d'un marché, gage de son accom-
plissement. — Doutui d'aros, donner diis arrhes.
Dér. du gr. i^i^iSôiv, m. sign., formé de l'hébreu arab,
promettre, donner des assurances, ou do l'arabe araba,
nouer, affermir, serrer; d'uu lu lat. arrka, m. s.
Arougan, anto, adj. Fier, insolent, arrogant.
Dor. du lat. Arrogant.
Arouganço, *. f. Orgueil, fierté, arrogance, insolence,
morgue.
Même dér.
Arouina, v. Ruiner, causer la mine; démolir; user
par le temps ; détruire la fortune, causer la perte des biens
de quelqu'un.
Dér. du lat. Ruina,
Aronndl, v. Arrondir; élargir; rendre rond. S'aroundi,
engraisser, se remplumer. Au fig., étendre son héritage,
joindre à son domaine une terre qui convient.
Dèr. de Koun.
Axounze, s. m. Ronce, Bubex eatius, I.inn. Arbrisseau
épineux t-t para:>itc, qui produit les mures ; de la fam. des
Rosacées.
Dèr. du lat. Ranea.
Arouqua [s'), »., ou S'aronqul. S'endormir; tomberdam
un profond sommeil, où l'on semble changé en pierre.
Dér. de Ro.
Aronqul (s'). Se pétrifier, devenir de la pierre; durcir
Au fig., s'endormir profondément.
Dér. de Ro, rocher.
Arousa, v. Arroser, répandre de l'eau; humecter.
Dér. du lat. Ros, eau, goutte, rosée.
Aronsado, t. f. Petite averse de pluie; pluie douce et
de courte durée.
Arousage, s. m. Action d'arroser; droit d'arrosage.
Arousouèr, t. m. Arros lir; grande cruche en fer-blanc
pour arroser les plantes et les fleurs.
Emp. du fr.
Arpaiargue, s. m , n. pr. Arpaillai^es, commune du
canton d'Usés. Son annexe est Aoureia, Aureillac on
Aurillac. Deux petits villages, situés, celui-ci sur une
haute montagne , celui-là sur la pente d'un coteau.
Le nom du dernier pourrait lui venir de Aouro, vent, a
cause de sa siluati m; mais son voisinage avec Arpaiargn«,
et même sa traduction française laissent croire que aurum,
Int., a contribué ti la deno(nination des doux localités,
situées pri?s d'un ruisseau aurifère :-^urum/e^«, chercher,
recueilhr de l'or.
70 ARP
Le nom d'Arpalargut. qui n'exprime pns bien entendu
par sa finali- «l'jae le domaine de qucKiiic sfiiali'ur romain,
est rendu dans le latin des chartes par Arpallmnicœ, et il
dérive fo-rlaineiiiont aussi de aurum et de palkure, bass.
lat., cliercliei- di> l'or dans le salile dos rivières ; d'où le fr.
Orpailleur. Ses analogues sont Orpilliéres (Gard) et Arpail-
hac (Aveyrnn).
Arpan, ». m. A proprement parler, signifie : longueur de
l'ouvoriur.! de la maiii. — .\ii jou d'Eqinp} {V. c. m.), qui
se joue avi'o des gobilles, ou mesure ainsi la dislance entre
les bouli's; l'on dit alors : l'aï tous (irpun.i, fais ta mesure.
Mais cninine la tricherie se niMe toujours h ces jeux d'en-
fants, le mesureur allonge tellement les duigts en glissant
sur la terre, qu'il abroge singulièrement la distance. On
appelait ce iirocèdé : Arpuns de la naciou, et l'on voulait
parler d'une mesure frauduleuse. Le jeu en question avait
sans doute pris naissance eu ce tenqjs-là. La nation était
prise alors pour le gouvernement ; on était sous la répu-
blique, la priîiiiière Ijien entendu, et les enfants se permet-
taient celle s irte l'epigrammo politique, en comuiémnra-
tion de la b.m'juer jule du tiers-consolidé. Les bonnes
vérités smt le jirivif'gî de cet ;^ge.
Aipaii, 01) ce sons, p lUi-rait av.iir quelque parenté avec
arpo; oepeiulanl nous peasjus quil n'est que l'extension
du mot suivant.
Arpan, i. m. Mesure de superficie qui répond au fr.
arpent, et qui dérive comme lui du lat. Arripendium,
mesurage des champs. Mais en Languedoc, il ne répond pas
aux dimensions de l'arpcul de Paris, qui valait autrefois
51 ares 07 centiares.
. L'arpent de Montpellier, qui était l'unité légale pour les
justiciables de la Cour des Aides de cette ville, était de
deux sortes. L'arpeiit ou dextre, pour mesurer les bâtiments,
était une corde qui tirait neuf pans, soit 2 met. 23 cent.,
sans avoir égard à la fragtion imperceptible qui résulte de
la comparaison du inHre à la toise ou à la canne. Le dexlre
on arpent, pour mesurer les champs, était de 18 pans, soit
4 m. 50, en mesure linéaire. L'arpent carré représente
donc une sui>erficie de 20 mètres : il faut 25 arpents pour
rxno quartdluh, 100 pour une scstUïrado, 400 pour une
tâoum'i'lado [V. c. m.), et dans le système décimal, il en
faut 5 pour un are, 500 pour un hectare.
Lerfej-Jreou Vaipeni coutientdonc ares 20 centiares.
Le boisseau. ..... | 23
La quarte ^ 5 >
L'émine 10 >
Le septicr 20 i
La salméc 80 i
Telle éUait la mesure à Alais ; à Saint-Christnl et dans
quehjues autres communes voisines, l'arpent n'avait que
8 pans.
Arpanta, v. Arpenter, mesurer la contenance des terres;
faire de loi^^^s pas, marcher vite et à grands pas.
Pér. de Arpan.
ARQ
Arpanlaîre, s. m., on Arpentur. Géomètre arpenteur
— ^'olJ. lispcr.
Arpantage, s. m. Arpentage, art de mesurer la super-
ficie des terres ; rapiwrt ou plutôt résultat d'une opération
d'arpenteur.
Dér. de Arpan.
Arpantéja, v. Parcourir à grands pas ; courir ç^ et là ;
et par ext., jouer des jambes. — Se dit surtout d'mi enfant
au berceau qui, couché sur le dos, joue des jambes et se
di'niéne quand il est libre. Ce mot se confond avec Arpa-
téja.
Dér. de Arpan.
Arpatéja, v. Gambiller, jouer des jamlws. — Il est le
môme que Arpantéja. La seule difl'èreuce parait être dans
l'étym. Celui-ci est dér. de Arpo.
Arpéto, j. /"., dim. de Arpo. Croc de batelier; mais plus
particulièrement ces petites griffes en vrilles, avec lesquelles
plusieurs plantes parasites grimpantes s'attachent au-\
murs ou à l'arhre, leur tuteur, comme le lierre, la vigne-
vierge, etc. On le dit aussi des pattes de la plupart des
insectes.
Arpi, V. Accrocher avec les mains ou les griffes ; rapi-
ner ; empoigner, saisir.
S'arpi, se prendre aux cheveux, s'égratigner récipro-
quement avec les ongles et les griffes.
Dér. de Arpo, formé lui-môuie du lat. arripio.
Arpian, ando, adj. Pillard, rapineur, qui a les mains
crochues, comme on le reproche, improprement sans doute,
aux iNormands; escogriffe, escroc.
Dér. de Arpo.
Arpiou, î. m. Dim. Arpîoulé. Ongle long et crochu ;
un doigt d'une serre, d'une griffe, pris séparément. Au
plur. par ext., main, doigts.
C'est un dim. dér. de Arpo.
Arpo, s. f. Main; griffe; serre; patte. — On dit: À
bono arpo, ou L"* uno bono arpo, d'une femme qui a la
main habile pour ramasser luie récolte, telle que les châ-
taignes, ou pour cueillir la feuille de mûrier. Jouga dé
l'urpo, jouer de la griffe ; rapiner, même égratigner. Trempa
l'arpo, mettre le pied, entrer dans l'eau ; au 11g. mettre la
main à la piite; entreprendre. Y-an bouta l'arpo dessus, on
s'en est saisi, on a mis la main sur lui.
Dér. du gr. ''Apaai, croc, crochet, grappin.
Arquado, s. f. Arche d'un pont; voûte courbée en
arc.
Dér. du lat. Arcus, arc.
Arqué, s. m. Arc-en-ciel, météore en arc formé par la
réfraction de la lumière solaire dans les nuages, composé
de plusieurs bandes de couleurs, rouge, orange, jaune,
vert, bleu, indigo et violet. — C'est le dim. do Ar. {V. c. m.)
Arqué dé voulan, Archet ou étui de faucille.
Dér. du lat. Arcus.
Arquièïro, i. f. Soupirail, lucarne, jour de souffrance ;
ouverture longue et très-étroite pour que la tôle n'y puissQ
ASA
{)asscr, qui éclaire une cave, une étable, un grenier, un
bâliinpiit non habile; barliacane, chanlcplcure; ouverture*
de même dimension. <|u'on praliiiue dans les murs do sou-
tèiienienl et de terrasse, pour taire écouler les eaux de
pluie.
Ce mot vient de son ancienne application aux meur-
trières par oii tiraient les archers, qu'on noininail arqaiès.
Arséniso, ». f. Armoise, herl)ede Saint-Jean, Âriemisia
vulgarU, Liiin. Plante de la fam. des Corymbifères, stoma-
chique, vcrinirugo, einmenag.igue, anliseplique.
Dér. du gr. 'Af rsixiif» , uoiii de la Diane des Latins,
patronne des vier^'es, qu'on appliquait par allusion à une
plante dont on faisait usage en médecine pour provoquer
les menstrues chez les jeunes filles.
Artéia (s'), v. Se heurter les doigts de pied contre quel-
que chose; broncher, se blesser le pied par un choc. —
Aï pôou que me serai artéia, j'ai peur d'avoir fait une
sottise, un pas de clerc.
Dér. de Artel.
Artéïado, ». f. Heurt, blessure aux orteils : co qui
n'arrive guère qu'aux gens qui vont pioJs nus.
Ce mot n'a pas d'équivalent en fraiiç.iis, dans nos dic-
tionnaires, parce que ni l'Académie ni les Parisiens ne vont
no-pieds ; mais dans la Picardie, par exemple, où les pau-
vres gens font comme les nôtres, on dit très-bien s'orteil-
ler et orieillaile. En tous cas, dans l'acception figurée, il
est encore à regretter, et il pourrait bien ne pas manquer
d'emploi. 11 signifie en eiïel: maladresse, mal-habileté, entre-
prise oa action dans laquelle on se laisse imprudemment
pincer.
Dér. de Àrtél.
Ârtél, ». m. Orteil, doigt du pied. — Leva l'artâ, se
sauver, décam()er, detalt^r; lever le pied. Trempa l'artél,
se mettre à leau, guéer à pied.
Dér., comme sou synouyme ital. Àrtiglio, du lat. Arti-
culu$, jointure.
Artlchàou, ». m. Artichaut, Cynara icolimut, Linn.
Plante indigène de l'Andalousie, de la fam. dos Cynaro-
cèphales, cultivée partout à cause de l'aliment que fournit
son réceptacle et les écailles de son calice. On eu connaît
plusieure variétés. — Voy. CarchofU.
Dér. du ci'It. Articluiuden; art, pointe, et chtulx, chou;
par où Chou épineux. D'autres le tirent de l'arabe h'har
chioff, artichaut. Le grec et le latin ont été mis aussi à
contriliution. Nous n'avons pas de préférence.
ArtisOÙS, ». m. pi. — loi/. ArcUoùs.
As, art. pi. m. au datif. Aux. Au fôm. on dit A las. —
As homes, as éfuns, aux hommes, aux enfants ; ù las fen-
nos, ù las fïos, aux femmes, aux filles.
As, î' pers. sing. itul. près, du verbe Avitlre, tu as. —
As fan. tu as faim. As dé poumos, tu as des pnmines.
Asaïga, v. Arroser ; mouiller, baigner. — Ce terme
exprime s|)écialement le mode d'arrosage imrticulier aux
Cévenues, soit qu'on puise l'eau dans un cours d'eau bor-
ASE
71
d.int la propriété, soit dans nn petit Ixissin où on la
ramasse el ((u'oii a|)|M?lle /o«i/m Ou la puise et on la répand
au loin au moyen d une [lelli' ca-iise en bois sur les plan-
ches d'un jardin, à peu pn.'b comme les bateliers vident
leur lKite;iu avec une éco|io. — Asatga lou vi. tremper le
vin. Asaiga à régo, arrosiT par irrigali.in en fais.ml l'oulcr
l'eau successivement dans chaque raie d'une planche de
potager. C'est le mode (|u'on suit quand ou arrose au moyen
dun pnils-a-roucou d'un chapelet.
Dér. de Aïga et de la part, explètive a, qui marque l'ac-
tion ; la lettre s n est l.*» que jwur I euphonie, pour éviter
le choc des deux u. par un hiatus réprouvé même en
prose.
Asaïgadouïro, ». f. Pelle creuse en bois pour arroser,
dont il est question à l'article précédent. Lorsqu'on n'em-
ploie à cet u.sago qu'une moitié de courge sèche, emman-
-chée d'un long bâton, cet qui est le plus commun, on peut
toujours nommer cet outil asaigadouuo ; mais il est plus
technique de l'appeler counsso.
Asaigaje, ». m. Arrosage, arroscment; droit d'irrigation;
acli'U d arroser.
Ascla, V. Tendre, mettre en éclats, dans le sens de
fêler.
Ascla, ado, alj. et part. pass. Fendu, fêlé ; an fi^.
éccrveli-, cer»enu fêlé, tête; folle.
Asclo, s. f. Fente, fêlure, crevasse ; intervalle entre nne
porte ou une lonéla' et li^ur chnmliranle. — Ilira coumo
uno asclo, rire a gorge déploNé". — i'oy. Fén:asclo.
Les trois mots ci-dessus de même formali.m dérivent,
selon S:iuvages et Astruc, du celt. Ascl, escl, radicaux.
Le grec a KÀâaiî, feule, rupture.
Ase, ». m. Dim. Astue, p<''j. Asénat. Ane, baudet;
Equus asinus, Linn. Mammifère de la fam. des Solipèdes.
Au fig. S)t, ignorant, imbécile, butor. — Fuïre lou repas
de l'use, manger sans \Mt<i. L'use lé quï$, peste de toi I
L'ose me quU, foiu de moi ! ilouririè pu lèou Vase d'un
pdoure home, il mourrait plutôt l'iinedu jjauvre : c'est une
espèce de murmure contre le sort qui semble frapper plus
fort sur le pauvre que sur le riche ; mais cette expression,
qui est deveime très-proverbiale, n'a rien d'irrévérencieux
ni d'irréligieux. Cela se dit quand l'enfant d'une nom-
breuse famille est dangereusement malade ; ou bien lors-
qu'on voit échapper de maladie un égoïste, un bomme isolé,
dont la ix.'rte ne serait préjudiciable i personne. On sup-
pose par là que rien n'est plus utile au pauvre que son
;\ne, qui est son gagne-pain. lUichan coumo un ase négr»,
méch,ant comme un ^ne noir, 0\.i provient de cette race
danes, très grands et très-uiécliants, qui vient de la CaU-
logne, où ils sont tous d'un gris presque noir. Paii coumo
un ase ilé lus g'^puiros. souffrir comme un àne de plâtriére.
Le pl'ilre gris, qu'on n'exploitait autrefois pour les envi-
rons d'Alais que dans la commune de Cénérargues, était
transporté à d.is d'i\ue dans des sics qu'on leur posait à nu
sur le dos. Un gamin, à calilourthon sur la croupe, les
7-2
ASE
ASS
guidait sans bride avec un grns bikton, et les faisait galo-
per, malgré cite doulile cliargf : ils allaient ainsi par
cavalcade de dix ft duiize. Cesrrvice était fort dur, atloiidu
surtout que les pauvres baudets étaient mal nourris et
réduits souvent à brouter l'herbe sèche des chemins. Ce
genre do transport, qui avait son cachet local, a disparu
aujourd'hui que les niutcs et les chemins vicinaux permet-
tent une voie plus laeile; mais le dioluu proverbial est
resté. Y-a vnï d'un use à tu fièiro que se sémblou, prvb.,
il y a plus d'un âne à la foire qui s'appelle Martin. L'ose
lié mita es loujuar màou émbasia, prvb., l'àne de la com-
munauté est louji;urs le plus mal bâté : tout bien en com-
mun ou en indivis ent toujours mal administré. Vase fiche.'
est une S')rle d interjection explétive, fort en usage, et qui
n'est que la modification plus décente d'une locution fort
employée, quoique de beaucoup moins honnête : L'use
fiche lou ilarià l le di.il)le emporte celui qui sera le dernier
i la course. Aquû use es bien muldou que porto dessus un
bit émplasire, voilà un ftiie bien malade, qui porte sur le
dos un grand emplAtre, c'est â-dire un homme inutile : ce
devait être un des prfipos de ceux de la fable du Meunier,
son fils et l'ône. Mouqné coumo un use, penaud comme un
baudet. Aqnelo rilju n'en pas ptr aijaet use, dicton prvb.,
mot à mot : ce veiJnge n'est pas pour un pareil âne. Au
fig. : ce n'est pns p^iur lui que le four chauffe; ce morceau
est trop délicat puurlui; il lui passera sous le nez. Dans ce
sens se trouvent une foule d'applications.
La lemelle do l'àne, fuiesse, est appelée Sdoumo. — V.
c. m.
Aséné, ànon, est le dim. Asénas, péjor., signifie au pr. et
au lîg., gros Ane. — Voy. Dourou. Uounsquo, Pécata.
Ase, au jeu de cartes, as. Ase <lé piquo, dé tréflo ou dé
trounfie, dé cuxre, <lé car, as de piiiue, de trèfle, de car-
reau, de cœur. — Voy. Bourou.
Ase, très-petit poisson de rivière, chabot des rivières,
Cottus gtiiiio, Linn., qui a lencolure de la baudroie, la tète
large et plate, plus grosse que tout le reste du corps. 11 est
insijiide à manger et Ci^ntient souvent du gravier dans l'es-
tomac. Il si> tient presfjue toujours au fond de l'e.iu, sous
les pierres. Qmnd on lirrite, il renfle sa large tète, ce qui
le rend encore plus hiid.
Ase-bouieii, s. m. Le têtard, la nymphe de la grenouille,
qu'on renpontre dans les eaux, croupissantes, où un rayon
de soleil sullit pour les faire éclare. Eu naissant il est noir ;
en grossissant il devient gris. Sa tète et son corps forment
une espèce de boule terminée par une queue plate en
forme d'aviron et dont le plan est vertical. Les pattes sor-
tent de cette boule, la queue se détache, et le têtard aqua-
tique devient grenouille amphibie. Au fig. Ase-bouien
signifie : butor renforcé, àne, imljéeile, sot Ceffe; un degré
do plus dans la sottise ou la bêtise que l'Ane onlinaire. Il
est très eoiiiliiyé.
I-e nom latin du têtard, Gyrinns, est facile à comprendre :
i( vient de gyrare, arrondir, puisque c'est une vraie boule.
Son nom fr. qui signifie grosse tête, a sa raison puisqu'il
ne semble être qu'une tête; mais notre aie-éouïé«, dont
l'épithéte surtout ne dit rien, ne s'explique guère. Dans
nos environs, on appelle le têtard tésto d'ase, ce qui est un
peu moins incompréhensible.
Ase (lé charpanto, chevron de charpente, composé de sa
ferme, du pied-droit et des arbalétriers.
Ase dé réssatre, banc à trois pieds sur lequel les scieurs
de long élèvent et placent horizontalement leur bigue; le
pied de derrière n'est que le prolongement du banc lui-
même , qui vient s'appuyer à terrre et le long duquel on
roule la bigue pour la hisser, quand elle est trop lourde
pour être soulevée sur les épaules.
Toutes ces dernières acceptions dérivent de quelque
point de comparaison ou de similitude avec l'àne, animal,
dont le nom dérive lui-même du lat. Asinus.
Asénén, énqno, adj. D'Ane; qui tient de l'âne ; qui
vient de l'âne.
Asénga, v., ou Enzina. Arranger; rajuster; agencer;
raccommoder; apprêter. S' asénga, s'arranger, se mettre à
l'aise et s'ajuster. — Voy. Enzina.
Dôr. de Aïsi.
Asérba, v., ou Ashérba. Donner le vert aux chevaux ;
conduire les troupeaux dans les prairies.
Dér. de Hèrbo.
Aspre, 0, adj. Apre, désagréable au goût.
Dér. du lat. Asper, et au moins contemporain du fr.
Assadoula, v. Rassasier, gorger; assouvir la faim.
Dèr. de Sadoul.
Assaja, «., ou Ensaja. Essayer; tenter; tâcher de faire ;
faire l'essai; essayer un habit, une robe, un chapeau, pour
voir s'ils vont bien.
Dér. de l'ital. Assagiare, m. sign.
Assalé, s. m. Place garnie de pierres plates ou de che-
neaux en bois, où l'on donne le sel aux moutons.
Dér. de Sûou et de Sala.
Assaléja, v. Donner le sel au bétail.
Dér. de Sâou, formé du lat. Sal.
Assana, v. Cicatriser, guérir une plaie, une blessure.
Dér. de San, sain.
Assâou, j. m. Emotion pénible; nouvelle alarmante;
reproche mortifiant ; importunité fatigante. — Nous douni
un fier assâou, il nous alarma vivement.
Einp. du fr. Assaut.
Assàouvagi, v. Rendre sauvage, farouche. — Dé batre
lou béstidou l'assdouvagis, on rend les animaux farouches
en les battant.
S'assdouvagl, v. S'effaroucher; prendre un air, une
humeur sauvage; contracter des manières agrestes.
Dér. de Stiouvnje.
Assassin, s. m. Assassinat, et non assassin. — Aquù'»
un assassin, c'est un vrai assassinat, dit-on, quand on est
assailli par une troupe de mendiants, une foule de créan-
ciers ou simplement d'importuns.
ASS
ASS
73
Dér. de Ifaschichin, qui était le nom des sujets du
Vieux de la Montagne, autrement dit Prince des Haschi-
chins, ou Assassins. Comme ses sujets, fanatisés par lui,
assassinaient tous ceux qui déplaisaient au maître, leur
nom est devenu générique pour désigner les assassins.
Assassinna, v. Assassiner, tuer par guet-apens, par tra-
hison, de dessein prémédité. Au fig. importuner à Texcès,
solliciter; exiger son dû tout de suite, comme si l'on met-
tait le pistolet sur la gorge. — Les deux n se font sentir.
Assassinur, >. m. Assassin, meurtrier.
Assata, v. Affaisser; battre; fouler, tasser. — Attatala
bugado, encuvcr le linge de la lessive, l'abreuver pour
l'entasser. Astata un co dé poun, asséner un coup de poing.
La cro/o $'és assatado, la voûte a fait son effort, les murs
ont pris leur assiette. Assata un soufU, appliquer an soufOet.
Dér. du lat. Assidere.
Assécarli (s'), v. Se dessécher, devenir sec. — Se dit
principalement d'un arbre qui meurt peu à peu par les
branches.
Dér. de Sé^tMi.
Asségnra, «. Rendre sur, consolider; caler; assurer,
certifier, affirmer.
Dér. do Ségu.
Asséguranço, s. f. Sûreté, assurance ; caution, nantis-
sement, liypothèque ; fermeté, hardiesse.
Assémâoa, s. m., ou Sémâon. Cornue; comporte;
benne ; vaisseau de bois composé de douves reliées par des
cercles, avec deux chevilles horizontalement placées, par
lesquelles deux personnes le transportent à l'aide de deux
tâtons appelés pour cela sémaïés, qu'on passe en dessons
des chevilles. Ce vaisseau sert principalement à transporter
la vendange.
Dér. probablement de Sima, mot d'un autre dialecte
que le nôtre , qui signifie : tirer le moût d'une cuve trop
pleine, dér. lui-même de l'ital. Scemare, diminuer. —
Voy. Simdou.
Assembla, v. Assembler; rassembler; mettre ensemble,
joindre, unir, réunir, rapprocher; convoquer. — Dlou tous
faï, amài tous assembla, Dieu les fait et les assemble, dil-
on souvent ironiquement d'un ménage plus ou moins bien
assorti , d'une coterie dont les membres sont ignorants et
singuliers.
Emp. du fr. Assembler.
Assémblado, s. f. Assemblée; plus spécialement, la
tenue des offices divins dans la religion réformée, soit
dans un temple, soit au désert.
Emp. du fr.
Assès, adv. Assez, autant qu'il en faut. — C'est pure-
ment un terme de civilité populaire. K'aï bien assès, dit-on
à table quand le maître de la maison vous offre d'un nou-
veau plat. Dans co cas-là on ne dit jamais : .V'oï bé prou.
Assis ne se place qu'à la fin de la phrase. On ne dit pas :
.il assùs manja, mais bien : Ai prou manja.
Emp. au fr., comme la plupart des termes de civihté.
Assési, ido, adj. Rassis. — Ne se dit guère que du pain,
par opposition à pain frais ou mollet.
Dér. du lat. Assidere.
Asaéta, v. Asseoir, mettre sur un siège ; faire tomber
quelqu'un par force sur son derrière; poser sur une base
solide.
S'asséia, v. S'asseoir, se mettre dans un siège ; s'établir
d'une manière solide, prendre son faix, en parlant d'un
mur, d'une voûte, d'une pierre de taille.
Dér. du lat. Assidere.
Assétoùs [d'), adv. Assis, sur son séant ; par opposition
à debout. — Ero d'assitoàs sut toun U, il était au lit, assis
sur son séant.
Assiétado, t. f., ou Siétado. Assiettée ; contenu d'une
assiette, plein une assiette. — Vno assiétado dé soupo, est
une assiette de soupe, non seulement pleine, mais combtéq
et presque en pyramide. — Voy. Siétado.
Dér. de Assiélo.
Assièto, *. f., ou Sièto. Assiette, vaisselle plate dans
laquelle on met ce que l'on mange à table. — Assièto béeudo,
écuelle à bec. Paro ta sièto, présente ton assiette.
Dtir. du lat. Assidere ou assisia, de à tedendo, parce
qu'autrefois Vassièio indiquait la place de chaque convive
à table.
Assigna, s. m. Assignat, papier-monnaie. — Ce terme est
malheureusement devenu familier à tous les idiomes de la
France, et y est resté en triste souvenir. — Prin coumo
un assigna, mince comme un papier d'assignat. Afatrassï
coumo un assigna, mou, sans apprêt, sans consistance,
comme les feuilles d'assignats. Môme avant que ceux-ci
fussent dôcrêdités par la banqueroute et l'échelle de dépré-
ciation, ils étaient méprisés par le peuple pour leur légè-
reté, leur peu de consistance, et la nullité de leur valeur
spécifique, en regard des espèces sonnantes, fussent-elles
du billon le plus lourd.
Assista, V. Faire l'aumône ; aider, secourir. — Diou
vous assiste. Dieu vous vienne en aide! Pode pas vous
assista, je ne puis rien vous donner, dit-on ik im men-
diant.
Dér. du lat. Assistere.
Assoncia (s'), v. S'associer, se mettre en communauté
d'intérêts; former une association.
Dér. du lat. Associare.
Assoulida, v. Consolider, rendre solide, sûr; donner
des garanties, des hypothèques, des nantissements ; affir-
mer.
Dér. de Soulide.
Assouma, v. Assommer ; tuer on terrasser en frappant
sur la tête avec quelque chose de lourd, comme un bâton,
une pierre, une massue.
Dér. du Lit. Summum, sommet.
Assourda, v. Assourdir, rendre sourd à force de crier
ou de faire du bruit ; ennuyer, fatiguer de propos.
Dér. de Sour.
to
74 ATA
Assourti, V. Aller au-dovant ou à la rencontre de quel-
qu'un.
Formé de Sourti et de la prép. lat. aJ, sortir vers.
Assourti, V. Assortir, mettre ensemble des objets qui se
ressemblent, qui se conviennent, qui concordent.
Dér. du lat. Sors.
Assupa, V. Rencontrer nez à nez, se heurter contre
quelqu'un, en le rencontrant à l'improviste, sans l'avoir
aperçu d'avance.
Dér. de Su, tête, crine.
Assuqua, i>. Assommer, frapper fort sur la tôte.
S'assuqua, V. Tomber sur la tête, donner de la tête
contre un corps dur. — Es tout assuqua, il est tout
hébété.
Dér. de Su, crAne, et a privatif.
Astre, s. m. Astre; soleil, étoile, corps céleste. — Moun
astre, dans le langage des nourrices à leur poupon , dans
celui des amoureux à leur belle, est l'expression de leur
tendresse charmée et éblouie. Il s'emploie aussi dans le
même sens a peu près que planéto, ou étoile, en fr., pour
parler do l'influence du sort, de la destinée soumise aux
astres ou en dépendant. Les anciens et les modernes ont
conservé dans leur langue la tradition de cette influence
des astres ; on en a fait une science qui a eu sa vogue.
Pér co d'astre, par hasard, par bonheur. Lou diable vire
l'astre ! Peste soit ! sorte d'imprécation qui nous vient de
loin, assure Sauvages. C'est le Deus omen avertati des
Romains. Sembla que siès din lous astres, on dirait que tu
es dans les astres, reproche-t-on à une personne distraite et
préoccupée.
Etym. du gr. ''A(rrpov,de 'Aorrrip, étoile, d'où le lat. astra.
Asurpa, v. Usurper. — Ne se dit qu'en parlant des pro-
priétés territoriales , qu'on rogne peu à peu en éloignant
la ligne divisoire.
Emp. du fr.
Atala, V. Atteler; attacher des bêtes do trait, chevaux
ou mules, h une voiture ou à une charrue. — Es dé mi-
ehan atala, c'est un homme intraitable, revèche au joug
ou qui n'entend pas la raison.
S'atala, v. S'appliquer, employer toutes ses forces, toute
son attention; faire son possible; se mettre au travail.
S'atalèrou à batata, ils se mirent en train à babiller.
Dér. du lat. Telum, flèche, timon.
Atalaje, s. m. Attelage; l'ensemble des bêtes de trait
qui traînent une même charrette.
Atalus (en), adv. Obliquement ; en talus; en biseau.
Dér. du lat. Talus, talon, cou-de-pind.
Atalussa, v. Couper un terrain en talus ; former en talus
la berge d'un fossé ; donner du pied à un mur, a une
chaussée, à une butte.
Atâoula, V. Attabler; mettre les gens à table pour
manger, boire ou jouer. — S'atdoula, se mettre à table.
Dér. de Tâoulo.
Atapa, V. Prendre, saisir, joindre; fermer, boucher.
ATÈ
couvrir, caclicr, voiler. — M. de Bonafous a dit dans une
charmante chanson :
Se vos pas «[ué siègue tan amouroiis
Et dé ta bouquéto et dé tous ièioiis,
Âtapo-loùs, ma mïo, atapo-loùs.
Ce mot, dans le premier sens, est une variante de atrapa,
et dans le second, de tapa. — Yoy. Atrapa et Tapa.
Ataqua, ado, adj. Atteint d'une maladie; qui a un vice
dans une partie du corps ; qui souffre d'une infirmité. — ■
Ataqua dé l'asme , asthmatique. Ataqua dé la péUrino,
atteint de pulmonie.
Dér. de Taquo.
Ataquo, s. f. Attaque, atteinte d'une maladie; crise.
Au fig. folie, acte de déraison. — Es mor d'uno ataquo,
il est mort d'apoplexie. Sas ataquos lou prénou, le voilà
retombé dans sa folie.
Emp. au fr.
Atarda, v. Retarder ; attarder, mettre en retard.
S'atarda, s'attarder, se retirer tard, se mettre tard en
route.
Dér. de Tar.
Atari, v. Tarir, mettre à sec. S'atari, tarir, devenir sec ;
perdre son eau. — Soun mouli s'ataris pas jama^i, il ne
mot jamais l'écluse à ses paroles.
Dér. du lat. Arire, par métaplasme de Arere, être à
sec.
Atébési (s'), v. Tiédir, devenir tiède. — La progression
de ce mot est en raison inverse de son correspondant
français. L'ne chose s'atiédit quand elle a été plus chaude
avant et qu'elle passe graduellement à une température
moins élevée. C'est le contraire avec le mot languedocien
S'atébési, qui exprime que la chose, de froide qu'elle était,
devient tiède.
Dér. de Tébés.
Atèncîou, *. f. Co mot ne s'emploie que précédé du
verbe faire : faire attention, prendre garde ; ou bien seul
comme intorj. : Attention! Atèncîou/ Garde à vous I
Emp. au fr.
Aténdre, v. Atteindre, frapper de loin, toucher ; attendre,
être dans l'attente, l'expectative ; être attentif à un ouvrage,
y mettre tout son temps, sans perdre une minute.
S'aténdre, croire, se fier, avoir confiance, se rapporter.
— L'aléndéguà à la lèsto d'un eo dé pè'iro, il l'atteignit
a la tête d'un coup de pierre. L'aténdou coumo lou Méssio,
ils l'attendent comme le Messie. Aténdùs-nous un pdou,
attendez un peu que nous arrivions. S'aténdiè énd'aquél
traval touto la gnuê, il s'appliquait à, cet ouvrage toute la
nuit. Se vous aténdès d'él, sérés mâou fisa, si vous vous
fiez à cet homme, vous serez peu sur de votre affaire.
Dér. du lat. Attendere.
Aténén, ènto, adj. Contigu, limitrophe, tenant.—
Aquél bé es tout d'un aténén, dans ce domaine toutes le»
terres se touchent, sont conliguës, attenantes.
Dér. du lat. Ad, et tenere.
ATR
AVA
n
Aténténa, v. Atermoyer, prolonger les termes ; ren-
voyer d'un jour à l'autre ; tenir le bec dans l'eau. —
Aténténa uno fïo, bercer une jeune jicrsonne d'une pro-
messe de mariage, dont on retarde toujours l'exécution.
Formé de la réduplication do Tén, comme si l'on disait
dé tén à tén, d'un temps à l'autre.
Aténténaïre, aïro, mij. Atermoyeur, mauvais payeur ;
enjôleur, trompeur de filles.
Atéssa, V. Allaiter; donner i. téter ; donner le sein à un
enfant.
Dér. du gr. TiO*i, nourrice, par métaplasme du t en <,
ou en suivant la prononciation adoucie du qui est une
véritable sifflante. En celt. Tétar signifie téter.
Atéssado, s. f. Repas ou réfection d'un enfant qui tète.
— Donna uno atéssado, donner à téter, faire téter. A agu
dos atéssados, il a tété deux fois.
Dér. de Téta.
Atétoonl, ido, adj. Affriandé à la mamelle, qui veut
toujours téter; enfant difficile à téter,
Dér. de Téta.
Atifa (s'), t). S'attifer, s'ajuster, se pomponner, se parer
de tous ses atours.
Dér. du gr. StIçîiv , orner , ou de TSçoç, soin de se parer.
Atifès, s. m. pi. AITiqucts, pompons; fanfreluches de
toilette; atours, ajustements de femme.
Emp. au vieux fr. Attifets.
Atira, «. Attirer; allécher; affriander , appâter. —
Aquel vin atiro soiin buvur, ce vin excite à boire. Aquélo
marchanda es bien aliranto, cette marchande est bien pré-
venante; elle attire les chalands par ses prévenances.
Formé de Ad, vers, et tira.
Atissa, V. — Voy. Aquissa.
Ato, s. f. Acte, contrat notarié ; exploit d'huissier. —
Li faraï donna uno ato, je lui ferai signifier un exploit.
Dér. du lat. Actum.
Atoùs, j. m., ou Trounfle. Atout, terme de jeu de cartes;
couleur de la retourne, ou celle dans laquelle on joue ; triom-
phe. — Baire atoùs, faire atout. A pas sâoupégu jouga, aviè
bien tous atousses en man, il n'a pas su mener sa barque, il
avait toutes les chances de succès; il a perdu avec beau jeu.
Ce mot signifiait dans l'origine la couleur supérieure à
tout, qui prend toutes les autres, qui gagne tout.
Atrapa, t». Attraper; tromper, duper, faire une niche;
trouver, trouver par hasard, rencontrer. — T'atraparas bé,
tu finiras bien par t'attrapcr. Vos que tous atrapén? \OMX-txi
que nous leur fassions une niche ? Coumo atrapas aquél vi?
comment trouvez-vous ce vin 7 Piou-plou, ce qu'atrape es
mtou, bon, ce que je trouve m'appartient, disent les enfants
pn s'emparant de quelque bonne trouvaille.
Dér. du vieux lat. Trappa.
Atrapaire, aïro, adj. Trompeur, faiseur de dupes.
Atrapo, s. f. Attrape ; niche; tricherie ou fourberie inno-
pente et par pure plais.interic. — Le poisson d'avril est trne
fitrapo.
Atrouba, v. on Tronba. Trouver, rencontrer ; sur-
prendre. — Aquést'an Caléndo s'atrobo un dilut, cette annte,
la ISoël arrive un lundi.
Dér. de l'ail. Treffen, toucher, atteindre, selon Le Da-
chat ; par métaphore, trouver ; d'oii l'ital. Trovart.
Atroupa (s'), v. S'attrouper, se rassembler par troupe, se
réunir tumultueusement.
Dér. de Troupo.
Atroapéla, v. Réunir en troupeau, par bandes qui mar-
chent dans un certain ordre, processionnellement, comme
le troupeau qui suit la trace de Robin-mouton.
Dér. de Troupèl.
Atnba, V. Allumer le feu, la lampe, une chandelle ; et
non éclairer.
Dér. du lat. Tubus, tube, tuyau, parce qu'originaire-
ment on souCQait le feu avec un tube en fer, comme on le
fait encore dans quelques-unes de nos montagnes.
Atnbal, s. m. Menu-bois, allumettes, copeaux, brou-
tilles ; tout ce qui est propre à s'enflammer rapidement et
qui peut aider à allumer le gros bois d'un feu.
Dér. de Atuba.
Atnpl, V. Réduire au silence, rendre muet; éteindre;
calmer; étouffer, couvrir; au prop. et au fig. — Atupl lou
pà, ce n'est pas éteindre ni étouiffer le feu ; mais bien le
recouvrir de cendres chaudes ou de charbon mouillé, co
qui le conserve sans le laisser flamber.
Dér. du gr. 'Atjjtoj, bogue, muet, sans bruit ; ou formé
de a privatif et Tùçw, allumer, enflammer.
Aval, adv. Là-bas, en bas : pour les Cévcnnes, tout ce
qui est au midi et à l'est d'Alais. Le territoire de ^imes,
de Montpellier et la Provence sont comparativement en
bas, aval; en parlant d'une de ces localités, on dit : AveU
vèr Sén-Gile, vùr Séoucatre. — Aval -aval, là -bas bien
bas.
Formé du lat. Ad vallem, vers la vallée, par opposition
à amoun, ad monlem, vers la montagne.
Aval! (s'), V. Se perdre, disparaître sans laisser do
traces, à la manière des esprits; se dissiper comme on
songe ; s'évanouir.
Dér. de Aval et du lat. ire, parce qu'on suppose que les
esprits viennent des bas lieux, et qu'ils y retournent
quand ils disparaissent.
Avança, v. Devancer, prendre les devants sur quelqu'un,
le dépasser, soit en marches, soit en études, en savoir ;
faire des avances, avancer de l'argent.
S'avança, avancer, s'avancer; aller au-devant, prendre
les devants; approcher du but, du terme. — Aguct éfan
es bien avança, cet enfant est fort avancé dans ses études.
Dé que vous avanço aqud? à qaoi cela vous sort-il, quel
avantage en retirez-vous? Aro qu'avis fa lou fol, tit pus
avança, à présent que vous avez fait toutes ces folies, ètes-
vous mieux loti ? Es tan d'avança, c'est autant de fait.
Dér. du lat. Ab, de, par, et anti, avant ; ou bien a4
venlum, vers le vent.
7C
AVA
Avanço, i. f. Avance, ce qui déborde, ce qui dépasse ;
espace de chemin que l'on a devant quelqu'un. — Préne
l'avança, prendre les devants. L'avança d'uno casquéto, la
visière d'une casquette.
Avanço (</'), adv. D'avance, par anticipation, avant le
temps. — Ou savian d'avanço, nous le savions déjà.
Avanços, ». f- pi- Avances d'une mise de fonds pour
un fermier, pour un commerçant ou pour un artisan qui
commence à s'établir ; anticipation ; ressources préparées
et prêtes. — Avédre d'avanços, avoir des avances, de l'argent
devant soi. Plaça sas avanços, placer ses fonds, ses éco-
nomies. Aquéles novit douran prés las cKanços, ces jeunes
fiancés auront prélevé les prémices du contrat.
Dér. du lat. Ab et antè.
Avantaja, v. Avantager, donner, faire des avantages à un
de ses enfants par-dessus les autres, lui former un prôciput.
Dér. du lat. Antè, et agere.
Avantaje, s. m. Avantage; supériorité; position privilé-
giée; préciput. — Aquà's un bel avantaje quand on a sat avan-
ços, c'est déjà un grand avantage d'avoir sa première mise de
fonds. D'aïçaval on a pas l'avantaje pér émplégi sas forças,
d'eu bas on n'a point d'élan pour faire valoir sa force.
Einp. au fr.
Avantajoùs, ouso, adj. Avantageux, qui offre des avan-
tages ; présomptueux , qui croit avoir par sa taille, sa
force, son adresse, l'avantage sur les autres.
Avantura, v. Aventurer, hasarder; exposer à un risque,
à un danger, courir la chance.
Dér. de Avantura.
Avanturiè, s. m. Aventurier. — On appelle ainsi le vers
à suie qui précède de plusieurs jours la masse de ses com-
pagnons et fait un cocon précoce. Dans une chambrée on
recueille à part ces avant-coureurs, pour avoir une idée
de la qualité et de la forme du gros de l'armée. Quelques
personnes croient que ces vers hâtifs ne passent que par
trois mues au lieu de quatre ; il est plus probable que ce
sont des vers premiers-nés ou qui ont plus de vigueur
pour parcourir leurs divers âges.
Dér. de Avantura.
Avantaro, ». f. Aventure; événement inopiné; accident.
— ilju^reureoawanJuro, j'eus une bonne fortune. A l'avan-
turo, à la garde de Dieu, sans précaution, aux chances du
hasanl. Douna la bano avantura, dire la bonne aventure,
tirer des horoscopes.
Dér. du lat. Adventurus, futur pass., qui doit arriver.
Avanturoùs, ouso, adj. Aventureux, qui hasarde, qui
ne craint pas le danger.
Dér. de Avanturo.
Avaras, asso, ». et adj. péjor. de Avare, peu usité; gros
et sordide avare.
Dér. du lat. Avarus, avidus eris.
Avaricio, ». f. Avarice, attachement excessif aux
richesses ; lésinerie sordide.
Dér. du lat. Avaritia.
AVE
ATaricioùs, ouso, adj. Avare, pince-maille, fessc-ma-
thieu; avaricieux, qui craint la dépense, ne donne pas ou
donne mal.
Dér de Avaricio.
Avè, ». m. Avé. Premier mot latin de l'Ave Maria,- de
la Salutation angélique ; grain de chapelet sur lequel on
dit l'Avé ; temps de le dire.
Avé, ». m. ou Avéïè. Troupeau de moutons, de brebis.
Il a vieilli et n'est plus usité (pi'au -dessus d'Alais. — Garda
l'avé, garder le troupeau.
Dér. du lat. Ovis.
Avédre, v. ad. et auxil. Avoir, posséder; atteindre,
âveindre. -^ Avédre Ion flou, être dégourdi, rusé. Avédre
pàou, avoir peur. Aoédre laténtido, pressentir. Avédre gran
gdou dé... S'estimer heureux de... £» pas riche, mais a bien
quicon, il n'est pas riche, mais il a quelque biîn. Avèn con-
véngu, nous sommes convenus. Aï agu, j'ai eu. Aguérou,-ï]$
eurent. Aguèn, nous eûmes. S'aguéssian fa coumo aqud,
si nous avions ou si nous eussions fait comme cela. Vaï.'
t'dourai, vas, je t'atteindrai. Avén agu dé résoiis, nous
nous sommes querellés. Àquél broutèl es trop ndou^ pode
pas l'avédre, ce rameau est trop haut, je ne puis y atteindre.
— Vay. Avéra.
Dér. du lat. Blabere.
Avéjan, ». m. n. pr. de lieu. Avéjan, comm. annexe de
Saint-Jean-de-Maruéjols, canton de Barjac, arrondissement
d'Alais.
Ce nom parait venir de Avé, avi'iè, troupeau de brebis, du
lat. ot!i», plutôt que de ave, èvs, eau, en roman, qui dans
notre lang. affecte en général une autre forme. La situation,
d'ailleurs, la nature du pays favorise singulièrement notre
interprétation. Le suffixe an qualifie le radical. — Vay.
An, suff.
Avélagnè, ». m., ou Avelagnéïro, ». f. Noisetier, ave-
linier. Coudrier; Corylus avellana, Linn. Arbrisseau ou
arbre de la fam. des Amenlacées. Le Coudrier est resi)ècc
sauvage et silvestre ; le Noisetier est le coudrier cultivé.
C'est avec les scions du coudrier que l'on fait la fameuse
baguette divinatoire des prétendus inventeurs de sources
et de fontaines.
Dér. de Avélano.
Avélagnèïro, ». f. Coudraie, lieu couvert de coudriers;
bosquet de noisetiers. On la prend aussi pour le Noisetier
lui-même.
Dér. de Avélano.
Avélano, ». f. Aveline, noisette, fruit du noise-
tier.
Dér. du lat. Avellana, m. sign., qui vient lui-même
de Avella , ville du royaume de Naples , où les coudriers
sont en abondance, et renommée encore aujourd'hui pour
la bonne qualité de ses noisettes. En cat. esp. ital. Avel-
lana.
Avén, ». m. Cavité ou conduit souterrain et naturel, qui
sert de réservoir aux eaux de la pluie ou de la neige, et
AVÉ
AVE
77
qui alimente les sources ; caverne profonde et verticale
au fond de laquelle est un amas d'eau.
Dér. du cclt. Awen, rivière.
Avéna, v. ou Abéna. Epargner, ménager, économiser ;
épuiser; user jusqu'au bout, jusqu'à la corde. — Avénas
ta $dou, ménagez le sel. Avéna tas farJot, user ses vieux
habits, les porliîr quoique usi^ et rapiécés. Avéna lou jour,
profiter du jour jusqu'à son déclin. — Le part. pass. adj.
Avéna, ado, signifie : épuisé, usé par les débauches, ou
ruiné par les maladies. — Voy. Abéna.
Aréna^ i. m. Gruau d'avoine, dont on fait une excel-
lente purée pour le potage.
Dér. du lat. Avena, avoine.
Avénaduros, t. f. plur. — Voy. Abénaduro$.
Avénén, ». m. Ne s'emploie qu'au génitif, et dans une
sorte de phrase faite, d'un avénin. — Tout d'un avénén,
tout d'une pièce, d'une venue, sans galbe et sans forme.
Vno cambo tout d'un avénén, une jambe sans mollet. Et
touto d'un avinén, elle n'a ni tournure, ni hanches, ni
gorge. — Le nominatif adjectivé, qui voudrait dire : ave-
nant, affable, est du pur franchimand.
Dér. de Vénl.
Avéngn, ado, alj. part. pati. de Avénl. Grand et fort,
bien venu. — Aqaél éfan éi bien avénga pér toun tén, cet
enfant est bien grand, bien fort pour son âge.
Avéngudo, ». f. Crise de maladie ; revers de fortune ;
accident malheureux et inopiné.
Dér. de Avénl.
Avéni, V. Arriver à faire ; parvenir à ; réussir ; suffire.
— • Pode pas y avénl tout soûl, je ne puis suffire seul à ce
travail. V avéndra pat, il n'y réussira pas, il n'y par-
viendra pas. — Péraquà y-avénirin, pourtant nous en
viendrons à bout.
Dér. du lat. Advenire.
Avéno, ». f. n. pr. Avène, petite rivière torrentielle qui
prend sa source dans la montagne de Rouverguo, près de
la Grand'Combc, et se jette dans le Gardon, au droit de
Saint-Hilaire-de-Brclhmas, au-dessous d'Alais.
Dér. du celt. Awen, rivière, qui entre dans beaucoup
de noms propres de rivières ou de localités situées sur des
cours d'eau, notamment le nom lat. Avenio, Avignon.
Avesnes, chef-lieu d'arrondissement du département du
Nord, sort évidemment de cette modeste source. Son an-
cienne orthographe Avenna rapiiclle la mot celtique avec
sa double consonnancc latinisée, avenn, et notre pronon-
ciation lang. fortement sentie dans avén, qui est le
même mot. L'origine de Advenœ, étrangers fixés sur ce
territoire, ab advenit gentibut ibi collocads, est une glo-
rieuse imagination ; mais notre patois, comme on dit dans
le Nord, est plus fidèle aux traditions et a bien son prix.
Les communes rurales Avesnes-le-See , Aveny , Avenay,
Avesncs-sur-Ttelpe , Avcsnes-les- Aubert , sont de petits
affluents : Avesnes-le-Sec indique un avén, une source tarie,
et non pas un sol aride où l'avoine ne pousse plus. Là se
trouve la confirmation de l'origine du nom, pour lequel il
est inutile de faire de l'érudition historique à la recherche
d'une (Intieuse et imaginaire dénomination.
Avéns (Lous), ». m. pi. L'Aveut, le temps qui est
placé entre la Saint-André, le 30 novembre, et la Noël,
25 décembre. C'est pour l'Eglise romaine, un temps d'expia-
tion et de pénitence pour se préparer aux joies de la Nali-
viuS comme le Cirôme est une préparation au triomphe
pascal. — On disait en v. fr. : les Avents.
Dcr. du lat. Adventus, arrivée.
Avéousa, V. ou S'avéonsa. Devenir veuf; perdre sa
moitié ; être délivré. — Diou m'en avéoute. Dieu me
délivre d'un tel ou de telle chose !
Dér. de Veouse.
Avéra , v. Aveindre ; atteindre ; tirer un objet d'un
endroit hors de portée, soit en haut, soit en bas. — ^Ivero
dé céruHrot, cueillir des cerises avec un croc. Avéra lou
fera, tirer un seau noyé du fond d'un puits. Qudou po y-
avéraf qui peut y atteindre?
Dér. du lat. Advmire. ou Advekere.
Avéracloù, ». f. Advération, terme de vieux cadastre ;
dénombrement des biens-fonds, avec leur contenance, con-
fins et estimation, pour former l'assiette de la taille.
Dér. du lat. Ytrax, véridique, sincère.
Averti, v. Avertir, donner avis ; présager ; instruire ;
prévenir du danger; convoquer les membres d'une assem-
blée délibérante; inviter à un convoi funèbre. — Lou tou-
nèro n'avertis pas, le tonnerre ne gronde p-is avant la
foudre.
Dér. du lat. Advertere, tourner l'attention vers.
Arértimén, ». m. Avertissement du juge de paix, invi-
tation à la conciliation ; avertissement du rôle des contri-
butions. Il serait encore applicable aux avertissements
donnés aux journaux dans notre époque. — Lous avérti-
méns i-an pas manqua, ce n'est pas faute qu'on l'eût
bien prévenu.
Avès, 2' peri. du plur. de l'ind. prés, du v. Avédre.
Vous avez.
Avès, ». m. Revers d'une montagne vers le nord ; aspect
an nord. C'est le contraire de l'Adré, aspect du midi. —
Aquà't dé bot dé l'avès. c'est du bois coupé à l'aspect nord.
Ce bois est moins bon à brûler que celui de Vadré. Ses
pores sont plus serrés, ses fibres sont pins longues et pins
entre-nouées ; il devient noir au feu et fournit peu de
braise.
Dér. de Vèt, versant.
Avésqua, ». m. Evftché, palais épiscopal. — L'évèché a
joué longtemps un grand rùle i Alais, soit pendant qu'il
était réellement un palais et la résidence d'un évoque, soit
lorsqu'il est devenu presque du dom.iine public. Ses cours,
ses jardins étaient le rendez-vous des oisifs de café et <i<^
jeux des écoliers. Il demeure seulement encore à l'état de
nom propre parmi nous, aujourd'hui que la sape indus-
trielle a fait disp.-iraitre le magnifique dessin de sa double
78
AVI
AVO
façade et de sa cour d'iionneur, que les jardins mutilés
ont été envahis par des constructions bourgeoises, ou divi-
sés en petits carrés, et qu'enfin l'orangerie et le côté des
fruitiers viennent d'être cédés pour une place publique
devant l'bôtel-de- ville.
Dér. du lat. Episcopatus.
àvésque, s. m. Evèquo, prélat chargé de la conduite
d'un diocèse. — Un chi regarda bé 'n avésque, amaï li leva
pas lou capèl, prvb. Un chien regarde bien un évêque, se
dit proverbialement quand une personne s'étonne ou se
fâche qu'on la fixe. On dit d'un pendu : Es un avésque dé
eampagno, dono la bénédicïou das pèses.
Dér. du lat. Episcopus. En ital. Yeseovo.
Arignoun, s. ni. Avignon, ville, chef-lieu du dép. de
Vaucluse. — Pata d'Avignoun, un pata, ancienne monnaie
papale frappée à Avignon. Palachoù d'Avignoun, sobri-
quet des Avignonnais, qu'ils doivent sans doute à leur
monnaie dite pata. Granéto d'Avignoun. graine de ner-
prun, Bhamnus infectorius, Linn., qui croit dans nos
environs. Elle sert aux teinturiers de petit teint pour le
jaune et de stil de grain pour la peinture. — Yoy. Gra-
néto, Aoubénas.
Dér. du lat. Àvenio, qui a sa racine dans le celt. Awen,
venant de aa, aqua, eau , qui a donné en roman ave, ève,
ive, et autres, en lang. avén, a'igo, etc. — Voy. Avéno.
Avirôoii, interj. Commandement de voiturier pour faire
tourner à droite. La conversion ou le pas oblique qu'exigç
ce commandement, décrit un angle plus ouvert que celui
qu'on obtient par le commandement à ruou ou à ruâou,
mais toujours du même côté. L'angle du premier se rap-
proche du quart de cercle ou de l'angle droit, c'est tout un
changement de direction ; l'angle du second n'est guère
qu'une déviation à droite pour couper l'ornière, éviter un
mauvais pas, ou pour partager la route avec une voiture
qui croise la première.
C'est un vocable composé arbitrairement, qui varie sui-
vant les localités , mais qui est fixe et d'une antique ori-
gine dans chacune d'elles. — Faire tira avirôou , faire
changer de direction à droite.
Avis, s. m. Vis, cylindre cannelé en spirale, destiné à
rentrer dans un écrou cannelé de même. En fr. le mot est
féminin, une vis ; il est masculin en languedocien.
Emp. au fr. avec l'a explétif, qui est dans le génie de
la langue quand elle est obligée d'emprunter à sa rivale.
Avis, s. m. Sentiment, opinion. — M'en dounarés un
avh, vous m'en direz votre sentiment, votre opinion. M'es
avis, il me semble.
Emp. au fr.
Avisa (s'), V. S'aviser, s'apercevoir; tenter, oser, s'en-
hardir — M'avise que plùou, je m'aperçois qu'il pleut. Lou
ciel toumbariè que s'in avisariù pas, le ciel viendrait à
tomber qu'il n'y prendrait pas garde, qu'il ne s'en avise-
rait pas. S'avise pas de me dire: voulur / n'osa-t-il pas
me dire : voleur! Se t'avises dé parla, si tu as la hardiesse
de parler. Sans s'en avisa, sans s'en apercevoir, sans y
faire attention.
Avisa, ado, part. pass. et adj. Avisé, prudent, circon-
spect ; éveillé.
Dér. de Avis.
Avisamén, 5. m. Prudence, prévoyance, perspicacité,
intelligence; circonspection. — Aquél drôle vous a d'avi-
samén que noun sat, ce garçon a une intelligence, une
prudence extraordinaire.
Dér. de Avisa.
Aviva, V. Raviver, évertuer, réveiller; vivifier.
Aviva, ado, part. pass. et adj. Vif; sémillant, éveillé;
guilleret. — Lou tén s'és aviva, le temps s'est mis au vif.
Lou tén s'avivo, le temps se refroidit. Aviva coumo «n
péïssoù sus lou rasiouble, éveillé comme un poisson dans
le sac. Aviva coumo un passéroii, éveillé comme un moi-
neau.
Dér. de Yiou, du lat, vivus.
Avoua, V. Avouer, confesser; reconnaître qu'une choss
est, en faire l'aveu.
Emp. au fr. Aveu.
Avoua, s. m. Avoué, procureur. — Cette profession a
trop de rapport avec le peuple, pour qu'il ne se soit pas,
hâté de la suivre dans la transmigration de son nom.
Avoua est aussi bon languedocien que Proucuroù.
Avouca , s. m., dim. Avoueadé. Avocat. — Es un
avouca, c'est un Gros-Jean, im important, un pédant , qui
fait l'entendu, l'érudit en affaires, et en toute science.
Avotica das uses, un pauvre avocat. Aquél avouca es cher,
dounariè pa'n bon eounsél pèr sièï frans , prvb. Cet avo-
cat est cher ; il ne donnerait pas un bon conseil pour six
francs, — sous-entendu : parce que cela lui est impos-
sible.
Pourquoi nos paysans appellent-ils leur Ane l'auouca.''...
Que dans un atelier d'imprimerie, le pressier s'appelle un
ours et le compositeur un singe, cela se conçoit pour qui
les a vus manœuvrer et se démener. Que certaines per-
sonnes soient des chameaux, c'est encore mieux, nul n'y
peut contredire. Il n'en est pas de même de l'assimilation
qui fait l'objet de cet article. Mais il est parfaitement inu-
tile d'en prouver la criante fausseté ; il ne s'agit que d'en
chercher l'origine.
Un i)laideur malheureux, irrité contre son avocat à qui il
attribuait, comme on fait toujours, la perte de son procès,
dit que c'était un âne : — l'àne avait tout à fait mauvaise
réputation à celte époque. — Rentré chez lui, il continua
à exhaler sa colère , et réciproquement il appela son âno
avocat. C'était du pur algèbre qu'il faisait sans s'en
douter, comme Monsieur Jourdain de la prose. A* étant
égal a .\2, X' devait être égal à .\i ; l'équation restait la
même quoique les termes changeassent de place. La colère
de notre plaideur dura bien au-delà des vingt-quatre heuresi
légales, et toutes les fois qu'il allait aux champs avec son
compagnon, il ne manquait pas de dire : Ari, l'avouca ! La
AVO
AZO
79
plaisanterie so répandit et finit par être acceptée, par l'âne
d'abord, cela va sans dire, et pais par ceux même qui
eussent pu en être blessés et qui no firent qu'en rire.
Voici une autre explication, qui est celle des savants.
L'a avocat, du vieux temps où l'on faisait force latin au
barreau, avait pris la spécialité de plaider les alibi. Il en
trouvait partout et faisait un tel usage de ce moyen dans
tous les cas, qu'il lança un jour le génitif pluriel fort
hasardé aliborum. On ne l'appela plus que Maitrc Alibo-
rum, qui devint Aliboron. Or, cet avocat était, dit-on,
un àne. De telle sorte que de ces trois noms ou de ces trois
mots on finit par faire une confusion qui dure encore.
Après cela il y a une explication plus simple et que je
crois la bonne, car il no faut pas abuser de l'anecdote.
Un paysan qui fait l'entendu en affaires, le beau parleur,
aimant fort à avoir raison, le Gros-Jean enfin, ses voisins
l'appellent un avouca. L'àno a bien quelque chose de ces
allures. A certain entôtemeent, que peut-être on apprécie
mal quelquefois, il doit se croire aussi une façon de doc-
teur qui en sait plus que tout le monde, car il est diffi-
cile de lui faire faire autre chose que ce qu'il a conçu ; et
dans les fréquentes discussions qu'à ce propos ils ont
ensemble, l'ànier de dire : Ah ! tu fais l'entendu, tu veux
faure ta tête, tu raisonnes, tu fais l'avocat ; nous allons
voir ; Art, l'avouca I — Ce n'est pas autrement qu'il a
pris ses grades et reçu son titre. — Foy. TranthitiMn.
Dér. du lat. Advoeatui.
Avugla, ». Aveugler, rendre aveugle ; éblouir, au prop.
et au fig. — L'douro avuglo, le vent vous remplit de
poussière à aveugler. Cérquo soun eapèl, et es aqul qui
l'avuglo, il cherche son chapeau, et son chapeau est là qui
lui crève les yeux, tous Uiouuet avuglou, les éclair»
éblouissent.
Dér. de Àvugle.
Avugle, avuglo, adj. Aveugle. — Vôou mai èttre nèei
quavugle, mieux vaut être sot qu'aveugle, n5pond-on prvb.
à quoiqu'un qui vous traite d'imbécile. Cette phrase, dont
le sens est singulièrement elliptique, signifie que n'étant
pas aveugle niais simplement un sot, on a la satisfaction de
voir plus sot que soi et l'espérance d'en guérir. Bada eoumo
un avugle, crier comme un aveugle, parce que l'aveugle
mendiant a une façon lamentable et criarde de déplorer son
infirmité. L' Avuglo dé Cattél-Cuïê, est le titre d'une de»
plus jolies pièces du poète Jasmin.
Dér. de la bass. lat. Abœulus, privé d'yeux.
Azoaèn, ». m. Adjoint à la mairie. — Toute la nomen-
clature des fonctions constituées sous un régime constitu-
tionnel est devenue familière au peuple, qui en accommode
au génie de sa langue toutes les dénominations.
B
B
B, seconde lettre de l'alphabet et première des con-
sonnes.
Il entre dans le plan de ce Dictionnaire, on a pn s'en
apercevoir, de réunir à la nomenclature purement lexico-
graphique de notre langue ou du moins de notre dialecte
les observations grammaticales relatives à la contexture
des mots, qui est leur orthographe, ou à leur étymologie,
qui est leur histoire. Nous faisons en même temps de la
grammaire, suivant toute l'acception du mot, et du glos-
saire, en inscrivant sous leur numéro d'ordre les termes et
les locutions en activité de service ou d'usage, et en ras-
semblant autour d'eux les significations, les définitions, les
exemples, les citations, les remarques qui présentent quel-
que intérêt de curiosité ou un éclaircissement instructif.
En cela nous suivons notre programme ; mais encore est-il
bon d'expliquer pourquoi nous nous le sommes imposé.
Avec la conviction que nous avions affaire à une langue
véritable, il convenait de traiter notre idiome méridional
comme une langue. Né le même jour et dans le même ber-
ceau que le français, il est resté plus longtemps fidèle à sa
nature et à ses origines : il l'a emporté sur lui en culture
B
et en harmonie; mais après avoir lutté, il a été vaincu et
il est proscrit. Pour lui le mouvement de progrès s'est
arrêté; la force seule de sa constitution le soutient, mais
la déchéance qui le frappe ne l'a pas converti en un des
patois du français, et les principes vitaux do sa forma-
tion n'ont point péri. C'est à retrouver ces éléments, à en
réveiller l'énergie et la puissance qu'il travaille et qu'il
mérite d'être aidé. Et c'est précisément pour cela aussi
qu'un vocabulaire languedocien, même quand il se ren-
ferme dans un dialecte particulier, ne saurait se contenter
de relever le catalogue complet des mots do bon et vrai
crû, ou des naturalisés, de traduire leur sens, de signaler
leurs altérations, de les ramener à leurs sources. Il nous
a semblé qu'il devait encore étudier leur formation et leur
composition, pénétrer dans leur génie, chercher la raison
de leur structure, de l'agencement de leurs lettres et de
leurs syllabes, de leurs combinaisons et de leurs change-
ments, noter leur accent et leur prononciation, tout ce qui
fait le caractère, le cachet, l'individualité, la physionomie
animée d'une langue.
C'est un champ nouveau à explorer : un filon que
80
B
la langue d'Oc a peut être trop négligé, tandis que lo
français et les autres langues possèdent des travaux Irès-
remarquables : est-ce un motif pour le délaisser? Notre
Dictionnaire n'a pas voulu rester dans le cadre d'une
simple classification de mots, moins dans l'espérance de
combler ime lacune, que dans la pensée do recueillir ce
qui intéressait la langue. Ces notions grammaticales, ces
observations sur la composition des termes qu'il enregistre
et sur la syntaxe, auraient peut-être gagné à être rassem-
blées et à se condenser dans un traité spécial entièrement
didactique, qui manque à la langue d'Oc, au lieu de se
répandre à petites doses séparées sur une infinité d'arti-
cles ; mais une fois la forme du Lexique adoptée, il était
difficile de procéder autrement. D'ailleurs, malgré leur
dissémination, un enchaînement coordonne et relie dans
une iilée d'ensemble tous ces matériaux ; puis, à vrai dire,
le travail s'est mesuré de lui-même à nos forces : vouloir
élever un monument eût été une bien grosse entreprise, et
pour nos moyens d'une exécution impossible. Un livre à
consulter, au courant de la fantaisie ou de la distraction
a surtout besoin de variété : il se sauve par l'éparpiUement
et peut atteindre son but sans fatigue : nous ne cherchons
que cela. Dans une œuvre toute originale, ce sera, si
l'on veut, notre originalité. Humble débiteur, dès notre
enfance , envers notre langue , nous payons notre dette à
cette créancière amie en monnaie de billon, ramassée sou
par sou , au lieu de solder en fins billets de banque, réservés
aux riches de la finance, dont nous ne sommes pas. Qu'im-
porte après tout, si la monnaie est courante et de bon aloi
et que le compte arrive juste?
Sans aller plus avant, nous tenions à expliquer, sinon à
justifier notre méthode et l'ordonnance de ce vocabulaire.
Sans doute notre travail n'est pas simplifié par là, non
plus qu'abrégé et plus facile; mais cette digression et colles
qui pourront suivre ne seront pas inutiles, si pour un plus
grand labeur elles nous valent aussi plus d'indulgence.
A propos de la première consonne do l'alphabet, il est
donc naturel de s'informer avec quelle valeur et par
quelles modifications les consonnes, ces éléments consti-
tutifs des mots, sont entrées dans leur composition.
La question serait fort abstraite et trop compliquée s'il
fallait la tenir à la hauteur des spéculations théoriques
touchant l'origine, la formation et la physiologie du lan-
gage ; elle se tempère heureusement en abordant à l'his-
toire, en s'appuyant sur des faits rapprochés, plus tan-
gibles et déjà vérifiés. Nous n'aurons qu'à relever les prin-
cipaux : les notions générales paraissent suffire.
La gamme des sons que peut émettre la voix humaine
n'a qu'un petit nombre de notes : ce sont les voyelles ,
qui se meuvent dans une échelle fixe, en passant du grave
au doux, du long au bref, du simple au composé. Les
consonnes sont plus nombreuses , leurs combinaisons
plus multipliées : elles servent de lien aux voyelles,
elles sont leur point d'appui. L'alliance de ces deux
B
éléments forme les syllabes et les mots, et toutes les
langues ont les mêmes procédés nécessaires. Tout cela,
voyelles et consonnes, se divise et se subdivise en nuances
de tons et demi-tons, se distingue en classes et en familles,
s'étiquette en genres et en catégories de gutturales, pala-
tales, dentales, labiales, sibilantes, liquides, aspirées, fortes
ou faibles. Dans la revue qui s'ouvre chacune doit venir
à son tour par ordre alphabétique; et nous nous attache-
rons à signaler leur caractère individuel, leur office el
surtout leurs permutations, sans autre tableau systématique.
Ce qui fait en somme une langue et la différence des
langues et des dialectes n'est que la tonalité ou l'accent
que prennent les voyelles, et la combinaison des con-
sonnes avec elles, comme agents et instruments de la
parole. Et ce qui rend un idiome commun à un peuple
est l'effet de la prédisposition naturelle ou instinctivement
convenue de l'organisme vocal d'un groupe vivant dans
des rapports fréquents, sous le même ciel et sur le même
sol ; ce sont les propensions particulières à chaque population
à rechercher ou à répéter certains sons, à préférer les
uns ou à réprouver les autres , suivant les facilités ou
les complications d'une articulation, qui la rendent plus
ou moins propre à être exprimée, entendue et comprise, et
qui lui font adopter de préférence telles ou telles intonations.
Cette loi est générale ; tous les langages qui se sont parlés
dans un pays quelconque, dans une zone déterminée, ont
leur raison dans ces sympathies ou ces répulsions orga-
niques: leurs altérations, leurs changements, leur déve-
loppement môme n'ont pas d'autre mobile.
Nous n'avons pas une langue primitive : notre idiome est
un dérivé de seconde ou de troisième formation. Par con-
séquent pour peu que l'on tienne à s'expliquer son expan-
sion, sa vivace persistance et sa régénération actuelle, il
est impossible de ne pas consulter ses origines, sa généa-
logie, sa filiation , son histoire, c'est-à-dire de ne pas
rechercher leg lois et les procédés de la langue qui lui a
servi de type, dont il s'est imprégné et qu'il remplace sur
son ancien territoire. Là est l'essentiel.
Nous l'avons dit déjà : le midi de la Gaule fut le pre-
mier latinisé. En tenant compte de l'élément celtique qui
se mêla au latin populaire, apporté par les vétérans et les
colons ; en faisant la part des influences germaniques et
orientales, dues aux Visigoths ou aux Sarrazins ; toujours
est-il que ce qui nous est parvenu de la langue des plus
anciens habitants, comme ce qui est resté de celle des
envahisseurs, ne nous a été acquis que par le latin, et à
la condition de revêtir la forme el les flexions romaines.
Au moment où, après une longue période d'inculture et
presque de barbarie, la langue voulut se relever et que se
forma le roman rustique, en même temps que l'italien et
l'espagnol, c'est encore le latin plus ou moins corrompu
et oblitéré, qui leur fournit son vocabulaire et sa syn-
taxe, les lettres de son alphabet et le mécanisme de l'ac-
centuation.
B
B
81
Mais il est bien évident (\\xe, jwur se former et s'orga-
niser, la langue romane ne fut pas coulée d'un seul jet
dans ce moule un peu fêlé du latin vulgaire, et ne sortit
pas non plus comme un l)loc d'une éialioralion savante du
moyen âge. Le peuple s'en mêla pros(iue seul. La fusion de
tous les éléments qu'on y dislingue se fit |ieu à peu, de sou-
venir et d'instinct. A mesure que s'éteignit la domination
qui imposait SCS formes, la population, pluslivrée àelle-mêmo
fit prévaloir ses goûts et ses commodités dans la pronon-
ciation, et assouplit davantage le parler à ses aptitudes et
à SCS préférena's. Et (ju'akjrs certaines tendances tradi-
tionnelles aient fait retour, que certaines propensions de
vocalisation, sous l'action directe du climat ou par l'in-
fluence des habitudes, se soient manifestées; il n'est pas
permis de le mettre en doute. En Espagne et en Italie, la
langue nouvelle qui se créait aussi, n'opéra pas d'une
autre manière : les mêmes conditions climatériques eurent
ici une influence à peu près pareille ; et c'est pour cela
que tant d'alTmités se montrent encore entre la langue
d'Oc et l'espagnol et l'italien.
Partout, dans noire Midi, la vivacité proverbiale des
Gaulois se donna carrière. 11 semble que la formule radi-
cale, qui représentait suflisamment l'idée, étant trouvée et
conservée, le premier besoin, le plus pressant était de
l'exprimer promptement, avec la rapidité que le peuple
tenait de sa nature. Aussi, la contraction, la syncope,
l'abréviation se produisent à chaque mot. Les langues
romanes les érigent en système ; preuve que la simpli-
fication répondait à une nécessité de l'esprit nouveau. Le
latin populaire n'y avait pas échappé : c'était comme un
exemple à suivre; souvent même l'idiome nouveau exagéra
le modèle.
Comment les désinences SHp|X)rlèrcnt la première épreuve,
nous l'avons fait voir il l'article Agiw , suffixe ; mais en
même tenqis le corps des polysyllabes ne pouvait manquer
d'être atteint. Pour eux la restriction s'opère au moyen de
l'accent tonique : nous allons indiquer ce procédé.
On sait (jue tous les mots, sans exception, ont une syl-
labe dominante sur laquelle la voix s'appesantit. Le latin,
langue de quantité par excellence, A cause des dactyles qui
terminaient licaucoup de ses mots, cl pour donner un point
d'appui suffisant à son accent sur une syllabe longue, avait
la faculté d'accentuer toniqucmcnt même l'anté-pénultiôme;
dans asinut, bibere, viiere, etc., la voix pesait sur la pre-
mière syllabe, elle glissait sur les autres. Le roman lan-
guedocien et ses dialectes n'étei\denl jamais l'accent jus-
qu'à l'anté-pénultième ; ils rejKiusscnl le dactyle de la fin
des mots , et c'est jKiurquoi la syllabe médiane brève se
trouve nécessairement supprimée ou absorbée dans une
seule voix diphlhonguéc et longue. Ex. : Âtinus fait ate,
bibere, béoure, vivere , vioure , conimo. populus donnait
pobol au roman et à notre dialecte puple ou pople, baju-
Iftt ba'ile, baculus battoù, spiritus éspri, etc., etc.
)^a conséquence devrait être d'amener les permutations
de lettres, qui mettaient la prononciation plus en rapport
avec l'organisme vocal du peuple destiné à s'en servir;
car CCS syncopes pouvaient placer en contact des combinai-
sons de syllabes dont les consonnes en se heurtant se
re|K>ussaient eupboniquemcnt. Et c'était le moins dès lors
que chaque [)opulation cherchât à approprier Ic^ mots à ses
facultés innées, à ses propensions et à ses facilités de les
articuler. Mais comme en définitive le roman languedo-
cien ne se débarrassait pas absolument de sou empreinte
latine, et comme il ne voulait pas s'affranchir des lois
générales d'affinités euphoniques qu'il recueillait par suc-
cession et trouvait toutes faites ; et qu'enfin les combinai-
sons anciennes avaient leur logique et ne s'étaient pas
établies au hasard et par pur caprice; les changements
qui ne blessaient pas le sens et n'étaient pas une gêne trop
grande, se soumirent aux règles consacrées.
Ainsi les permutations du latin à notre languedocien
actuel, en passant par le roman, ont été inspirées, de
proche en proche et ta tous les degrés, par le besoin d'ob-
tenir une prononciation plus prompte et plus facile, et par
cela de diminuer l'elTort et de mieux approprier la lettre
aux habitudes ou aux propensions de l'organe.
De là est venu d'abord l'adoucissement dans la pronon-
ciation et l'introduction des finales muettes, plus gènëra-
liséi* dans le français que dans notre idiome méridional.
Les consonnances dures se sont affaiblies ; le e et le 9
romains, toujours rudes devant toutes voyelles, se sont
cliangés en j et en g doux, en ch ou en j. Quand deux
lettres similaires se rencontraient rapprochées dans deux
syllabes voisines, il paraissait souvent plus commode d'en
transformer une par son équivalente, que d'admettre une
répétition. C'était un sentiment mélodique, autrement
perçu et autrement noté ; mais les rapports chromatiques,
si délicats à observer, se maintenaient sans avoir toutefois
rien de constant et d'uniforme. La fixité leur est venue,
quand chaque dialecte, prenant son vrai caractère, s'est
consolidé dans une région et qu'il y persévère, comme
pour démontrer qu'il réiiondait dans le principe, et qu'il
répond encore à (juelque nécessité réelle ou harmonique,
naturelle à la population ([ui l'a adoptée.
Dans cet ordre d'idées, quelques exemples ' pris au
hasard, qui seront mieux expliqués par la suite, mais qui
donnent déjà la clé de bien des étymologies et qui décou-
lent des observations précédentes. >"ous ne faisons qu'in-
diquer : d'abord les désinences en argue, passant de la
bass. lat. anicœ au roman anègues, se métamorphosant en
artche, ange, encke, agne et leurs analogues ; manica, latin,
devient notre -vieux mot tnargue c\, nuxneht actuel, domi-
nicut, tlominica, donne doumèrguecX dimènche ; les finales
en ola, ola, olum se convertissent de diverses manières,
Balneolœ, bnlneolum. balniolum, deviennent jwur nous
Bagndou, Bauious et Yagnas, en fr. Hagnols, Baigneux.
IJagnères, etc., comme Unleolum fait lênçàou, linceul,
ftUolas, /idou, filleul ; lusciniola, routsignàou, rossignol, etc.
n
82
BAB
BA6
Et encore , pour la permutation qui nous occupe , ou
iconve piper , pébre, |)oivre; râpa, rabo, rave; ripa, ribo,
rive; capra, cabro, cllèvre ; lepus, lèbre, lièvre, et ainsi de
8nite d'une foule d'autres ; la labiale B, selon l'esprit de
chacun des trois idiomes, se transformant de trois façons,
tant()t douce, tantôt forte, tantôt aspirée.
Tant il y a que, dans l'application, on est arrivé à obtenir
certaines lois de permutation. C'est ce qui a permis de les
classer par groupes naturels. Il se rencontre sans doute des
exceptions; mais rien ne parait en définitive livré au
hasard ni au caprice dans les variantes les plus étranges
en apparence. La règle peut se formuler, et il en résulte
qu'une consonne de même nature, soit forte ou faible, soit
aspirée, peut bien être appelée à remplacer une consonne
appartenant à la môme famille, mais que rarement elle
dément sa race et elle ne se substitue jamais à une con-
sonne d'un groupe opposé. Ainsi B pourra être indifférem-
ment, sans trouble harmonique, converti en une consonne
de son ordre, P, F, ou V, et à l'inverse ces dernières ixjur-
ront être permutées en B ; mais il n'adviendra pas que les
unes ou les autres passent facilement dans l'ordre des den-
tales ou des gutturales.
B et V appartiennent au même groupe des labiales sim-
ples ; leur permutation est fréquente et légalisée par les
règles. Suivant les diverses nuances de l'idiome languedo-
cien, elles usurjient volontiers l'une sur le domaine de
l'autre. Dans le dialecte gascon, B a l'avantage ; dans le
Bas-Languedoc, c'est V ; dans nos Cévennes, c'est un juste
milieu. Il y a encore parmi nous une foule de mots dans
lesquels on emploie B et V à peu près ad libitum, comme
tabe, save ; abcna, avéna ; atrouba, atrouva ; houmi,
voum), etc. Cela tient à ce qu'Alais, placé sur la ligne
divisoiro du dialecte lozéricn et raïol, et de celui de Mimes
et du pays gounèl [V. c. m.), est comme un terrain
neutre, qui peut emprunter aux deux rivaux avec une
égale légalité.
Sans insister sur des observations qui reviendront
d'ailleurs à chaque lettre, on voit toutes les ressources que
la philologie peut tirer de ces principes, quand il s'agit soit
de recomposer un mot étyraologiquement, en dégageant le
radical, soit alors qu'il faut chercher sa descendance et la
raison de sa forme actuelle.
B, lettre isolée, se prononce à l'ancienne méthode fran-
çaise, comme si elle était suivie d'un é fermé, Bé. A ce
litre, ici el dans l'article suivant, elle devrait figurer à un
aulrc rang ; mais comme elle n'est considérée que dans sa
valeur ordinale et non point sous le rapport de la pronon-
ciation, noHs la inainttmons à cette place. H en sera de
même pour les autres consonnes.
Ejire marqua doit B, être maniuô au B. Un pro-
verbe a dit :
lU^you, lioriii, boussu, bouïtoiis,
Quatre U que soun faihoùs.
B-a-ba, ». m. Commencement de la seconde leçon du
syllabaire, et par conséquent une des plus faciles. — Es
éncaro âoii b-a-ba, il en est encore aux premiers éléments.
Aquà's lou b-a-ba. c'est la chose la plus simple du monde.
Ba, syllal» qui, isolée, no présente aucun sens, et qui
n'entre dans ce dicton populaire : tant fa, tant ba .' que
pour signifier : tant de gagné, tant de mangé. — Cela
dérive probablement de bas, jeter à bas.
Baba, v. Baver, comme font les enfants au maillot, les
vieillards en caducité et même quelquefois les idiots. C'est
sans doute ce qui a donné naissance au dicton : es nèci que
babo, il est imbécile au point de baver. — Dâou plésl que
n'aviè babavo, il en bavait de plaisir, a dit le poète abbé
Favre, dans son fameux sermon dé moussu Sistre, pour
peindre la l3éate jouissance de Simon h l'écouter. Li faguère
baba lou rouje, je lui fis rendre le sang par la bouche ; je
lui cassai la gueule.
Un fousél baba, est un cocon que la nymphe, récem-
ment transformée en papillon, a commencé h percer pour
obtenir sa délivrance. L'animal, pour cette opération, com-
mence par répandre sa bave sur les parois intérieures de
l'un des pôles du cocon, afin de les ramollir et de dissoudre
le ciment visqueux qui colle les fils de soie l'un à l'autre ;
par oe procédé, il parvient à les décoller, à les séparer et
à les écarter, en les ramassant en bourrelet sur l'orifice,
mais sans jamais les couper, car, à l'état de papillon, il
n'a ni dent, ni sécateur quelœnque ; enfin il agrandit assez
l'ouverture pour y passer tout le corps. Or le fousél baba
n'est pas celui qui est complètement ouvert et qu'on
nomme parpaïouna, mais bien celui dont les téguments
intérieurs ont été humectés de bave, babo, et relevés en
bouchons, sans ouverture extérieure. Cette espèce de
cocons ne fournit pas de soie, parce que le brin de soie a
été embrouillé, noué, renoué, et qu'il ne peut se dévider
à la bassine ; il n'a plus d'autre valeur et d'autre utilité
que le cocon de graine ordinaire, dé babo, gâté par la
bave.
Dér. du lat. barb. Babua, enfant.
Babaïre, aïro, adj. Qui bave ; enfant plein de bave ;
baveux.
Dér. de Baba.
Babàou, *. m. Sorte d'être fantastique dont on ne déter-
mine pas le nom, ni la forme, ni l'usage ; c'est un objet
indécis de crainte pour les enfants. — Garo lou babâou!
Gare la bête noire ! — Babdou est aussi le type do ce qui
est noir, de l'obscurité ; on dit : nègre coumo babdou, éscu
coumo babdou. Faire pinchoii-babdou, montrer et cacher
alternativement la tête : jeu qu'on fait à un petit enfant
pour l'amuser. — Dans le langage enfantin, on appelle
encore babdou un pou de tête, qu'on présente comme ime
liêto dangereuse et méchante pour engager les enfants à se
laisser peigner. On leur fait à l'appui le conte suivant :
Se vos pas té laissa pénchina, lous babâous trénaran tout
péous, né faran uno cordo, et té rabalaran en Gardoîi, si
tu ne veux pas te laisser peigner, les poux tresseront tes
BAB
BAB
83
cheveux, ils en feront une corde, avec laquelle ils te trai-
neronl t\ h rivière.
Ce mot i)nr;ul dur. de l'ital. florentin BAou, dont il n'est
qu'un réduplicatil' et qui a la môme signification . Va auteur
italien, qui a voulu faire l'ôrudit cl l'original , prétend que
ce mot bdou est l'abrégù ou la finale du nom d'Annibal,
qui fut longtemps un signe d'elTroi à Rome, et dont les
femmes romaines usaient pour menacer leurs enfants.
Babarèl, t. m. Bavette d'enfant; pièce d'estomac, linge ou
toile en taffetas ciré, destiné à recevoir la.bave des enfants.
— Sauvages dit aussi que Babarèl est une pièce ajoutée
au haut d'un tablier, dont les femmes font un ajustement et
se couvrent la poitrine, dans un âge où l'on ne bave plus.
Dér. de Baba.
Babarïa, v. Baver ; rendre de l'écume par la bouche,
comme font les chevaux qui ont trop d'ardeur ou les épi-
leptiques.
Fréquentatif de Baba.
Babario, s. f. Bave, salive qui découle de la bouche;
écume de la bouche ; liqueur visqueuse que répandent les
limaçons.
Dér. de Baho.
Babarogno, ». f. Être fantastique; la bête noù«, dont
on fait peur aux enfants, en les elTrayant autant par un
nom aussi laid que par la forme hideuse qu'on suppose au
fantôme.
Ce mot no serait-il pas un peu parent d'étymologie avec
celui de Babarâoudo, que cite Sauvages, et qui signifie un
domino, habit de masque ; grande robe dont on alTublait
les pleureurs, a .Montj)cllier, dans les convois fujièbres?
— Yoij. Baragogno.
Babaroto, s. f. Blatte, eu lat. Blata, insecte ortho-
ptère, très-vite, lucifugo, brun-noir, plat et large, à deux
longues antennes, qui habite autour des cheminées et des
fours. Sa préférence pour la farine et le pain lui a fait
donner un second nom languedocien, celui de Panaiièïro.
Il est assez dilficile de se débarrasser de cette blatt« domes-
tique, là où elle a établi son domicile.
Nous sommes fort tenté de faire dériver son nom de
Babàou, parœ que c'est une béte noire et qu'elle inspire
quelque di-goùt.
Babèou, n. pr. de femme, dira, de Itabèou, Elisabeth.
— Voy. Béloun.
Babïa, t>. Babiller ; jacasser, bavarder.
Dér., comme le fr., d'après certains auteurs, de l'hébreu
Babel, confusion ; d'après les autres, du gr. BaCiÇav, bal-
butier. On a voulu y voir aussi une onomatopî-e, imitant
les premiers sons inarticulés (jue fait entendre un enfant.
Je le crois plutôt dér., comme Baba, du lat. Babut, enfant,
parler comme les enfants, pour ne rien dire.
Babïaïre, aïro, adj. ou Babiur. Balùllard; qui aime à
caqueter; qui parle beaucoup, a tort et à travers. — Voy.
BabiuY.
Pér. do Babil.
Babil, t. m. Babil, lo({uacité ; caquet, caqnetage. •—
Manqua pat dé babil, il n'est i>as en peine de iwrler.
A fosso babil, il babille beaucoup. A j>as qui dé babil, il n'a
que du caquet.
Même étym. que Babfa.
Babinar, ardo, adj. Qui a de grosses lèvres; lippu.
Dér. de Bobina.
Babino, t. m. \A\Te ; babine d'animal. — Ti né pot
fréta las babinos, tu j)eux t'en frotter la moustaclie. S'in
liquo adéja lai babinot, il s'en lèche les lèvres d'avance ;
l'eau lui en vient à la bouche.
Dér. du lat. Labina, dim. de labia, lèvres; peut-être
aussi de babo, dont ks babinos sont le siège.
Babiur, urdo, adj. — Voy. BMidirt.
Babo, ». [. Bave, salive qui découle de la Iwuche ;
écume de certains animaux ; liqueur visqueuse du lima-
çon. — Es tendre coumo dé babo, diton d'un légume ou
d'un fruit très-tendre. On ne sait quel rapport il peut y
avoir entre un fruit tendre et la bave, qui n'a aucune con-
sistance et n'est qu'un hquide gluant. Le languedocien est
plein, dans ses dictons, de ces comparaisons excentriques
dont les deux membres sont sans rapport. L'usage de
celui-ci est fort ancien et fort journalier. Aquélo éstofo es
pas qui dé babo, cette étoffe n'a point de consistance.
Dér. de Baba.
Babo, ». m. Nymphe ou chrysalide du ver i soie : c'est
l'état moyen de cet insecte entre celui de ver et de papillon.
Il se métamorphose en chrysalide environ trois jours après
avoir commencé à fder son cocon, qu'il termine en se con-
vertissant en babd, de forme ovoïde, à mesure qu'il se
dépouille de sa soie : et après le treizième jour de cet état,
il devient papillon.
Les chrysalides sont un excellent engrais, soit qu'on les
répande dans leur entier, soit réduites en poudrette. Cet
engrais actif et chaud accélère prodigieusement la pousse
et la végétation. On dit que les Madécasses en font un plat
très-friand, au rapport de Lamothe Le Vayer. Pareil usage
se retrouve en Chine, où les mandarins ont trouvé et livré
une recette particulière pour cet apprêt. La députation chi-
noise venue à la dernière exposition universelle, avait,
sans doute, oublié le secret de cette préparation, ou bien
elle a tenu a ne pas le révéler ; car le rapport de la com-
mission ne mentionne pas qu'elle ait été primée pour le
moindre échantillon culinaire en ce genre. Si cependant le
fait rapporté par les voyageurs est vrai, il est fort pro-
Ijable que les chrysalides qui font les délices des gour-
mands du Céltîste-Empire ou de Madagascar, sont d'une
nature différente des nôtres, dont on connaît l'odeur détes-
table, et qui ne doivent pas avoir un goût meilleur à quel-
que sauce qu'on les acconimode. — Vn pouU àou baba,
un poulet nourri et engraissé de chrysalides, qui lui don-
nent une chair jaune, molasse et une saveur naust^bonde.
Dér. du lat. Bombyx, jwr un métaplasme un [«u forcé.
Baboutièïro, ». f. Femme qui achète les chrysalides.
64
DAD
BAD
dans les filatures, soit pour élever des porcs, soit pour Ips
faire sécher et les revendre pour engrais.
Dér. de Baba.
Bacanal, i. m. Bacchanal, grand bruit, tapage infernal;
rixe bruyante.
Dér., comme lo fr., du lat. Bacchanalh , bacchanales,
fêtes de Bacchus ; mais le bacanal n'entraùie pas comme
les bacchanales l'idée d'orgie, ni de plaisir sensuel.
Bacara, s. m. Bacarat, terme du jeu de macao. C'est le
plus mauvais point à ce jeu, un point ruineux. Par ana-
logie, on dit : faire bacara, manger tout son bien, se
ruiner complètement, jusqu'au jeune forcé inclnsivoment.
Quand on a tout mangé ou perdu,' on se trouve dans la
môme situation que lorsqu'on fait bacarat an macao.
Einp. au fr.
Hachas, s. m. Bourbier; gilciiis; cloaque, soit qu'il pro-
vienne de boue liquide, d'eaux sales ou d'eaux pluviales;
mare à canards ; mare à fumier ; flaque d'eau ; cuvette ou
bassin de fontaine domestique ; maie ou réservoir d'un
pressoir à vendange. — Crébo-bachas d'Anduso, vieux
sobriquet des Andusains, sans doute à cause des fontaines
dont leur ville est abondamment fournie.
Dér. de l'allem. Bach, rivière, ruisseau, ou de h. bass.
lat. baeca, baccha, bacchia, baccharium, identiques de
Sign. k bâchas.
Bachassoù (Céndrouséto) , *. f. Cendrillon. — Voy.
Céndrousélo.
Bacho, ». f. Baclie, grande couverture de grosse toile ou
de cuir, dont on recouvre les charrettes ciiargées pour
préserver les colis de la pluie ; sorte de manne en cuir
qui occupe l'impériale des chaises de poste et sert de
malle aux voyageurs.
Bada, v. Ouvrir la bouche ; avoir la bouche béante ;
Être ouvert; par ext., crier à tue-tête; appeler; héler en
donnant toute extension à sa voix ; bayer, être ravi d'ad-
miration. — Bada âou lotip, crier au loup. Bado tant qu'a
dé gorjo, il crie de toute la largeur de sa bouche, il crie à
pleine gueule. — Doumynaï lotis âousséloùs soun jomnes,
doummaï badou, plus les oisillons sont jeunes, plus ils
ouvrent le Iwc. C'est une expression proverbiale, qu'on
applique par comparaison à une nichée d'oiseaux qui
ouvrent lo Ijec et crient à la fois quand ils voient arriver
la pâtée que leur apporte leur mère. Mous soutes badou dé
pérlout, mes souliers font mille grimaces. Aquà faï bada
■ dé véire, on est, en voyant cela, ravi d'admiration. Dé que
baJet ? le, véloù'quU De quoi te plains-tu ? pourquoi cries-
tu? tien», le voilà ! Bada ta drageio, avoir la bouche béante ;
bayer aux corneilles. Cotte expression i)rvb. est empruntée
à un jeu de carnaval. Un masque, déguisé en Cassandre,
est monté sur un àne, la face vers la queue. Il tient a la
main une haguelti; au bout de laquelle est attaché un fil,
portant une dragi'w qui se balance sur la tête d'une foule
d'enfants qui suivent, la bouche ouverte pour happer la
dragée, car il leur est défendu de se servir de leurs mains.
Le Cassandre frappe sur la baguette avec une seconde, qui
inii)rime à la dragée un sautillement continuel et rend
très-difTicile la t:\chc des happeurs. A les voir .se démener,
se bousculer, et bada, est le plaisir du masque et l'amuse-
ment des spectateurs.
Dér. de la bass. lat. ou de Fital. Ba'are, béer, bayer.
Bayer est donc l'acception naturelle et originaire de bada;
crier n'est venu que par analogie, prrce qu'on crie en
ouvrant la Iwuche grande, comme quand on baye.
Badadls, s. m., ou Badadisso, s. f. Criaillerie; réu-
nion de plusieurs voix qui crient.
Dér. de Bada, crier.
Badado, s. f. Grand cri prolonger; mercuriale à hante
voix et colérique ; huée de mépris ou de risée. — Faire la
badado, huer quelqu'un, le poursuivre de huées ; lui faire
une honte publique, crier haro.
Dér. de Bada, crier.
Badafièïro, s, f. Terre remplie de lavande; par ext.
broussaille, bruyère.
Dér. de Badafo.
Badafo, s. /"..ou Espi. Lavande, spic, aspic, Latandula
spica, plante de la fam. des Labiées, aromatique; nard
commuft. C'est de cette .plante qu'on tire par la distilla-
tion l'eau de lavande et l'huile d'aspic. La badafo est pro-
prement la plante elle-même considérée comme combus-
tible. On la brûle en effet dans les magnaneries poirr puri-
fier l'air; on l'emploie aussi en guise de bruyère pour
ramer les vers à soie ; mais comme elle est basse et courte,
on ne peut la fixer d'une table à l'autre comme la bruyère,
et on la réserve pour la table la plus haute qui n'a point
de dessus, en la piquant dans des liteaux jiercés de trous,
ou dans des fagots de sarment. Les vers à soie se plaisent
à filer dans la badafo, dont ils paraissent aimer l'odeur
forte et agréable. La fleur de la badafo et sa semence sont
placées au haut des nombreux épis qu'elle pousse annuel-
lement. Quand ces épis sont secs, on les vend par bottes
pour allumer le fou , ou pour faire chaufl'cr le linge de
corps, auiiuel ils communiquent une bonne odeur. Dans cet
état, on l'appelle Espi. — V. c. m.
Il est difficile de donner une étymologie à ce mot ; là
plupart des termes empruntés à l'histoire naturelle sont
dans le même cas. Chaque dialecte a ses techniques, et
ils sont souvent, comme les noms propres, produits par
un cas fortuit, quelquefois anecdotique. Le lat. JSalsamum
serait bien hasardé et aurait passé par trop d'altérations.
f.,e roman a badace, pour nommer aussi une plante qui
croit dans les lieux arides, comme la lavande.
Badaia, v., fréquent, de Bada. Bâiller, ouvrir invo-
lontairement la bouche, en respirant et expirant avec
force; au fig., s'entr'ouvrir; se crevasser; rendre le der-
nier soupir. — ■ Lous castagnes couménçou dé badaia, les
chiUaignes commencent à ouvrir leurs hérissons; les châ-
taignes sont prêtes à tomber. Badaia vàoa pas menti, m
noun vôou manja, vôou dourmi, prvb., le bâillement
ËAG
BAG
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annonce la faim ou le sommeil. Ei pat mort, mait bada'io,
il n'est pas mort, mais il est aux abois.
Dér. de Bmla.
Badaïre, aïro, adj. Qui crie, qui appelle; criard. —
Siii pas qu'un hadaïre, tu ne fais que crier.
Der. de Buda.
Badal , «. m„ dlm. BadaHoù. Bâillement ; action de
bâiller. — Faire tous badais, ou faïre lou dariè badal,
rendre le dernier soupir.
Dit. de Badaïa.
Badàon, âoudo, adj. Badaud, niais, nigaud, qui s'ar-
rête à tout, qui admire tout.
Dér. de l'ital. Badare, ou de la bass. lat. Badaldus, qui
t la bouche ouverte, qui bâille.
Badarèl, élo,a(/y., péjor. Badarilat. Criard, criailleur;
qui toujours cric, toujours se fâche.
Dér. de Bada.
Badin, ino, adj. Badin, plaisant, farceur.
Dér. du gr. flaiSviSî, d'enfant.
Badina, v. Badiner ; folâtrer ; tromper, duper, plaisanter
quelqu'un, le mystifier ; faire semblant. — M'an bien
badina à la jieiro, on m'a bien dupé à la foire. Badine
pai, je ne plaisante pas, je le dis très-sérieusement. Véaèt
pas que badine? ne voyez-vous pas que c'est pure plaisan-
terie?
Dér. du gr. IlaiSviî.
Badinado, s. f. Plaisanterie ; tour de plaisant bon ou
mauvais ; mystification ; gaillardise.
Badinaïre, aïro, adj. Gouailleur; plaisantin; mystifi-
cateur.
Badinaje, s. m. Badinage; plaisanterie; gaillardise;
mystification, génériqueinent parlant. Badinado est un
acte isolé et spécial du badinaje. — Enlinpat rés lou badi-
naje, il n'entend nullement la plaisanterie. Aquà's pas dé
badinaje, ce n'est point un jeu, c'est très-sérieux. Aquà's
un vilén badinaje, c'est une mauvaise plaisanterie.
Badine, s. f. Badine, canne mince et flexible; le stick,
en nouveau langage à la mode ; petit bijou que les femmes
portent suspendu au cou et qui varie suivant le pays, le
culte et la mode.
Dér. de Badina, parce que dans l'une ou l'autre accep-
tion, l'objet semble toujours frétiller, jouer et être en
mouvement.
Badîon, adj. m. sans fém. Ouvert de tous côtés; béant;
grand-ouvert. — L'ousiâou es tout badiou, la maison est
toute grandoouverte, soit par négligence, soit par manque
de lernjeture, comme le logis du pauvre.
Dér. de Bada.
Bagar, j. »»., n. pr. de lieu. Bagard, commune du can-
ton d'.\iiduze, arrondissement d'.Vlais.
Un titre de l'an 1071 cite cet ancien village comme
viguerie, in vicaria de Baijarnis, et l'appelle encore de
Bagarno ; en M 74, la forme au pluriel revient dans (ie
Bagarnis, el se conserve depuis.
Comme étymologie il se rencontre deux mots de la bass.
lat. qui feraient une sorte de pléonasme : baga, id ttt
arca, coffre ; et ania, alveus apum, ruche d'abeilles, qui
est dans l'ital. arnia, lieu rempli de ruches d'abeilles. Cette
attrihution serait appuyée et confirma par le nom d'un
écart de cette commune dans le voisinage , mentionné
aussi dans la charte de 1071, qui dit : in vitaria d«
Bagarnis, el in villa quae vocatur de Melnacho. Ce dernier
mot est certainement le nom primitif de Moinas actuel,
qu'il est facile de reconnaître ; mais le nom latin d'évidence
est formé de md, miel, qui y entre tout entier. Ce rappro-
chement donne raison à la signification étymologique de
Bagar, lieu où se trouvaient de nombreuses rucheries.
Bagasso I interj. Ah ! bien oui, je t'en souhaite ! Va-
t-en voir s'ils viennent ! Cela ne vaut rien.
Nous croyons que cette expression dérive du mot de l'an-
cienne langue d'Oc, Bagans, formé du lat. vagans, errant,
vagabond, nom que l'on donnait aux Ijergers nomades de»
Landes. Sans doute, ce genre de vie excentrique, au milieu
de la civilisation, leur avait donné des mœurs barbares et
sauvages, pareilles à celles des truands et des bohémiens,
qui les mit en mauvais renom. On a fait de là notre inter-
jection, qui ressemble à l'expression du mépris.
Autrefois, en v. fr.,on api)elait Bagasse, une prostituée,
une coureuse. Probablement l'étymologie est la même et
s'appliquait à ces sortes de bergères nomades. En tous cas,
le mot est ancien dans notre idiome. Voici un fragment
extrait des Joyeuses recherches de la langue tolosaine, par
Odde, de Triors, 1378, qui s'en explique dans un assez
long commentaire rabelaisien ; il commence ainsi : « Ba-
gasso, seu ut nonnulli volunt, eourredisso en ccstc cité de
Tolose, est vn terme iniuricux entre les pauures femmes,
de fort basse, vile et infime condition, lequel nom de
Bagasso sœpissime resoluitur per aliud nomen quod dicitur
[cantoniero) ; sunt et nonnulli quidicunt [cabas], juxta vul-
gare dictum figue de Marscillie, cabas d'Auignon... Or,
bien que le susdit prouerbc se dise et s'vsite bien souuent
comme nous voyons icy m mahm partent contre la noble
cité d'Auignon, toutes fois ie m'asseure que telle maladie
règne plus ailleurs qu'en Auignon, et que si elle a le brnict
les autres ont le faict. Que mal de pippe eut abbatu le
premier inventeur de tels blnsmcs et ne peus croire que ce
n'aye esté quelque larron foeté et banni de la susdicte
noble cité. Et pour tout liongue qui hongue, gronde qui
gronde, tousiours viura la noble cité d'Auignon, moienant
l'ayde de Dieu, car sine ipso facium est nihil, et per ipsum
omnia fucta sunt, Deo gratias »
Bagatèlo, s. f. ou Barandèlo. Danse on plutôt galop,
fort en honneur dans les Cévennes, qui ressemble assez i
la danse des Bacchanales. Celte danse fort animée et sou-
vent gracieuse s'elTace dans nos mœurs actuelles, qui ont
adopté la contredanse des villes, danse pâle et dialoguée,
qu'on ne fait plus que marcher de nos jours. Le galop
était ce qui rappelait le mieux, il y a quelques années, ki
86
BAG
bagatèlo ; mais depuis qu'avec les mazurkas et les scotichs,
le progrès chorégraphique a [rfnétré dans les campagnes,
par la manière dont on les saute et avec laquelle on s'ahan-
doiuie, il n'y a pas à regretter les élans et la désinvolture
de la bagatèlo.
Comme vocahle, Barandèlo est à la fois plus technique
et plus expressif. C'est celui qu'a employé notre charmant
poète cévenol, dans la description si vive, si joyeuse de
celte danse à la Fièïro dé Sén-Bourloumiou.
Ce mot est sans doute par analogie empr. au fr.
Bagna, v. Mouiller par aspersion ou par immersion. —
Lou bas se bagno, proprement, le bit commence à tremper
dans l'eau; au fig. et prvh. : la chose commence à se
gâter, le danger approche. On suppose ici un homme pas-
sant à gué une rivière sur un nmlet ; quand l'eau com-
mence à arriver à la hauteur du bat, il est à craindre que
cela n'empire, il y a danger de la noyade : prenons donc
garde, lou bas se bagno. Ainsi dans toutes les entreprises
ou circonstances, pour avertir d'être avisé et prudent,
quand ou comprend qu'on va être poussé à bout, et que la
mesure s'emplit. Bagna coumo un ra, mouillé comme un
canard, fat la cato bagnado, il fait la chate-mite.
Dér. de Ban, bain.
Bagnaduro, s. f. Mouillure; état de ce qui est mouillé.
— fôou pas garda la bagnaduro, il ne faut pas garder ses
habits ou sa chaussure, quand ils sont mouillés.
Dér. de Bagna.
Bagnôou, n. pr. de lieu. Bagnols-sur-Cèze, ville, chef-
lieu de canton, arrondissement d'Uzès. — On donne à ses
habitants, dans la tradition, le sobriquet de Galinélo dé
Bagnôou, mais la tradition n'a pas expliqué pourquoi. —
il ne faut pas confondre cette ville avec celle de Bagnols-
les-Bains (Lozère), qu'on appelle Lous Banîous. — V.
c. m.
Il est curieux cependant de rapprocher les deux appel-
lations : Bagnôou, arrondissement d'Uzès, Lous Banious,
arrondissement de Monde. Ces deux mots, qui ont la môme
signification, la même traduction, se distinguent par leur
consonnancc finale. Leur radical commun vient du lat.
Balneum, qui donnait dans les vieux titres Balneolœ ou
Balneolum, par l'addition de la désinence diminutive, pour
indiquer un iietit lieu de bains. A Bagnôou, il existait en
effet autrefois, ii peu de distance de la ville actuelle, au
pied d'une petite montagne appelée Lancisc, une source
d'eau thermale fort en renom jwur les maladies cutanées :
celte source a perdu son efficacité. Lous Banious gardent
toujours l'ancienne réputation de leurs eaux minérales qui
les ont fait dénommer. — Voy. Banious {Lous).
Sur le nom latin des deux localités, le languedocien a
fait la variante que nous remanjuons, (|ui s'ell'aco dans le
français Bagnols, mais qui se retrouve dans le roman
encore conservé sur des points nombreux de la France.
Ainsi, au bord du Rh6ne, dans la plaine, Bagnôou ; dans
les montagnes des Cévennes, lous Banious ; comme iden-
BAU
tiques, les noms de BanyuU-des-Âspres et Banyult-sur-
Mer se rencontrent dans les Pyrénées-Orientales; Bagnouœ,
commune de Calvisson (Gard), dit liagnolum villa, en 1060 ;
Les Bagnious dans la Haute-Garonne ; Bagneux, dans l'Aisne,
Allier, Cher, Indre, Isère, Maine-et-Loire, Marne, Meurthe,
Moselle, Seine, Deux-Sèvres, Somme, Vienne ; Baigneux,
dans Indre-et-Loire, Sarthe, C6te-d'0r; qui avec Banios
(Hautes-Pyrénées) , Baneuit (Dordogne) , Bagneaux (Loiret,
Seine-et-Marne, Yonne) , Baigneaux (Eure-et-Loir, Gironde,
Loir-et-Cher) , Batièche (Haute-Vienne) , Baneins (Ain) ,
Baneix (Haute-Vienne) , tous désignés par Balneolœ, Bal-
neolum, Baniolum, Batniolum, semblent plus rapprochés
de lous Banious ; de même que La Bagnolle (Ardennes) ,
Bagnolles (Orne) , Bagnol (Cote-d'Or) , Baignol (Haute-
Vienne) , Bagnols (Basses-Alpes, Aude) , Bagnols (Hérault,
Puy-de-Dome, Uhùne, Var) , Bagnolet (Seine) , les Bagno-
leis (Allier), Baignolet (Eure-et-Loir), sont parfaitement
semblables ou plus voisins au moins de Bagnôou. Dans la
même famille se comptent encore Bagnac (Cantal, Lot,
Haute-Vienne), Ba^inars (Allier, Cantal), Bagnars (Avey-
ron) , /e Baj»as (Hérault) , Bagne (Ain), Bagne (Vienne),
Bagnéras, Bagnères, la Bagnère (Hautes-Pyrénées, Haute-
Garonne, Landes), Baignac (Lot-et-Garonne), Baignes
(Isère, Haute-Saône, Charente), les Baigners (Loiret). Près
de nous, Vagnas (Ardèchc) et La Vagniérette, ruisseau dans
la commune de la Rouvière (Gard), n'onl-ils pas la même
source, par la substitution connue du V au H?
Partout le radical est à peu près immuable ; les variantes
s'exercent sur le diminutif olus, ola, olum, au sing., ou
olœ, plur. Ces différences ethniques très-remarquables s'ex-
pliquent par l'influence des situations, des climats, sur la
formation des noms.
Bago, s. f. Bague ; anneau d'or ou d'argent ou d'autre
matière, orné quelquefois de quelque pierre précieuse,
que l'on porte au doigt. — Bago dé mariaje, anneau
nuptial.
Dér. du lat. Bacca, anneau.
Bagou, s. TO.Caquetage, babil, intempérance de langue;
facilité de s'exprimer, mais dans le genre trivial. — • A bon
bagoli, il a la langue bien pendue. En fr. fam., dans la
langue verte, on dit aussi bagou.
Dér. du gr. BïÀjj-a, son, parole.
Baguéto, s. f. Baguette ; bùton long, délié, flexible ou
rigide; baguette de fusil; petite bague, petit anneau;
baguette d'un nœud, ganse. — Voy. Aouscléto.
Dér. de la bass. lat. Baculela, dim. de Baculus.
Baguiè, s. m. Baguier, écrin à mettre des bagues.
Dér. de Bago.
Bahu, s. m. Bahut, grand coffre à serrer les bardes, le
plus souvent doublé en cuir et garni do clous à tête qui y
forment divers dessins. C'est un meuble du moyen-!lge.
On appelle encore bahu, ces grands coffres où les paysans
serrent leur salé quand il est sec.
Dér. de l'allem. Behuten, m. sign.
BAI
BÀJ
87
Baïa, 1'., ou BaHa. Donner en g«^n*^ral; donner à bail
ou ik eniphiléosp, Imiller en style de pratique. — Ti baia-
raï uno douréïailo, je te tirerai les oreilles. Baia-iné un co
dé mon, aidez-moi un moment, donnez-moi un coup demain.
D6r. du gr. BiXXitv, lancer, jeter, envoyer.
Baïar, ». m. IJar, ou bard, sorte de civière dont le fond
n'est pas à claire-voie, mais en planches, pour transporter
le mortier.
Dur. du lat. Bujulare, transporter un fardeau.
Baïargue, t. m., n. pr. de lieu. Baillargues, village et
commune dans le dt^partement de l'Hérault.
Au lieu de cbercher [x'-niblemenl dans les monuments
lapidaires ou sur les médailles romaines un nom d'homme
d'une notoriété souvent douteuse, qui corresponde à la
dénomination d'un village construit sur les prétendues
ruines d'une villa antique, pourquoi ne pas demander à la
langue parlée dans les (JaulM en même temps que le latin,
et ne pas extraire des altérations et des transformations
que les mots ont subies pour arriver jusqu'à nous, une
racine qui soit également satisfaisante à la signification et
aux procédés ordinaires do composition des noms propres?
Pour Baiargue, Baillargues, Balhanieœ au moyen-àge, sa
dérivation no serait-elle pas plus naturelle en la tirant du
gaulois bala, baile, village, qui est encore, avec le môme
sens, en gallois, bala ; en irlandais, baile et bala ; en bas-
breton, baile; qui ont donné au fr. baillage, l«illi, après
la kiss. latin., qui disait baXia, balHa, baillagium? Sur co
radical , se serait , par les procédés ordinaires , formée
l'appellation de la Iwss. lat. en anicee, puis la traduction
romane arrivant enfin à notre désinence en argue. Cette
descendance est pour le moins aussi probable que celle
tirée du nom d'un airlain liaUienus que cite Cicéron dans
son oraison Pro l'onteio
BaOa, V. — Voy. BaXit.
Baïle, s. m. Itailli ; maitre-valet dans une ferme, chef
des journaliers, qui a la dirtîctioii de l'ouvrage; maitre-
berger (jui a la conduite d'un grand troupeau pour aller à
la montagne (V. Âbeié). — Odou pu toundrâou n'an fa
lou baïle, prvb., du plus ignorant on a fait un docteur.
Ce dicton a reçu et recevra, de tous temps et sous toute
sorte di' régimes, de nombreuses applications. La malice
des ambitions méconnues esf si grande, les Iwns choix si
difliciles, le vrai mérite si rare!
Dér. de la Iwss. lat. Ballium, gouvernement, adminis-
tration, tutelle.
Baïléja, «. Commander; faire les fonctions do baïle;
tranclier du maître ; faire l'important.
Baïléssû, J. f. l'emme du maitre-valet dans un domaine,
qui est chargée de veiller aux soins du ménage.
Baissa, t>. Baisser, diminuer de hauteur; baisser de
prix ; s'affaisser peu à [ku, s'affaibhr.
Se baissa, se baisser, se courber.
Emp. au fr.
Baïssos, 5. f. pi. Brandies basses d'un arbre, celles où
l'on peut atteindre de terre. — Ce root ne se dit que de*
arbres à fruits quelconques et du mûrier, do ceux enfin dont
il faut atteindre les branches pour faire la curillette. — Loê
baïssos toqaou lou tdou, l'arbre est tellement chargé de
fruits que les basses branches traînent à terre.
Dér. de Baissa.
Baïto, s. f., ou Capitèlo. Hutte, liaraque, maisonnette
do vigne, qui n'est pas habitée et ne sert que pour enfer-
mer des outils, on se mettre à l'abri d'un orage, d'ane
ondée.
Dér. de l'héb. Baith, maison, logement, d'où vient peut-
être l'angl. to bail, se loger en pssant.
Baïnèmo , s. f. Etincelle ; bluette qui s'échappe du
bois enflammé. — Voy. Bélugo et Sarjan.
II est difficile de déterminer l'étymologie de ce mot;
mais il est impossible de lui refuser un rapport saisissant
de conformation avec le français baliverne, rapport qui
trahit une commune origine. Le mot est en effet le même
dans les deux langues, sans autre variante que celle pro-
duite par une trans{)osition de lettre due à la différence de
leur génie ; l'ï tréma languedocien n'est guère que le pen-
dant des deux II mouillés ou de l'i, forme que garde du
reste la ]irononciation raïole en disant baïuimo. Sauvages,
qui ne donne pas ce mot, conserve cette orthographe dans
tous ses analogues. Quant .'i la transformation de l'u en v,
elle est si commune aux deux langues qu'elle n'a pas
besoin d'explication. Outre la ressemblance matérielle, gra-
phique et consonnante, les deux mots ont bien aussi quel-
que rapport dans leur signification. La baïuèmo comme
la baliverne , sont choses de peu d'importance , de peu
de durée, choses qui passent sans laisser de trace. Leur
différence est en ce que le premier mot tient \ l'ordre
physique, le second à l'ordre moral. Maintenant, le pre-
mier a-t-il donné naissance au second ou faut-il prendre
le tiice versd ? iVe peut-il se faire aussi que, dérivant d'une
source commune, ils soient nés simultanément? Ce mystère
se perd dans la nuit... de l'étymologie.
Baïzaduro, t. f. Biseau on baisure du pain, empreinte
que deux pains s'impriment réciproquement , lorsqu'ils sa
touchent et se collent dans le four.
Dér. de Baïsa, baiser, mot ancien, usité encore dans
quelques-uns des dialectes du languedocien.
Bajana, s. m., ou Coiuina. Potage aux châtaignes blan-
chies, dont toute la préparation consiste à les faire bouillir.
C'est un mets très-commun dans les Cévennes, où il fait
la principale nourriture des habitants pendant tout l'hiver.
Il est exquis avec une addition de lait.
Dér. de Bajano.
Bajanèl, èlo, adj. Nigaud, imbécile, niais. — Cette
épithète mocjueuse me parait tenir à cet esprit de rivalité
qui a existé au moyen âge entre les habitants de localités
voisines. Par la même raison que les habiL-ints des Cévennes
appelaient Gounèls [lar dérision les habitants des communes
au-dessous d'Alais, ceœc-ci, usant de représailles, quali-
83
BAL
BAL
fiaient les premiers de Bajanéls, parce qu'ils se nourrissaient
de bajanos; et dans leur dictionnaire ce nom est resté
synonyme de nigaud. — Voij. Gounél.
Dér. de Bajano.
Bajano, ». f- Châtaigne blanche, séchée à la fumée et à
la ciialeur dans le suoir à châtaignes, clédo, et dépouillée
après cette opération de sa coque et de sa pellicule ; châ-
taigne-bajane.
Dér. du lat. Baianus ou Bajanus, qui est de Daïa, ville
du royaume de Naplos. Il semblerait par là que l'usage de
faire sécher ou blanchir les châtaignes a commencé dans ce
dernier pays.
Bal, *. m. Bal ; réunion convoquée pour danser ; danse.
— Donna lou bal, donner la chasse, pourchasser ; rosser,
faire danser quelqu'un, iron.
En ital. JSallo; en esp. Balle. Le gr. a BaXÀfiJw, je danse,
Bal, s. m. Bail à ferme, à loyer, à emphytéose ; contrat
public ou privé, pour donner, pendant un temps déter-
miné, moyennant un prix payable annuellement ou à des
termes convenus, la jouissance d'une chose mobilière ou
immobilière à quelqu'un.
Dér. du lat. Baltium.
Bala, V. n. Etre en suspens, entre le mouvement et
l'immobilité. — Se dit d'une boule prête à s'arrêter, qui se
balance avant de se fixer ; et encore d'un moribond à ses
derniers moments, prêt à passer. — Balo, il est entre
la vie et la mort. A bala, il est mort. Dans ce dernier
sens, familier du reste, ce mot ne serait-il pas une corrup-
tion de émbala, faire ses paquets pour partir ? Ou bien a-t-il
la même étymologie que le suivant : balan ?
Balalin-balalan , ou Balin-balan. Onomatopée pour
exprimer un objet qui branle, qui s'agite ou qu'on agite
de droite et de gauche, comme une cloche. C'est im rédu-
plicalif de 6atan. — Ana balin-bcUan, ou balalin-balalan,
aller à l'aventure, à droite et à gauche, ou les bras ballants.
Balan, t. m. Branle, volée ; élan que l'on donne â un
coup que l'on vent lancer. L'élan qu'on prend soi-même
pour s'élancer se dit van. — Souna à balan, sonner les
cloches à volée. Très cos à balan, trois volées. Donna lou
balan. donner le branle. Aquélo carétado a trop dé balan,
cette charrette est chargée trop haut, elle court risque de
verser. Aquél marlèl a mai de balan, ce marteau a plus de
coup, plus d'élan. Itesté'qui en balan, il resta là en sus-
pens, dans l'hésitation.
Ce mot est-il une contraction de Bilança, ou bien vient-
il du gr. BiUw, lancer, envoyer ? On peut choisir.
Balança (se), v. Se balancer, se dandiner; s'égaliser, se
valoir réciprofiuement l'un l'autre; jouer à l'escarpo-
lette, à la balançoire.
Dér. de Balança.
Balançadoù, ». m. Balançoire, escarpolette; une planche
posée en travers sur une poutre, et aux doux bouts de
laquelle les enfants se balancent en faisant la bascule.
Dér. de Balança.
Balanço, ». f. Balance. Au sing. ne se dit que figur.
pour : attention avec la(juelle on pèse les raisons pour et
contre; comparaison, iwrallèle équitable. Au plur. la»
balanças s'emploie pour balance, instrument formé d'un
arbre, d'un fléau et de deux bassins pour peser. — Tèn
bien la balança, il rend justice égale à tous. ¥6ou faire la
balanço. il faut rendre justice à tous, il faut fajre un
poids, une mesure équitables.
Dér. du lat. Bilancis, génit. de bilanx, double bassin,
Balandran, ». m. Arbre mobile de la balandro; plateau
d'une grande romaine ou balance pour peser des objets
d'un grand volume. — Delà, par analogie, pa»»a(lou 6a/an-
dran, berner, faire passer à la couverture ; Iwusculer.
Formé de Balan et de l'ilal. andare. aller.
Balandro, ». f., ou Poulèje. Bascule de puits de cam-
pagne ; mécanisme fort simple et fort usité pour les puita
de jardin dans les Cévennes. Il consiste : 1" en un arbre
droit fiché en terre; 2» en un arbre mobile fixé au pre-
mier par un crochet et un anneau, en forme de vergue ; à
une extrémité de celui-ci on place un contre-poids fait
d'ordinaire d'une grosse pierre jwrcée qui tient à l'arbre
par une cheville; à l'autre bout est attachée, par un brin
de corde assez lâche, une barre mince qui descend ainsi
verticalement et qui est terminée par un croc soutenant le
seau. Pour puiser l'eau, on tire cette barre, qui fait jouer
facilement la vergue sur son anneau, et le seau plonge;
quand il est plein, le moindre mouvement du bras fait
jouer la bascule, et le contre-poids, agissant dans le môme
sens, le seau remonte sans effort et sans fatiguer le pui-
seur, — Voy. Poulèje.
Même dér. que Balandran.
Balé, s. m. Auvent, petit tojt de planches, en saillie,
au-dessus de la porte d'une boutique, pour abriter l'étalage
de la pluie et du soleil trop éblouissant ; palier d'escalier
ou galerie découverte, balcon en terre-plein. — Le balé,
auvent au-dessus de la porte des magasins , a disparu, ou à
peu près, devant les règlements d'édilité ; il était pitto-
resque et utile aux marchands ; mais les devantures en
avancement et surtout les étalages à la mode le remplacent
avec avantage et maintiennent à l'intérieur un peu plus
que le demi-jour favorable au choix de la marchandise,
sous prétexte d'un soleil trop éclatant. Le progrès des
lumières nous vaut ce changement.
Dér. du gr. BâXXsiv, jeter en avant.
Baléja, f. Faire contre-poids ; être égal, équivalent ; en
équilibre. — faire balèja, égaliser, équilibrer, par ex. ;
une charge de mulet, de manière à ce que les deux côté*
aient à peu près le même poids. Aquâ batéjo à l'èniour
d'un quintdou, cela pèse environ un quintal. Aquéles doui
éfans se balèjou, ces deux enfants sont à pou près du
même ago ou de même force.
Dér. do Bala.
Baléno, s. f. Baleine, Balœna mysticetus, Liim. Poisson,
genre de Mammifères de la fam. des Cétacés; le plus grp^
BAN
BAN
89
de tous les animaux connus ; ses fanons ou barbes four-
nissent les baleines de parapluies, servent aux corsets de
femme, etc.
Eiiip. au fr.
Balisto, I. m. Bailliste; fermier, séquestre; adjudica-
taire. — BaUsio rli Votroui, fermier de l'octroi.
Dér. de Bal, Itail.
Balo, s. f. Balle do plomb; ballot, balle. — Balo dé
fusil, dé pistoulé, balle de fusil, de pistolet. Balo dé eébos,
balle d'oignons ; il y a douze tresses, on rèsses, à la balle.
Aquù fat bien ma balo, cela me chausse à merveille, ça fait
bien mon affaire.
Dér. du gr. liciXXsiv, jeter, lancer.
Balo, ». m. Ballot, balle, sous une enveloppe de grosse
toile, serrée avec des corde»; demi-charge d'un mulet,
celle que l'on met d'un côté du bât. — Sc^que aquà's pas
un balà dé sélo, pér lou mena tant plan? ou pesa tant fi,
faut-il tant de précautions, ou tant regarder au poids? ceci
n'est pas un ballot de soie.
Dér. du précédent.
Baloto, s. f. Petite boule du loto, ouest inscrit un numéro.
Ditn. de Balo.
Balouta, v. Balloter; au pr., lancer et relancer d'une
main à l'autre, ou d'un joueur à l'autre, comme se repasse
une balle ; au fig.. mystifier quelqu'un, le renvoyer do l'un
à l'autre, du poirier an pommier.
Dér. de Balo.
Balustrade, s. f. Balustrade, garde-fou, composé de
balustres continus.
Emp. au fr.
Balustro (à tusto), adv. A l'aveuglette, i la hurlu-
berlu ; brusquement , brutalement ; sans prendre aucune
précaution.
Formé de Tusta et du fr. balustre, parce que dans cette
situation on se heurte à tout.
Bambocho, i. f. Orgie, débauche. — Faire la bam-
bocho, ou se mètre en bambocho, faire une partie de dé-
bauche, un gala crapuleux.
Dér. de l'ital. Bamboccio , petit homme grotesque :
Bocca, Iwuche, ne serait-il pas là pour quelque chose?
Peut-être même le fr. bouc, dont la lascivité est connue.
Bamboucba, v. Faire des bamboches; se livrer à la
débauche ; faire de mauvaises farces, des farces d'ivrogne.
Bambouchur, urdo, adj. Bambochnur'; libertin ; enclin
à la débauche.
Ban, ». m. Rinc; siège ou tréteau long, en bois ou en
pierre, sur lequel plusieurs personnes peuvent prendre
place ou plusieurs choses être déposét>s. Il prend en fr. dif-
férents noms, suivant les usages auxquels il sert. — Ban
dé mcnuisiè, établi de menuisier. Ban dé bouché, étal de
boucher. Ban dé ié, tréteau de lit. Ban dé la bugado,
selle ou batte de lessiveuse. Ban das marguïès, banc de
l'œuvre. Es vièl coumo un ban, il est vieux comme les rues.
Dér. du lat. Bancus ou de l'allem. tank.
Banar, do, adj. Cornu, encorné; qui a de longues
cornes; habitant de la commune de Bannes (Ardèche).
Dér. de Bano.
Banastado,»./'. Contenance d'une&ana<ro/ plein une man.
ne, ou banne — Faïtoujourquâouquobanasiado, il fait toujours
quelque ânerie, quelque école, quelque affaire do dupe. Yana
émbé touto la banastailo, dit-onde quelqu'un qui parledesgens
sans égard, sans garder aucune mesure, lâchant sur leur com-
pte les vérités les plus dures, les plus blessantes, qui, jjas plus
que les véritésordinaires,nesont pas toujours bonnesà dire, ni
surtout à entendre : c'est comme si l'on disait qu'il vide tout
son sac, sans y rien garder, comme on jette là une banastado.
Dér. de Banasto.
Banastaïre, ». m. Fabricant de banastes, et de toutes
sortes d'engins faits avec des scions refendus de châtai-
gniers sauvageons, que l'abbé de Sauvages apjielle Cotons.
On dit proverbialement : Banastaïre das Apéns, parce
que les habitants de ce hameru, dépendant de la commune
de Lamelouse, arrondissement d'Alais, se livrent beaucoup
en hiver à la fabrication de ces bannes en châtaignier.
Dér. de Banasto.
Banastéia, v. fréq. Transporter habituellement à dosde
mulet ou d'âne dans des banastos.
Banasto, ». f. Banne ou manne double, panier à bât
pour transporter le fumier et autres objets, dans les pays
où les voitures ne peuvent rouler. — Sot coumo uno ba-
nasto, sot comme un panier. A éstudia souto uno banasto,
dit-on d'une personne complètement ignare, par allusion
peut-être aux chevreauX; que l'on recouvre ainsi pour les
empêcher de gambader et par là de maigrir; ou bien pour
rappeler les ânes, qui sont le plus souvent chargés de banastos.
Dér. du gaulois Benna, voiture, ou de l'allem. benne,
tombereau ; d'oii le lat. benna, charrette entourée de claies,
sorte de corbeille.
Banastoà, ». m., ou Taréirôon. Dim.dc Banasto. Ban-
neton, mannequin ou petite manne, sans anses, très-évasé
d'ouverture.
Bancèl, ». m., ou Faisso. Terrasse ou bande de terre;
plate-bande de jardin. Le terme bancél est proprement usité
dans les hautes Cévennes; faïsso est plut^it des environs
d'Alais.
Dim. de Ban, banc, parce que le baneél est droit et
long comme le banc.
Banda, ado , adj. Mort, crevé; ivre-mort, roidi. —
Banda coumo un piô, soûl comme une grive.
Emp. du fr. bander, pour roidir.
Banda (se) , v. Se soûler, s'enivrer ; se goi^r de vin.
Rlêine dér.
Bandé] a, v. fréq. Passer du linge savonné dans l'eau
claire, ce qui se fait en le tenant par un bout et le plon-
geant, le passant, le repassant dans l'eau, jusqu'à ce qu'il
soit bien essuyé de l'eau de savon.
Est-il dér. du lat. Pondère, étendre, développer, ou du
languedocien branda 1
90
BAN
BAO
Bandi, $. m. Dim. Bandinà. Bandit, vagabond, homme
sans aveu. — E$ un bandi. c'est un mauvais drôle; et
quelquefois, seulement, un mauvais sujet, un libertin , s'il
s'agit d'un tout jeune homme ; on dit alors : es un ban-
dinà.
Dér. de l'ital. Banditto, banni, proscrit.
Banéja, v. fréq. Commencer à montrer les cornes, comme
les escargots ; par ext. jouer des cornes.
Dér. de Bano.
Banèlo, ». f. Vanneau. — Voy. Vanèou.
Bani, v. Bannir, chasser. — Y-a pat mouïèn dé boni
tous ras, il est impossible de se délivrer complètement des
rats. — 11 signifie aussi : faire une saisie-arrêt.
Dér. du lat. Bannum, bannissement, exil, ban.
Banimén, ». m. Saisie-arrêt ou opposition, terme de pra-
tique en procédure.
Banîous (Lous), n. pr. de lieu. Bagnols-les-Bains, ville
dans la Lozère, renommée par ses eaux thermales.
11 est à remarquer que l'appellation française ne donne
pas la preuve que le baptiseur fut très-fort en languedocien.
Bagnols, traduisant lous Banious, est dér. du lat. Balneo-
lum, qui signifie : lieu de bains ; pourquoi alors ce pléo-
nasme inintelligent dans le nom français, et l'accouple-
ment de deux mots de même signification ? — Voy. Ba-
gnôou.
Bauo, J. f. Dim. Banéto, péj. Banasso. Come de la tête
de certains animaux ; antennes de certains insectes ; cornes
des escargots ; coup à la tête, qui se tuméfiant devient une
bosse au front. — Vno bano dé fougatso, un morceau de
fouace, parce que la fougasso , le gâteau des paysans, est
plate et formée en compartiments et en grillage ; un de ces
fragments ressemble donc assez à une corne. Fia coumo la
bano d'un biâou, contre-vérité, mou comme la corne d'un
bœuf. Chacun soun gous, dis lou prouvèrbe, coumo l'âoutre
que sufavo uno bano, chacun son goût, comme disait
cet autre qui suçait une corne. S'és fa uno bano, il s'est
fait une bosse au front. La bano d'un tour, l'un des quatre
volants de la roue d'un tour à filer la soie. Cagarâouléto,
$or tas banitos, chantent les enfants dans nos Cévennes,
comme ceux de Paris disent : Colimaçon borgne, montre-
moi tes cornes. Nous rimons mieux.
Las banos, au plur., comme les cornes, sont, au fig.,
l'emblème d'un mari trompé.
Dér. probablement du celte; car on ne trouve l'ana-
logue de ce mot dans aucune des langues connues.
Bano, n. pr. de lieu. Bannes, village et commune de
l'Ardèche, sur les limites du département du Gard.
Du Cange cite Bano avec la signification de terrain
communal. L'étymologie de ce nom pourrait bien être tirée
de l'affectation du territoire à des dépaissances, ou à quel-
que autre servitude communale. Ce que nous ne pouvons
vérifier.
Banquaroutiè, tièïro, adj. Banqueroutier, ière, celui
ou celle qui a fait banqueroute.
Banquaronto, ». f- Banqueroute; faillite; insolvabilité
feinte ou réelle d'un négociant.
Dér. de Banquo, banque, et de routo, fém. de rou,
rompu.
Banque, t. m. Petit banc; tréteau de lit, de théâtre de
bateleur, de table à manger, etc.
Dim. de Ban, banc.
Banquiè, ». m. Banquier; celui qui fait le commerce
de l'argent ; à certains jeux de cartes, celui qui taille ou
joue contre tous les autres.
Dér. de Banquo.
Banquo, s. f. Comptoir de marchand ; grand coffre à
hauteur d'appui, qui règne tout autour du magasin, ou
dans une partie seulement et sur lequel on montre et on
étale la marchandise. Il y a un tronc au milieu, en tiroir,
où l'on fait tomber les espèces à mesure qu'on les reçoit,
et dont on fait la levée et l'inventaire chaque soir.
Dér. de Ban, banc.
Banu, udo, adj. Cornu; qui a ou qui porte des cornes.
— Vn cho banu, un sot, un homme sans intelligence,
comme un hibou.
Dér. de Bano.
Bâou, bàoujo, adj. Niais, nigaud, badaud. — Que sièt
bdou ! Que tu es bête !
Dér. du lat. Balbus, bègue.
Bâoubècho, ». {. Bobèche, partie du chandelier où se
place la chandelle.
Emp. au fr.
Bâoudrado, ». f. Bêtise, balourdise, niaiserie ; école.
Dér. de Bâou.
Bàoudroï, ». m. Baudroie, galanga, raie pécheresse,
diable de mer; espèce de lophie, Lophius piscatorius, Linn.
Poisson de l'ordre et de la fam. dos Chisnopnés (respirant
par une fente), cartilagineux, à corps plat, à évent près
des nageoires, à large gueule, qui semble n'être que tête et
queue. La Baudroie fait un très-bon potage.
Bâoudufo, ». f., ou Boudufo. Toupie, jouet d'enfant;
sabot. Ce mot ne s'emploie plus qu'au fig. Es pat pu bel
qu'uno bâoudufo, il n'est pas plus grand qu'une toupie. Té
vire coumo uno bâoudufo, je te fais tourner comme oo*
toupie.
Que se trufo,
Dlou lou bufo.
Et lou faï vira coumo uno bâoudufo. (Prvb.)
Les étymologistes sont fort divisés sur la dériv. de ce
mot ; elle est tirée du celte Bodwa, mamelle, à cause de
la ressemblance; ou bot, boud, qui a fait dans la bass.
lat. botta, d'où l'ital. bodda, crapaud, à cause de la gros-
seur. — Voy. Boudufo.
Bàoujoula, u. Porter un eid&ni au bras, le caresser, le
cajoler.
Dér. du lat. Bajulare, porter un fardeau.
Bâoume, ». m. Baume, sorte de menthe, plante aro*
matique, plus particulièrement la mentlie verte et gen-
BAR
BAR
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tille. Aufig.ïeditaussid'un confortatif, d'unréconfortantdoiit
on exagère la Ijoiité : Aquél vin is un bdoume tus l'éttoitma.
D(t. du tat. Baliomum.
Bâoumélu, udo, adj. Creux, caverneux ; se dit parti-
culièrement d'un arbre, d'une pièce de bois.
Dér. de Bâoumo.
Bâoumo, ». f. Dim. Bdouméto, péj. Dâoumatto. Grotte,
caviti^ naturelle; caverne; bauge du sanglier; terrier du
renard; garenne du lapin. Ce mot a donné naissance aune
foule do noms propres de personnes et de lieux : Laàâoumo,
Bàoumé, Bâoumèlo, Bâoumassiè, qui se traduisent en fr.
par I^baume, Baume, La Banmelle , Rilmelle, Balmes,
Baumior, Baumassier, etc., qui signifient pour en dériver
en ligne directe et primitive : babitation ou liabitant des
■cavernes, des grottes : l'origine est ancienne et se rattache,
par une infinité de quartiers, aux troglodites. La Bâoumo
dé lut Fados est le titre d'une des plus jolies pièces de
notre inimitable poète des Caalagnadoi.
Bâonquo, t. f. Du verdage, espèce d'herbe graminée,
foin grossier qui pousse naturellement sur les talus et
berges des fossés et dans les bois taillis ; c'est probable-
ment du foin dégénéré en poussant dans des terres sèches
et trop fortes. On ne s'en sert guère que pour litière.
Aucune bète de labour , non plus que les moutons , ne
-consent à s'en nourrir.
Bâouri, s. m. Péj. BAouriat. Précipice; ravin profond
et escarpé , gorge étroite et sauvage ; atrime ; fondrière.
Dér. peut-être du lat. ValUt rivut, ruisseau de vallée,
ou de l'ital. balzo, précipice, du gr. BifXXsiv, jeter, lancer.
Bar, I. m. Dalle, pierre plate large et carrée, pour car-
reler. — Bar dé Mus, dalle des carrières de Mus, vilLige
près de Nimes, d'où se tirent les meilleures dalles pour
carreler les fours à pain, parce qu'elles sont réfractaires et
iMpportent très-bien l'action du feu. Bar dé $abo{i, ane
table de savon. C'est sous cette forme que le savon est
fabriqué et Uvré an commerce. Cette table a d'ordinaire huit
lœnlimétrcs d'épaisseur sur cinquante centimètres en carré.
Buw, «. Fermer, en général; barrer, boucher; bâcher
une porte, la fermer et l'assujeitir par derrière avec une
barre. — S'en fâou bara tous ièls, il faut s'en fermer les
yeux, s'en consoler, en prendre son parti. Aquà bnro iés-
touma, ce spectacle vous serre le cœur. Bara sa boutigo,
est tout simplement fermer son magasin ; mais bara bou-
tigo, c'est cesser son commerce par suite de déconfiture ou
-autrement. Baropas dé lout loujour, il ne cesse pas de pir-
1er de toute la journée. Bara lou cami, couper le chemin,
entraver la marche, fermer la carrière ^quelqu'un. Bara un
trdou, boucberun trou. Se bara déforo,sé bara déJin, fer-
mer la porte sur soi du dehors, ou par dedans, s'enfermer.
Dér. de Baro.
Baracan, *. m. Bouracan , espèce de camelot, étoffe qui
rejette La pluie.
Enip. au fr.
Baradis, isso, adj. Qui peut se fermer ; fermant; des-
tiné à Mre fermé. — Pagnè baradU, panier k couvercle.
Coûté/ baradis, couteau do poche, qui se ferme.
Dér. de Bara.
BaraditBO, t. f. Action souvent répétée de fermer et
d'ouvrir une porte, une fenêtre, un tiroir. — Aquilo bara-
disso finira léou? En ilnira-t-on bientôt d'ouvrir et de fer-
mer cette porte?
Dér. de Bara.
Baradnro, s. f. Fermeture, en général; boucheture
d'épines ou de fagots, pour empêcher l'accès d'un champ.
Il est peu employé au propre. Au fig. il est usuel dans ce
dicton : PAouro baraduro ! pauvre ressource ! mauvais
pronostic! cela s'annonce mal.
Dér. de Bara.
Baragna, v. Faire une haie vive, garnir de buissons on
d'épines l'entrée d'un champ ou la crête d'un mur de clô-
ture ; clore, faire des haies avec des buissons.
Dér. du celt. Bar, barrière ; on de l'esp. brma, hallier,
ou du lat. vara, barre : sans doute tons proches parents.
Baragnado, *. f. Haie vive ou non; échalier; toute
sorte de clôture en haie. Sur les bords du Gardon, et de
toutes les rivières torrentielles, on fait des baragnadot
pour faire déposer le limon. On y emploie des ramées de
chêne-vert, serrées et assujetties par le sable et le gravier,
on des branches d'osier et de saule. Les premières sont
plus fortes; mais celles-ci, plus épaisses, ont l'avantage
de prendre racine, de durer plus longtemps et d'être plus
résistantes; aussi sont-elles préférées. On établit aussi des
baragruidos en fagots de bois mort de toute sorte, potir
arrêter et faire amonceler les feuilles de ch&taigniers que
le vent entraine. Par ce moyen elles se trouvent ramas-
sées en tas, nettes de leurs hérissons et propres à la litière
de toute sorte d'animaux. — Vn Irdouquo baragnado, on
braconnier, un grapilleur, un homme qui ne respecte
aucune propriété ni clôture. Au fig., un éventé, un étourdi,
un hurluberlu. — Voy. Barlai.
Baragnas, ». m. Haie naturelle ; amas de ronces et
d'épines, qui se forme sur les anciennes murailles démo-
lies; entrelacement de ronces; buisson.
Péjor. de Baragno.
Baragno, ». f. Echalier plutôt que haie ; clôture presque
toujours provisoire, moins forte et moins épaisse que la
baragnado.
Baragogno, ». f. Le mfime mot et la même ngmf. qw
Babarogno. — F. C. m.
Baragouina, t- . Baragouiner; parier d'une manière inin-
telligible ; lirijdouiller.
Emp. au fr., qui tire, dit-on, son étym. dubas-brel.
Bara, pain, et guin, vin, à cause de la confusion que font
ceux qui parlent mal la langue ; mais que d'antres font
venir du lat. Barbaricus, Ivtrbare.
Baraia, v. — Voy. Taraïa.
Baraïè,». m. Boisselior; ouvrier qui ftitdes banrax.
Dér. de Barùou.
92
BAR
Baraje, ». m. Barrage, digue ; déversoir en travers d'un
cours d'eau pour faire une prise d'eau.
Dt>r. de Bara.
Baralé, ». m. Baril, barillet; bidon des journaliers aux
champs ; baril à huile ; capron, baie de fraisier sauvage,
qu'il ne faut pas confondre avec la fraise des bois.
Dim. de Barâou.
Barandèla, v. Danser la barandèlo ou la bagaièlo.
Barandélaïre , aïro, alj. Danseur de barandèlo. Par
ext. un étourdi, inconsidéré, léger.
Barandèlo, s. f. — Voy. Bagatèlo.
Baranqua, v. lladoter ; battre la campagne ; parier ou
agir à tort et à travers; ne savoir ce qu'on dit. — L'es-
coulés pas, baranquo, ne l'écoutez pas, il radote, il ne
sait ce qu'il dit.
Dér. de Ba, partie, rédupl., et de ranquo, de rolulare.
Baranquaje, ». m. Radotage; paroles en l'air ou sans
suite ; propos extravagants.
Baranquaïre, aïro, adj. Radoteur; qui débite des rado-
teries, ou par vieillesse, ou par bôtise. Id., Baranqur,
urdo.
Baranquéja, v. rédupl. de Baranqua.
Barâou, ». m. Baral, v. fr., barrique à vin, longue et
étroite, qui sert, comme les autres, à transporter le vin à
dos de mulet; mesure de capacité pour les vins. Cette
mesure varie d'une localité à l'autre. Le Barâou d'Alais
contenait autrefois 27 pots ou 54 pintes de Paris. Le Ba-
rAou métrique contient 60 litres. — Enlén boutopér barâou,
il entend tout de travers ce qu'on lui dit ; il prend des
vessies pour des lanternes, martre pour renard. Pou-barâou,
un puits public qui se ferme la nuit, de crainte d'accident
ou de mauvais dessein. Il y avait autrefois à Alais une
quantité de ces puits qui étaient situés dans un renfonce-
ment de rue et à couvert dans l'épaisseur d'une maison.
On les fermait la nuit ; mais avec le temps les fermetures
avaient disparu, et ces impasses obscurs étaient dange-
reux ; on les a fermés et remplacés par des pompes. Un de
ces puits a donné son nom à une de nos rues, qui est appe-
lée encore : rue Puits-Baral. L'opinion que son nom lui
vient de la fermeture appliquée à son puits, est fort sou-
tenable; mais, dans ce mot que le languedocien persiste à
prononcer baral, et non barâou, et qu'il n'a pas eu l'idée
d'exprimer par baradis, ne trouverait-on pas aussi bien
une qualification tirée de la situation qu'il occupait, au
moment de son baptême, à l'extrémité de la ville? Puitt-
Baral signifierait alors : puits situé aux barrières d'Alais,
sur la limite de la clôture de la ville. La rue Montagnasse,
qui reprend aujourd'hui son nom, s'appelait, au moyen Age,
rue Malbourguel, mauvais petit fauljourg : elle est voisine
de la rue Puits-Baral ; sa dénomination ancienne viendrait à
l'appui de notre interprétation, en indiquant que, dans ces
temps reculés, la ville ne s'étendait pas plus loin.
Barâou, en tous cas, put trouver son étym. dans la
bass. lat. barrale, barile, barillus, d'un capitulairc de Char-
BAR
lemagne, avec la sign. de tonne ou de vase propre à con-
tenir un liquide quelconque, ou dans l'esp. barrai, grande
bouteille; ou enfin, comme baral, dans le celt. barr, qui
signifie non-seulement barre, barrière, mais tout ce qui
sert à renfermer, à contenir.
Baraquo, ». f. Dim. Baraquéto. Baraque, chaumière ;
maisonnette en mauvais état; hôtellerie de routier sur les
routes ; baraque, échoppe, auvent, construit en planches
sur les places en temps de foire. — Aquél oustdou es uno
vié'Co baraquo, cette maison n'est qu'une mauvaise pauvre
baraque. Las baraquos dé Coudougnan, dé Fons, la bara-
quo dé Plagnoou, la baraquo ddou Pela sont connues et
renommées sur nos routes départementales.
Dér. de l'esp. Baracca, cahute de pécheur.
Barato, s. f. Baraterie; dol, fraude, contrebande ; alté-
ration des liquides par mélange ; contrefaçon, tromperie.
Dér. de l'esp. Baratar, brouiller, tromper.
Barba, v. Pousser des radicules, prendre racine ; se dit
surtout des boutures, quand elles commencent à barba, à
jeter leur tissu de radicules.
Dér. de Barbo.
Barbacano, ». f. Ouverture, fente laissée dans un mur
de soutènement, pour faire écouler les eaux pluviales.
Dér. de l'esp. Barbacana, m. sign.
Barbajôou, ». m. Grande joubarbe, artichaut de mu-
raille, Sempervivum lectorum, Linn. Plante de la fara. des
Crassulacées, grasse, vulnéraire et émolliente.
Dér. du lat. Barba Jovit, barbe de Jupiter, comme son
correspondant fr. Ces deux mots sont la métathèse l'un de
l'autre.
Barbajôou, ». m., ou Quiou-blan. Dim. Barbajoulé.
Hirondelle à croupion blanc, hirondelle de fenêtre ; Hirundo
urbica, Temm. Le dessus du corps, partie d'un noir à
reflets bleuâtres, partie d'un noir mat, le restant d'un
blanc pur ; queue fourchue. Cette hirondelle est lapins
commune dans nos contrées, où elle arrive quelques jours
après l'hirondelle de cheminée. Elle aime à placer son nid
sous la corniche des maisons et des grands édifices. — £»ca-
rabïa eoumo un barbajôou, gai comme un pinson.
Ce mot a évidemment la même étym. que son homo-
nyme précédent. Cependant il est difiicile de saisir les
rapports de cette origine, à moins que la queue fourchue
du volatile ne soit une image de la barbe du maître des
dieux.
Barbasta, v. Faire ou tomber de la gelée blanche. —
A barbasta tus sa tésto, ses cheveux grisonnent, il a neigé
sur ses cheveux.
Dér. de Barbasto.
Barbasto, ». f. Gelée blanche ; givre. C'est le produit
de la condensation de la rosée et de toutes les vapeurs qui
exsudent de la terre. Barbasto exprime cet effet des grands
frimas d'hiver qui fait ressembler le sol à un champ de
neige; plouvino eljalibre {V. c. m.), sont plus particu-
lièrement ces gelées de printemps, ces giboulées, qui font
BAR
BAR
93
tant de mal à la vigne et à la feuille de mûrier. Les con-
crétions ilo la barbaiio sur les plantes et les arbres ressem-
blent à une sorte de barbe blanche. C'est de là que Sau-
vages fait dériver ce nom.
Barbata, v. Bouillir <1 gros bouillons; particulièrement,
faire un certain bruit en bouillant, soit comme un grand
vase qui rend un bruit sourd en bouillant fortement, soit
seulement comme un potage qui mitonne sur un fourneau ;
chez l'un et l'autre , ce bruit est pnxluit par le dégage-
ment de l'air, qui forme des globules qui crèvent et se suc-
cèdent instantanément. C'est ce qu'e.xprime ce mot par
une onomatopée saisissante.
Barbéja, v. Raser, faire la barbe, au pr. et au fig. —
L'avèn barbéja, nous avons eu de son poil, nous lui avons
gagné son argent.
Dér. de Barbo.
Barbèl, ». m. Barbeau, Cyprinus barbui, Linn. Poisson
d'eau douce; museau pointu, mâchoire supérieure fort
avancée avec des barbillons, dos olivAtre, ventre blanc ;
il croit vite et devient fort grand ; sa forme ressemble
assez h celle du brochet. Il préfère un lit couvert de cail-
loux à un fon^ bourbeux.
Barbèl signifie aussi : un jeune gars, un blanc-bec.
L'une et l'autre do ces acceptions sont dér. de Barbo :
dans la dernière, parce que c'est l'Age où la barbe com-
mence à pousser ; dans la première, parce que ce poisson
porte deux appendices ou barbillons à la mâchoire supé-
rieure.
Barbéto, s. f. Terme do nageur, qui n'est employé que
dans cette expression : Faire ta barbéto, et signifie : ap-
prendre à nager à un apprenti en le soutenant de la main
par le menton, ce qui l'empêche d'enfoncer la tète, et lui
permet d'étendre le corps sans danger dans la position
horizontale. Au fig., prêter aide et appui, soutenir.
Dér. de Barbo, parce qu'on prend le nageur par la
barbe, ou du moins au siège de la barbe ; qu'on lui tient
le menton dans la jKiume do la main, comme font les bar-
biers à leur patient pour le savonner, ou plutôt comme ils
faisaient, quand il y avait des barbiers, et avant l'inven-
tion du pinceau à Iwrbe.
Barbie, $. m. Barbier, qui fait la barbe, qui rase. L'his-
toire des barbiei-s mériterait d'être écrite et conservée. Il y
a un siècle, ils n'étaient point autres que des chirurgiens,
avec privilèges. Aujourd'hui, ils ont i)crdu leur droit de
saigner, autrement qu'en faisant la barbo, et encore! mais
leur titre a totalement disparu, sinon la profession. — Lou
barbiè de Sâouzé. Sauzot est un petit village, arrond.d'Uzès.
La tradition assure qu'il y avait là un barbier qui non-seu-
lement rasait gratis, mais qui payait à boire à ses pratiques
par-dessus le marché. Sa réputation est passée en pro-
verbe. On en voit les applications ironiques.
Barbïà, >. m. Petit homme barbu, bamboche à longues
moustaches. La mode de nos jours rend fréquente l'appli-
cation de ce mot. — Yoy. Barboefu.
Barbo, t. f. Dim. Barbéto, péj. Barbaiio. Barbe, poil
des joues et du menton; arête de l'épi des céréales; filets
du tuyau d'mie plume ; radicules, filaments d'un végétal
quelconque. — Quand papiès parlou, barbo» calou, quand
les titres parlent, les docteurs se taisent. Farié la barbo
énd'un iéou, il trouverait à tondre sur un œuf. A'ou» /"aï
la barbo en toutes, il nous i)asse tous, il nous rendrait
des points. Barbo dé païo, visage de bois, dicton fort usité
et d'mie application plus large (lue son correspondant fran-
çais : il s'étend à toute sorte de désappomtement, quand
on se voit trompé dans son attente. Bouvii tans barbo, aïro
sans garbo, prvb., à jeune bouvier, pauvre moisson.
Dér. du lai. Barba.
Barbocho, 5. m. Dim. Barbouchéto. Petit homme liarbn:
môme sens que Barbie. {V. c. m.) Barbichon; chien-
barbet.
Dér. de Barbo, parce que le liarbet a beaucoup de poil
autour du museau.
Barbouïa, v. Balbutier ; bégayer; baragouiner ; bre-
douiller.
Dér. du lat. Balbus, bègue.
Barbouîaje, s. m. Barbouillage, en discours, en écri-
ture, en jxîinture, en diction ; grifTonnage ; gahmafrée.
Enip. au fr.
Barbouiur, uso, adj. Barlwuilleur ; bredouilleur ; grif-
fonneur.
Barbontl, v. Marmotter; chuchotler; parler entre ses
dents; murmurer tout bas; faire un à-parte; dire des
messes-l)as.ses, i)arler dans sa barbe.
Dér. de Barbo.
Barboutimén, s. m. Chuchottement , marmottement;
murmure ; messe-basse ; bredouilleraent.
Barbu, ndo, adj. Barbu, qui a de la barbe, beaucoup
de barbe.
Barbudo, s. f. Chicorée sauvage, barbe de capucin,
Cichorium intybus, Linn. Chicorée liarbue des prés, qu'on
mange en salade quand elle commence à pousser et qu'elle
germe encore dans la terre ;plus tard elle est dure et héris-
sée de piquants. C'est à cet âge peu tendre qu'elle a reçu
son nom.
Barbudo est aussi le nom des ceps de vigne d'un an, qui
ayant poussé des radicules, qui plus faciles à la reprise et
donnent plus tôt des produits.
Dér. de Barbo.
Barda, (. m. Carrelage en dalles; pavé bardé avec des
dalles.
Dér. de Bar.
Barda, v. Couvrir, barder de lanl un rôti ; mettre la
barde à mie bête de somme ; plaquer ou lanc«r contre les
murs ou sur le carreau. ^ Barda un perdigal, barder,
couvrir un perdreau de bardes de lard, l'aï barda la miolo.
Vase, va-t-en mettre la barde à la mule, à l'âne. Lou bardé
àou s6ou, il le jeta rudement par terre.
Dér. dans le premier sens de Bardo, dans le second de .Bar.
94
BAR
BAR
Bardo, ». f. Dlm. Jiardèlo, péj. Sardasuo. Barde, bar-
delle, espèce de bât ou de se/le piquée de liourre ; tranche
mince de lard appliquée sur une volaille.
Dér. de Barda, du lat. bardianum, espèce d'armure ou
de cuirasse des soldats gaulois.
Barda, j. f. Dim. Bardouté, jwj. Bardoutas. Espèce de
mulet, né de l'âncsse et du cheval. Cet animal, très-robuste
mais de forme peu élégante, est le souffre-misère de la
bande des mulets [cottblo] ; c'est lui qui porte les bagages, et
le muletier par-dessus le marché. Au fig. butor, lourdaud ;
souffre-douleur. — Lou prénox pér barda, on en fait le
bouc émissaire, un objet de mystification ; on le charge de
tout ce qu'il y a de plus pénible. Paisa pér barda, deve-
nir le jouet, être le dindon de la farce.
Il y a une distinction à faire entre les deux locutions :
passa pér barda et préne pér barda. Que le premier dicton
s'applique à qui porte plus que sa part des peines et des
fatigues communes, c'est bien cela, mais c'est encore antre
chose. La charge susdite du bardot ne pouvant figurer sur
une lettre de voiture, il ne comptait pas lui-même au
nombre des mulets qui composaient la caravane. C'est dans
ce dernier sens qu'est prise la première locution, appliquée
à une personne qui, dans une dépense à faire, dans une
charge quelconque à supporter en commun, trouve moyen
de s'exonérer de son écot, de sa tiche ; passe comme on
dit par-dessus le marché, et par conséquent ne compte pas
non plus.
Pour le deuxième dicton : Barda, au fig., signifie un
lourdaud, un imbécile, un sot «t grossier personnage, dont
on se moque, dont on abuse, à qui l'on fait porter aussi
double bat, double charge; et l'individu qu'à tort ou à
raison on considère comme tel et que par conséquent on
traite de cette manière, on le prend pour bardot : il devient
alors chef d'emploi de doublure qu'il était, et la copie vaut
l'original.
Dér. du gr.BapSiç, lourd, lent.
Barguigna, v. Barguigner; hésiter; balancer; être in-
décis, embarrassé.
Dér. de la bass. lat. Barcaniare, marchander. Ce der-
nier mot venait lui-même du lat. in barcam ire, aller sur
ime barque, parce que le mot barca était à proprement
■un esquif, on embarcation, sur laquelle les trafiquants
allaient et venaient, dans le port, d'un navire à l'antre,
pour traiter avec les patrons.
Bargulgnaire , aïro, adj. Péj. Barguignaïras , asso.
Barguigneur; marchandeur. — Voy. Ratsséjaïre.
Bari, s. m. En vieux languedocien. Rempart; barrière. —
La earièiro ddou Bari, la rue du Hempart, qu'on a eu le
bon esprit à Alais de ne pas franciser et qui s'appelle tou-
jcAirs la rue du Barry. Lou m'ioit bari es la pès. le meil-
leur boulevard d'une ville, c'est la paix. Suivant la fameuse
devise, ce devait être aussi celui de l'empire; mais depuis...
Esfouïro-bari d'Aoubénas, c'est le vieux surnom que l'on
'donne aux habitants d'Aubenas. Il est sans doute glorieux
pour eux, puisqu'il doit signifier : qui sape les remparts,
sapeur de remparts.
Dér. de la bass. lat. Vara onbarum, barricade, enceinte,
clôture , faite avec des poutres, premiers remparts des
villes, ou plutôt des villages qui devinrent des villes et
des places de guerre sous la féodalité, dans un temps où
tout le pays était couvert de forêts. On se servit ensuite
de l'expression, un peu modifiée, barium , pour mur de
ville fait de poutres, et le nom resta quand les pierres rem-
placèrent ces remparts trop faibles. Un prvb. disait, et il
justifie la dériv. : A bari bas éscalo noun fàou.
Barièïraïre, s. m. Préposé aux Ijarrières, à l'octroi,
commis aux barrières à la percepticm des droits d'entrée
dans les villes.
Dér. de Bariètro.
Barièïro, s. m. Barrière. — Les villes, qui n'avaient
pas des portes, avaient des barrières, ne fut-ce que pour
empêcher la contrebande et assurer les péages. On les pla-
çait même quelquefois à des distances assez éloignées, qui
agrandissaient le rayon autour des villes ou des châteaux
féodaux ; et les noms , qui {)ersistent encore, en conservent
le témoignage, comme les anciennes chartes d'établisse-
ment. Un décret consulaire imposa un droit de péage à
l'entrée des villes pour les chevaux et les voitures, et pour
la perception on y plaçait des barrières mobiles. Ce droit
fut converti par la loi de frimaire an VII en octroi muni-
cipal, et les bureaux d'octroi occupèrent le même empla-
cement que les barrières. Ce n'est même que sous le nom
de barièïro que sont connus ces bureaux et le quartier
qu'ils occupent. Ainsi, on dit à Alais la Barièïro ddou
Mas-dé-Négre pour désigner le bureau d'octroi du Mas-de-
Nègre.
Dér. de Bara.
Baril, ». m. Dim. Barïi. Baril, petit tonneau, barrique
à huile ; barillet, petit liaril. — Un baril dé sardos, une
barrique de sardines. Un baril d'anchoïo, \m baril d'an-
chois. Un baril d'oli, un baril d'huile.
Dér. du celt. Barr, vaisseau, d'où la bass. lat. bariUut,
baril.
Barioto, s. f. Brouette, espèce de petit tondiereau, à
une roue et deux bras, traîné ou poussé par une personne.
— Voy. Brouéto ou Brouvèto.
Dér. de Ba, rédupl, et du lat. rota, roue, parce que
dans le principe elles avaient une double roue.
Barïoù, ». m. Barillon, engin destiné à confectionner
des trousses, de grosses bottes de foin ou de paille. C'est
une sorte de filet, composé de deux barres et de cordes
non croisées : un réseau ou tramail à cet usage.
Dér. do Baro, dont il est un dimin.
Bariqno, s. f. Barrique, grand baril. Il ne se dit que
du baril qui sert de caque aux anchois et aux sardines. On
se sert de ces barillets pour les chapelets de puit»-à-roue.
— La musiquo es din la bariquo, disent les chantres et Bn
peu sans doute les chanteurs, dont la réputation est aussi
BAR
BAR
95
d'être boDS buveurs ; mais alors ils parlent de bariqua,
dans sa grande diiuoiision, gros toniicau servant à conte-
nir Uu vin. — Au ûg. et en style fani. ce mol signifie lo
ventre, les intestins. — Té vàou créba ta barinuo, je te
crève le ventre. En esp. on dit aussi dans le même sens
bvrrica, ventre.
Dde. du celt. Barr, vaisseau, ou du lat. barillui.
Barisquo-Barasquo, adv. Ouoinatoptie exprimant l'ac-
tion de quelqu'un qui , une barre à la main, comme une
faulx, renverserait ou briserait tout ce qui est à sa portée.
Au fig. brutalement, bruyamment.
Dtïr. de Baro.
Barja, n. pr. de lieu. Barjac, ville et canton de l'arron-
dissement d'Alais.
Celte petite ville est mentionnée dans les anciennes
chartes avec quelques altérations dans son nom : en i 076,
de Bariado; en 1077, de Bariac; en 1084, de Bargiaco ;
ea HM, de Bargago; eu ll3i, de Barjago; en 1171, de
Barjaco; en 1194, de Bargiaco. En fr. on écrivait Barjac
ou Bargeac.
Abstraction faite de la désinence adjective ae, acum, et
enlang. a, ou le c Quai est supprimé [V. a, an, suff.), la
forme la plus ancienne du mot semblerait indiquer son
étymologie de la bass. lat. barium au plur., avec le sens
de nucnia, fortiiication, selon Du Cangc, et Barja signifie-
rait alors village fortifié. Mais n'a-t-elle pas été prise peut-
être du celt. berg, éminence, hauteur, d'où est venu le
vieux mot barge, aujourd'hui berge, ou mieux peut-être de
la bass. lat. baria ou beria, locus scilicet arboribus desU-
lutus, dumelit i>erù vepribusqxte referlus? (\'oy. Du Cauge,
V" Berra.) On ne trouve pas en elTet dims le territoire de
grandes forêts, mais de petits bois. Le nom d'un lieu voisin.
Sériât, dans l'Ardèche, pourrait servir d'indice, au moins
par analogie de situation, d^ nature de terrains et d'aspect
général,
Il y a dans le Gard deux autres localités du même nom,
Barja, hameaux des communes de Monteils et de Trêves,
où la topograpliic et le sol coufirmcraieat notre dernière
interprétation.
Barja, t>. Maquer le clianvre, le broyer avec la maque.
— Ce mot semble une contraction du fréquentatif Baréjei,
qui n'est pas dans la langue, mais qui signifierait jouer de
la barre, passer à la barre : parce que les mâchoires de la
maque à chanvre ont bien pu dans l'origine n'être que de
simples barres à broyer. — Dans le dial. prov. maquer se
dit brégea, rapproché de broyer, dér. de l'allem. brecken,
rompre, briser; de cette origine germanique, le laugued.
aurait bien pu conserver bar ou ber pour bérja et barja,
avec le même sens de briser et broyer.
Barja, v. Jaser ; babiller; jacasser; caqueter ; jabotter.
— Barja eoumo la bèlo Jano, babiller comme une com-
luôre. Lou diable lé barjei Au diable ton babil !
Bel-, du celt. BajoU ou du gr. Bx^w. babiller, bre-
douiller.
Barjadisso, «. (. Bavardage; longue causerie; babil
ennuyeux et insupportable.
Dér. de Barja.
Barjaire, aïro, ailj. Babillard, qui aime à causer; qui
ne cesse jkis de jacasser. — Yoy. Barjâou.
Barjalado, t. f. Bisaille; trémois; menus grains ; menus
blés; semences de mars; mélange de paumelle et de vesco
dont on fait un pain grossier. On séiiie ainsi en mars, de
barjalado, les terres que le manque de temps ou les lon-
gues pluies ont empêché d'ensemencer en automne. —
Aquà's pus que dé barjalado, c'est de la ripopée.
Dér. du lat. Farrago, toutes sortes de grains.
Barjàou, àoudo, adj. — Voy. Barjaire.
Bariïos, e. f. plur. Chencvottes, débris du chanvre
broyé, niaqué, avec quoi on faisait les allumettes soufrées,
avant que l'usage des allumettes chimiques, a frottement,
à phosphore, à explosion soudaine, plus dangereuses mais
plus rapides à s'enflammer, eût fait oublier les premières.
— Dansa tus las barjios, sauter de joie, être dans le ravis-
sement. Quand la culture du chanvre était une industrie
dans nos contrées ; quand arrivaient les barfiot, la récolte
était fmie, et c'était fête et repos; on pouvait danser.
Dér. de Barja, maquer.
Barjo, (. f. Maque, brisoir, banc à maquer le chanvre;
babil, jacasserie, superfluité de paroles. — Xa pat qui di
barjo, il n'a que du babil, U n'y a point de fond.
Barlaqua, v. Mouiller, tremper; agiter dans l'eau;
plonger dans l'eau.
Si barlaqua, se tremper jusqu'aux os; se vautrer dans
l'eau et dans la boue; se saucer par la pluie.
Dér. de Bar, eu v. laug. boue, fange, limon, et laqm,
vautrer.
Barlaqaado, t. f. Mouillure, soit qu'elle vienne en jetant
à l'eau quelqu'un ou quelque chose, ou s'y plongeant soi-
même, soit par l'effet de la pluie qu'on reçoit. — Ai indura
uno bono barlaquado, j'ai supporté une grosse averse.
Dér. de Barlaqua.
Bamaje, (. m. FouilUs, embarras; bardes, meubles,
entassés en désordre. Au prop. effets personnels qu'on prend
en voyage.
Ce mot nie parait la contraction de Barounage, qui vou-
lait dire l'ordre des barons, équipage de baron ; ou plus
simplement, du gaulois bornage, bagage désignant le train
d'un grand seigneur. — Voy. Baroun.
Baro, t. f. Dim. Baréto, baroit, barïoii, péjor. Baratto.
Barre ; pièce de bois ou de fer, longue et peu épaisse ; tra-
verse ; perche; latte. — Baro dé carito, enrayure de
charrette. Baro dé galignè, juchoir. — Se préne uno baro!
si je prends un bâton ! Propre eoumo la baro d'un galigni,
propre comme le perchoir des poules. 3Iitre la baro à la
porto, bâcler une porte. A'oui ajuJarat à pourta la baro,
tu nous aideras àporler le joug, dit-on à un nouveau marié.
Dér. du lat. Vara, traverse, pièce de bois mise en tra-
vers d'une porte.
96
BAR
BAS
Baroù, j. m. BMon de chaise; traverse de bois rondin,
qui sert à soutenir les tailles do vere à soie et qui porte
elle-môme sur les chevilles des montants. Quand ces tra-
verses sont en bois scié, on les appelle jaséno. — Y. cm.
Dér. de flaro.
Barougné, ». f. Baronnie; titre de baron ; terre baron-
niale, château baronnial. — Le quartier où s'établit aujour-
d'hui l'avenue de la nouvelle gare du chemin de fer, l'em-
placement de l'hôtel du Commerce, et tout ce pfité de mai-
sons, ainsi que la première gare, faisaient partie de ce
qu'on appelait autrefois à Alais la Barougné, quand la
ville et son territoire étaient divisés en deux juridictions,
celle du baron et celle du comte ; ce dernier avait aussi
des possessions vers le quai de la Comté, rappelant ce sou-
venir.
Baroun, s. m. ; au fém. Barouno. Dim. Barouné, péjor.
Barounas. Baron, titre de noblesse. — Le sort de ce mot
a été bien divers : lors de son premier emploi, dit Honno-
rat, il signifiait homme vil, ensuite homme en général, et
il n'est devenu un titre d'honneur que vers l'année 567.
En italien, le mot barone signifie tantôt noble, vaillant,
puissant, et tantôt brigand, voleur, vaurien. Les extrêmes
se touchent.
Dér. du V. lang. Bar ou baro,vir, homme. Les roisappe-
laient barons leurs vassaux immédiats. Ils disaient indif-
féremment : mon baron ou mon homme, pour homme
d'armes.
Barounéja, v. Se montrer baron ; se vanter de l'être ;
se donner des airs de grand seigneur.
Dér. de Baroun.
Barquado, s. f. Batelée ou barquée, plein une barque ;
le chargement d'une barque. — Empouisounariè uno bar-
quado dé crucifis, dict., il ferait faire naufrage, il porte-
rait malheur à une barque chargée de crucifix.
Dér. de Barquo.
Barque, s. m. Batelet; bachot; canot; esquif.
Dim. de Barquo.
Barqaéto, ». /". Petit bateau, petite barque ; barquerolle ;
barquette, espèce de pâtisserie, de gaufre, en forme de
l)arque.
Dim. de Barquo.
Barqoiè, barquièïro, adj. et s. De barque, qui tient à
une barque ; batelier, patron d'un bac sur ime rivière ; pas-
seur.
Dér. de Barquo.
Barquo , ». f. Péjor. Barquasso. Barque ; bac; tartane;
allège. — Sa barquo toquo, sa barque échoue; il est au
Iwut de son rouleau: ses affaires vont mal. Mena bien sa
barquo, bien conduire ses affaires. Coumo vaï la barquo?
comment va la santé? comment vont les affaires?
Dér. du lat. Barca.
Bartas, ». m. Dim. Barlaiioù. Hallier, buisson épais,
touffe do ronces et de broussailles ; au pr. touffe de bois
taillis non élagué. — Amouroùs coumo un bartas, par
contre-vérité, doux comme un fagot d'épines. Vn sâouto-
hartas, a beaucoup de rapport avec trdouquo-baragnado
{Voy. Baragnado), et je n'y vois d'autre différence que
celle de l'escalade à l'effraction.
Le poète Salluste du Bartas était certainement méridional
par son nom ; né dans le nord de la France, il se fût appelé
du Hallier ou du Buisson , avec ou sans séparation de
l'article; nous ne savons.
Dér. delà bass. lat. Barta, buisson, hallier, ou par l'ad-
dition d'un r, du grec Bi-coç , buisson.
Bartassado, s, f. Fourré de bois ; lieu rempli de hal-
liers, où il est difficile de pénétrer ; grande touffe de buis-
sons.
Dér. de Bartas.
Bartasséja, v. Battre les buissons et halliers, terme de
chasseur ; quêter le gibier en fouillant les buissons.
Bartassoù, s. m. Branche basse, ou plutôt rejeton de
chêne vert, rabougri et ravalé, et par cette raison plus
épais, plus touffu, dont on se sert pour ramer les vers à
soie en les mêlant avec la bruyère. Avant de les employer,
on les fait sécher et on les dépouille de leurs feuilles, en
les battant contre un mur. L'éducateur cévenol, supersti-
tieux observateur des lunaisons, ne coupe les bartassoùs
que pendant la nouvelle lune, sans quoi il arriverait que
le bois en serait de suite vermoulu et se briserait en le
frappant. D'après lui, tous les arbres verts doivent être
coupés en lune nouvelle, et tous ceux qui j^rdent leur
feuille, après la pleine lune, sous peine des vers.
Dim. de Bartas.
Barunla, v. Rouler; courir; rôder; vagabonder. —
— Barunlé lous éscaïés, il roula l'escalier.
Rédupl. deBunla. — V. c. m.
Barunlaïre, aïro, adj. et s. m. Vagabond; batteur
d'estrade ; coureur ; rouleau, cylindre mobile qu'on roule
sur une terre nouvellement ensemencée pour aplanir la
crête des sillons et raffermir le terrain.
Dér. de Barunla.
Barunlo, s. f. Pente escarpée et rapide ; terrain qui va
en descendant, très-incliné. — Préne la barunlo, être
entraîné par la pente, dégringoler, au pr. et au fig.
Dér. de Ba, signe du rédupl. et du lat. rotula, petite
roue.
Barutèl, s. m. Claquet ou traquet d'un moulin ; blu-
teau, blutoir; sas. Au fig. babillard sempiternel, bavard
dont le caquet imite le bruit incessant d'un traquet de
moulin.
Dér. du lat. Volutare.
Bas, basso, adj. Dim. Basse, péj. Bassas. Bas, pro-
fond ; qui a [wu do hauteur.
A bas, adv. A bas ; doucement.
En bas, ou Dé bas, adv. En bas, au fond.
L'émbas OU Lou débas, s. m. Le bas; par rapport an
premier étage d'une maison; le rez-de-chaussée; le fond.
— Lou vin es bas, le tonneau est au bas. Delà cénturo en
BAS
B.\S
97
bas, (lo la ceinture aux talons. Et à bas, il est tombé,
détruit, par terre.
DtT. (le la bass. lat. Bassus.
Bas, s. m. Dim. Batte, [)t'j. Bastas. Bat, espèce de selle
très-forte jwur b6tes de soiniiie, servant au transport. —
Anén plan, loti bas se biigno, ou té moto, doucement, ceci
commence à se gùtcr [Yoy. Bagna). Pourta lou bas, payer
l'acquit ]Kiur les autres ; avoir tout le souci.
Dur. du celt. Basi, d'où la bass. lat. aurait fait bastum,
bât ; ou bien du gr. Bïariiî, bâton avec lequel on iiorte les
fardeaux, forme de Baoril^eiv, iwrtcr une charge.
Basacle, ». m. Terme de comparaison à tout ce qui est
large et grand. — Aqtiéles souïès soun dé basacles, ces sou-
liers sont démesurômcnt larges. 11 existe à Toulouse une
grande minoterie de ce nom sur la Garonne et le canal
Brienne. Est-ce ce nom qui est devenu type , ou bien
vient-il lui-même de ses grandes dimensions ; ou enfin ces
deux acceptions existent-elles indépendantes l'une de
l'autre? Cette dernière hypothèse parait plus raisonnable.
Le mot Basacle est ancien dans l'idiome, tandis que le
moulin du Basacle a été construit sous l'administration de
Mgr de Loménie de Brienne, archevêque de Toulouse, qui
a laissé son nom au canal sur lequel il est construit ; ce
qui ne fait remonter son établissement que vers les années
qui touchent à 1789. Son architecture ne présente pas une
date beaucoup plus ancienne, en supposant qu'il ne se fut
agi alors que d'un agrandissement. Du reste, ce mot parait
dér. du lat. Yascultim, vase, vaisseau.
Basali, s. m. Basilic, ser[)cnt ou lézard, animal fabuleux,
dont le regard, dit-on, donnait la mort, s'il voyait l'homme
avant que l'homme l'eut vu. On croyait , et qui dirait que
bien des gens ne croient pas encore? qu'il provenait des
œufs d'un vieux coq. Dans les Cattagnados , le marquis de
la Fare-Alais a chanté cette légende et a dédié cette pièce à
Jean Relwul : deux noms fraternels ! deux gloires locales !
Dér. du gr. BadiXixiî, royal.
Basali, j. m. Basilic, Ocymum busilicum, Linn., de la
fam. des Labiées, jilante annuelle, aromatique, que le popu-
laire cultive avec soin dans des pots cassési Les jeunes
gens des .deux sexes, (luand ils sont endimanchés en été,
ne se passeraient pas d'un brin do basilic .'i la bouche, à la
main ou sur le sein. C'est le patchouli cévenol. On peut
l'apitelcr aussi l'oranger du savetier, car il n'est guère de ces
artisans qui n'en aient un jKit dans leur boutique. Notez qu'on
ne dit point vase, attendu que c'est presque toujours un vieux
pot hors de service et chassé de la cuisine, qu'on emploie à
ce dernier usage. — Etiguén-basall, Ijasilicon, onguent.
Même étym. que le mot précédent.
Bassaqua, v. Cahoter; secouer; remuer d'un côté à
l'autre ; ballotter comme un sac.
Dér. de Ba, particule rédup., et de sa, saquo.
Bassaquamén, s. m., ou Bassaquado, s. f. Secousse;
cahot, cabotage d'une voilure.
Même dér. que le mot préc.
Bassaqno, j. f. Paillasse de lit ; sac à paille ; large sac
dans \m\w\ se plient les l)ergers dans leur cabane, et sur-
tout lorsqu'ils bivouaquent dans les pâtis des montagnes.
Même dér. (juc Bassaqua.
Bassarèl, s. m. — Voy. Bastil. m. sign.
Basségou, s. m. Timon d'une charrue, d'un araire;
brancard d'un puits à roue, auquel est attelé le cheval qui
met en mouvement son mécanisme.
Dér. du lat. Baculus, bJton.
Bassèl, s. m., ouBassarèL Battoir de lavandière, palette
de bois dont elles se servent pour luttre le linge en lavant.
Au flg. soufDet, tape à main plate.
Dér. du lat. Baculus, dim. Bacetltis.
Basséla, v. Battre le linge avec le battit. Au iig. frap-
per, Iwttre comme plAtre ; frapper à coups redoublés ; par
ext. tourmenter, inquiéter.
Dér. de Bassèl.
Bassélaje, s. m. Bruit de battoir de lavandière; ou
tout autre bruit ou tapage qui lui ressemble par la fré-
quence des coups.
Dér. de Bassèl.
Bassèsso, s. f. Action indigne d'un homme ou d'une
femme d'honneur ; action honteuse ; une faiblesse chez le
sexe . — A fa uno bassèsso, il a commis ime lâcheté.
Emp. au fr., le mot, mais non le sens.
Bassina, 5. m. Au ptur. Bassinasses. Cocons qui ne
peuvent achever de se dévider dans la bassine, soit qu'ils
aient été attaqués par les rats, qui auraient rompu la suite
du fil, soit parce que le papillon aurait commencé à le»
bouchonner intérieurement, comme on le voit à l'article
Baba, OU bien encore que le fil serait bouchonné naturelle-
ment [Voy. Troumpélo), ou enfin que le fil soit lellemenl
inconsistant qu'il casse à chaque instant.
Dér. de BassU.
Bassina, v. Bassiner, chauffer avec une bassinoire; bas-
siner, fomenter en mouillant avec un linge imbibé ou avec
une liqueur tiède. — Se bassina Véstouma, se réconforter
le cœur par la lioisson, se réchaufl'or par quelques rasades.
Dér. de Bassina.
Bassinado, s. f. Contenu d'une bassina, plein une bas-
sino. — Bojo dé plèjo à bèlos bassinados, la pluie tombe
à seaux.
Dér. de Bassina.
Bassiné, s. m. Bassinet d'un fusil, d'un pistolet ; partie
creuse d'une arme à feu qui rcfoit l'amorce. — F6ou cra-
cha âou bassiné, il faut jwyer d'avance, payer comptant :
c'est d'un petit bassin, d'une sébille à quêter qu'il s'agit
dans ce dicton, et non du bassinet d'une arme quel-
conque.
Dim. de Bassis.
Bassino, s. f. Cuiller à seau pour puiser de l'eau. Elle
est ordinairement en cuivre. Quelquefois, pour éviter le
vert-de-gris, la queue seulement est en cuivre et le bassin
en étaia.
u
98
BAS
BAS
Depuis que le français s'est emparé de ce mol pour
exprimer le vaisseau où l'on fait bouillir les cocons dans
une filatui-e, le languedocien l'a suivi dans cette voie ;
inais sous cette dénomination il ne désigne que la bassine
en poterie des nouvelles fdatures. — Voy. Bassis.
Bassis, s. m. Au plur. Bassisses. Bassin ; vivier ; plat
à barbe; particulièrement, bassine h fder les cocons. Le
bassis était autrefois en fonte ou en cuivre pour résister à
l'action directe du feu ; dans les filatures à la vapeur ou
à la Goiisoul, ils sont simplement en poterie.
Dér. du gaulois Jîac/tinou, bassin; la bass. lat. avait
bacinus, formé de l'allem. hack, signifiant lac ; diin.,
bassin.
Basso-cour, s. f. Cour, basse-cour. — Le lang. exprime
l'une et l'autre acception.
Emp. au fr.
Bassoii, s. f. Profondeur; ce qui est bas et profond.
Dér. do Bas.
Bastar, ardo, adj. D'un. Baslardoù, ouno. Bâtard,
enfant naturel. En terme d'agriculture, sauvage, sauva-
geon.
Dans cette dernière application, on dit tantôt bastar,
tantôt bouscas; l'usage seul indique les différents emplois.
En général cependant l'adj. bastar s'accole aux simples et
aux plantes potagères, et bouscas aux arbres et arbustes.
On dit : api bastar, aïgréto bastardo, et castagne bouscas ,
férié bouscas. Il y a une distinction qui parait plus tech-
nique encore : on dit bastar d'un végétal qui, quoique de
la même famille que celui qui lui sert de type, en diffère
par sa nature et sa production ; tandis que bouscas est pro-
prement le sauvageon, qu'on peut assimiler au type en
l'entant.
Le dim. Basiardoit, ouno, ne se prend jamais qu'en par-
lant d'un enfant illégitime, naturel.
Dér. du gr. Baaoipï, femme prostituée.
Bastardiè, ièïro, adj. Préposé des hôpitaux qui va
conduire les enfants-trouvés en nourrice.
Bastardièïros, s. f. pi. Comportes, grands paniers
d'osier doubles, où l'on dépose les enfants-trouvés pour les
transporter il dos d'Ane chez leurs nourrices.
Bastardije, s. f. Bâtardise; état de celui qui est bâtard ;
signe de bMardise.
Bastarduégno, s. f. La gent bâtarde; les enfants-trouvés
pris collectiveineiit ; les bâtards en général.
La dérivation du mot n'a pas Iwsoin d'être expliquée,
tant elle est naturelle. Au substantif est joint le suffixe
uigno, qui marque la collectivité ; il est peu fréquent et
propre à notre dialecte. On le rencontre dans éfantuéiino,
trassuègno, avec la même idée collective.
Baste ! adv. Plût à Dieu ! A Dieu plaise ! — Le fran-
çais a également le mot baste, peu usité et familier, qui
signifie : soit, passe pour cela, j'en suis satisfait. Dans le
lang., Basic' exprime un souhait. Ce n'est donc que la
différence du vœu, du désir à l'approbation ; une nuance.
Les deux mots ont évideniinoiU la luèmo origine. Basier,
verbe neutre, impers., aucii'iini^ment en fr., ne s'est con-
servé qu'il l'impér., comme en lang. l'ancien verbe Basta.
L'un et l'autre devaient être contemporains et procédaient
d'une source commune avec Vital. Baslare, suffire, qui
fait basta, il suffit. La racine doit donc être la même pour
tous, et elle ne jKSUt être que dans le lat. bené slare, qui
réiwnd à toutes les acceptions dans les trois langues.
Basté, s. m. Maiitelet, sellette d'un cheval de trait, qui
supporte le brancard ou liinonnière.
Dim. de Bas, bât.
Bastéja, V. Charrier à bât, à dos de mulet ou d'âne ;
transporter sur le bat ; porter le bât.
Dér. de Bas, bat.
Basti, V. Bâtir, construire en maçonnerie; établir ; battre
violemment, frapjjer, jeter contre le mur. — ■ Lou roussi-
gnôou couménfo dé basti, le rossignol commence à bâtir
son nid. Basti sus lou davan, en parlant d'un homme,
engraisser, prendre du ventre; d'une femme, être enceinte;
avancer dans sa grossesse. Bastirièï aquél drôle, quand
bado coumo aquô, je souffletterais cet enfant, quand il crie
de la sorte. Qudou m'a bastî aquél gusas? qui m'a amené
ce gueux-là 7
Dér. du gr. Bao-ci;, bâton, parce que dans les premiers
âges on construisait les maisons avec des perches et des
barres.
Bastido, s. f. Maisonnette de campagne ; villa.
En Provence, et à Marseille surtout, ce nom a été donné
aux pavillons et aux maisons des jardins qui sont dans la
banlieue dos villes. Il ne s'applique qu'à des maisons
d'agrément, et non aux fermes et aux bâtiments d'exploi-
tation.
Dér. de Basti.
Bastiè, s. m. Bourrelier; ouvrier qui fabrique des bâts;
celui qui fait et vend tout l'équipage des bêtes de somme,
bâts et gros harnais.
Dér. de Bas, bât.
Bastimén, s. m. Navire, vaisseau. — 11 est impropre
de s'en servir pour désigner un bâtiment sur terre, un
édifice.
Dér. de Basti.
Bastisso, s. f. Bâtiment, construction en maçonnerie ;
toute chose bâtie; action de bâtir ; frais de construction.
— Aïmo la bastisso, il a la manie de faire bâtir, la maladie
de la truelle. Aquélo acdou faï dé bono bastisso, ce mortier
fait une excellente prise. La bastisso la arouina, la manie
de bâtir l'a ruiné.
Dér. de Basil.
Bastoù, s. m. Dim. Baslouné, péj. Bastounas. Bâton;
canne ; long morceau de bois, brut ou travaillé, que l'on
porte à la main pour se soutenir, pour parader, pour con-
duire des animaux, pour se défendre, etc. — Seras moun
bastoù dé vièïèsso, tu seras mon bâton de vieillesse ; mon
appui, mon soutien dans mes vieux ans. Tour dâou battod.
BAT
BAT
99
tour de bâton, ponr dire profits casuels et illicites d'un
emploi.
Dît. du gr. BaTrfî.
Bastounado, j. f. Bastonnade; volée de coups de
bàtoii.
Batacla, v. Bicler une affaire, la terminer rondement,
proiiipleiucnt ; finir un ouvrage rapidement, taniliour-bat-
tant. — Sera U'ou balada, ce sera bientôt troussé.
Dér. (lu lat. Ilucutare, fermer avec un liàton.
Bataclan, s. m. Avoir, mobilier d'une maison; nippes
et a rfc'ont; équipage; étalage; batterie de cuisine ; attirail
de ménage. — A éscudéla tout soun bataclan, il a dissipé
tout son saint-fru.s(juin. Empourlas tout vaste bataclan,
emiwrtoz tout votre attirail, tout ce qui vous appartient.
En provençal, on dit Pataelan, c'est évidemment le
môme mot. Cette homonymie ne pourraiUelle pas mettre
s>ir la voie de l'élym. ? Ne dériverait-il pas alors de Palo,
chiffon, tiré du gr. IliT/ifia, chose vile, et de KXioj, rompre,
briser, WXi<3[xx, éclat, morceau ?
Batado, s. f. Dim. Batadéto, péj. Batadasso. Empreinte
de la iKittc d'un animal.
Dér. de Bato.
Bataïa, v. Bavarder ; brailler; babiller; batailler en
paroles.
Dér. du lat. Batuere, combattre, se disputer.
Bataïaire, aïro, adj. Péjor. Baiaïai'rat,a$so. Babillard;
braillard; bavard qui aime la discussion.
Dér. de Bata'ia.
Bataïo, s. f. Bataille; batterie, querelle entre des com-
battants. — Faiire la bataïo, jouer à la bataille, à coups de
fronde. C'est une sorte de petite guerre qui a été fort en
vogue chez les enfants et jusque chez les gars de quinze à
dix-huit ans, sous le Directoire et le Consulat. Les diffé-
rents quartiers d'une ville se formaient -sous des bannières
différentes. Ce jeu avait fini par donner lieu k des études
de stratégie et de ruses de guerre fort savantes. La police
alors se montrait peu réjjressive aux développements de
cette science, et les enfants avaient d'autant plus de zèle
et de loisir pour cet exercice qu'on trouvait jieu d'écoles
de ce temps. Pendant l'Empire, il y avait ailleurs trop
d'occasions sérieuses de batailler pour chercher des amuse-
ments dans l'imitation. Plus tard, la police mit bon ordre
a des jeux qui avaient voulu reprendre leurs anciennes
projiortions. Sous le nouvel empire, ces divertissements
enfantins seraient moins tolérés que jamais. La paix n'est-
elle pas .son princij» ?
Emp. au fr.
Bataiioun, s. m. Bataillon; grand nombre, multitude;
' foule.
Emp. nu fr.
Batanlul, s. m. Espèce de coiffe, de bonnet de femme,
dont la dentelle descend sur le front et les yeux comme vm
demi-voile.
Dér. du fr. Batiant-l'œit, terme que la mode consacra
dans le temps, et qui a passé avec elle. L'expression, qui
est restée générique en languedocien, a survécu.
Batéïè, ïèïro, adj. Dér. de Batêou. — Voy. Barquiê.
Batéïre, éïro, adj. Qui aime à battre, qui cherche
noise; querelleur; disputetu^.
Dér. de Batre.
Batéja, v. Baptiser, donner, conférer le baptême; donner
un sobriciuet à queUju'mi ; asiwrger d'eau la tête de quel-
qu'un par plaisanterie; tremper, arroser d'eau. — Batéja ton
vi, tremper le vin. Couro baléjes? Quand feras-tu baptiser
ton enfant? c'est-à-dire quand ta femme accouchera-t-elle î
L'an batéja émbé d'aïgo dé mérlusso, c'est un mauvais
chrétien, un mal-haplisé. Batéja soulo'n code; quand les
protestants n'avaient point le libre exercice de leur culte,
c'est dans les champs, au désert, qu'ils accomplissaient
toutes leurs cérémonies religieuses, et que par conséquent
ils donnaient le baptême ; de là, pour indiquer un protes-
tant, le dicton : es esta batéja souto'n code, il a été bap-
tisé sous un genévrier. Ce dicton, par extension, tend bien
aussi à prendre la significaticm du préoklenl. / fané batéja
un téoulé, il lui inspire tant de confiance, il a tant d'em-
pire sur lui, qu'il lui ferait baptiser une tuile, qu'il lui
ferait croire que les enfants se font par l'oreille. Té vOou
batéja coumo se déou, je vais t'asperger comme il faut.
Lou Batéja, cérémonie ; escorte ; fête de baptême.
Dér. du gr. Bi;r:Etv, plonger dans l'eau.
Batéjado (La), s. f. n. pr. de lieu. La Baléjade, quar-
tier voisin du hameau de Larnac, dans la coramuoe
d'Alais. Son nom lui vient-il de ce que, au moment de
l'introduction du christianisme dans les Gaules, ce lieu
fut témoin de la prédication de la foi nouvelle par un des pre-
miers apùtres et de la conversion des plus anciens habitants
de nos contrées? >'ous ne le jwnsons i)as. Il semble plutôt
ne dater que de l'époque de nos dissidences religieuses où
les cérémonies du culte, les assemblées et l'administration
du baptême se faisaient, comme on disait, au désert.
Batèmo, s. m. Baptême, sacrement qui efface le |)éché
originel et rend chrétien; le premier des sacrements. — A
pas que lou batémo dé trop, il a le baptême de trop : c'est
une brute. Téni en batémo, être parrain d'un enfant.
Dér. du lat. Baplisma.
Batén, s. m. Vanteau de porte, de croisée, d'armoire.
Dér. de Batre.
Bat-én-goulo (Dé), adv. Tout grand ouvert ; ouvert à
deux battants ; béant.
Formé de Bat ou batén, vanteau, et de Gâoule, jable,
mortaise ; c'est-à-dire battant ou vanteau à mortaise.
Batèou, I. m. Bateau, petit vaisseau qui va à rames, et
qui est particulièrement destiné à naviguer sur les rivières
ou dans les ports.
Emp. au fr. Dans la bass. lat. Batellut.
Batèsto, s. f. Batterie ; rixe ; combat à coups de poings,
de bâton ou de pierre.
Dér. de Batre.
100
BAT
BÈ
Batïoù, s. m. Pied de cochon, de mouton, spécialement;
pince d'uii cheval. Par ext. péton d'un petit enfant.
Dim. de Balo.
Batisto, «. pr. d'homme. Dim. Batistoii, souvent abré-
gés l'un en Tisio, l'autre en Tistoii. Baptiste : nom insépa-
rable de Jean, qui vient de saint Jean-Baptiste . — Tran-
quiiUe coumo Balisio, tranquille comme Baptiste ; on dit
de même proverbialement en français : un père tran-
quille.
Batistouèro , s. m. Constatition du baptême sur le
registre curial ; l'acte lui-même. On disait autrefois l'extrait
baptistère ou de baptême, ce qui équivalait à l'acte de
naissance d'aujourd'hui, lorsque les curés étaient c'^ nés
de la tenue des actes de l'état civil. En languedocien,
malgré ce changement dans nos institutions, on nonrne
encore mi acte de naissance : batistouèro. — Regarda, hu
batistouèro d'aquélo mioto, regarde l'âge de cette mule à ses
dents. A perdu soun batistouèro, dit-on d'une femme (j yi
cache son âge.
Dur. du lat. Baplisma.
Bato, s. f. Dim. Satéto, balïoii, péjor. Batasso. Pied;
corne du pied des bœufs, des brebis, des porcs, des chè-
vres ; sabot d'un cheval, d'une mule, d'un àne. — Dalica
coumo uno bato d'ase, douillet comme le sabot d'un àne ;
par contre-vérité. A vira las batos, il a tourné les pieds
en l'air ; il est mort, ou il est crevé.
Bato dé biôou, espèce de grosse figue, assez fade et
aplatie.
Yoy. Pato.
Dér. de Batre, par la raison que c'est avec cette partie
que les animaux battent ou foulent le sol.
Bato-quioulo, s. f. Casse-cul, selle ; contre-coup sur le
derrière, comme lorsqu'on tombe en glissant, ou qu'on
vous enlève une chaise sur laquelle vous comptiez vous
asseoir. — • Douna la bato-quioulo, est uu jeu d'enfants
(cet âge est sans pitié) qui consiste il prendre le patient,
ordinairement le plus faible de la bande, et en le soule-
vant par la tète et par les pieds, à lui faire, par saccades
régulières, donner du derrière contre une pierre ou sur le
sol.
Sauvages rapporte que « la selle est en Lombardie le
supplice des banqueroutiers, et la pierre sur laquelle on
les fait tomber en les hissant et en les lâchant de fort
haut, au moyen d'une corde et d'une poulie, est appelée :
pierre d'ignominie. » C'est de l'histoire du moyen âge, et
peut-être du temps du roi Didier. Ces sortes de supplices
spéciaux sont aujourd'hui abolis partout.
Formé de Batre et do Quiou .
Batre, v. Battre; frapper; donner des coups; frapper
fortement. — Batre dé las dos mans , terme d'agric,
bêcher des deux côtés, de manière k rejeter la terre sur un
même point pour niveler le terrain et combler mi bas-fond.
Batre la pavano, vagabonder. Batre uiw marcha, suivre
un plan de conduite, entrer dans une voie : il se prend
d'ordinaire en mauvaise part. Chacun ba sa marcho, cha-
cun tire de son côté. Batre atotts, jouer de l'atout. Batre
las cartos, mêler les cartes. Batre la campagno, battre la
campagne; radoter ; chcrcherdes faux-fuyants. Batre l'aïyo
émbe un basloii, battre l'eau avec un bâton, perdre son
temps. Batre d'iôous, brouiller des œufs. Mena un bel
batre, faire étalage de sa fortune ; mener grand train ; faire
un commerce sur une grande ècliclle.
Dér. du lat. lialuere, battre.
Batu, udo, part. pass. de Batre. Battu, lie. — Conçu
et batu, les battus paient l'amende.
Batudo, s. f. Battue, terme de chasse et de louveterie ;
battue, terme de filature, quantité de cocons mise en une
fois dans la bassine à fder et .'i battre avec le petit balai ;
séance de travail sans désemparer; quantité de travail que
fait un ouvrier entre un repas et l'autre.
Dér. de Batre.
Batuma, v. Enduire; cimenter; empoisser ; goudronner.
Par cxt. enduire un mur, terme de maçon. — Balumo,
dit-on d'un ivrogne qui s'en va battant les nmrailles.
Dér. du lat. Bitumen.
Baturèl, èlo, adj. Péj. Baturélas, asso. Bavard; babil-
lard; caqueteur; causeur ennuyeux.
Mélathèse de Barutèl.
Bavar, ardo, adj. Dim. Bavardé, bavardoU, péj. Bavar-
das. Bavard, babillard; effronté, impertinent; sot, insolent.
Dér. de Baba.
Bavardije, s. f. Bavardcric ; impertinence ; effronterie.
Même étym. que le précéd.
Bé, J. m. Dim. Béné, augm. Béwos. Domaine ; immeuble
rural, quelle que soit son imjwrtanco ; génériquemcnt, for-
tune, avoir, biens, possessions, richesses. — A foço bé dou
sourél, il est riche en fonds de terre. Pér tout lou bé que
se souréto, voudrièï pas . . . . pour toute la fortune du monde,
je ne voudrais pas... Un bé d» dous coubles, un domaine
de deux charrues.
Dér. du lat. Benè.
Bé, adv. Bien; beaucoup; considérablement. Cette
expression est prise explétivement comme en fr., pour
synonyme de : en effet, certainement, il la vérité ! Devant
une voyelle, on y joint un n euphonique. Elle prend aussi
quelquefois la forme substantive. — Bé lalamén, très-cer-
tainement ! Y souï bé-n-ana, j'y ai bien été. — Ona bé
foço, il y en a en effet beaucoup. Dé bé s'en fdou, il s'en
faut bien, il s'en faut de beaucoup. Tout se fat pér un bé,
rien ne se fait sans raison. Ou fasià pér un bé, il le faisait
dans de bonnes intentions. Ou a tout fa hormi lou bé, il a
fait toutes sortes de choses excepté le bien. Fasés dé bé à
Bértran, vous ou rendra en cagan, prvb., Graissez les'
boites d'un vilain, il dit que ça les brûle; chantez à l'Ane,
il vous fera un pet, ce qui revient au vieux prvb. fr. : Oignez
vilain, il vous poindra ; qui ajoute de plus que le nôtre :
Poignez vilain, il vous oindra.
Dér. du lat. Benè.
BEC
BED
101
Bè, s. m. Diin. Béqué, béquoù, péj. Béquas. Bec, partie
cornée qui tient lieu de bouclie aux oiseaux ; nez ; pointe
en forme de l)oc ; au fig. babil, langue, caquet. — A un
pouU bè, il a un fameux nez, fam. un fameux pif. Tato la
piolo? dé bè; dé bè.' expr. prvb., niot à mot : ta hache
coupe-t-elle? de la pointe seulement; mais cela s'applique
à une personne qui n'a que du jargon, à un faux brave.
Un co dé bè, un coup de langue, un trait satyrique, un
sarcasme, itam/ao pas dé bè, il ne manque pas de babil.
Tène lou bè din l'aïgo, payer par de belles paroles, faire
attendre.
D(5r. du gaulois Becq, ou du celto-breton bak ou beg.
Bèbo, s. f. Moue, mine ou grimace de mauvaise humeur,
de b(5uderie. — Foire la bèbo, faire la moue, bouder.
Dér. de Bè.
Bécar, ». m. Goujon, bouillerot, Cyprinus gobio, Linn.
C'est un petit poisson de rivière (bien qu'on cite un j)ôclieur,
un seul, qui en prit un de 2oO grammes ou demi-livre pour
être clair), d'un bleu noirâtre sur le dos et le ventre blan-
châtre à fdets jaunes. Son nom de Bécar lui viendrait-il de ce
qu'il mord, ou bèquo, facilement M'hameçon des pécheurs-
amateurs, dont il est la grande ressource ?
Bécaru ou Béchani, s. m. Flamant, bécharu, phcni-
coptére, Phoenicopicrus ruber, Liun., oiseau de l'ordre des
Échassiers. Son nom lui vient de la grosseur de son Iwc.
Bécasso, s. /". Bécasse; bécasse ordinaire, Scolopax rus-
licola, Linn., oiseau de l'ordre des Échassiers et de la fam.
des Tenui rostres. Sa chair est trés-estimée ; gibier d'un
fumet supérieur. St)n long liée eflilé lui a fait donner son
nom.
Bécasso s'appli(jue au fig. à une iicrsonne niaise ; sot,
butor. — Chd coumo uno bécasso, stupide comme une
bécasse. Tout aquà ses foundu en mèrdo dé bécasso, tout
cela est venu à rien.
Les deux dim. Bécassoù, s. m., Bécassino, s. f., iiécas-
sine, Scolopax gallinago, Linn., sont des oiseaux du même
genre et de la même fan)ille que la bécasso, plus jwtits
comme leur nom l'indicpie, mais de même fumet et de
pareille délicatesse de chair.
Béchar, s. m. Dim. Béchardé. Houe fourchue, houe à
deux lx!cs, binette, qui est l'instrument le plus usité dans
ce pays pur travailler la vigne, les mûriers, et pour toute
espèce de travail h bras, là où la pierraille empoche d'em-
ployer le louchet. — Voy. I.uché.
Dér. de la bass. lat. Besca ou becca, bôche.
Béchérino, *. f., ou Réïné. Uoitelet, le plus jjetit des
oiseaux d'Europe. Il y en a de deux espèces également
communc!> dans nos contrées et que le languedocien con-
fond sous le môme nom ; ce sont le roitelet ordinaire, Re-
gxUus cristatus, et lo roitelet triple-lwndeau, Regulus igni-
eapUlus, Temm. I>e second ne diffère que par le dessus de
sa tète, orangé couleur de feu, du premier, dont les parties
supérieures sont olivâtres nuancées de jaune, gorge et
poitrine ronssiVlres, et les parties inférieures blanchâtres.
Bèchos, j. f.plur. Lèvres; gi-osses et laides lèvres. Ne
se prend i[u'au péjoratif, en terme de mépris. Autrement
on dit : las bouquos.
Dér. de Be.
Béchu, udo, adj. Péj. Béchudas, atso. Lippn; qui a de
grosses et vilaines lèvres; bec-de-lièvre.
Dér. de Bè.
Bécu, udo, adj. Dim. Bécudé, péj. Béeudas. Qui a un
bec, une pointe en forme de bec. Au fig. babillard ; rai-
sonneur; qui se reljè<iuc, qui répli(iue h tout. — Pèses
bécus, pois |)ointus, pois-chiches. Sièto bécudo, écuelle à
bec [Voy. Crouséludo). Es uno bécudo, elle a la langue
affilée.
Bèdaïne, s. m. Bec-d'àne , outil de menuisier, espèce de
rabot destiné !i vider les mortaises.
Emp. au fr.
Bédé, s. m. Petit agneau, terme d'amitié qu'un berger
donne à un agneau favori. Lous bédés, les moutons ou les
brebis, dans le dictionnaire des {)etits enfants.
Onomatopée tirée du Wlement des brebis ; le gr. avait
aussi B^, et le latin hee, pour exprimer le bêlement.
Bédigano, s. f. Sarment, liane de vigne sauvage dont
on fait des cannes.
Formé et corrompu de Védil et de cano. — V. c. m.
Bédigas, s. m. Bédigasso, s. f. Dim. Bédigassé, jvjor.
Bédigassas. Agneau d'un an, mouton de l'avant-dernière
portée. Au mois de septembre, les agneaux de l'année com-
mencent à s'appeler Bédigas, nom qu'ils conservent jus-
qu'au mois de septembre suivant, où ils deviennent Dou-
blén. ,
liédigas, au masc. et Bédigasso, au lém. se disent des
bonnes personnes, sans fiel et sans malice. Bédigas est
aussi un terme de commisération. — Es un bédigas, un
bédigassas, un bédigas sans lano, c'est un bonhomme, une
bonne pâte d'homme, une bête du bon Dieu. Pdoure bédi-
gas ! jiauvre homme ! lo poveratzo des Italiens.
.Vugment. de Bédé.
Bédlgo, s. f. Brebis de l'année; brebis maigre, malingre,
éclopée. — Voy. Bédigas.
Bédin-Bédàs, s. m. Jeu des osselets; osselets. — Les
enfants, pour jouer i, ce jeu, se munissent d'osselets, qui
font le plus souvent l'enjeu, quand il n'est pas autrement
intéressé ; chacun des joueurs doit en avoir au moins trois.
L'adresse consiste à placer les osselets dans un trou
creusé dans la terre, à une certaine distance. Au premier
coup celui qui joue dit : Bédin ou bédi ; an second, bédàs
ou bédà, et au troisième, sdauto din lou crûs. L'incantation
et le jet doivent être rapides; le gain de la partie appar-
tient, comme de raison, au plus adroit, qui fait rafle. Ce
jeu est fort ancien ; l'histoire raconte qu'Auguste, empe-
reur, s'y divertissait beaucoup.
Les osselets avec lesquels on joue, sont la rotule du
genou des moutons. Le nom du jeu ne viendrait-il pas,
pour cette raison, do Bédé, mouton, agneau?
102
BEL
Béfa, s. m. nicnfiiit; Iwuue œuvre; bonne action.
Dér. du lat. Venefactum.
Bèli, io, adj. Vù'y Bépas, asso. — Voy. Bofi.
Bégatagno, alj- <lcs deux genres. Bègue, qui bOgaic.
Péjoratif de Bègue.
Bégu, udo, part. pass. du v. Béoure. Bu, bue. — Y-a
bégu, il a donné dans le panneau.
Bégudo, j. f. Bouchon, petit cabaret de route, où l'on
s'arrête pour se rafraîchir. Ce mot est devenu nom propre
pour une foule de maisons et de lieux où cette industrie
ne s'exerce plus, mais où elle existait autrefois.
Dér. de Bégu.
Bègue, bèguo, a.Jj. Bègue, qui bégaie.
Dér. du gaul. Bec, d'où le lat. heccus.
Bégui, s. m. Dim. Béguine. Béguin, bonnet d'enfant de
naissance ; têtière ou coiffe de toile, qu'on attache sous le
menton au moyen d'une bride ; béguin en velours ou en
soie qu'on leur met un peu plus tard par-dessus la têtière.
— L'a prés ûou bégui, lou quilara âou couïssi, c'est un
défaut qu'il d pris au berceau et qu'il ne quittera qu'au
tombeau.
Ce mot, comme son correspondant français, dérive évi-
demment du mol Béguine, parce que sans doute les reli-
gieuses de ce nom portaient une coiffure à peu près sem-
blable dans l'origine. Elles formaient un ordre fort ancien
et qui est resté fort populaire en Belgique, où elles exer-
çaient une œuvre de miséricorde. Ce nom, d'après un
auteur anglais, vient de la première fondatrice de l'ordre,
Bégué, fdle de Pépin de Landon, mère de Pépin d'Héristal
et grand'mère de Charles-Martel, qui fonda la première
maison à Gand, au VIH siècle.
D'autres le font dériver d'un chanoine de Liège, nommé
Laml)erl dit Le Bègue, qui aurait fondé cet ordre en 1177.
A cette époque les surnoms avaient plus d'importance que
de nos jours, ils devenaient l'appellation vulgaire, et il
n'est pas étonnant que ce Le Bègue ait pu donner son
nom à un monastère de sa fondation.
Un mot allemand pourrait aussi intervenir dans l'ôtym.
C'est Beginn, commencement, origine; bonnet qu'on met
aux enfants nouveau-nés.
Bèjàoune, s. m. Béjaune. Les deux acceptions du fr.
au prop. et au fig. ne sont point admises en lang. Cette
expression n'a cours que dans cette phrase : Paga lou
Mjâoune, payer la bienvenue, la mise hors de page, la
sortie du noviciat.
Bel, bèlo, adj., au plur. BUes, hèlo) ; dim. Bêlé, péjor.
Bélai. Grand ; gros ; vaste. — Gardoù es bel, la rivière a
grossi. .S'és fa bit, il a grandi. On dit aussi : Es un bel
éfan, c'est un l)cl enfant; mais ce n'est que par euphonie,
bel est pris là pour bèou, teau.
Dér. du lat. Bellus, beau, bien fait. Il parait que dans
les premiers âges de notre idiome, Ages éminemment guer-
riers, la l)eaut« était inséparable d'une belle taille. Bellus
était évidemment la qualité d'un homme fort et propre à
BEL
la guerre, ieWwm.En fr. encore, onnc dira pas liel homme,
ni belle femme, d'un individu mignon et de courte sta-
ture; c'est pour ce dernier qu'a été inventé le mot :
joli.
Bèl-Bèl, locution au masc. qui n'est employée que
comme suit : faire lou bèl-bèl, flagorner ; accabler de pré-
venances; flatter l'amour-propre; faire tout Iwau à un
chien; montrer une friandise ou un joujou à un enfant,
sans vouloir le lui laisser prendre.
Bùl est pris ici pour synonyme de beau.
Bélèou, adv. Peut-être; il est jwssible. — Que dit
béléou, n'es j)as ségu, dire peut-être, n'est pas allîrmer,
donner ni avoir l'assurance.
Bêles (A), à bèlos, adv. Un par un; un après l'autre.
— A bêles sôous, un sou après l'autre. A bèlos fés, à plu-
sieurs reprises. A bèlos pal ados, par pelletées. A bèlos
avéngudos, par accès, par crises. A bèlos troupélados, par
pelotons. A bêles flos, un morceau après l'autre, par petits
morceaux. A hèles us, un par un. A bêles dous, deux à
deux, deux par deux. A bêles dès, à bêles douje, par
dizaine, par douzaine; dix, douze à la fois. A bèlos houros,
parfois, quelquefois.
Bélétos, s. f. pi. Petites pièces de monnaie; argent
mignon. — Foudra bé qu'apounche sas bélétos, il faudra
bien qu'il délie les cordons de sa bourse.
Dér. de Bèou.
Bélicoquo, s. f., ou Piquo-poulo. Fruit du micocou-
lier, qui est une jxîtite baie à noyau, noire quand elle est
mure, sèche, douceâtre, et qui n'a presque qu'une peau
ridée sur son noyau ; on en fait une tisane béchique.
Bélicouquiè, s. m., ou Fanabrégou, ou Piquo-pouïè.
Micocoulier, Celtis austral is, Linn., arbre de la fa m. des
Amen lacées, qui vient très-grand et très-vieux. Son lx)is,
qui a les fdires longues, fortes et flexibles, compacte et
dur, est très-cstimô pour le charronnage. Dans les Ce ven-
ues, on le recépait camme les saules, et de ses pousses,
quand elles étaient arrivées h l'itge de trois ans, on faisait
des cercles de tonneau, qui duraient fort longtemps. Cette
industrie s'est perdue, soit par la rareté de ce bois que les
défrichements ont singulièrement éclairci, soit par l'emploi
très-répandu des cercles en fer laminé. Cet arbre est soi-
gneusement ménagé en taillis à Sauve (Gard), où l'on on
fabrique des fourches ii trois becs, les seules dont on se
serve dans tout le pays pour remuer et tourner les pailles
et les foins.
Béloïo, s. f. Bijou, parure, alliquets de femme.
Dér. de Bèou.
Bèlos (Dé), s. f. pi. Terme de jeu. Ne se dit que dans
la phrase : Faite dé bèlos, parier en dehors du jeu prin-
cipal, comme les paris de la galerie à l'écarté. C'est sur-
tout au jeu de dés, au passe-dix, que ce terme était em-
ployé. Ce jeu. qui était fort usité parmi les gamins, il y a
quarante ou cinquante ans, s'établissait en plein air et sur
les places. On formait une masse ou poule des mises de
BEN
BEN
103
tous les joueurs, el celui (lui aiiiciiait le plus gros jKiiut on
la plus forlc rafle, gagiuiit la poule. Mais le joueur le plus
lianli, ou (|ui voulait jouer plus gros jeu, au inoiueiU où il
avait les dés en main, i)roposait à la galerie de parier
qu'il ne délasserait pas tel iioiubre ; s'il dépassait ce nombre,
il avait \Ktdn. C'est ce pari d'extra qu'on nomaialt</é bèlos.
Dér. de Bèou.
Béloun, n. pr. Dim. Bélouné. C'est un dini. du nom
de foniiiifi Isabelle ou £lisal)elb. — Voy. BaMou.
Bélouso, J. f. Blouse, un des six trous du billard. —
fichu din la bélouso, blouser; duper; tromper ; mettre
dans l'embarras.
Emp. au fr.
Bélugo, s. f. Dim. Bélugùéto. Bluette, étincelle qui
s'ôcbai>|K,' du feu. — Es (oui Jià. tout bélugo, il est vif
comme la poudre, il est plein de zélé et d'ardeur.
Dér. du lat. Lux, lumière, précédé de la particule
rédupl. bé.
Bélugué, éto, adj. Vif; léger ; alerte, éveillé ; émous-
lillé ; fringant ; sijmillant.
Béluguéja, v. Elinœler ; pétiller ; briller ; éclater. —
Tout li bétuijuéjo, il est pétillant de vivacité ou d'esprit.
io fièïo couménço dé béluguéja, les Ixjurgcons des mùriei's
conunenwnt à poindre el fi prendre un reflet doré.
Dér. de Bélugo.
Bèmi, bèmio, adj. Péjor. Bémias. Dohèmc, bohémien,
truand, qu'on appelle Gitanos en Espagne, Zingari en
Italie, Zigemier en Allemagne et Gypsi eu Angleterre ; au
moyen âge, le fr. les nonnnait Bernes ou Besmes; jwuplade
errante, triliu vagabonde, que chaque peuple fait sortir
d'une origine dilTércnto. Ceux que l'on voit dans notre
pays, nous arrivent des frontières de l'Espagne et du Bous-
sillon. Aussi les appelle-t-on vulgairement Catalans. Ils se
rendent par biuulcs à nos foires, vendant des unes et des
nmles, disant la Ixonne aventure, et exerçant souvent des
industries moins légales. Us marchent ainsi en tribu com-
posée d'hommes, de femmes et d'enfants, ne logent jamais
dans les hôtelleries, mais bivouaquent sur une grève.
campent sur les bords d'un chemin ou sous l'arche d'un
pont, se nourrissant d'animaux morts ou de débris de
légumes qu'ils ramassent par les rues. Ils sont très-friands
de chats.
On dit adjectivement Bèmi, d'un homme de mauvaise
mine ou de mauvaise foi. — Franc coumo un bèmi, franc
comme un Bohème : c'est le me plus ultra de cette contre-
vérité.
Sous la Ligue, on a donné le nom de Bème au meur-
trier de l'amiral de Coligiiy, qui était de la Bohème et se
nonnnait Charles Dianowitz. — Voy. Bigoro [bando dé).
Corrupt. do Bohème. — Voy. Catalan.
Bémian, ano, ou ando, ailj. Bohémien. — Voy. Bèmi.
Bénda, f. Bander, envelopjwr d'une bande ; lier avec
une bande. — Bénda uno rodo, embattre ime roue.
Dér. deBéndo.
Béndaje, ». m. Bandage de hernie, exclusivement. Le»
aulivs acceptions s'arrangent avec Béndo, qui suit.
Béndèoa, t. m. Dim. Béndèlé, {«^j. Béndélas. Bandeau;
bande pour ceindre le front ou pour couvrir les yeux ;
plus spécialement bande de toile, bordée d'une petite den-
telle, dont les fcnnnes du peuple se servaient autrefois pour
se serrer la tète el les cheveux par-dessous la coiffe, et
qu'on met encore aux enfants au maillot sous leur Wguin.
Diia. de Béndo.
Béndo, j. f. Bande d'étoffe , pièce de linge, plus longue
que large, destinée à entourer quelque partie du corps, une
pjaie, un membre; bande de fer pour renforcer les jantes
d'une roue; ])andagc de roue.
Le railical de ce mot se trouve dans beaucoup de lan-
gues : en persan, bend, lien ; en allom. anc, bund, aujour-
d'hui benden, lier, bind , lien; en XaX., pondère, déplier,
étendre; dans la bass. lat. bandum, bandellus ; d'où le
roman benda.
Bénédiciou, s. f. Bénédiction, cérémonie par laquelle
on liénit ; vœux favorables; abondance, bienfaits du ciel.
— Ana à la bénédiciou, aller au salut. Plôou qu'es uno
bénédiciou, il pleut à seaux. Gn'avié qu'èro uno bénédiciou,
il y en avait à foison.
Dér. du lat. Benedictio.
Bénézé, n. pr. d'homme, fort répandu daus ce pays ;
au fém. Bénézéto. C'est un dim. de Bénouè, Benoit, et
tous, en lang. et en fr., dér. du lat. Benedictus, liéni.
Bénhuroùs, ouso, adj. Dim. Bénhurousé. Un bienheu-
reux, un saint-homme, lut innocent ; une personne sans
malice, sans vice. — Voy. Bénura.
Dér. de Bé et Huroits.
Béni, V. Bénir, consacrer au culte divin ; donner la
Ijénédiction ; louer, remercier ; faire prospérer. — Diou té
bénisque! Dieu te bénisse ! expression qu'on adresse à celui
qui éternue. Cierge béni, cierge liénit. Aïgo-bénito, eau-
bénite. Dé pan-bén), du pain-bcnit.
Dér. du lat. Benedicere.
Bénissiadîou ! interj. Littéralement : que Dieu soit
béni ! Merci ! Grâces à Dieu !
Dér. de Béni, siègue contracté en sia, et Diou.
Bénitiè, s. m. Bénitier, vase à l'eau-bénite, placé à
l'entrée des églises catholiques, ou au chevet de lits, ou
au-dessus d'un prie-Dieu.
Dér. de Béni.
Bénobre, ». m. n. pr. de lieu, ou Vénobre. Vézenobres,
chef-lieu de canton dans l'arrondissement d'Alais.
La tradition rapporte que le vieux château de Véze-
nobres, dont il ne reste plus que quelques pans de murs,
et dans l'enceinte duquel est bâtie la plus grande partie du
haut village, fut attaqué ])ar les Sarrazins après leur
déroute à Poitiers, due à Charles-Martel. C'était sans doute
une forte position, qu'ils convoitaient pour un de leurs
postes de défense. Ils en furent repoussés par les habitants,
qui délivrèrent par là tout le paysd'iui semblable voisinage.
104
BEN
BEN
Une autre tradition, moins glorieuse, est rapportée par
l'iiistorien Ménard. A la fin du X1V« siècle, pendant les
troubles de la minorité de Charles VI, une troupe de
rebelles des environs de Nimes, excédés sans doute du
poids des impôts et provoqués par le désordre des guerres
civiles, avait pris les armes et commettait toutes sortes de
brigandages chez les nobles et les riches. Ces bandes étaient
désignées sous le nom de Touchis. On prétend que les
habitants de Vézenobres favorisèrent ces pillards; peut-
être ne firent-ils que leur donner asile à contre-cœur ; tou-
jours est-il que le surnom de Touchi dé Bénobre leur fut
donné en souvenir de ces faits. Ce sobriquet est venu
grossir ainsi la nomenclature de surnoms, d'ordinaire
peu flatteurs, que les localités rivales et voisines se don-
naient entre elles au moyen âge.
Le nom de Bénobre est arrivé au languedocien après de
nombreuses variantes. Le latin du moyen âge l'écrit dans
un titre de 1 050 Yezenobrium ; en 1 052 et \ 054 Vinedo-
brium ; en 1 060 Yidanobre et Vinadobre dans le môme
acte ; en 1 077 Vinezobre ; en 1 1 00 Yedenobrium ; en H 25
et 1128 Yezenobre ; en 1142 Yedenobrium; en 1144 et
1150 Yesenobre ; en 1151 et 1162 Yedenobrium; en 1166
Yicenobrium; en 1167 Yedenobrium; en 1174 Yenedo-
brium ; en 1 1 93 Yedenobre , en 1 21 9 Yicenobrium et Yeze-
nobrium, sans parler des variations plus récentes.
Sur ce thème l'étymologio ne se montre pas clairement.
Le savant Ménard a voulu la voir dans le mot Yirinn, un
des noms de lieux du territoire des Volces Arécomiques,
inscrit sur un petit piédestal antique conservé au musée
de Nimes. Ce nom aurait été abrégé à cause des dimen-
sions du monument ; mais restitué en son entier, il serait
Virinno on Virinnum , se rapprochant l3eauC;0up des
formes que nous citons. L'interprétation a été contestée.
Cependant qu'on nous permette une analogie, si éloignée
qu'on voudra. La ville de Bergues, arrondissement de
Dunkerque (Nord), était anciennement dénommée Gruono-
Berg, Groenberg, nom tudesque composé de groen, gruen,
vert, et berg, liauteur, éminence, et le latin le rendait par
viridis mont. Soit à cause de cette origine, soit à cause de
la venue de saint VVinoc, qui fit en ce lieu bâtir une église,
le nom dans les chartes latines se transforma en celui de
Winociberga. Le rapprochement est facile à saisir : ici la
forme tudesque domine ; pour nous, c'est la celtique qui
survit ; mais la traduction latine est de nature à faire im-
pression et a bien pu se conserver dans une inscription de
la province romaine, en adoptant le mot Yirinn qui s'est
si bien altéré dans la suite.
Quoi qu'il en soit, les chartes disent Yieeno, Yideno,
Yidano, Yeceno, et ajoutent le radical bri, rendu par le
neutre lat. brium ou bre. Bri est caractéristique de la
situation, comme suffixe ; il signifie hauteur, colline, élé-
vation. Yicœn est traduit dans Du Cange par habitatio,
domus, demeure, maison, et il ajoute : Saxonibus vicœn
eu pagut, vicus; en saxon viccen veut dire bourg, village.
Le nom entier signifierait par conséquent demeure élevée,
tourg ou village, sur une colline : ce qui est exact pour
Bénobre.
Le glossaire de Du Cange peut fournir une autre indica-
tion. On y trouve le mot YinobUum, — et la ressemblance
avec notre nom latin n'est pas contestable, — pour vigne,
champ planté ou propre à être planté de vignes, dont le
fr. a fait vignoble. Puis, et à l'article suivant : Yinobre,
eodem intelleclu, avec le môme sens. Il y a concordance.
La dernière forme surtout a le mérite de reproduire le
mot actuel sans le décomposer : on sait en effet que les
deux lettres Y et B se substituent volontiers l'une à l'autre.
L'application dans les trois modes, soit éminence verte,
verdoyante, soit village sur une hauteur, soit lieu planté
de vignes, est du reste également juste.
Encore une interprétation, qui pour être la dernière
n'est peut-être pas la bonne, mais qui prouvera au moins
que nous avons cherché, si nous n'avons pas trouvé.
Sur le monument du musée de Nimes, parmi les noms
inscrits, se trouve celui de Briginn, abrégé plus tard eu
Brinno, qui est devenu le Brignon actuel. Briginn, à
l'époque la plus ancienne, était une localité, centre de
population sans doute assez important dans un certain
rayon. Une voie romaine, celle de Nemausus à Gabalum,
n'était pas éloignée de Briginn, Brinno, et venait traver-
ser le Gardon à Ners, en vue du village actuel de Véze-
nobres. Quand ce village se fonda, peut-être à l'époque
gallo-romaine, aurait-on voulu que son nom, tout latin
dans sa première partie, traduisit ou exprimât sa situation
dans le voisinage de l'oppidum le plus considérable aloi's
de la contrée, vicinus, vicino, de Briginn, Brinno, qui
nous est parvenu avec les abréviations et les altérations
d'usage. Cette conjecture vient de bien loin, de si loin
même, qu'on peut sans lui faire le moindre tort, préférer
les autres; mais elle n'était pas à négliger.
Bénoù, s. m. Auge, sorte de mangeoire pour les brebis.
Elle se compose de deux planches posées de champ et réu-
nies par des chevilles d'environ lui pied de longueur, ce
qui laisse entre elles un vide de même dimension, qu'on
remplit de fourrage ou de regain. Cette mangeoire, ainsi
disposée, a pour objet d'empêcher les brebis de mettre les
pieds dedans et de fouler et de gâter leur provende.
Dér. du celt. Benn, benne.
Bénoubrén, énquo, adj. , ou Vénoubrén , énquo.
Habitant do Vézenobres; qui appartient à Vézenobres.
Bènouri, s. m., ou Fourniguiè, ou Pi-col-dé-sèr.
Torcol, torcou, turcot ; torcol ordinaire, Yunx torquilla,
Linn. Oiseau de l'ordre des Grimpeurs, de la fam. des
Cunéirostres. Cet oiseau, qui est une espèce de pie, s'ac-
croche aux troncs d'arbres et se pose sur les grosses bran-
ches ; mais il préfère se tenir à terre où il cherche des
fourmilières. Sa langue est longue, rugueuse et gluante;
il l'introduit bravement dans les trous de fourmis, dans
l'interstice qui se forme entre l'arbre et l'écorce ; les four-
BÈO
BÉO
105
mis, qui y liabitent, grimpent sur cette langue, croyant y
trouver pâture; alors l'oiseau-chasseur la retire et avale
ses ennemis. Le torcol est curieux à voir de près : il
retourne sa tête et son cou par des mouvements onduleux
semblables à ceux des serpents ; il ouvre sa queue en
éventail, tourne ses yeux et redresse les plumes du haut
de sa tête. (1 devient extrêmement gras aux premières
pluies de l'automne. Les diverses habitudes de cet oiseau
lui ont valu ses trois noms languedociens ; il est pourtant
plus habituellement dénommé par le premier. — Voy.
Fourniguié, et Pi-col-dé-tèr .
La prononciation du nom de cet oiseau est l'indice de
son étymologie. La première syllabe est en effet fortement
sentie par l'accent grave sur Vè. ce qui lui donne aussitôt
sa filiation de Bè, bec, faisant allusion à la manière ingé-
nieuse que ce volatile emploie pour se procurer une pro-
vende de son goût. Si un accent aigu se fût rencontré sur
le mot, sa signification eût été changée et il aurait voulu
dire : bien nourri. Ce qui était moins pittoresque et se
serait appliciué à bien d'autres. Le caractère et la descrip-
tion exacte du volatile sont bien mieux représentés par la
prononciation et l'orthographe de son nom.
Bénura, ado, «'0'- et pari. pass. Heureux, bienheureux;
favorisé du Ciel ; à qui tout réussit.
Bénura comme verbe, signifiant rendre heureux, est peu
usité, quoique le terme soit bien fait et pittoresque. Mais
dans le sens de l'adj. ou du part, pas., il est élégant et
expressif. — Ta bénurado planéto, ton heureux destin.
Diou l'a bénura, Dieu la béni, l'a rendu heureux.
Ce mot, d'après Sauvages, parait être formé du lat. Bona
et //ora, qui a une bonne heure ou qui l'a eue. On sait en
effet que les anciens distinguaient les heures favorables et
les heures funestes ; traditions qui se sont conservées dans
le vieux mut fr. keur, et qui sont passées dans ceux de bon-
heur et malheur, contraction de bonne heure et maie heure.
A ce titre le lang. devrait écrire notre mot avec un h,
comme nous avons fait pour Bénhuroùs, qui a la môme
origine; mais nous supprimons ici la lettre parasite, qui
n'est qu'étymologique, et dont le retranchement ne nuit en
rien à la prononciation , par raison de nos règles d'ortho-
graphe, et jwur avoir d'ailleurs une variété de plus con-
forme h notre mut à la malouro, où elle ne parait pas
d'avantage.
Bèou, adj. m. sans fém. Beau. — Faï bèou, il fait
beau. A bèou faire, il a beau faire.
Ce mot, dans sa formation, dans sa signification natu-
relle et dans toutes ses acceptions elliptiques, est d'origine
française ; mémo einplui, mêmes acwptions.
Béoucaïre, i. m. n. pr. de lieu. Beaucaire, ville renom-
mée par sa foire du 22 juillet. Aussi son nom est-il devenu,
iwur un vaste rayon de pays autour de lui, une date, un point
important dans l'année. Autrefois les marchands en détail,
les artisans, les fournisseurs do toute espèce, allaient faire
_eurs achats en foire de Beaucaire, et pour cela ils avaient
besoin de réaliser les crédits qu'ils avaient faits dans
l'année. Quoique aujourd'hui les boutiques et magasins
se fournissent ailleurs qu'à Beaucaire, l'nsage d'arrêter les
comptes des fournitures à crédit et de réclamer le montant
des mémoires s'est conservé. Aussi pleut-il à cette époque
ce qu'on appelle les comptes de Beaucaire : c'est un mau-
vais quart d'heure pour les débiteurs et un temps fort
occupé pour M.M. les huissiers. — Pér Béoucaïre, ou à
Béoucaïre à l'époque de la foire de Beaucaire, k la mi-
juillet.
Béoucaïre remonte aux temps les plus anciens. Le géogra-
phe Strabon l'appelle (KY^fvov, Vfipvjv et l'ipvjv, que les
auteurs latins Pline, Sidoine Apollinaire, les Tables théodo-
siennes traduisent par Vgemum ou Ugertto;que l'Anonymede
Ravenne écrit Vgurnum: qui devint au VI* siècle Catirum
Odjerno, et dans la bass. lat. Catirum de Vgemo, en
4020; Belcayra, en Hii ; Bellicadrum. en <460. H78,
4209; Belloquadra, Bellumquadrum, Belli-quadrum, en
4 226 et plus tard ; en même temps que la langue vulgaire
disait, en 4425, Belcaire; en 4 294, Bauquaire; en 4302.
Bieuchayre, et en 4435, Beleayre; ce qui a donné enfin le
nom actuel.
La première partie du mot, en lang., en fr. et dans la
latinité du moyen <tge, ne présente aucune diflicuitô. La
seconde partie cayra, quadra, quadrum ou cadrum, est une
alteration on une syncope du substantif de la bass. lat.
cité par Du Cange, quadraria, quadrataria. Cayra a fait
directement caire, comme quadra et quadrum, dérivant de
quadraria OU quadralaria , en lat. lapidieina, le tout a
produit carrière, en fr. L'aflinite est incontestable ; et tous
ces dérivés descendent d'un primitif commun, le vieux
mot celtique cair, pierre, qui se retrouve du reste dans
une infinité de noms locaux. Nous avons dans nos envi-
rons, en grand nombre, /ou» Caïrolt, comme désignation
de quartiers pierreux, ou de carrières de pierres communes.
La liste serait longue des lieux ayant la même origine d'ap-
pellation : Cayrac et Cayrol, dans l'Aveyron; Cayres
(Haute-Loire); Cayrols (Cantal); Carole (Gers); Carrole
(Hautes-Pyrénées) ; Carolles (Manche) ; Charolles (Saône-
et-Loire ; Queyrac (Gironde) ; Queyras (Hautes-Alpes) ;
Caralp (Ariége) ; Carrouge et Carouge (Orne, Seine-et-Oise,
Suisse) ; Cayrouse (Aveyron) ; Qniers (Seine-et-Marne) ;
Carrare, en Italie, et autres.
Sauf tout le respect dû à une opinion assez accréditée,
qui voudrait que le nom de BMiquadrum ou Bellumqua-
drum eût ëte donné à Beaucaire à cause d'une tour carrée
qui dominait l'emplacement sur lequel la ville s'est cons-
truite, l'étymologie tirée du gaulois cair nous parait préfé-
rable et plus naturelle. D'ailleurs la même raison appella-
tive devrait se rencontrer dans les homonymes assez nom-
breux ; et l'on n'a pas remarqué des traces de la moindre
tour de forme carrée à Belcaire (Aude), arrondissement de
Limoux ; à Beaucaire (Aveyron), commune Noviale ; à
Beaucaire (Charente), commune Saint-Amand-de-Nouère ;
t*
106
BEO
BEO
i Beaucaire (Cher), commune Herry; à Beaucaire (Gers),
commune Valence, et autres encore ; non plus qu'à Bel-
caire (Dordogne) ; à Beilicaire, province de Gerona, et à
Bellicayre, province de Lerida (Espagne). Ce qui commence
à donner beaucoup de crédit à noire version.
Mais il y a plus : le nom grec de Béoucaïre latinisé me
semble un argument nouveau. Le lieu désigné par Strabon
existait avant lui et était connu. On a dit que sa forme
celtique devait être Wern ou Guern, qui veut dire en
gallois et en bas-breton : aune, aunaie, lieu planté d'aunes;
vèr, lang. L'application à un castrum sur un grand fleuve
est juste ; mais la dérivation serait-elle moins exacte, si
l'on admettait que le celtique cair a été le parrain du Tép-
vov de Strabon, qui se trouvait sans doute précédé d'une
épithète significative, exprimant en gaulois ce que dit le
bellum de la bass. lat., Béoudn languedocien, et que, dans
la variante ÏYÉpvov, Strabon aurait traduite et exprimée?
Ainsi, la première syllabe de Ugernum on Vgerno, lat., ne
serait-elle pas la diphlhongue adverbe Eu, bien, reproduite
euphoniquement par le latin u ? La prononciation du y
grec et du g latin devant « est dure et se rapproche sen-
siblement de celle du celtique : ce qui ne met pas à une
grande distance cair et guer. Le gaulois a encore cairn,
appliqué aux monuments de pierre, dolmens, qui introduit
une lettre de plus dans la ressemblance graphique des mots.
Mais une permutation identique se fait remarquer sur le
nom d'un ancien oppidum purement celtique, signalé dans
le savant ouvrage de M. Germer-Durand, Diction, lopogr.
La petite commune de Garn, ancien évêcbé d'Uzès, aux
limites du Vivarais, a conservé intacts sa forme et son
nom celtique, Cairn. Le g s'est substitué au e, inverse-
ment à ce qui est arrivé dans le roman pour Belcaire, qui
reprend sa forme primitive ; mais par un procédé sem-
blable à celui employé par le latin et le grec, Ugernum,
Y-cépvov : preuve que nos déductions sont vraisemblables.
La terminaison en o, si commune dans les appellations
celtiques, ne doit pas être négligée. On sait que nos pères
les Gallo-Romains employaient les deux langues, celtique
et romaine, et quand, au moyen âge, on voulut désigner
l'antique localit«5, la traduction devint précise et fidèle en
substituant à ïy^pvov, le mot Belcayra, Bellicadrum, Bel-
lumquadrum.
Tous ces noms seraient donc synonymes; mieux que
cela, ce serait le môme nom, sous différentes formes, grec-
que, latine, languedocienne et française. L'antiquité qu'on
attribue à Beaucaire, les belles carrières qui touchent la
ville, et qui ont été connues dès les premiers âges, ne s'op-
posent point à cette origine de son appellation et semblent
la justifier. Le géographe Strabon a traduit autant que le
grec le permettait, sans trahir le vieux gaulois.
Béou-l'oli, s. m., ou Damo, Suito, Nichoulo. Effraie;
frésaie, chouette-effraie, Strix flammea , Linn., de l'ordre
des Rapaces et de la fam. des Nocturnes. Cet oiseau de
proie nocturne, qui atteint jusqu'à 3o centimètres de lon-
gueur, a le dessus du corps jaunâtre, onde de gris et de
brun, parsemé d'une multitude de petits points blancs ; le
dessous est d'un blanc soyeux, éclatant. 11 habite les vieux
édifices, les clochers et les toits des églises. On croit vul-
gairement qu'il y entre la nuit pour boire l'huile des lam-
pes; de là son nom de Béou-l'oli. Par celui de Suito sous
lequel il est connu aussi, on a sans doute essayé de rendre
le soufflement ou sifflement qu'il pousse pendant la nuit.
Il a la réputation d'être l'oiseau de mauvais augure par
excellence. — Voy. Damo, Suito, Nichoulo.
Béoure, v. Boire ; avaler un liquide, l'absorber. —
Aquel home béou, cet homme est adonné à la boisson, à
l'ivrognerie. Mous soutes bévou, mes souliers laissent trans-
pirer l'eau. Béoure dos iils, manger des yeux, couver du
regard. Béoure coumo un sablas, boire beaucoup, sans fin,
comme un champ de sable, qui absorbe l'eau et la pluie
en telle quantité qu'elle y tombe. Y-a pas qu'un grand
béoure que pogue té tira d'aqui, ce n'est qu'à force de
boire de la tisane que tu peux te tirer de cette maladie.
Mais les ivrognes ou les plaisants qui veulent les imiter
dans leurs propos, tournent la chose dans le sens du vin,
et c'est le vin qu'ils conseillent, quand ils adressent cette
phrase à ceux qui se plaignent d'un malaise. Jmu béoure
U lévo pas lou manja, la soif ne lui Ole pas la faim, boire
ne l'empêche de manger. Un ase i béouriè, le cas n'est pas
difficile, un âne s'en tirerait. Fénno que noun manjo, lou
béoure la mantén, à petit-manger, bien boire. Béoure pûou
et souvén, boire peu et souvent : bonne hygiène.
On dit d'un homme qui s'est ruiné : Ou a pas tout
manja, n'a bé bégu dé p.às, il n'a pas mangé tout son
bien, il en a bu une partie. Aquélo aigo se béou, cette
source se perd dans la terre ou dans le sable. Béoure lout
cos, endurer les coups sans se plaindre. Crésès aquo et
bévès d'aïgo, croyez cela et buvez de l'eau par-dessus,
phr. prvb. pour dire que vous ne croyez pas un mot de ce
que l'on raconte, ou que ce mensonge est difficile à avaler
et qu'il faut boire pour le faire descendre dans le gosier.
C'est dans le môme sens qu'on dit d'un hâbleur : Faï-lou
béoure, fais-le boire, pour que son mensonge ne s'arrête
pas au gosier. Las lèros an prou bégu, les champs sont
suffisamment abreuvés. Faire un béoure, faire un temps de
repos pour les journaliers, pendant lequel ils vont boire
un coup à leur gourde pour reprendre haleine. Il ne faut
pas confondre un béoure avec un repas, un repas : le repas
est un temps déterminé par les usages, où les travailleurs
mangent commodément assis ; lou béoure n'est qu'un
simple temps d'arrêt, pendant letjuel ils cassent simple-
ment une croûte et boivent un coup. Ce temps est de
durée arbitraire, et soumis au plus ou moins de zèle de
l'ouvrier, ou au plus ou moins de sévérité du chef d'ate-
lier, ou baïle. Quant se faï dé béoures d'aquésto sésoù?
combien doit-on faire de poses au travail dans cette
saison ?
Dans cette acception, lou béoure est subst. maso. Il
BEQ
BER
107
signifie encore : le boire, le liquide que l'on boit; la ration
de breuvage aux animaux , mais dans ce dernier sens on
emploie : Abéoure. — Lou béoure et tou manja, le boire et
le manger. Aqub mé lévo lou béoure et lou manja, cette
émotion, cette nouvelle m'a cnnpè la soif et l'appétit.
Dér. du lat. Bibere. En ital. Bevere, boire.
Béouta, ». f. Beauté, qualité do ce qui rend aimable ou
adiniralile, au physi(|ue et au moral. — Es pa'no béouta,
ce n'est pas une beauté.
Ernp. au fr.
Béqna, v' Becqueter; mordre avec le bec; battre à
coups de bec; donner des coups de bec; manger seul, en
parlant d'un oiseau ou d'un poussin ; brouter ; mordre à
l'hameçon; avaler crédulement un mensonge. — Aquél
pastéroù couménço à béqua, ce petit moineau commence à
manger seul. Lou péusoù bèquo pat, le poisson ne mord
pas. rouf Inu bdquo, tout le monde le dupe, le houspille;
tout le monde l'accuse ; se moque de lui : on l'accable i
coups de bec. Lout faguère toutes béqua, je leur fis avaler
à tous cette bourde.
Dér. de Bi, bec.
Béqnado, 5. f. Dim. Béquadéto. Becquée, pîktée que les
oiseaux portent à leurs petits dans le nid ; coup de bec ;
raillerie ; sarcasme, insulte. — Espéra la béquado, attendre
la becquée; attendre que la manne tombe du ciel ; ne se
donner aucune peine, aucun souci, pour obtenir ce qu'on
désire.
Dér. de Bi, bec.
Béquaduro, ». f. Blessure causée par un coup de bec;
accroc; déchirure ou piqûre causée par un coup de bec oti
par quelque chose de pointu.
Dér. de Bè, bec.
Béquaje, ». m. Herbage d'automne, qu'on fait brouter.
C'est l'herbe dernière qui pousse dans un pré, après en
avoir enlevé le foin et le regain.
Dér. de Béqua.
Béquo-figo , ». m. Becfigue, oiseau du genre gobe-
mouche, Motacilla ficedula, d'après Linn. ; Muscicapa lue-
tuosa , suivant Temm. Le becfigue a le dessus du corps
noir, le front et toutes les parties inférieures blanches ; la
queue et les ailes noires ; celles-ci ont leur couverture blan-
che. Arrivé en Franco vers la fin d'avril, il repart dans les
premiers jours de septembre. D'après l'ornithologie mo-
derne, il se nourrit de mouches et d'autres petits insectes
ailés, qu'il enlève de dessus les feuilles et les fruits mûrs;
aussi la science l'a dénommé Gobe-moucho. Le vulgaire, en
le voyant fréquenter de préférence nos figuiers, car c'est
là qu'il fait la chasse la plus abondante, a cru qu'il se
nourrissait do leurs fruits et lui a donné le nom de Bèquo-
figo. Les latins, qui on avaient la même opinion, l'appe-
laient Ficerlula. Peut-être ce gobe-mouche, en becquetant
la figue pour y saisir sa proie vivante, se laisse-t-il aller à
goûter un pou du fruit ot mérite-t-il ainsi ses divers noms ;
en tous cas, dans quelque genre ou famille qu'on le range.
son nom est évidemment un emprunt dn fr. au langued.
La figue est trop un fruit du Midi pour ne l'avoir pas ins-
piré ; Bee^gue, double sul)st. fr., ne signifierait rien s'il
n'était la traduction dn verbe et du régime employés par
la langue d'Oc. — Orat eoumo un bèquo-figo, gras comme
un becfigue. Sa chair est en effet très-délicate et très-esti-
mée. Un grand professeur en gastronomie, Brillât-Savarin,
a dit : « Parmi les petits oiseaux, le premier, par ordre
d'excellence, est sans contredit le becfigue ; si cet oiseau
privilégié était de la grosseur d'un faisan, on le paierait
certainement à l'égal d'un «rpent de terre. >
Bèqnon, ». m. dimin. Baiser, en style mignard et
enfantin, comme on dit en fr. famil. Bécot.
Dér. de Bequa, becqueter.
Bérbéqnin, t. m. Villebrequin, outil de menuisier, qui,
au moyen d'une mèche, sert à faire des trous en emportant
la matière qu'il traverse.
Formé probablement de Vira, tonmer, et de bréquin,
nom ancien de la mèche, du lat. Veru, veruum.
Béré, ». m. Berret ; espèce de bonnet d'enfant, en ve-
lours ou en soie, coupé à côtes de melon, qu'on attache
sous le menton ; bonnet plat et tricoté des paysans du
Bôam. — Voy. Béréto.
Dér. du lat. Birrut on birrum, nom d'une espèce de
coiffure en usage chez les anciens ; d'où la bass. lat. bar-
retum ou birretum, berret, barelte ; en esp. birreta; en
ital. barreta.
Bérénguèri, ». m. nom pr. d'un terroir d'Alais, près
la route d'Alais à Nimes, dit Bérénguèri, que des archéo-
logues, d'après un passage de Sidoine Apollinaire, pré-
tendent être Yoroangus, habitation d'Apollinaire, voisine
de Prusianus, Brésis aujourd'hui, demeure de Tonanoe
Ferréol, préfet des Gaules an V« siècle.
Béréto, ». f. Bonnet d'enfant ; calotte de prêtre; bonnet
rond et juste à la forme de la tête, tel que la calotte qu'on
voit au thé&tre aux Cassandres, à Bartolo et aux r6les à
manteau de la comédie française et italienne.
Même étym. que Déré ci-dessus.
Bérgadiè, ». m. Brigadier, commandant d'une brigade,
grade de cavalerie on de gendarmerie correspondant à celai
de captral dans l'infanterie.
Emp. au fr.
Bérgado, ». f. Brigade, division d'un corps d'armée;
section de gendarmerie commandée par un bérgadiè. En
gén., troupe, bande armée.
Emp. au fr.
Bérgan, ando, adj., ou Brégan, ando, péjor. Bérgam-
das ou lirégandat. Brigand, voleur de grand chemin ; le
plus souvent, èpithèle injurieuse donnée à celui qui com-
met des vexations ou d'étranges concussions. Souvent en-
core, c'est une sorte d'interjection : O Bérgan/ neutrale-
ment employée; en ce sens, le péj. Bérgandas 1 1&\ surtout
admis.
Dér. du lat. BriganUs, peuples d'Hibemio qui, sous la
108
BER
BER
domination romaine, ravagèrent souvent les provinces sep-
tentrionales de la Grande-Bretagne.
Bérgandaje, a. m., ou Brégandaje. Brigandage; action
violente; volene; concussion.
Même étym. que le préoéd.
Bérgandéja, v., ou Brégandéja. Se livrer au brigan-
dage, dans la double acception, étendue ou restreinte, mais
également peu recominandable.
Bérgè, s. m. Dira. Bérgètré. Berger, pitre, expression
toute française, qu'on ne [wut employer qu'en poésie.
Bergéïreto, t. {., ou Gouache, Bergeronnette, hoche-
queue, lavandière, petit oiseau du genre des becs-fîns ; il
vient se mêler au milieu des troupeaux de moutons, et
mange familièrement avec eux : ce qui lui a valu son
nom. Quant au mot lui-même, c'est du français tout pur
comme le précédent et le suivant, et dans le même ordre
d'idées et d'emploi. Aussi ne devrait-on donner droit de
dlé et de classification qu'à Pastouréléto; car le languedo-
cien n'appelle ses bergers que paitres, ainsi qu'on le voit
dans le mot de meilleur aloi de la bergeronnette, Gala-
pattre.
Voy. Couacho, Galapaslre, Brando-quu'io.
Bérgèïro, i. /". Dim. liérgèïréto. Bergère. — Voy. Bérgè.
Bérigoulo, s. f. Barigoule ; manière d'apprêter les arti-
chauts, qui consiste à les placer crus sur le gril, avec du
sel, du poivre et de l'huile, qu'on introduit dans les inter-
stices des feuilles. C'est un emp. au fr. Barigoule, sauce
bien plus compliquée d'ailleurs que notre bérigoulo.
Bérlénqué, s. m. Jeu d'enfants, qui ne pourrait être
traduit et exprimé en fr. que par le mot lui-môme. Il con-
siste à placer quelques sous ou même des épingles, debout
derrière une petite pierre carrée et mince, posée de champ.
Les joueurs, placés à une certaine distance, lancent chacun
deux palets contre cette pierre; quand ils peuvent la
chasser assez loin pour que l'un de leurs palets soit plus
rapproché que la pierre de l'enjeu ou d'une pièce de cet
enjeu ; l'enjeu ou la partie d'enjeu leur est acquis. Comme
on le voit, le bérlénqué est le premier rudiment du jeu de
bouchon.
Dér. peut-être de Bèrlo, à cause du petit caillou qui
sert de but, ou de ceux avec lesquels on joue.
Bèrlo, s. f. Dim. Bérli, bérléto, péj. Bérlasto. Eclat de
pierre ou de bois , souche d'arbre ébréchée ; grosse branche
morte ; bord d'un vase.
Bérioquo, ». f. Breloque. Ne s'emploie que dans la
phrase : Batre la bérioquo, battre la campagne, divaguer,
déraisonner. La bérioquo, breloque, en terme de théorie
militaire, est la batterie de tambour qui amionce l'heure
des corvées.
Dér. du lat., soit Veriloquium, langage vrai, naïf; parce
que, quand on déraisonne par folie ou par ivresse, on
laisse souvent échapper des vérités qu'il eut été sage de
retenir ; soit de breviloquium, laconisme, langage coupé ;
soit de varia loqui, parler sans suite.
Berna, ». m., n. pr. d'homme; au fém. Bérnudo ; dim.
Bérnade. Bernard. Nom qui a servi de racine à beaucoup
d'autres dans le pays : Bernadèl, Màoubérna, Bernardin,
et la syncope familière de ce dernier : Nadin. — T'a tou-
qua. Berna? J'espère qu'on t'a touché, l'ami? Express,
prvb. qu'on adresse à celui qui vient de recevoir une
correction méritée, ou bien un quolibet piquant qu'il av it
provoqué. Berna din la luno ; ou fait croire aux enfants
que les diverses taches qu'on aperçoit dans la lune, quand
elle est pleine, et qui donnent l'apparence d'une face
humaine, ne sont autre chose que la figure dlin bûcheron,
nommé Berna, que Dieu a placé dans la lune pour le punir
d'avoir fait des fagots un jour de dimanche.
Dér. du lat. Bemardus, formé de l'allem. béer, ours, et
de kart, génie.
Bérna-pésquaîre, s. m., ou Guiràou-Pésquaïre. Héron
cendré, héron ordinaire, Ardea cinerea, Luni., nom com-
mun à plusieurs variétés de héron. Oiseau de l'ordre des
Echassiers et de la fam. des Cultrirostres, remarquable
par la longueur de ses jambes, de son cou et de son liée ;
il vit de pêche et tire de là son nom. Dans nos environs,
on l'appelle Béma-pésquaïre, et dans d'autres localités voi-
sines aussi, Guirdou-pésquaïre. Keste à savoir quel Ber-
nard et quel Guiraud, qui ont toujours été assez nombreux
dans le pays, étaient assez forts pêcheurs devant la langue,
ou assez mal bitis, pour qu'on ait donné leur nom au dis-
gracieux oiseau- jiôcheur, aux si longs pieds et au si long
bec, emmanché d'un si long cou. La Fontaine, qui l'a si
bien peint, ne l'a pas dit et ne le nomme que le héron ;
nous n'en savons certes pas plus que lui. — Voy. Guirdou-
péscaïre.
Béroù, s. m. Dim. Bérouné. Terme de berger, Kobin-
mouton, mouton favori ; celui qui conduit le troupeau ;
petit agneau privé qui mange dans la main.
Dér. du lat. Vervex, mouton.
Béroù, s. m. Ver blanc, qui vit dans les fruits, princi-
palement dans les cerises et dans les pois.
Ce mol parait dérivé du fr. ver, dont il ne serait qu'un
dim. Dans le rom. beron ou berou, ver qu'on trouve dans
les cerises nommées guignes.
Bérouïa, v. Verrouiller; fermer au verrou.
Dér. de Béroul.
Béroul, s. m. Dim. Bérouïé, péjor. Bérouias. Verrou;
fermeture de porte; tige de fer ronde et mobile, glissant
entre des crampons, ou anneaux. En lat. Pessulus. « C'est
de ce mot, dit Sauvages, que certains auteurs font dériver
le nom de Montpellier (Monspessuli), mont ou colline du
verrou, à cause de la célébrité du verrou de l'église de
Saint-Firmin, dans cette ville. »
< Les banqueroutiers y faisaient, dit-on, cession de
biens, en présence des magistrats et du peuple assemblés
un dimanche à l'issue de la messe. Le patient, debout, nu-
pieds et nu-tête, appuyait les deux mains sur le verrou de
l'église, et, dans le moment marqué, il en détachait une
BÉR
BES
lU'J
i
qu'il portait sur son derrière en disant à ses créanciers
d'une voix haute : Pago-té d'aqui, dicton qui a passé en
proverbe. »
11 prétend encore que c'est de là qu'est venu cet autre
dicton : Moustra loa quiou, montrer le derrière, qu'on dit
de ceux qui ont manqué à leurs engagements.
L'anecdote est assez curieuse et peut être vraie ; mais il
est absurde do supposer, comme ces savants auteurs qui ne
sont pas d'ailleurs cités par Sauvages, que de là vient le
nom de Monspessulanus, Montpellier, attendu que ce nom
existait certainement avant l'invention de cet usage, et sur-
tout avant qu'on y parlât le languedocien, tel qu'il est
cité dans la phrase sacramentelle : Pago-té d'aqui. — Voy.
Mounpeïè.
Empourtaras pas lou béroul , tu n'em{)orteras pas la
crémaillère quand tu quitteras cette maison, est une exprès^
sion proverb. fort usitée de nos jours. Lorsqu'un domes-
tique prend vivement l'intérêt de son domaine vis-à-vis
d'un maraudeur, d'un grapilleur, celui-ci l'apostrophe par
cette phrase, comme pour lui dire que sa fidélité ne lui
procurera pas une fortune.
Dér. de Baro, dim. baroul, béroul.
Bérqua, v. Ebrécher; écorner; entailler; édenter.
Dér. de Bèrquo.
Bérquaduro, t./". Brèche ; écornure ; entaille ; l'action
d'ébrécher. — Voy. Bèrquo.
Dér. lio Bèrquo.
Bèrque, bèrquo, adj. Spécialement mouton, brebis ou
chèvre, (jui a jwrdu ses dents.
Bérquièïro, s. (., ou Vérquiéïro, t. f. Dot d'une fille
en la mariant; constitution dotale; bien apporté par la
femme en mariage.
Dér. de la bass. lat. Vercheria.
Bèrquo, ». f. Brèche ; écornure ; entaille; coche.
IKt. do l'allcm. Brechen, rompre, casser, briser.
Bèrquo-dén, adJ. des deux genres. Brèche-dent, à qui
il m.iiKiue une ou plusieurs dents; ne s'applique qu'aux
personnes.
Formé de Bèrquo et de dén.
Bértèlo, s. f. Sangle, courroie, pour soutenir un sac
sur le dos; bretelles pour soutenir les pantalons.
Emp. au fr.
Bértoul, ». m., ou Bértoulo, *. f. Dim. Bériouli, bér-
touléto. Cueilloir, petit panier à anse, fait d'éclisses tres-
sées ; son usage principal est de servir à ramasser des châ-
taignes. — Aquèl castagne frucho bien, las bojo à plén
bértoul, ce châtaignier produit beaucoup, à plein panier.
Formé par corrupt. peut-être de Bridoulo, éclisse, scions
refendus; mais mieux dér. de brett, celt., en lat. lignum,
bois, planche. — Yoy. Bréthmas.
Bértoulado, ». {. Contenu d'un Bértoul, plein un bér-
toul.
Bérugo, ». f. Dim. Béruguéto, péj. Bérugasso. Verrue;
poireau, excroissance dure et indolente, qui vient ordi-
nairement aux mains. — Un remède de bonne fcnmie contre
les verrues consiste à les frotter journellement avec un
bouchon de bourre prise dans un bat. On n'a pas oui dire
que cela ait guéri |)ersonne ; mais comme cela ne saurait
faire empirer le mal, il n'y a aucun inconvénient à conti-
nuer la friction jusqu'à ce qu'elle ait usé la calosité.
Dér. du lat. Verruea, verrue.
Bésàon, ». m. Dim. Bésalé. Canal d'irrigation, biez de
mouhn; prise d'eau.
Ce mot doit avoir une origine commune avec le fr. Biez.
En roman, betal, besaliere, canal, conduit des eaux, rigole
d'arrosage, même sign.; celt. beat; bass. lat. bedale, en lat.
via aqua; en gr. B(r,.
Béscle, ». m. Terme de boucherie; rate de mouton;
fressure.
En V. fr. Bascle.
Béscul, » m. Biscuit; pâtisserie faite de la fleur de
farine, de sucre et d'œufs, cuite au four dr* pâtissier. ~
Papiè-béscuX , papier sur lequel on enfourne la pâte de
biscuit, et sur lequel il reste des traces de sa substance
quand on le détache. Les enfants achètent ce papier chez
les pâtissiers et rongent à belles dents cette friandise à
très-bon compte.
Dér. du lat. Bis et coetus, cuit deux fois.
Béségno, t. f. Gousse-d'ail; amande d'ail; un des
caieux dont la réunion forme la tète, qu'on appelle Bous-
sèlo.
On dit, et c'est possible, que ce mot a pour étym. Véno
d'a'iè, à la vérité par altér.
Béségudo, ». (. BesaigUe, instrument de charpentier,
taillant jxir les deux bouts. — Eselà à la béségudo, sabot à
la cévenole, dont la pointe est recourbée connue les anciens
souliers à la ix)ulaine.
Dér. du lat. Bis et actitus, à deux pointes, soit qu'il
s'appliciue à l'instrument des charpentiers, soit à la chaus-
sure do nos montagnards, qui portait sans doute, dans
l'origine, une seconde pointe à l'arrière, comme une sorte
d'éperon.
Bésougna, v. Travailler, s'occuper ; faire une aflaire ;
faire ses affaires. — A bien bésougna, il a bien spéculé.
Bésougno, ». f. Dim. Bésougnélo, péj. Bésougnatso.
Chose ; affaire ; besogne, travail, ouvrage. Dans ce dernier
sens : Laissa mé fairo ma bésougno, laisse-moi faire ma
besogne, mon travail, mon ouvrage. Faï fosso bésougno, il
fait beaucoup d'onvrage. Faire bésougno, réussir dans ses
affaires, être rangé ; augmenter progressivement son avoir.
Avec la première acception, Bésougno a la même extension
que le fr. chose et le lat. negolium. 11 sert à désigner une
foule d'objets dont le technique ne vient pas immédiate-
ment à la mémoire ; il veut tout dire et désigne tout. —
.Vou»»u Bésougno, monsieur Chose, monsieur un tel.
Bésougno en dit autant, en supprimant monsieur.
Dér. de l'ital. Bisogna, affaire.
Bésoon, ». m. Besoin ; manque ; misère, disette, indi-
b
110
BËS
BÉS
gence ; nécessité naturelle. — Aqud U fdi bésoun, cela lui
est nécessaire, il ne peut sen priver, ou s'en passer. Es bé
b«ioun que... il faut bien que, il est bien nécessaire que...
Es lou bétoiin que i-ou [ai faire, c'est la misère qui le
conduit là. S'èro dé besoun, s'il le fallait. Faire sous bésou-
nas, vaquer à ses nécessités naturelles.
Dér. de l'ital. Bisogno, manque, nécessité.
Béssédo, ». f. Taillis de bouleau.x.
Ce mot est dér. de Bés, bouleau, qui a vieilli, mais qui
s'est conservé dans le breton be:, pris du cett. bets, même
sign. Il n'est plus qu'un nom prop. et entre dans la com-
position de plusieurs ; la désinence édo, qualificative et col-
lective, répondant à aie fr.- ou ay : La Béssédo revient à
La Boulaye ou La Boulay, ou Boulay. Cette finale édo est
caractéristique et propre au midi de la France ; elle repré-
sente la terminaison lat. etum, qui a varié souvent en
eium, eyum, et a fait idum et edum, d'où édo procède
plus directement; mais sous toutes ces formes, elle porte
en soi un sens de collectivité, qui s'attache aux mots dans
.lesquels elle apparaît : Cériéïrédo, Nougarédo, Pinédo,
Vérnédo, etc., lieux plantés de cerisiers, de noyers, de
pins, d'aunes, etc. Ses similaires sont en lang. ter, ières;
en fr. aie, ay, aye, ei, ey, ée, eis, eis, eix, es, et, ex, ois,
ai; mais le radical commun est dans l'ancien gaulois, au-
quel il faut toujours remonter, en fait surtout d'étyraologie
des noms propres de lieux.
Bésséjo, ». /■., n. pr. de lieu. Bessèges, commune
érigée nouvellement en chef-lieu de canton, arrondis-
sement d'Alais. L'importance et la prospérité des mines de
houille et des fonderies et forges établies dans cette loca-
lité lui ont donné un développement considérable.
Dans l'étymologie des noms, il y a toujours à distinguer
le radical, qui forme le corps du mot et leur signification,
de la désinence, qui n'est souvent qu'explétive. Ici éjo
semble être un suffixe marquant la collectivité, la quan-
tité ; le radical reproduit le celt. bess, vess, bouleau, et le
nom signifierait un lieu planté de bouleaux. Il pourrait
cependant aussi avoir été formé par la bass. lat. bessœ ;
Bésses dans le dialecte limousin et auvergnat a le sens du
lat. pascua, pâturages, prairies. Les deux acceptions sont
applicables.
Béssina, v. Vesser ; rendre par le bas un vent muet.
Béssino, ». f. Vesse, vent muet par en bas. — Parâou-
los dé fénno, béssino d'ase, propos de femme, le vent l'em-
porte. Pér un pé, pér uno béssino réfuses pas la vésino,
pour un petit défaut sans gravité, ne refuse pas en mariage
la voisine. La moraliiéde ce proverbe est qu'il vaut mieux
épouser une femme que l'on connaît bien, malgré quelques
petits défauts, qu'une étrangère qui peut en cacher de
beaucoup plus grands. Le proverlie ajoute en effet : rfé
prendras uno déiras lou pioch que n'daura fach sept ou
kioch.
Béssino-dé-loù , vesse-de-loup , plante de la fam. des
Funguê, Bolefs ; qui se remplit d'une poudre noire, quand
elle est en maturité. Sous la pression elle éclate, et sa pous-
sière se répand.
Dér. du lat. Vesica, petite vessie, globule.
Bésso, ». f. Abbesse, supérieure d'un monastère de filles
ou de femmes. — Tèros ou Mas dé las Bessos, métairie on
champs de l'Abbaye ou des Abtesscs.
Dér. du lat. AObas, par apocope de l'a initial.
Béssoù, béssouno, adj. Dim. néssouné. Jumeau, elle;
en parlant soit des [jersonnes, soit des animaux ou des
arbres, produits d'une même souche, ou bien des fruits
adhérents l'un à l'autre.
Dér. du lat. Bis et de la part, on, contraction de homi-
nes : deux hommes, ou homme double. La désinence saà,
qui est la même que soun, et qui, dans le principe, était
ainsi, puisque son féminin est encore souno, peut avoir été
empruntée à l'aiigl. son, fils. La longue occupation des
provinces méridionales par les Anglais rend cette hypo-
thèse plausible, liéssoù reviendrait alors à bis-son, deux
fois fils, ou double-fils.
Béssounado , ». f. Accouchement de jumeaux ou de
jumelles ; les jumeaux eux-mêmes pris collectivement. —
Aquo fat uno bravo béssounado, c'est un joli couple. A fa
très béssounados , elle est accouchée trois fois de ju-
meaux.
Béstialén, énquo, adj. Qui tient de la bête, bestial ;
qui aime les animaux, qui se plaît à lesélever, à les soigner.
Dér. de Bèstio.
Béstiâou, ». m. Dim. Bestiale, péj. Béstialas. Bétail ;
ensemble des animaux domestiques d'une ferme ; la gent
animale en général. — Lous magnans soun un brave bes-
tiale, les vers à soie sont un charmant peuple-animal.
Ariba lou béstidou, donner la ration aux animaux de la
grange, chevaux, mules, bœufs ou moutons, non comprise
la volaille. Laissas pissa lou béstiâou, laissez pisser le mou-
ton ; laissez faire ; laissez couler l'eau.
Dér. de Bèstio.
Béstiassado, ». f. Grosse bêtise; balourdise; gaillardise
grossière.
Béstiasso, ». f. Gros et vilain animal. Au fig., grosse
bête; butor; grand imbécile; grossier.
Augm. et péjor. de Bèstio.
Béstiéja, v. Faire l'imbécile, le nigaud; dire ou fairs
des gaillardises grossières.
Béstiéjsûre, aïro, adj. Qui fait des niches grossières et
gaillardes ; qui fait des lazzis indécents.
Béstiéto, ». f., ou Béstiolo, s. f. Bestiole, petite bête;
insectes en général. Au fig., petit esprit, personne bornée,
sans intelligence et sans instruction.
Béstiouno s'emploie dans le même sens.
Dim. de Bèstio.
Bèstio, ». f. Dim. Béstiéto, béstiolo, béstiouno, péj. Bés-
tiasso. Bote, animal, en général, particulièrement une
mule ou un cheval. Au fig., sot, idiot, imbécile ; lourdaud;
butor; mauvais plaisant; vicieux.
BIA
BID
lit
— Âï étcampa uno bittio, il m'a crcvé un cheval, une
maie. Es pu bèslio que nèci, il est plus co({ain que sot. Mi
digue pas soulamén : bèslio, siès aqui? il no fit nulle atten-
tion à moi ; il no mo deniandH pas seulement : que fais-tu
là ? Aguù's la bèslio ddou bon Diou, c'est un pauvre inno-
cent, un crr'tin inolTensif.
Dér. du lat. Beslia.
Béstiôou, olo, adj. Dim. BésUoulé. Nigaud; imbécile;
ignorant; stupidc.
Béstiu, udo, adj. Dim. Béstiudé, péj. Bistiudcu. Bes-
tial, qui a les instincts de la bète ; brute ; abruti.
Dér. de Bèstio.
Bésnquariès, (. /*. plur. Dim. Bétuquarièïrétos. Vé-
tilles ; niaiseries ; bagatelles.
Dér. de Bésuqué.
Bésnqné, éto, adJ. Vétillenr; cogne-fétu ; tatillon ;
qui fait une grosso affaire de niaiseries ; qui se tue et se
tourmente de minuties, les crée et les cherche à plaisir;
qui épluche ce qu'il mange.
Dér. de Bésuquo, vieux mot hors d'usage, qui signifie
une espèce de jeu de fainéant, consistant en une chaîne
dont les anneau.\. sont enchevêtrés de manière qu'ils sont
très-difficiles 4 dénouer. C'est cet instrument ou quelque
chose d'analogue qu'on vient de renouveler sons un nom
de circonstance : la question romaine. L'allusion a été
saisie; cet exercice a amusé sans rien résoudre, bien
entendu ; mais l'inventeur y a fait sa fortune.
Dér. du lat. Bis et uncus, double crochet.
Bésuquéja, v. Vétiller; baguenauder; s'amoser à des
riens ; pignocber ou majiger à petits morceaux et en éplu-
chant.
Bésuquoiis, ooso, adj. Vétilleux ; minutieux en parlant
des choses. — Vn ouvraje bisuquoùs, un ouvrage minu-
tieux, qui exige de la patience ; travail de détail minu-
tieux.
Béto-rabo, s. f. Betterave. Beta vulgaris, Linn., plante
potagère, partout cultivée, qui a trois variétés principales :
blanche, rouge et jaime.
Emp. au fr.
Bétorgo, j. f. Cerise courte-queue; gobet ; la meilleure
espèce pour confire à l'eau-de-vie.
Bétourguiè, s. m. Cerisier courte-queue.
Serait-il dér. du lat. Bis lortus, qui serait une allusion
à la brièveté de la queue de son fruit qu'on croirait
tordue î
Bïa, V. Serrer la corde d'un ballot, ou la charge d'une
voiture, en la tordant avec la bille ou avec le garrot;
biller.
Dér. du lat. Bis et de Via, lier ; lier deux fois.
Biaï, ». m. Dim. Biaïss». Biais; adresse, habileté;
savoir-faire ; tournure ; esprit ; inclinaison ; manière d'être.
— Jean sans biaï ou Pdou-dé-biaï, un maladroit. Préne
lou biai, prendre la bonne manière de faire quelque chose.
Aquà'i soun biat, c'est sa manière de faire on d'être. Cha-
cun soun biaï, chacun a sa façon d'agir. Prine quàouquut
dé soun biaï, prendre quel(ju'un par son faible, s'acoom-
mcxlor à son humeur. Aquà's toujour d'un biaï, c'est tou-
jours la même chose, ni mieux, ni plus mal. Donna lou
bia'i à quicon, donner une Iwnne inclinaison à quelque
chose ; lui donner de la tournure. A bon biaï, il parait
adroit, habile. De quinte biat que mi vire, de quelque côté
que je me tourne, quelque tournure que je prenne. D'un
biaï ou d'un àoulre, d'une façon ou d'autre. Siès pas de
biaï. ta n'es pas bien placé. A fosto bidissé, il a beaucoup
de dextérité, d'adresse ; il est plein de savoir-faire. Aquà'i
pas dé biaï, ce n'est pas d'aplomb ; cela n'a pas de tour-
nure.
Dér. du gaulois Bihay, obliquité.
Blaïssu, udo, adj. Dim. Riaïssulé. .\droit ; ingénieux;
plein de savoir-faire.
Dér. de Biaï.
Biala, ». Bêler. — Se dit des brebis, des moutons, des
chèvres, des agneaux, et par cxtens. de tout cri forcé. —
Fido que bialo pèr un moucèl, brebis qui bêle perd sa gou-
lée, c'est-à-dire qu'un bavard est toujours en arrière dans
ses affaires.
Dér. du lat. Batare, bêler, ou du gr. Br)>.Tiv, brebis.
Bialaïre, aïro, adj. Qui bêle; au fig., pleurard; qué-
mandeur; poétiq., mouton, chèvre, agneau.
Bialamén, s. m. Bêlement, cri naturel des brebis, etc.
Bïar, s. m. Dim. Biardi. Billard; table sur laquelle on
joue à ce jeu.
Emp. au fr.
Biasso, s. f. Dim. Biasséto. Besace ; panetière de berger ;
sac des mendiants; sac ouvert dans le milieu, ayant une
poche de chaque cèté. — ■ A sa biasso eoufido, pléno, il a du
foin dans ses bottes. Chacun prècho pér ta biasso, prvb.,
chacun prêche pour sa besace, dans son intérêt.
Dér. du lat. Bisaccium.
Biblo, *. f. Bible; livre ou recueil des Saintes Ecri-
tures.
Dér. du lat. Biblia, livre par excellence.
Bicarèoa, s. m. Mercier ambulant; porte-balle.
Dér. du lat. Vieatim. de bourg en bourg, de village en
village.
Biohë, ». m. Dim. Bichëiré. Petit broc ; cruche à vin
qui, au lien d'avoir un goulot, a un large bec.
Dér. du gr. B'xoî, vase ou urne à anses. En ital. hic-
chiere, verre, gobelet ; mesure à vin.
Bidé, s. m. As au jeu de dés. — A fa raflo dé bidi, il
a fait rafle d'as; il a tout gagné, tout ramassé.
Ce mot a la même étym. que le fr. Bidet; comme l'as
au jeu de cartes se nomme aussi ase en langned., âne,
bidet.
Bidoun, s. m. Bidon; barillet en bois, où les journaliers
portent leur ration de vin pour la journée, et les cantiniers
de l'eau-de-vie.
Emp. au fr.
112
BIG
BU
Bièïos, j. f. pi. Pi5jor. Bièïassos. Effiloques ; effiinres ;
franges d'une ôloiTo usée et qui s'effile.
Corrup. du mot Vièïos.
Bien, adv. Bien; beaucoup; à merveille; grandement;
lieureuscment ; largement. — Ce mol est une richesse de
la langue d'Oc, qui distingue entre les deux acceptions du
fr. bien, sans confusion possible. On dit en français : je
l'aime bien, et l'amphibologie est embarrassante. On doute
si cette petite phrase signifie : oui, je l'aime, ou si elle
exprime : je l'aime lx>aucoup. En lang. on dirait dans le
premier cas : L'aime bé, je l'aime, certainement ; et dans
le second ; L'aïme bien, je l'aime extrêmement.
Dér. du lat. Béni.
Biènfasén, énto, adj. Bienfaisant ; qui prend plaisir à
faire du bien; qui fait de bonnes œuvres.
Formé de hièn et de fasén.
Bièro, s. f. Bière, boisson spiritueuse produite par la
fermentation de graines céréales et particulièrement del'orge.
Dér. de l'allem. Bier.
Bièro, i. /". Brancard à claire-voie dans lequel on porte
les morts au cimetière, qu'ils soient déjà renfermés dans
le cercueil ou seulement dans leur suaire. On ne doit
jamais dire la bièro, dans le sens de cercueil, bière, qui se
disent caùso.
Dér. du celt. Haer ou baar, cercueil, ou de bar, bran-
card, caisse portative.
Bïèto, ». f. Citation ; billet d'avertissement à compa-
raître devant le juge de paix; extrait du rôle des contri-
butions ou avertissement.
Dér. du fr. Billet.
Biga, v. Colloqucr ; se défaire; troquer; échanger;
vendre ; marier. — A bien biga sa fto, il a bien placé sa
fille ; il lui a fait faire mi bon mariage ; il l'a bien collo-
qnée. Coumo quicon la bigarén, de manière ou d'autre
nous nous en débarrasserons.
Dér. du lat. Bis et jugare, ou vices, échange : invicem
miiture.
Bigara, ado, wJj. Bigarré; peint, nuancé, mêlé de plu-
sieurs couleurs disposées par bandes.
Dér. du lat. Bisjugare, atteler, joindre, et radius, rayon,
raie; ou bien de variegatus ou virgutus.
Bigaraje, .?. m. Bigarrure; bariolage; mélange de plu-
sieurs couleurs tranchantes.
Dér. de Bigara.
Bigarouno, s. f. Bigarreau, grosse cerise en forme de
cœur.
Formé du lat. Bis et du mot garo, lang. adjectivé.
Bigo, s. m. Hoyau à deux dents; bident; binette;
moins fort et emmanché plu» court que le béchar. — Y. c.
m. — C'est l'outil dont on se sert dans les hautes Cévenncs
et le Vivarais pour les vignes et toutes sortes de binage.
Dér. du lat. Bicornis.
Bigo, oto, adj. Bigot; faux dévot; hypocrite.
Dér. de l'allem. Bey Goti. ou de l'angl. hy god, par
Dieu ! parce que les bigots sont censés répéter souvent cette
oraison jaculatoire.
Bigo, «. f-, ou Bigoun. Pièce de bois courte et équarrie;
poinçon; étai. — Voy. Bigoun.
Dér. de la bass. lat. Biga.
Bigorno , s. f. Enclume à deux cornes ou à deux
pointes arrondies pour tourner le fer en rond; compagnies
du centre de la garde nationale ; ancienne milice.
Dér. du lat. Bicornis, à deux cornes.
Bigoro (Bando dé), s. f. Bande, troupe de Bohême ou
de Gitanos, qu'on appelle aussi dans le pays Catalans,
parce que leur domicile, s'ils en ont un, est dans les mon-
tagnes frontières de la Catalogne et de la France. On les a
appelés dans le temps bando dé Bigoro, parce qu'il en
venait beaucoup du Bigorre, pays limitrophe de la Cata-
logne. Par ext. on dit bando dé Bigoro comme terme inju-
rieux, pour : tas de voleurs, tas de brigands. — Voy.
Bi'mi.
Bigoun, s. m., ou Bigo. Bigue; petite poutre longue et
grêle, ou courte et équarrie quand elle sert de poinçon ou
d'étai. — Yoy. Bigo.
Bigoumu, ado, adj. Milicien ; garde national du centre;
biset.
Dér. de Bigorno.
Bigoutariè, s. f. Bigoterie; fausse piété; fausse dévo-
tion.
Dér. de Bigo.
Bigoutéja, v. Faire le bigot; se livrer habituellement &
des actes de dévotion puérile.
Dér. de Bigô.
Bigre, bigro, adj. Dim. Bigratoii. Synonyme radouci
etdimin. de Bougre. Il n'entraîne aucune idée fâcheuse
ni insultante : ce n'est guère qu'une plaisanterie. Bigre
s'emploie aussi comme inlerj. : diable! C'est un nom qu'on
donnait autrefois aux riverains des forêts nationales ou
seigneuriales, qui étaient des espèces de gardes spéciaux,
chargés de la surveillance et de la recherche des abeilles,
pour en recueillir le miel. Un privilège de leur charge les
autorisait à couper l'arbre sur lequel l'essaim venait se
poser. De lii ils furent nommés dans la bass. lat. et les
actes de notaire bigrus ou bigri, par corrup. du lat. api-
ger, apicurus, apicuri, ce qui a fait le mot actuel. On
pourrait peut-être aussi tirer cette épithète légèrement
moqueuse du nom des habitants du Bigorre, en lat. Biger-
riones , que l'on confondait avec les Bohèmes. — - Yoy.
Bigoro.
Bijare, aro, adj. Bizarre; bourru; d'humeur peu so-
ciable; fantasque; capricieux.
Emp. et corrup. du fr.
Bijou, s. m. Dim. Bijouné. Bijou, parure, jolie petite
chose en général. Bijouné, joli petit enfant.
Dér. du lat. Bis et jours.
Bijoutariè, s. f. Bijouterie ; toute espèce de bijoux ;
magasin et profession de bijoutier.
BK)
BIS
113
Bijoutiè, .t. m. Bijoutier, marchand qui vend des bijoux ;
fabricant de bijoux.
Bijoutièîro, i. f. Marchande de bijoux ; femme d'un
bijoutier ; boite vitrée oii s'étalent les bijoux dans un
magasin de bijouterie.
Bingoï (Dé), adv., ou Dé guingoï. De guingois; de
travers ; de cûtti ; en faux-6querre ; bistourné. — Marcha
tout (lé bingoï, il marche obliquement. Y véi dé bingdi,
il est louche. — Toy. Dé guingoï.
Dér. du gr. Tvib;, boiteux, estropié.
Binlo, s. f. Hile; mais particulièrement pituite. C'est ce
qu'on entend d'oiilinaire quand on se plaint de la binlo ;
on veut désigner par là un épaississement des glaires sur
la poitrine, qui deviennent visqueuses, muqueuses et diffi-
ciles .1 expectorer.
Dér. du Lit. Bilis.
Bïo, ■"!■ f. Bille de billard, exclusivement.
Dér. du lat. Bulla, bulle ou boule, ou de pila, balle à
jouer, boule. F>e mot n'est pas ancien en lang. avec cette
sign. et vient du fr.
Bïo, s. f. Garrot; bille; bAton court et fort dont on
serre les cordes d'emballage en les tordant ; trique, tricot ;
gros b;\ton ; court kMon des bfktonistes. — Garo, la tiio I
gare, la trique, le bftton !
Dér. de Vio.
Bïo, s. m. Billot; grosse canne bnite; tricot; gourdin.
Augm. de Bïo.
Biôou, s. m. Dim. Blousé, péjor. et augm. Bioulas. Bœuf
domestique. Bas taurus domesticus, Linn., mammifère de
la fam. des Ruminants. Le taureau se nomme SrAou. —
Bioulé, s. m. Bouvillon, jeune IxEuf ; en v. fr. bouvelet
ou beuvelet. I.ou biOou bramo, le IxEuf beugle, meugle on
mugit. — Aquél home es un biôou, cet homme est fort
comme un IxBuf. Bidou dé la Palu, taureau sauvage des
marais f palus J de la Camargue , très-propre aux combats.
Fia coumo la bano d'un bidou, antiphrase, c'est-à-dire
raide comme une barre. Volo-biâou, sobriquet ancien des
habitants de Saint-Ambroix. On prétend qu'iui charlatan,
au moyen Age, annonça qu'il voulait faire voler un IxBuf
du ran dé Jèsu, rocher de Jésus qui domine la ville au
midi, jusqu'au ran dé Manifaciè, rocher qui se trouve de
l'autre côté du pont. Jour pris pour cette expérience, on
ne sait trop comment s'en tira l'empirique : probablement
le bœuf ne vola pas ; mais les drogues et les onguents
eurent bon débit, et les malins du voisinage firent subir
aux Saint-Ambroisicns les conséquences de leur crédulité.
Ce sobriquet tient encore dans toute sa force.
Voici une autre version : les habitants de Saint-Am-
broix avaient une foire à laquelle jamais personne ne
venait. Une année, ils s'avisèrent de faire publier dans
tous les environs (les affiches-programmes n'étaient pas
connues , non plus que l'imprimerie inventée dans ce
temps), qu'on verrait à leur prochaine foire un spectacle
extraordinaire : un bœuf qui volerait, en parcourant dans
son vol le trajet ci-dessus indiqué. On laisse à {wnser si au
jour dit les curieux abondèrent dans la ville ; pendant
toute la journée, les boutiques non plus que les cabarets
ne purent suffire aux chalands. |l va bien sans dire que le
bœuf ne vola pas non plus; mais la foire fut Iwnne, et
cette fois les mystifiés ne furent pas ceux de Saint-Am-
broix.
On peut choisir entre les deux origines du sobriquet : à
coup sûr, elles ne partent pas du même auteur.
Bato dé biôou. — Voy. Bato.
Léngo dé biôou, espèce de feuille de mûrier, dure, gri-
sâtre et sans mures; elle est plus clair-semée que les autres
espèces ; aussi est-ce la moins productive et doit-on l'éviter
à h greffe , mais en revanche, elle est moins sujette à la
tache par les brouillards et la miélée.
Biôou, s. m. Coccinelle, Coceinella punetata, Linn., de
la fam. des Triinérés, insecte, genre de scarabées, dont les
élytres sont rouges, tigrées de sept points noirs. On le
trouve principalement dans le calice des lys. Il est connu
aussi sous le nom de Béstio ddou bon Dieu, ou Galinito
dàou bon Diou.
Lorsque Biôou est un nom propre d'homme, ce qui est
fort commun dans le pays, il fait au féminin Bùdo.
Dér. du lat. Bos, ou mieux du gr. BoOç, même sign.
Bien, t. m. Dim. Bïouné. Biguc de bois équarrie pour
être sciée en long. — Aquél Aoubre fara tri» bfioiit, cet
arbre fournira trois longueurs de sciage.
Dér. de Bio.
Biquo , f. m. Gaillard; bon compagnon. — Vn bon
biquo, un bon drille. Trasso dé biquo, mauvais garçon,
mauvais diable. Sires un biquo à faire aquà, si tn étais
homme à faire telle chose. AM lou biquo.' ah! le luron !
Ce mot [wurrait bien dér. de Vicanus, villageois.
Bisa, ado, adj. IIAlé, gercé par la bise.
Dér. de Biso.
Bisbil, (. m. Bisbille; mésintelligence; discorde; que-
relle ; rixe ; dispute.
En ital. Bisbiglio.
Biscaïre, s. m. Biais; côté; obliquité; travers; angle.
— Dé biseaire, de travers, en faux équerre. Coupa dé bis-
caïre, couper de biais. Cantoii dé biscaïre, encoignure en
faux équerre.
Dér. du lat. Bis et du lang. cotre.
Biscarlà, s. m. Bidet; petit cheval de montagne, ordi-
nairement de race lozerotte.
Ce mot ne serait-il pas dans sa finale une contraction on
une altération de eavalà, petit cheval? La syllabe bis, de
la bass. lat. bisus, brun, noir, déterminerait la couleur la
plus ordinaire de ces poneys de montagnes.
Biscoantour, s. m. Zig-zag; faux-fuyant ; course pleine
de contours et de détours, en décrivant divers arcs de
cercle inverses les uns des autres.
Dér. du lat. Bis et eontorquere, tourner deux fois au-
tour.
u
114
BIS
BLA
Bise, ». m. Pigeon biset; ramier; pigeon sauvage,
Columba liviu, Liiui. — Il se distinguo par doux bandes
noires nu'il a sur chaque aile. Son plumage est d'un gris
de fer fonce, et lui a valu son nom, tirci de la bass. lat.
bisus, brun.
Bisècle, s. m. Bizègle, instrument de cordonnier en
buis, ayant une sorte de mortaise aiguë à chaque bout,
qui sert à lisser la tranche des semelles et h effacer la ligne
de suture.
On no sait trop pourquoi on donne quelquefois, chez le
peuple, le nom de Bisècle aux enfants qui ont le prénom
de Louis.
Dér. du lat. Jiis acutus, aigu des deux côtés.
Bisèl ou Bisèou, s. m. Biseau, talus pratiqué à l'extré-
mité d'un outil, d'un instrument. On le dit des bords à
facettes d'une glace, de l'arête adoucie d'un bois équarri,
du dos d'un couteau, etc.
Dér. comme Biaï, du gaulois Bihay, obliquité.
Bises, s. m. pi. Coup do bise ; autans; vents froids et
fréquents.
Dér. de Biso.
Biséto (En), aJv. De biais; en biseau ; obliquement. —
Biseto est le dimin. de Bisèou, mais ne s'emploie qu'ad-
verbialement. On dit encore : ésca'iè en biséto, escalier en
colimaçon. 11 semblerait cependant que cette dernière
expression viendrait de avis, une vis, dim. viséto.
Biso, s. f. Bise; vent de bise; vent sec et froid qui
souille du N.-E. au N.-O. — La biso es folo, il fait un
vent fou. Touqua ildou vén dé biso, il est un peu timbré.
Aquésto fés né siès touqua dâou vén dé biso, pour le coup,
tu peux t'en frotter les moustaches.
Juste-Lipse fait venir ce mot de l'ancien teutonique, bisa,
tom-billon de vent. En tous cas, il est remarquable que la
racine de notre biso, prise du celt. bis, signifiant noir,
réponde au grec MeXavSoféaç, vent noir, et au lat. aquito,
même sign., dér. de aquilus, noirùtre.
Bisouèr, s. m. Dimin. Bisouèrné. Vent-coulis; courant
de bise à travers une porte, une fenêtre, une ouverture
quelconque.
Dér de Biso.
Bisqua, v. Bisquer; être vexé; enrager; s'impatienter;
s'inquiéter; recliigner.
Dér. du lat. lexare, vexer.
Bisquo, J. f. Colère; fâcherie. — A prés la bisquo, il a
pris la mouche. Aquù's mdou préne sa bisquo, voilà qui
est mal prendre son temps, se fAclier mal a propos.
Dér. de Bisqua.
Bisses (L'an dé), s. m. L'année bissextile, celle où se
rencontre le bissexte, c'est-à-dire le jour (pi'on ajoute an
mois de février tous les quatre ans. — l.ou pagarai l'an
dé bissés, je le paierai aux calendes grecques.
Un lourdaud, nommé Jean dâou t'es, qui avait pris
femme, trouva mauvais que celle-ci accouchât au bout de
trois mois de mariage. 11 consulta sur cette affaire son
curé, qui, en homme d'esprit et de conciliation, voulut pré-
venir les suites fâcheuses d'un événement irrémédiable
d'ailleurs. Il comj)ulsc son Ordo, et voyant qne l'année
est bissextile, après des calculs qui commencent à calmer
l'imagination du pauvre mari, il on tire enfin l'oracle con-
solateur suivant :
Jean (làou Fés
Fénno n'a prés
L'an dé bissés que né vûou très ;
Très et très fau sièi et très fan iiôou,
L'éfan es vostre pcrqué Diou-z-ou vécu.
Jean du Fé$ a pris femiue dans l'anuéc bissextile, qui
compte triple ; trois et trois font six, et trois font neuf; l'en-
fant est à vous puisque Dieu le veut ainsi.
Notre homme se retira satisfait, dit l'histoire.
Dér. du lat. Vissextus.
Bistour, s. m. — Voy. Biscountour.
Bistourtiè, s. m. Bistorlier, terme de pâtissier ; cylin-
dre, rouleau, pilon de bois pour travailler la pâte, la pétrir
et la mettre en feuille sur une table.
Dér. du lat. Bis et torquere.
Bitaïo, s. f. Victuaillo ; provision de bouche ; spéciale-
ment, ration de vivres qu'apjwrte un journalier dans son
bissac.
Dér. du lat. Victualia, vivres.
Biva, s. m. Bivouac, garde qui est sur pied pendant la
nuit.
Emp. au fr., qui dér. do l'allem. Bey, guet, etwacht, nuit.
Bivaqua, v. Bivaquor ou bivouaquer ; par ext. passer
la nuit en plein air, à la belle étoile.
Dér. de Biva.
Bla, s. m. Dim. Bladé. Blé, nom générique qui com-
prend toute espèce de céréales propres à la noun'ilure de
l'homme. Dans beaucoup d'endroits, le mot bla ne désigne
que le froment et ses variétés. — Lou bla a fa d'un sièt,
d'un dès, le blé a sextuplé, décuplé, il a produit six ou
dix pour un. Téro négro [aï bon bla, la terre noire pro-
duit de bon blé; on dit cela souvent d'une femme très-
brune, qid doit produire des enfants robustes. Manjarén
pas grand bla ensemble, nous ne vivrons pas longtemps
ensemble; il y a incompatibilité entre nous. Sa fénno ïé
fara manja lou bla cher, sa femme le ruinera. Bla carga,
blé chargé de mauvaises graines. Via dé barquo, blé étran-
ger, qui \ ient par eau et (jui est souvent avarié. Bla dé
péïs, blé indigène. Chaque pays a une prédilection pour les
produits de son sol, ici surtout. Le fait est que le blé des
environs d'Alais est de fort bonne qualité; il se vend tou-
jours plus cher que le blé étranger. Bla dé séinénço, blé
du premier clioix, réservé pour renouveler la semence.
Bla vésii, grains qui n'ont pas éti;- dépouillés de leur
balle. Vn bla est ordinairement un blé en herbe. Un for
bla, un blé bien fort et bien épais.
Dér. delà bass. lat. Bladum, qui vient lui-même du
vieux saxon blad.
BLA
BLA
115
Bladïè, èïro, adj. Qui concerna le bl6; LIalier, mar-
chand de l)lé, moins usité cependant en ce sens que mar-
chai! dé bla. n est quelquefois nom prop. ; les enfants alors
se nommant : Bladiifré, Bladièïréto. — SfouU bladiè,
moulin à blé.
Dér. de la bass. lat. Bladaritu ou bladerius, moulin à
farine.
Blagua, v. Bavarder; hàbler ; parler inconsidérément;
mentir.
Dér. du lat. Blaterare, caqueter, babiller.
Blaguo, j. /". n;\blcrio ; bavardage ; babil importun ;
menteric; blague, qui est passé en ce sens dans le fr. fam.
et pour signifier : sac i tabac. — Taïso ta blaguo, cesse
ton babil. J^'omj a pas fa que dé blaguos, il ne nous a dit
que dos Iwurdcs, dos bàblories, des mensonges.
Dér. do Blagua.
Blagur, urdo, adj. Blagueur; hâbleur; parleur sempi-
ternel ; indiscret.
Mémo dér. que le préc.
Blaâme, s. m. Calomnie, ou tout au moins grosse médi-
sance. — Leva un bldime, inventer une calomnie, calom-
nier.
Dér. (lu gr. Vki^'^oi, lésion, injure, dommage.
Blaïsa, V. Biaiser; agir avec nonchalance, sans entrain,
sans conviction.
Dér. du nom pr. BUso, Biaise, synonyme de noncha-
lant.
Blaïséja, v., et Blésséja, r. Grasseyer, parler gras,
comme font les Provenfaux, i. l'enconlre de la lettre r qui
s'embarrasse dans leur gosier, et qui a quelque rapport
avec le g.
Ce mot est encore plus spécialement applicable à un léger
défaut de langue, qui so produit pour certaines con.sonnes,
comme si on les glissait entre les dents ; ce qui fait pro-
noncer le ch comme un s, \e j comme un z, et ^ comme si
d la précédait.
Le premier est le grassaicmcnt et le second le zézaie-
ment , que le lang. confond dans Blaïséja ou Blésséja.
Dér. de Blé.
Bla-maré, s. m. Maïs; blé d'Inde ou de Turquie; gros
millet des Indes; Zea mays, Linn. Plante de la fam. des
Graminées, originaire de l'Amérique, d'après certains
auteurs, tandis (pio d'autres soutiennent qu'elle est venue
des Indes-Orientales, opinion que semblerait confirmer son
nom fr. En tous cas, la dénomination languod. Bla-maré,
indique qu'elle nous est arrivée par la mer.
Blan, s. m. nianc, monnaie du moyen Age qui valait
cinq deniers. — Sirt blan, deux sous et demi, ou 125 mil-
lièmes. C'est là le seul cas où le mot est employé.
Son nom dérive de sa couleur, c'est-A-dire que cotte
monnaie était blanchie ou étaniée ; en argent, elle eût été
trop iwtilo pour la valeur repn'-sentée.
Blan, quo, adj. Dim. Blanqué,p^]oT. Blanqua.^. Blanc;
couleur de la neige ; pAlc; propre. — Drapeau blan, dra-
jieau de la monarchie française. Pèro-blan, frére-pri^chouf
dominicain dont il existait un couvent à Alais. Abtoura
Aou blan, mêler de la farine dans le breuvage d'un animal.
Mé fai véni tous pèous blans, il mc fait blanchir les che-
veux, dit-on do quelqu'un qui nous tourmente, nous im-
portune jusiju'à l'iraiwtience. Camiso blauqno, chemise
propre. Faire un viaje blan, faire un voyage inutile, se
déplacer pour rien, rénguè tout blan, il pâlit tout à coup.
Dér. de l'allem. Blank, brillant, éclatant.
Blan, .5. m. Cible, but où l'on tire. — Aï fa blan, j'aà
mis dans le blanc, j'ai touché le but. Tira Aou Uan, tirer
à la cible.
Le point où l'on vise est marqué ou tracé en blanc au
centre d'un espace noir : de là le nom.
Blan-bè, s. m. Blanc-bec, jeune homme sans expérience,
ironique et méprisant.
Formé de Blan et de bè.
Blanchi, v. Blanchir; jusser au lait de chaux; faire
prendre une couleur blanche. — Fuira blanchi, faire blan-
chir, en terme de cuisine, donner une première ébullitiou
à la viande, aux légumes, les passer à. l'eau bouillante.
Dt^r. de Blan.
Blannavo, s. f. n. pr. de lieu. Blannaves, commune du
canton de Saint -Martin- de -Valgalgucs, arrondissement
d' Alais.
Ce nom se divise en deux parties. La dernière ne pré-
sente aucune difficulté : nave, twve, noue, en v. fr., nava,
en osp., signifie prairie. Dans la première, pour avoir un
sens raisonnable, blan ne pouvant s'allier au sens do nave,
il faut admettre, pour l'euphonie et la signification, que
r primitif s'est transformé en l actuel ; ces deux consonnes
ont d'ailleurs des dispositions particulières à permuter
ainsi. Or brana est rendu dans la bass. lat. par juvenea,
vacca junior, vache jeune. Ce qui donne pour le nom entier:
prairies ou pâturages pour l'élève des vaches. Cette inter-
prétation se fonde par assimilation sur le nom d'un hameau
de cette commune de Blannaves, où la môme étymologie se
trouve très-marquée. Branoiis, Branoux.est représenté par
le lat. branu.s, niasc. de brana, id est juvencus, junior
bos (Du Cange), dont nous avons fait en langued. avec la
même sigi\ification brâou, jeune taureau.
Blanquâou, f. m., ou Blanquâondo, s. f. Guigne
blanche, espèce de cerise de couleur de cire, légèrement
teintée de rose, du cAté exposé au soleil. Le fruit est indif-
féremment masc. ou fém., l'arbre n'a que lemasc. Cérièïre
blanquâou, cerisier qui produit la guigne blanche.
Dér de Blan.
Blanquas, asso, adj. Blanchâtre, qui tire sur le blanc;
d'un blanc sale.
Poj. de Blan.
Blanqué, s. m. Cérat de Galien, pommade résolutive,
détersive et dessicative ; onguent connu aussi sous le nom
de blanc Bhasis , par corrup. blanc raisin, d'une couleor
blancluMrc.
IIG
BLÂ.
Blanquéïras, s. m. Terre schisteuse et argileuse, d'une
teinte jaunâtre pâle ; terrain à maigre végétation. Pour le
mettre en produit, il faut le défoncer profondément.
Dér. de Blan. et du celt. cair, pierre, yuier et autres.
Blanquéia, v. Paraître blanc ; avoir de loin une teinte
blanchâtre ou lumineuse; tirer sur le blanc; devenir
blanc. — Lous sères acouménçou dé blanquéja, l'aurore
commence à blanchir le soinraol des montagnes. Adéjà
blauquéjo, il devient blanc, il vieillit, en parlant d'un
homme qui commence à grisonner.
Dér. de £lan.
Blanquéto, s. f. Blanquette, espèce de fricassée, de
gibelotte d'agneau, de chevreau ou de rogatons de rôtis de
veau ou de mouton, à la sauce blanche.
Blanquéto de Limoàs, Blanquette de Limoux, nom que
le fr. a emprunté au lang. comme le précédent. C'est un
vin clairet et mousseux, de môme natnre mais plus piquant
que la clairette de Die.
Blanquinoùs, ouso, adj. Dim. Blanquinousé, péjor.
Blanquinousas. Blanchâtre ; tirant sur le blanc ; d'un
blanc sale. Peut-être est-il d'un degré supérieur à Blan-
quas, déjà péjor. — V. c. m.
Blanquoù, s. /". Blancheur ; couleur blanche.
Blaquarédo, s. (. Chênaie ; taillis de chênes blancs.
Ce mot est formé de la finale caractéristique, méridio-
nale essentiellement, élo, qui est le signe de la collecti-
vité, et qui répond à la terminaison lat. elum, et armori-
caine ek : le radical, ou mieux les deux syllabes qui pré-
cèdent, se décomposent en blak, celt. blanc, et quar qui
égale querc, celt., d'où le lat. a fait quercus, chêne; et en
voulant désigner un lieu planté de chênes, une chênaie, il
s'est servi de son collectif etum, traduit dans la langue
d'Oc par édo. Ainsi s'est formé quercetum, même ques-
notum, exprimé en fr. par chênaie cl en lang. par blaqua-
rédo, ou blanche chênaie, ou taillis de chênes blancs.
La première syllabe est indicative de la qualité ; la seconde
représente le radical celtique, caractérisant le sujet, l'arbre
lui-même. Mais il n'est peut-être pas de syllabe qui ait
subi autant de transformations, qui ait été plus défigurée
que le nom du chêne, l'arbre des Druides, le vieux gau-
lois tann. On le retrouve en Armorique, et il est syno-
nyme de dero; le latin l'avait altéré en querc u>, avec la
désinence propre au génie de sa langue. Il est toujours
reconnaissable et le changement graphique devait avoir été
produit par la variété de prononciation. Tann ou dero
sonnaient indifféremment comme tsann, chann, sann, ou
ehero, chesro, xero. quero ; quand la voyelle finale, muette
sans doute, est tombée , on voit facilement comment ont
pu se former et le mot latin et les variantes romanes. Si
bien que, d'après les plus anciens titres, tann primitif est
exprimé par tasnus comme par connus, d'où leur collectif
ta$netum et casnetum, ce dernier donnant quesnetum, le
môme que quercetum, plus rapproché du latin, et employés
tous deux également dans la traduction ou la reproduction
BLA
des noms comnmns ou de localités, tels que chênaie, écrit
autrefois chesnaie comme c/iesne, et Chesnei (Eure), Quesnay
(Calvados) , Chenay (Sarthe) , Cheney (Yonne) , Chenaye
(Deu.x-Sèvres), Chenois (Meurtho), Chesnaye (Seine-et-Oise),
Tannois (.Meuse), Ckanoy (Haute-Marne), Xenois (Vosges),
Sannois (Seine-et-Oise), T/ic/iay (Indre), yue/ta»/ (Calvados),
Casneuil (Lot-ct-GaronnC;, identiques à Thenailtes (Aisne),
Chenailles (Loiret), Tkenneil (Indre-et-Loire), et Quesnay
(Nord), lous analogues, et tous rendus par la forme inva-
riable latine, Quercetum ou Quesnetum. Le lang., en em-
ployant édo, as, ièro, ièïro, comme désinences, n'a fait
qu'approprier au génie propre de sa langue et de sa pro-
nonciation, ce que dans d'autres dialectes on entendait et
on prononçait avec une autre inflexion. Jlais la dérivation
est évidente ; elle se fait mieux sentir dans La Blaquièïro,
La Blachère (Ardèche), qui confirme la filiation — Voy.
les articles Cassayno, iido et lè'iro, suffixes.
Blaquas, s. m. Dim. Blaquassoù. Jeune chêne blanc.
Blaquassino, s. f. Jeunes pousses du chêne blanc qui
se convertissent en buisson faute d'être élaguées, ou pour
avoir été broutées à leur naissance.
Blaquièïro (La), s. f., nom pr. de lieu. La Blaquière,
hameau de la commmie de Cendras, près Alais, probable-
ment dans l'origine un taillis de chênes blancs. Même
forme et môme étym. que Blaquarédo. — Voy. Blaquas.
Blaquo, s. f. Jeune ramée du chêne blanc, dont les
moutons sont très-friands, et dont on fait des fagots pour
leur nourriture d'hiver.
Blasa, t). Faire de la blaso. premier travail des vers à
soie qui veulent filer leur cocon.
Dér. de Blaso.
Blasi, s. m., nompr. d'homme. Biaise. Au fig., noncha-
lant, mou, bonhomme. — Voy. Blèso.
Dér. du gr. BXiÇ, lâche, imbécile.
Blasi, V. Faner; flétrir; froisser, meurtrir. — Blasi,
part, pass., flétri; fané; meurtri. 11 a formé Ablasiga qui
a la même sign. — V. c. m.
Dér. du gr. BXàS, comme le nom pr. précéd., qui n'a
avec lui que la seule différence de l'accent, placé dans le
premier sur la pénultième qui est longue et rend l'i muet,
tandis que la syllabe est brève dans celui-ci, comme le
note du reste l'accenl que prend l'i final et le fait sonner.
Blaso, s. f. Bave, bourre des cocons du ver à soie : ce
sont les premiers fils qui servent d'échafaudage à ce petit
édifice et qui le tiennent à la bruyère où il est suspendu. On
dépouille le cocon de cette bave avant de le filer ; elle est ,
grossière et n'est pas chargée de l'humeur visqueuse ,
répandue par le ver, qui donne de la force et de la consis-
tance au fil de soie.
Dér. du gr. BÀàÇ, subst. de BXâiCu, être mou, flasque. Le
mol blasi existait dans la langue ; il a suffi d'un rappro-
chement pour appliquer l'épithète et faire le mot, au
moment de l'importation des vers à soie, moins ancienne
évidemment que le mot lui-même.
BLO
BO
117
Blassa, t>. Blesser. N'est pas admis avec son acception
active, et serait une injure adressé à une femme. II n'est
reçu que comme ver!», se blassa, se blesser, avorter, en
parlant d'une femme enceinte qui accouche avant le terme
naturel; faire une fausse couche.
Dér.dugr.IIXniajsiv, frapper, ou BXirceiv, offenser, blesser.
Blatiè, 5. m., au fém. BlaUhro. Dlatier ; marchand, ou
plutôt revendeur de blé. 11 a beaucoup d'analogie avec
Bladiè, s'il n'est toutefois le même.
Dér. de Bla.
Blé éto, wlj. Blet, blette, ])cu usités; mou, comme le
deviennent certains fruits en mûrissant; mince, plat. —
Péro bléto, poire blette. Bousso hléto, bourse plate. Il est
des fruits qni no sont mangeables que lorsqu'ils ont atteint
un certain point de maturité, tels que la nèfle, la cor-
nouille, la corne. Pour les poires et les autres fruits, quand
ils arrivent à ce degré de ble, ils sont à demi pourris et
perdent tout leur prix.
Dér. du gr. BXiÇ, lâche, mou.
Blé, adv. En grasseyant, avec blésité. — Parla blé,
grasseyer, bUser. — Voy. Blaïsséja.
Dér. du lat. Blœsus, bègue.
Blédo, ». f. Blette, bette; poirée; Beia vulgarit, Linn.
Plante potagère de la fam. des Chénopodées. — Coslot ou
couslétos dé blédo, cardes de poirée.
Dér. du lat. Blitum, ou du gr. BJitov, m. sign. En ital.
Biela, en esp. Bledos.
Blêmi, adj. m. sans fera. Blême, pâle.
Dér. du gr. BXÉjxfi», aspect, visage.
Blèso, s. m., nompr. d'homme. Biaise. Au flg., niais;
nigaud. — Fa>ire dé soun Blèso, faire l'innocent, le bon
apôtre, la cbatte-mittc. — Voy. Blasi.
Dér. du lat. Blasius, du gr. Bki^.
Bléste, ». m., ou Blésto, ». f. Talc, sorte de mica-
schiste, concrétion de mica; pierre tdqueuse, commune
dans nos Cévennes, opaque, feuilletée en lames minces,
flexueuses, jamiàtres ou grises, facilement pulvérulentes;
elle se trouve en amas ou en filons dans les différentes
roches de cristallisation ou dans les calcaires qui lui sont
subordonnés.
Le roman avait le mot Blesie, bom-bier, chose sale.
Dèriverait-il du lat. Bliteus, vil, pour signifier un terrain
de peu de valeur ou qui se convertit aisément en boue?
Blétoù, ». m. Diin. Blétouné. Clou rivé d'un couteau,
de ciseaux, etc., qui est accompagné d'ordinaire d'une
rosette d'argent ou de cuivre.
Corrup. de Boulait.
Blétouna, v. Clouer la lame d'un couteau à son manche,
y mettre un clou rivé.
Blo, ». m. Total, assemblage en bloc de différentes choses
de nature et de valeur diverses.
Dér. de l'allem. Block, tronc, souche ; gros morceau de
métal bmt.
Blodo, t. f. Blaude; blouse; sarrau de toile, le plus
souvent bleue, que les cliarrcticrs et les cultivateurs, dans
beaucoup de départements, portent par-dessus leurs habits.
Dér. de la bass. lat. Btialdus, bliaudus, venant de
bla vus.
. Bloun, mieux Blounde, do, adj. Dim. Bloandé, bloun-
din, Uoundiné, bloundinà, bloundinoùs; péj. Bloundai,
Uoundinas. Blond, onde; d'mie couleur moyenne entre le
doré et le chàtain-clair. — Bloundin est souvent un sobri-
quet, que l'on donne rarement à un blond, mais bien par
antiphrase à un uoireau, à un teint prescjuc mulâtre.
Nombreuses variétés d'étym. : les unes prises du saxon
Blond, mêlé; d'autres du lat. upluda, couleur de la graine
de millet, ou de ablunda, paille, couleur de paille; ou
bien de bladum, couleur de blé; ou encore de blandut,
agréable.
Blouqua, u. Boucler ; serrer avec une Iwucle. — En
parlant des cheveux, le lang. dit frisa, dans le sens de
boucler ; mais blouqua serait impropre.
Blouquo, ». m. Dim. Blouquéto, augm. Blouquasso.
Boucle, anneau de métal, muni d'un ardillon, et qui sert
de fermeture à bien des objets divers. — S'emploie dans
toutes les acceptions, sauf boucle de cheveux.
Dér. du lat. Buccula, anneau du bouclier par oii ou
passait le bras.
Bloaquà, ». m. Clou de soulier, court, à tète ronde et
plate, dont on sème la semelle par lignes régulières. Il ne
faut point le confondre avec la taclio, petit clou, fi tète
grosse et ronde, comme les clous de fauteuil, pour fixer
toute sorte de choses délicates, et qu'on appelle en fr.
broquette. Métathèse de Broquo, en esp. broca, clou.
Dér. de Blouquo, parce que cette espèce de clous sert à
relier les différentes assises de la semelle, comme si elles
étaient serrées par des boucles.
BIu, OÏO, adj. Dim. Bluïé, péjor. Btuxas. Bleu, bleue;
violet; de couleur bleue ; une des sept couleurs primitives
— Blu dé ciel, bleu céleste. Véni lout blu, prendre un
teint pourpre de colère, de frayeur ou de froid. Estre passa
dou blu, être désappointé, désabusé de ses prétentions.
Il se prend quelquefois comme substantif; mais il se
rapproche alors de l'argot. Vn blu signifie un mauvais
bidet, une rosse, mi àne, et par ext. au jeu de cartes, tm
as. — Au pi. m. lous blus, les bleus, désignation de parti.
Dér. de l'allem. Blauw, azur, bleu de ciel.
Bluïastre, astre, adj. fileu&tre; violacé; tirant sur le
bleu ou le violet ; d'un bleu sale.
Blaiéja, v. Paraître bleu; jeter de loin une teinte bleue,
azurée ou violacée.
Dér. de Utu.
Bo, bono, adj. Dim. Bouné, péj. Bounai. Bon, bonne;
qui a de la bonté; parfait ; qui a toutes les qualités dési-
rables selon sa nature ou pour sa destination, on pour son
état ; en parlant des personnes et des choses , excellent,
fort, vigoureux, vrai, heureux, humain, franc, véritable.
— Lorsque cet adjectif précède immédiatement le sob-
118
BON
BOR
stantif auquel il se rapporte, il se dit : bon ; xm bon home,
dé bon pan. 11 fait de iiiêiiie, lorsque le uiot suivant com-
mence par «ne voyelle dans un môme membre de phrase :
Aquà's bon à sâotipre, c'est bon à savoir. — Faire soun bon
jour, faire sa communion eucharistique.
Jùii-bo, il fait bon : le temps est doux. Lorscjue cette
expression (a:i-bo est suivie immédiatement d'un infinitif,
on dit bon. Fuï-bon marcha, il fait bon cheminer. Faï-bon
tAoupre quicon, 11 est utile d'avoir quelque instruction.
Se faïre bo pér quâuoquus, se porter fort pour quel-
qu'un, le cautionner. Faire bo dé r.én frans, s'obliger sur
parole de cent francs ; les jouer sur parole.
Un bon home ne veut pas dire comme en fr. un I)on-
homme, un peu niais; mais un homme solide au travail,
soit pour l'adresse, soit pour la force. — Aquà's dé bon
faire, dé bon dire, cela est aisé à faire, à dire. Escrittiro
dé bon Ugi, écriture très-lisible. Aquà's dé bon vitre, c'est
clair, évident. Loti bo dâou jour, le bon du jour. Faï bon
èstre riche, parlez-moi d'être riche. Ou dises dé bo ? Tu
parles sérieusement ? Y vaï dé bo, il ne plaisante pas. Y-a
une bono lègo, iino bono houro, il y a encore une forte
lieue, une bonne heure. I.ou bon Diou, Dieu, le bon Dieu;
se dit quelquefois pour crucifix.
Dér. du lat. Bonus.
Bocho, s. f. Boule, ordinairement en buis, servant à
jouer. — Jouga à las bochos, jouer au jeu do boule. Tira
uno bocito, débuter une boule.
En ital. Boccia, en csp. bocha.
Bofi, io, adj. Péj. Boufias. Bouffi ; gros joufflu; enflé ;
difforme de figure ; boursouflé.
Dér. de Boufa.
Bojo, s. f. — Voy. Saqua.
Bolo, s. f. Borne; limite ; frontière; ligne divisoire quel-
conque entre deux territoires, comme entre deux héri-
tages, deux champs, qu'elle soit déterminée par la nature,
un cours d'eau par exemple, une chaîne de rochers, les
eaux versantes d'une montagne, ou par un canal et un
chemin public, soit par des bornes conventionnelles entre
parties. — Faire bolo, servir de point ou de ligne de déli-
mitation.
Le plur. lat holot est d'un emploi plus fréquent.
Dér. de la hass. lat. Bola : bolas seii mêlas plantare,
planter des bornes, venu sans doute du gr. BôiXoç, motte,
tertre.
Bomi, s. m., ou Vomi. Vomissement; action ou envie
de vomir; haut-le-cœur. — Aquà faï véni lou bomi, cela
soulève le cœur.
Dér. du lat. Vnmere.
Bon, bono, adj. — Voy. Bo.
Bonaloùs, oasso.Dim. Bnmifiussé, éio, n. pr. d'homme,
qui réiKind à bonne fontaine : Bonafous, Bonefoux ou Bon-
nafoux. L'ancienne langue d'Oc disait fous pour fontiiine.
Dér. du lat. Bonus, et fons.
Bonamén, arft». Bonnement; sans fiel, sans malice; sans
arrière-pensée. C'est souvent un adv. explétif, sans portée:
Jlonamén dé que vous dirai? .\u fait, que voulez-vous que
je vous dise ?
Dér. do Bonus, bonâ mente.
Bonhur, s. m. Bonheur; félicité; état heureux; pros-
périté; chance heureuse. — Estre dàou bonhur, être heu-
reux au jeu; avoir bonne chance. Se lou bonhur m'en vdou
dire, si le hasard veut me sourire. Lou bonhur gn'én vôou,
le bonheur le suit, s'attache à lui. Y-a pas bonhur que dé
canaïo, il n'y a de bonheur que pour la canaille.
Dér. du lat. Boyia et hora.
Bonjour, s. m. et interj. Dim. Bonjotimé. Le bonjour
et Bonjour ! En langufd. plus qu'en fr. on distingue le
bonjour du bonsoir ; on s'y trompe bien quelquefois, mais
rarement. On dit bonjiur toute la matinée jusqu'à midi,
et bonsovàr de midi au soir. Bonjour et bonsouèr se disent
soit en accostant quelqu'un, soit en passant à côté de lui,
sans s'arrêter. On ne les dit guère pour prendre congé, ce
qui se fait par adiou, adiou-sias, ou bien vdtro, auquel on
répond : amaï à vous, je vous en dis autant. — Lou bon-
jour à vosto fénno, vous présenterez mes salutations à
votre femme, et l'on réplique invariablement : Y manqua -
rat pas, dé vosto part, je n'y manquerai pas, de votre
part.
Formé de Bon et de jour.
■ Bonsouèr, s. m. et interj. Dim. Bonsouérné. Le bon-
soir, bonsoir ! salutation du soir. — Voy. Bonjour. —
Aça anén, bonsouèrné. Çà, nous partons, bonsoir! Dire
bonsouèr, dire adieu ; renoncer à.
Formé de lion et de soiièr.
Bôou, s. m. Ocre; terre bolaire. On emiiloie l'ocre en
pain ou en motte pour marquer d'une couleur rouge ou
jaune foncé les moutons qui sont destinés à la boucherie.
Les bergers s'en servent aussi par coquetterie pour farder
leurs plus beaux moutons, concurremment avec le vert-
de-gris.
Dér. du lat. Jiolus. bol, terre bolaire.
Bor, s. »i. Dim. Botirdé. Bord; lisière ; extrémité; rive.
— Préne sus lous hors, prendre vers les extrémités, sur la
lisière. Siifs bien âou bor, tu es bien sur le bord.
Dér. du lat. Ora etdugr. "Opoç, par l'addition du B.
En allem. bord, m. sign.
Bordo, .f. f. Dim. Bourdéto. Fétu, brin de paille ; saleté;
atomes surnageant dans un liquide. — Tiro mé aquélo
bordo, tire-moi cette paille de l'œil, dit-on i quelqu'un
qui avance une grosso liablcrie. Y-a bé dé bordos dinc aquél
afaïre, cette affaire est bien sale, bien louche.
Dér. comme le v. fr. Ord, orde, du lat. sordidus, laid,
sale.
Borgne, gno, adj. Dim. Botirgné, péj. liourgnas. Bor-
gne, privé d'un œil. — C'est par le frottement du fr. qu'on
a restreint le mot Borgne il ce sens. 11 parait certain qu'en
lang. il signifie proprement : aveugle, privé de la vue,
comme cela se démontre par les phrases proverbiales :
BOR
BOS
119
Borgne d'un ièl ; il est clair que borgne s'enlend ]!i {wur
aveugle. Une chansun fr. ilil bien aussi : Il était borgne
des deux yeux. L'argén fat canta loua borgnes, l'argent
fait cliantcr les aveugles et non les lM)rgnes. D'aïcl à cent
ans sérén toutes borgnes, dans cent ans nous serons tous
aveugles, nous n'y verrons plus. On apjiclle aussi les vers
à soie tous borgnes, à cause du préjugé général qui veut
qu'ils soient privés de l'organe de la vue. Enquiè coumo
un ca borgne, ne peut s'entendre que d'un chat aveugle;
les animaux ne pouvant beaucoup s'inquiéter de la iicrte
d'un seul œil, qui ne fait que diminuer faiblement leur per-
ception visuelle. Bado coumo un borgne qu'a perdu soun
battoà, il crie comme un aveugle qui a perdu sou bftton ;
crierait-il s'il lui restait un œil ? Siis borgne que y véses
pas, tu es donc aveugle pour n'y pas voir?
Dér. du bas-breton Born, m. sign.
Borgno, alj. fém. de Borgne. Dim. Bourgnéto ; péj.
Sourgnasso. Borgne ; aveugle. .\u fig. obscure. — Ma
grand-la-borgno. ma mère-l'oie ; la traduction est exacte,
mais incomplète. En fr. comme en lang., il s'agit d'une
bonne vieille grand' mère, qui charme et endort les enfants
par ses longs contes. Notre gran a la mftmc spécialité que
la Mère-l'Oie. Ce^jcndant il y a pour nous quelque chose
de plus ; nous n'avons pas seulement recours à notre con-
teuse, comme on fait à l'autre, {jour nous amuser ou appe-
ler le sommeil. Lorscjuc quelqu'un nous poursuit ou fatigue
de billevesées, de promesses auxquelles on ne croit pas,
de contes à dormir deijout pour tout dire, on lui jette à
la figure : ma gran-la-borgno ! ou contractivemont : ma
jran.' C'est une expression d'incnVlulilé, de dédain, de
reproche, de colère. On voit qu'il est toujours question de
contes, sans quoi l'ellipse ne s'expliquerait pas, c'est comme
si l'on disait : vous me débitez des sornettes, je n'en crois
pas un mot. En fr. on n'emploie pas ainsi le nom de la
Mère-l'Oie, c'est une lacune. Resterait maintenant à savoir
quel malheureux accident rendit liorgne ou iiour mieux
dire aveugle, notre pauvre gran. L'infirmité lui vint .sans
doute avec l'âge, et elle a toujours été si vieille ! Xlais que
de plus clairvoyants décident à quelle époque de sa vie ma
gran-la-borgno perdit la vue.
Borgno, s. f. Canal d'entrée ou d'amont, canal de fuite
ou d'aval d'un moidin h eau. C'est généralement ce pas-
sage voûté et obscur, qui conmiencc à la première vanne
de chute et se termine au canal couvert de fuite.
Dans le Ixis-bret. liorn ; on ital. Vornio, m. sign.
Borio, s. f. Dim. Bouriéto ; jiéj. Bouriasso. Métairie ;
ferme ; closerie ; domaine déiiendant d'une seule et même
exploitation. Comme ce mot est propre aux llautes-
Céveunes, où la propriété est fort divisée, il ne représente
guère qu'un petit domaine. Le mot .Has, plus particulier
aux Basses-Cé venues, et à un pays de plaines et de larges
vallées, enlraine \"u\6e d'une plus largo exploitation.
Borio est devenu nom pr. ol s'appli(iue à tout mi quar-
tier, où se trouvait sans doute et où il existe encore un
manoir ou une ferme principale. On le traduit en fr. par
La Borie, et quelquefois on on a fait un nom d'homme.
Dér. de la bass. lat. Boria, fonds do terre, maison de
campagne; du lat. fmuria, étahles & IwRufs.
B08, s. m. Dim. Bousquè; péj. Bouscarasso. Bois, en
général, substance ligneuse dure et compacte des arbres
et des arbrisseaux; forêt ; taillis; futaie. — Apara un bos,
défendre l'entrée d'un taillis aux tmu|)oaux. Bos dé luno,
bois coupé dans la lunaison favorable ; dans le sens de ce
préjugé qui veut qu'on coujjo après la pleine lune tout le
bois qui perd annuellement ses feuilles, et en nouvelle
lune celui qui les conserve toute l'année (Yog. BartassoitJ.
Bos coumun, communal ou communaux, pâturages où les
habitants d'une commune ont droit de pâture ; dans les
Hautes-Cévennes et la Lozère, communaux sur lescjuels les
habitants ont droit d'affouage, c'est-à-dire le droit de
prendre du Ijois iwur leur chauffage, fixé par répartition
des feux. Sén dinc un bos ? Sommes nous dans une forêt, au
milieu des voleurs? .Vu fig. Porto bien soun bos, il jwrte
bien son âge, il est vert pour son ftge. Es dé bon bos, il
est b&ti de bon Ixiis, il durera longtemps. Faire /td dé tout
bos, faire flèche de tout Iwis. Laissas faire luu bos, loc.
prvb., ayez patience ; laissez pisser le mouton ; mot A mot
cela signifie : attendez que le Irais ait travaillé tout ce
qu'il doit, qu'il ait pris le degré de sécheresse néces-
saire.
Le radical Bos, ses composés et ses dérivés, ses dimi-
nutifs ou ses jjéjoralifs ont donné naissance à une famille
Irès-noinbrousc do noms propres do personnes et do lioux.
Pour bien saisir les variantes dos apj)ollations modernes,
il faut connaître les changements par lesquels a passé le
primitif qui se trouve dans la langue ci?lti(iuo Bos, base,
dans le germaniciuc Buse, ou dans le gothique Busche.
Suivant l'innuence dominante, la bass. lat. fit ; Boscus,
boseum, buscus, buschus, avec les dim. Boschelus, buske-
tus, busquetus. Le roman disait : Bos, base, bor, boise,
bosche, bou, busche, et les dimin. Boscal, bosquet, buchel,
bosquina, boscntge, boisson, bogssala; en csp. portug.
Bosque, bosquete; en ital. Bosco et boschelto.
De ces éléments se sont formées, disons-nous, bien des
dénominations locales ; mais le fonds était si rioho, dans
lui pays couvert do forêts, et il prêtait si bien à une dési-
gnation, qu'il ne faut pas s'en étonner. Les altérations de
langage s'en mêlant ensuite et venant à modifier les mots
et les sons, à les amoindrir ou à les renforcer, il n'est pas
surprenant non plus que la véritable racine des vocables
soit souvent difficile ft distinguer, et puisse être confondue
dans oesbroussailli's. Nous essaierons do les retrouver sous
leurs formes diverses, et sous chacun des composés on
dérivés, diminutifs et autres. — Voy. Bruèl, Bruguii.
Ici notons les nuances qui retracent dans notre langue
colles du primitif lui-même. Dans les noms d'homme et de
lieu, se conservent très-rapprochées : Mu Bos, Um Bosc, le
Bosq (Hérault) ; dèl-bos, Delbos, Dalbos, Dalbosc. Dnbosc
150
BOU
ou Dulwis, tous idonliques et faits du môme l)ois ; les
composés Chalbos, Châoudobos, Chàoudoboi, Mânubos ,
Malbos. Malbosc. — Voy. ces mots, et autres, sans oublier
ceux où la désinence particulière k notre territoire se
montre, comme dans les noms : Boussargue, qui est
identique aux premiers, et Bussargiie.
Bosso, ■«. f. Dim. Bousséto, Boussignolo, péj. Boxissanso.
Bosse, déviation de l'épine dorsale ou du sternum ; enflure
causée par une contusion ; en général, toute excroissance
contre nature. — Bounla sa bossn, rouler sa bosse, voya-
ger de tous cotés en exerçant différentes industries inter-
lopes. Faire ou j^ ficha uno bosm, manger et boire avec
excès. Se ficha uno bosso ddoti rire, rire à ventre débou-
tonné, ou mieux dans le même sens : Créba ddou rire ; ces
trois locutions sentent fortement la langue verte. Ses fa
uno bosso âou front, il s'est fait luie contusion au front,
qui s'enfle.
Dér. du celt. Boss, ou du gr. «PJaaa, enflure.
Boto, s. f. Péj. Bouiasso. Botte, chaussure de cuir qui
couvre le pied, la jambe et quelquefois le genou. — Coumo
vaï la boto ? comment va votre santé ?
Emp. au fr. En celt. Bot, pied.
Bon, t. m. Dim. Bouté. Bout; fin, extrémité, reste de
quelque cbose; brin. — Fiou à dous bous, à très bons, fil
à deux ou trois brins. Sèn pa'ncaro âou bon, nous ne
sommes pas encore au bout, à la fin; nous n'avons pas
fini. Tout se v^ra dou bou, nous verrons bien à la fin du
compte. Ia)u téne pér un bon bou, j'ai mes sûretés avec lui ;
je le tiens par un bout qu'il n'essaiera pas de rompre.
Lou boit ddou mounde, terme de charcutier, l'intestin
cœctim, boyau fermé naturellement d'un côté, dans lequel
on ensache de la viande de porc hachée dont on fait une
sorte de mortadelle : c'est cette mortadelle qu'on appelle
bou ddou mounde.
Dér. du celt. Bod, fond, extrémité, ou du gr. BuG6ç,
fond, profondeur.
Bou, 1. m. Papillon mile des vers à soie. Plusieurs
femelles pouvant être fécondées par un même mâle, il y a
intérêt à prendre pour le grainage plus de femelles que de
m&les ; à cette fin, lorsqu'on choisit les cocons qui doivent
servir, on donne la préférence k ceux qui sont bien formés,
qui sont les plus durs, parce qu'il est à supposer qu'ayant
plus de soie, il faut admettre que les papillons qui en
proviendront seront plus robustes ; on reconnaît ensuite ou
on croit reconnaître les mMes dans les cocons à forme plus
allongée, plus pointue aux extrémités, mais souvent on se
trompe à ce triage dont les données sont peu précises.
C'est du reste un mauvais procédé et une économie mal
entendue que de choisir trop peu de mâles pour le nombre
des femelles que l'on élève; car le plus souvent la mau-
vaise qualité de la graine est due â sa provenance de mâles
épuisés. Il est prudent de calculer seulement deux femelles
pour un mAle ; mais l'usage contraire est malheureusement
suivi par les spéculateurs, surtout depuis l'extension que
BOU
cette industrie a prise. Quand il sera possible d'échapper à
tous les inconvénients des grainages faits au hasard, et
que chaque éducateur éclairé par l'expérience et soigneux
(lèses intérêts, voudra lui-même avec intelligence surveiller
cette opération délicate, en y mettant l'importance qui
convient, peut-être la solution du problème si intéressant
pour nos contrées aura-t-elle fait un pas de plus.
Bou, .s. m. Figue-fleur, ou figue précoce, que le préjugé
donne pour mXh h la figue fraachc. C'est cette idée qui
lui a fait donner le nom de Bou, bouc, qui est typique du
genre niAle.
Bou, s. m. Péj. Boucas, Boucaras. Bouc, mâle de la
chèvre, Capra hircus, Linn. Mammifère de la fam. des
Ruminants. Se prend aussi pour : outre à vin faite d'une
peau de bouc, dont le poil est tourné en dedans. — Es
confie coumo un bou, il est enflé comme une outre; ou au
flg. il a le cœur gros, de colère ou de chagrin.
Dér. du celt. Buch, d'où le bas-bret. bouch, le gallois
bwch, le saxon boch, dans la bass. lat. buccus.
Boubâou, s. m., n. pr. de heu. Boubaux, Saint-
Martin-de-Boubaux, hameau de la commune de Lamelouze,
arrondissement d'Alais.
Dér. de Bou, bon, dialecte lozerot, ou peut-être de bos,
en lat. buschus, bois, avec apocope, et de bdou, baux,
par substitution du t; en b, lettres identiques, vaux, val,
anc. fr.. vdou, lang., vallon, vallée ; d'où bon vallon ou
vallon boisé. Les noms analogues seraient : Belval, Bel-
leval, Beauvalon , ou Bonval , Bonneval , noms d'homme ;
Bonnevaux, canton de Génolhac, arrondissement d'Alais.
Boubo, ou Boubou I interj. Dim. Boubéto , boubou.
Terme d'enfant ou de nourrice. C'est le baragouinage de
l'enfant qui demande à boire. On sait qu'iv cet âge où peu
de syllabes sont encore connues, on ne s'attache qu'à quel-
ques consonnes qui frappent davantage la mémoire, en y
joignant luie voyelle quelconque, et on en fait une rédn-
plication de la syllabe retenue pour la rendre plus sen-
sible. L'enfant ne se rappelle pas de tout le mot béoure,
mais le B l'a frappé comme le son de la diplithongue o«,
il en fait boubo et botiboù. de même qu'il a créé papa,
poupo, tété, etc. Les grands enfants qui sont auprès de
lui, et qui devraient toujours le ramener à la prononcia-
tion du mot propre pour l'y façonner, au lieu de cela,
abondent dans son sens et se plient à son vocabulaire. La
nourrice ne manque jamais de lui dire : Vos boubo, vos dé
bouboti, au lieu de prononcer le mot béoure, qu'il compren-
drait évidemment, puisque c'est lui qui a formé par ana-
logie son boubo. S'il ne le répète pas exactement, ce n'est
pas faute de l'entendre ni d'en faire l'application, mais
plutôt d'être exercé aux procédés labiaux et autres qui sont
nécessaires à la prononciation. Il est bien entendu que, par
cette raison, le dim. BouAefo n'est jamais employé que par les
nourrices et les bonnes, jamais par leur poupon lui-même,
qui aurait aussitôt fait de dire béoitre, s'il pouvait varier et
articuler plusieurs syllabes avec changement de consonnes.
BOU
BOU
121
Boubourado, i. f. Pi^j. Bouboiiradasso. Vapour chaude et
étouffante qui s'exhale d'un endroit chaud et enfermé; étuvc.
Onomatopée exprimant le bruit d'une eau qui bout à
gros bouillons: hou! Ixiu ! répété.
Boucan,!, m. Boucan; Itriiit; vacarme; tintnmarre;
l)ruit d'une rixe.
Ce mot, qui est importé, comme son homonyme fr., de
l'idiome des Caraïbes, signifie le mode et le lien de la pré-
paration des viandes qu'on boucane ou qu'on fume. Il a
donné naissance au v. boucaner et au s. boucanier, appli-
qués d'abord aux Indiens qui boucanaient à la fumée des
viandes de bœufs sauvages, dont ils faisaient commerce.
Plus tard, ce commerce d'échange innocent et primitif fut
délaissé par les sauvages, qui travaillaient plus directe-
ment et qui se firent flibustiers. De toutes les nations leur
vinrent des compagnons : c'étaient bien les plus grands
tapageurs et les plus mauvais garçons du monde. Le mot
originaire dévia de son acception primitive, et il reparut
comme synonyme de tapage tumultueux, vacarme, et
caractérisa ainsi les boucaniers, faiseurs de boucan, tapa-
geurs et querelleurs. — Voy. Bousin.
Après cela, comme l'étym. a des ressources, elle a fourni
dans le celt. Bocan, impudique, qualification encore très-
applicable à ce genre de tapageurs, et dans le gr. Buxcîv»;,
instnimentde tapage par excellence, qui les caractérise aussi.
Boucariè, ». f., n. pr. de rue et de quartier, qui signi-
fiait dans l'origine Boucherie, inscrit aujourd'hui sous le
nom fr. de Bouquerie.
Dans les premiers temps de l'émancipation des com-
munes, les différentes corporations des arts et métiers adop-
taient des rues et des quartiers particuliers, soit par ordre
de leurs syndics, soit que l'autorité consulaire voulût
détruire tout privilège de quartier en obligeant tous les
exploitants d'une même industrie à s'établir dans une
même rue. — Voy. Fabrariè, Frucharii, Piiroulariè .
Sabatariè, TéUsariè, etc.
nouqunrid, dérivant de bou, botte, boearia, dans labass.
lat., désigne le lien où l'on tuait les boucs et où l'on en
préparait la chair, où l'on tenait boutique pour la vendre.
Or il .semble extraordinaire que la viande des boucs et des
chèvres fiit le principal objet du commerce des boucheries;
cependant le doute est difficile quand on se rend compte
des mots Iwucher et boucherie, et quand on trouve dans la
charte d'Alais de l'année 1200, écrite en langue vulgaire,
ce curieux passage :
Et mmnndamenz disent que en carreiras puhligas o em
plas'as n boquier o H nltre mnnelier lo sanc de.lz bocz non
jeton ni escnmpon, ni las bii/ladas o attras causas pudenz,
ni auclzon los bocz emptassas ; e aizo vedam a tofz homes.
« Nous défendons expressément aux bouchers de jeter ni
répandre le sang des boucs dans les rues publiques ou sur
les places, non plus que les intestins ou autre chose fétide,
qu'ils ne puissent non plus égorger les boucs sur les places;
et ceci nous le défendons à tout le monde. »
n paraîtrait cependant qu'au moyen âge il existait deux
sortes de bouchers, les uns dits boquiers, les autresmaïe/i«r».
du lat. macellarius. Sauvages nous dit que ce dernier nom
appartient à un autre dialecte. Néanmoins dans la charte
de <Î00 nous voyons les deux noms en usage à Alais, en
rapprochant l'article que nous venons de citer de celui-ci :
Establen que fuit It masellier vna regada en lan juron
sobrels quatre evangelis de Peu qvezel masel defra la vUa
dalest lur etient en alcvna guisa carn de moria ni poirida
dallra gnisa mortalz non vendran ; cant verre rendran
aret o troia digon o al comprador, iasla aisso que non H o
demant ; de feda si hom non H a deinanda non son tengut
de dire nomnadamenz. Creissem que las camz non sion ten-
giidas en aigo, en aicique las vendant polridas per bonas;
e si en contra aizo fasion H seinnor melan lur pena.
€ Nous ordonnons que tous les bouchers, une fois par an,
jurent sur les quatre Evangiles de Dieu, que dans la bou-
cherie ou dans la ville ils ne vendront sciemment aucunes
viandes passées, ni pourries, ni provenant de bêtes mortes
de maladie. Quand ils vendront verrat, bélier on truie, ils
devront en prévenir les acheteurs, même sans qu'on leur
demande; s'il s'agit de brebis, ils ne seront tenus de le
dire qu'en tant qu'ils en seront requis expressément. Nous
ajoutons qu'ils ne tiendront point les viandes dans l'eau
afin de vendre ainsi pour bonnes celles qui seraient pour-
ries, et s'ils se mettent en contravention ils seront punis
par leurs seigneurs. >
Il existait donc des états distincts et par le genre de
leur commerce, et par le quartier de leur réunion en con-
frérie, puisqu'à Alais il y avait une rue appelée Boucariè,
et une autre nommée Uaxèl-vièl. Il faudrait en conclure
que les boquiers, bouchers, ne vendaient que delà chair de
bouc, chèvre et chevreau, qui était sans doute plus estimée
que de nos jours, et les maseliers toute autre espèce de
viande, comme mouton et porc.
On pourrait tirer une autre induction du rapprochement
de nos. deux citations. On y voit qu'il est défendu aux
bouchers d'égorger les boucs dans les rues et places et d'y
jeter le sang ; mais on ne retrouve pas la même prohibi-
tion laite aux maseliers pour les béliers, verrats ou truies.
D'où on pourrait penser, à notre avis, que les boquiers
égorgeaient toutes sortes de bêtes comprises dans l'expres-
sion générique boves, et que les maseliers n'étaient que des
espèces de revendeurs de viande de basse qualité, qu'ils
auraient achetée des particuliers ou des gens de la cam-
pagne. Ce qui confirme cette idée, c'est leur serment de ne
pas vendre, à leur escient, de la viande de bètes mortes ;
il est évident que, s'ils avaient égorgé eux-mêmes, ils
n'auraient pu être dans le doute si leur viande appartenait
ou non à une bête morte. Une seconde considération, qui
corrobore cette idée, est puisée dans l'étym. de maselier:
macellarius signifie moins boucher que marchand de
viande; en outre macellum signifie halle, étalage de den-
rées, étal de boucher; enfin macellus est le dira, de maeer.
16
12&
BOU
BOU
maigre. De tout cela on pourrait conclure que le maselier
n'était que le revendeur, Tétalagisle de viandes maigres,
de moindre qualité, et destinées à la classe la plus pauvre ;
les boquiers, bouchers, étaient au contraire à peu près ce
qu'ils sont de nos jours .
Boucaru, udo, adj. Péj. Boucarudas. Lippu ; qui a de
grosses lèvres. Ce mot, qui n'est plus dans le dialecte, est
resté nom pr. d'homme.
Boucha, V. Tirer une boule, débuter une boule ; terme
du jeu de boules. Ou lance de loin pour cet effet une boule
contre celle qu'on veut débuter, éloigner du but; si elles
sont d'un poids égal et qu'on tire juste, la boule lancée
perd tout mouvement et le communique à l'autre, qui part
au loin, tandis que la première occupe exactement la place
qu'elle a usurpée, par droit d'adresse : c'est ce qu'on
appelle : tira'n plaça, qui s'emploie aussi au fig. — Yoy.
Tira.
Boucha ne se dit au sens de boucher (tapa) qu'au part,
pass. et figurât. : es boucha, il est bouché, il a l'intellect
fort obtus.
Dér. de Bocho.
Bouchar, ardo, adJ. Dim. Souchardé, péj. Bouchar-
das. Sale ; malpropre ; barbouillé au visage ; mouton
marqué de noir ou de brun sur le museau ; un bœuf ou
un mulet, portant au museau une couleur noire ou diffé-
rente de celle du corps, reçoivent aussi cette dénomina-
tion.
Dér. de Boucho, ou de bouquo.
Bouchardije, s. f. Saleté; malpropreté; crasse sur la
figure.
Bouchariè, s. f. Bouctierie; abattoir public; boutique
où l'on vend de la viande. — Voy. Boucariè.
Bouché, s. m., au fém. Bouchèïro, dira. Bouchèïroù.
Boucher. — Voy. Boucariè.
Bouchin-Cabro, s. m. Barbe-bouc, salsifis des prés, à
fleur jaune, Trapopogon pratense, Linn., de la fam. des
Composées chicoracées. Les gamins sont très-friands au
printemps de cette plante dont ils sucent chaque jointure
au nœud de sa tige, qui a un goût douçàtre.
Dér. du lat. Barbula-hirci, d'où bouchin-barbo, et la
corrup. bouchin-cabro. En ital. Barba-di-becco ; en esp.
Barba-de-cabron.
Bouchi-tè ! interj. Cri ou plutôt commandement adressé
à la chèvre. Il é(iuivaut à Halte-là! et s'emploie lorsque cet
animal se dresse contre un arbre pour le brouter, ou quand
il prend quelque direction dangereuse. Comme cet appel
est toujours accompagné d'un coup de pierre, l'animal ne
se trompe guère sur sa signification.
Dér. de Boucho.
Boucho, s. f. Dim. Bouchito; péj. Bouckasso. Chèvre.
[Voy. Cabro.) Boucho est le fém. de Bouc, et l'ancien nom
de la chèvre en langue d'Oc.
Boucouïran, j. m., nom pr. de lieu. Boucoiran, com-
mune du canton de Lédignan, arrondissement d'Alais, sur
la route de iNimes à Alais, et sur le chemin de fer qui
traverse sous un tunnel le rocher que domine son vieux
château.
Sauvages le fait dériver de deux mots gr., Bou;, bœuf et
Korpo?, porc. On pourrait trouver une autre racine qui
paraîtrait s'accommoder davantage aux allures du pays.
Haremont on a emprunté chez les Grecs pour formuler le
nom des bourgs qui se fondaient dans les Gaules, excepté
peut-être pour quelques-uns qui pourraient remonter à la
colonisation phocéenne. Il est plus naturel de supposer
qu'on a pris dans l'idiome vulgaire, surtout alore que les
racines s'en présentent si aisément dans deux mots de l'an-
cien comme du nouveau languedocien : bou ou bouc, qui
signifie bouc, et outre, outre de bouc. La désinence an,
qui est la traduction littérale du lat. anus, anum, dérivée
du suffixe celt., signe de la descendance, de la propriété,
de la provenance, indique le sens et la signification à don-
ner au mot qui lui est attaché ; ici Bouc-ouïr-an veut dire :
lieu des outres de bouc, où l'on fabrique des outres de
bouc. — Voy. l'article Argue, et An, suff.
Sauvages a commis une erreur en écrivant à la française
le prétendu Côiros venant du gr. Le mot porc se dit bien
côiros; mais en gr. l'orthographe veut qu'on mette .Xofpoç
par un X et non Kotpo;, par un K: différence qui détermine
le sens. Dans le mot Boucouiran, d'ailleurs, pas la moindre
trace du ch, qui aurait été conservé, si la version de iiotte
savant lexicographe eût été admissible.
Boudéfla , v. S'enfler ; se gonfler, se boui-soufller. —
Aquù faï bjudéfla las bouquos, cela fait enfler les lèvres.
Las figos boudéflou, les figues commencent à tourner en
maturité; elles se gonflent.
Boudéfle, éflo, adj. Péjor. Boudéjlas, asso. Enflé;
gonflé; bouffi; boursoufllé; gros. .4u prop. et au fig.
Boudifla, v. S'enfler; former des vessies, des cloches,
des ampoules ; enlever. — Moun dé boudiflo, mon doigt
s'enfle; il me vient au doigt une ampoule, une cloche.
Boudiflo, s. f. Dim. Boudiflélo, péjor. Boudiftasso.
Vessie urinaire ; vessie de porc, (ju'on conserve gonflée de
vent pour l'appliquer comme dessiccatif; cloche; ampoule;
élevures sur la peau ; bulles formées par de grosses gouttes
de pluie en tombant dans l'eau.
Dér. comme les précédents, du celt. Bot, crapaud, bass.
lat. botta, en ital. bodda ; et du lat. inflare, flare in, souf-
fler dans.
Boudignièïro, s. f. Boudinière ; charcutière qui va
dans les maisons particulières faire l'assaisonnement des
viandes salées do porc, qu'il est d'usage d'égorger pour la
provision do l'année.
Dér. do Boudin.
Boudin, s. m. Boudin, boyau rempli d'un mélange de
sang de porc, d'iiorbos et de graisse. — Kuus pourtan pas
dé boudin, nous n'en sommes pas aux civilités ensemble;
nous sommes brouillés; il y a des motifs d'inimitié entre
nous. Cette loc. prvb. est fondée sur l'usage local qui veut
BOU
BOU
«28
que lorsqu'il! égorge un porc, ce qui a lieu dans chaque
iuai»on de paysan el presque dans toutes les familles bour-
geoises, on envoie un plal de boudin à ses parents, à ses
amis et à tous ceux auxquels on veut témoigner affection
ou reconnaissance. Aquà's cla coumo dé boudin, c'est clair
comme la bout<3ille à l'encre ; tout cela est fort obscur.
Dér. de laltass. lat. Botulus ou boteUus.
Bou-Dioul interj. Bon-Dieu ! exelam. de surprise,
d'étonnement, qu'on place h tout propos, et qui survient un
peu partout, au commencement, au milieu on à la fin
d'une phrase. — Bou-Diou .' qu'es M. Bon Dieu ! qu'il est
grand. Dé que voûtés faire, Jiou-DUntI Que voulez-vous
faire, grand Dieu !
Altération de Bo, bon ; euphoniquemcnt traduit en bou.
Boudoli, s. .■». Petit homme; bout d'homme; nabot;
enfant gros et court, replet et jouilln.
Dér. de Bon, bout, et oU, huile, comme terme de com-
paraison à une outre à huile, qui a les mêmes dimensions
et une sorte de ressemblance de conformation.
Boudoufle, s. m. Péj. Boudouflas. Gros-bouffi; gros
joufUu ou pansu ; bouffe-la-balle, dans l'argot populaire.
Ce mot est synonyme de Boudtfle, proche parent de bou-
doli. descendant plus ou moins direct de boudiflo pour
l'étym.
Bondougna, v. S'élever; s'enfler; grossir. La différence
ayec itoudifia, est que l'enflure exprimée par ce dernier
est censée remplie d'eau ou d'air ; dans celui-ci l'enflure est
produite par une contusion, d'où résulte une bosse, une
bigne, en v. fr.
Dér. de Boudougno.
Boudougno, s. f. Dim. Boudougnito, péjor. Boudou-
gnasso. Bosse, enflure, bigne, produites par un coup, par
une contusion ou par l'engorgement d'une glande ; loupe,
tumeur, excroissance charnue. — Il vient de pareilles tumeurs
à certains arbres, au chêne et au châtaignier principale-
ment.
Parait un augm. de Bougno. — V. c. m.
Dér. du gr. Bouviç, élévation.
Boudousquo, s. f. Epiderme de certains légumes; écale,
écorce, coque do certains fruits ; pellicule qui reste sou-
vent adhérente dans les nigosités de la châtaigne sèche ou
blanchie ; efllorescence du vin en bouteille ; dépôt de lie
au fond d'un vase ; éclaboussure de boue. — Manqua pas
boudousquo din tout aquà, toute cette aC&ire est bien
sale.
Dér. peut-être du gr. B4p6opo{, bourbe.
Boudroun, s. m. Terme de maçon. Biguc de ]K>isqui sert à
soutenir les planches d'un échafaud.ige, soit lorsqu'elle est
posée transversalement aux poutres principales, soit lors-
qu'elle s'enfonce dans l'épaisseur de; murs, ce qui arrive
lorsqu'on est parvenu à une élévation telle qu'on ne peut
plus échafauder ni sur des poutres maîtresses, ni sur des
6tau(ons.
Formé de Bou-dé-roun.
Boudufo, j. f. Toupie, sabot, bourdat; jouet d'enfant.
— Voy. Bdoudufo.
Bouésaje, s. m. Charpente d'un couvert ; boiserie,
ouvragj de menuiserie ; Iwisagc, tout le bois dont on s'est
servi pour boiser ; (Kirquetage.
Dér. de Bot.
Boula, V. Souffler; être essoufflé ; siffler; refuser avec
dédain ; manger avec avidité, avec excès ; dévorer. —
Boufa coumo un Utrou, souffler comme un lézard, soufiQer
de fatigue; le lézard, quand il est aux abois, rend une
espèce de son comme le vent d'un soufflet. LaUsat un pdou
bou fa à la mountado, donnez le temps de souffler à la
montée. Mé botifé d'uno lègo, il repoussa au loin mes pro-
positions. Un pdoure diable tout lou boufo, un pauvre
hère est mal accueilli partout. L'àouro boufo, le vent
souffle. Àguè lèou boufa tout toun fdoure, il eut bientôt
dévoré sa fortune. Boufes pat, ne souffle pas; chut!
silence !
Onomatopée du bruit (ju'on fait en soufflant ; en allem.
on dit puffen, gonfler les joues pour souffler. L'étym. peut
s'appliquer à im homme qui est essoufflé, ou qui se gorge
la bouclie en mangeant avidement.
B ouf aire, t. m. Goinfre; gros mangeur; voraco; au
fig. prodigue, mangeur.
Dér. de Boufa.
Bonfar (Grau), s. m. Bouffard, maitre-souffleur daos
une verrerie, celui qui souffle les grands vaisseaux, tels
que dames-jeannes, alambics, matras.
Dér. de Boufa.
Boufarèl (Anjon-), t. m. Ange bouffi, gros bouffi, par
comparaison aux têtes d'anges isolées qui sont toujours
joufQnes, et aux figures du vent, que les peintres repré-
sentent comme les têtes d'anges et que le peuple confond
avec elles. — SémJlilo un anjou-boufarèl, il ressemble à un
ange bouffi.
Dér. de Boufa.
Boofé, t. m. Dim. Boufétoit. Enfant joufflu et nabot;
gros petit joufflu ; fort ressemblant au boudoli.
Dér. de Boufa.
Boofèlo, s. m.; au fém. Boufilétto. Dim. Bouféloii.
Gros-enflé; gros bouffe-la-balle, surnom familier que l'on
donne aux hommes d'un embonpoint excessif. Le dimin.
ne s'applique pas à un homme moins gros que le premier,
mais d'ordinaire au fils de celui qui est surnommé BoufèU,
quelle que soit d'ailleurs sa constitution; de même pour
le fém. BoufèUsso. Cet usage de faire participer les femmes
et les enfants aux sobriquets de leur mari et de leur père
est trèsfré(iuent chez le peuple, surtout chez celui des
communes rurales.
Dér. de Boufa ou de boudifla.
Boules, i. m. pltir. Dim. Boufétit ; péjor. Boufétattat.
Soufflet à feu, instrument pour souffler.
Dér. de Bo^tfa.
Boufiga, v. Se boursouffler; se comTir d'ampoules;
1^4
BOU
s'élever en pustules, en vessies, avec inflammation, telles
que les produisent les piqûres d'abeilles, de moucherons, et
le frottement des orties, ou les brûlures.
Dér. de Boufa.
Boufigo, s. f. Dini. Boufiguéto, péjor. Bouflgasso. Vessie;
cloche ; ampoule ; pustule ; échauboulure ; boursoulllure.
Diir. de Boufa, boufiga.
Boufo , s. f. Balle du blé ; gousse ou pellicules des
légumes.
Dér. de Boufa.
Boufo, adj. fém., inusité au masc. Boufe. Creuse ; ver-
moulue; stérile, appliqué à une femme. — Nose boufo, noix
vide, qui chante creux, parce que l'amande est desséchée.
Fénno boufo, femme stérile.
Dér. de Boufa.
Boufo-fio, s. m. Petit bonhomme ; enfant chétif et petit,
toujours au coin du feu ; gratte-cendre : le pendant au
masc. de Cendrilion.
Boufo-la-balo, s. m. Bouffe-la-balle. Il a beaucoup de
rapport avec Boufèlo ; seulement celui-ci exprime plus
particulièrement l'embonpoint de la figure, de grosses joues
et une petite bouche ; celui-là est instantané d'application
et ne sert jamais de sobriquet. Le fr. d'argot pop. et fam.
dit bouffe-la-balle, qu'il parait avoir emprunté au lang. ;
car que signifie en fr. le mot boulîe ? tandis que boufo,
3°» pers. indic. prés, du v. Boufa, indique quelqu'un qui
souffle et qui, pour ce faire, enfle ses joues.
Boufoon, s. m. Bouffon; plaisantin; gaudrioleur ; facé-
tieux; farceur; goguenard. — Boufoun coumo un céndriè,
loc. prvb., mot à mot : bouffon, plaisant, farceur comme
un cendrier. Voilà un de ces dictons capable de déjouer les
plus subtiles et les plus sagaces explications. Est-ce une
antiplirase? c'est probable, car on ne dit cola que de quel-
qu'mi passablement refrogné, nullement rieur ou qui plai-
sante à la façon des fossoyeurs d'Hamlet. Mais le cendrier
est-il l'emblème de la tristesse, l'image de la morosité ?
peut-être; surtout lorsqu'on se le représente avec ses débris
de charbon noirci et sa couleur grise, sans étincelles, sans
flamme. Puis n'est-ce pas de cendres qu'on se couvrait
dans les jours de deuil ; et le premier mercredi du Carême,
le Mémento homo, avec ses cendres, ne vient-il pas rappeler
les pensées graves et solennelles de notre néant 7 La locu-
tion peut avoir été créée par toutes ces comparaisons. Le
contraste serait parfait. Le fr. a dans le môme sens : gai
comme les portes d'une prison. Les deux phr.ises, en lang.
et en fr., veulent dire : aussi peu gai que possible, ce qui
approche beaucoup de triste, et le dépasse souvent quand
il s'y mêle tant soit jkîu d'ironie. Donc contre-vérité.
Boufoun, comme son correspondant fr. et l'ital. buffb,
vient du nom des anciens bouffons de cour, dont le premier
emploi a été celui de grimacier ; la principale de leurs gri-
maces consistait à s'enfler les joues et à rouler les yeux,
ce qui donne au mot la même dérivation qu'au verbe
boufa.
BOU
Boufouna, V. Bouffonner; dire ou faire des plaisante-
ries ; mais particulièrement railler, amuser les autres aux
dépens do quoiqu'un ; goguenarder.
Dér. de Boufoun.
Boufounado, s. /'. Bouffonnerie; plaisanterie presque
toujours mauvaise ; farce qui excite à rire.
Dér. de Boufoun.
Boufounaïre, aitro, adj. Péj. Boufounaïras. Railleur ;
mystificateur ; mauvais plaisant.
Bougéroun, ouno, adj. Matois; luron, petit coquin.
Dimiri. et lénitif d'une expression plus énergique ; comme
qui dirait en fr. d'argot niiligù : un bigre. C'est là un de
ces mille mezzo-lermine que le lang. emploie volontiers pour
faire accorder ce qu'il doit à l'énergie d'une qualification
avec son respect pour la pudicité du langage. Dans bougé-
roun, du reste, l'adoucissement n'est pas seulement dans
le terme, il est aussi dans la pensée : il n'y a rien d'insul-
tant dans cette épithôte, et la signification que nous lui
donnons est exacte. Les Italiens disent aussi en langage
trivial bugiarone, évidemment un dim. de bugiardo, men-
teur. 11 est d'autant plus probable que notre bougéroun est
emprunté à l'ital. que nous le croyons vulgarisé ciiez nous
depuis seulement que les chaudron)iiers napolitains, les
labrasaïres {V. c. m.), nous ont apporté leur bugiarone. Il
a été au surplus très-bien accueilli comme léuitif du gros
mot que nous n'écrivons pas ici, et qui a bien quelques
autres variantes, toutes en dimin. classés et usuels.
Bougnas, s. m. Vieux tronc d'arbre noueux, tels que
ceux qui sont charriés et délaissés par les inondations. Au
fig. grosse et vilaine tête.
Augm. et péjor. de Bougno.
Bougné, s. m. Débris noueux d'un arbre; petite
souche.
Dimin. de Bougno.
Bouguéto, s. f. Beignet, sorte de pâtisserie cuite à la
poôlc avec de l'huile ; tache produite \)a.v un corps gras.
Dér. de la môme source que l'ital. Bugna , tumeur,
enflure, parce que les beignets sont une pâte boursouf-
flée.
Bougno, s. f. Dim. Bougnéto, péj. Vougnasso. Souche
d'arbre, particulièrement la partie noueuse du tronc où
sont attachées les racines ; bigne ; bosse ; enflure ; glande ;
contusion ; meurtrissure. — Voy. Boudougno.
Dér. de l'ital. Bugna, bosse.
Bouï, s. m. Buis, liuxus semper virens, Linn., arbris-
seau de la fam. des Euphorbiacées, commun dans nos
montagnes. Cet arbuste, qui fournit un très-bon engrais,
est fort en vénération dans le pays. On prétend qu'il fume
un champ pour trois années, suivant ses divers degrés de
putréfaction ; il fume la première année avec ses feuilles,
la seconde avec l'écorce, la troisième avec le bois.
Dér. du lat. Bitxus, dugr.IIiîoî.buis. — Yoy. Bouïssiétro.
Bouïargue, s. m., n. pr. de lieu. Bouillargues, commune
dans le canton et l'arrondissement de Nimes. Il est fait
BOU
BOU
125
mention de ce village dans de vieilles cliartcs sous le nom
de BollaniccB et Bolhanicw, villa de Bolhanicit.
Nous aurions à l'épt'ter, à propos de l'étymologie de ce
nom, ce que nous avons dit dans l'art. Baïargue. {Y. c. m.)
Tous ces villages ou hameaux, si nombreux dans le Gard
et dans l'Hérault, ne nous semblent pas avoir eu nécessai-
rement pour parrains des Romains d'origine auxquels on
attribue leur fondation, sans autre preuve qu'une ressem-
blance de noms et sur une fausse interprétation de la finale
argue Parce qu'un Komain inconnu se sera appelé Bo/onui,
qu'un certain Vcttius Bulaims aura été consul avec Cal-
purnius Piso, en l'an III do l'ère chrétienne ; que même
Cicéron aura eu un ami de ce nom, et qn'il parle dans une
lettre i Quintus, son frère, d'mi domaine près de Home
qu'il noniine Bouillanus, ce n'est pas une raison pour
admettre (juo Bouïargue, Bouillargues, Bolhanicœ, tire sa
dénomination de cet illustre personnage, non plus (jue de
ijuelqu'un de ses clients ou descendants établi dans les
environs de la colonie nimoise. Il est moins superbe, mais
certainement plus sur, de prendre l'origine du nom dans
le lat. bovilia, étables à bœufs, de bos, bovit, qui a donné
à notre dialecte Ihdou, bœuf, botnè, bouvier; au prov.
buôou ; au roman l/ouières, bouvières, boviéres, terres lais-
sées en jachère pour servir de pAturage aux bœufs. Ainsi
on trouverait à ranger dans la même famille, comme l'a
fait-le latin, qui se connaissait en traduction, en les dési-
gnant par le nom analogue Bnvilhacum ou Boviliacum, les
identiques correspondants à Bouïargue, Bolhanica : Bouil-
lae (Aveyron, Oordogne, Gironde, Tam-et-Garonne) ; Bouil-
lat (Gers, Lot-et-Garonne) ; La Bouille (Seine-Inférieure) ;
Bouille (Maine-et-Loire) ; Bouilly (Aube) ; Bouvine (Nord) ;
Bovelles (Somme); Boves (Somme); Bova, en Calabre;
môme Bovaca, dans la Colombie ; car la racine, la même
pour tous, est tirée du nom de l'animal le plus utile à
l'agriculture. A Bouiargue, ce nom est parfaitement en
situation.
Bouïda, V. Vider ; faire écouler d'un lieu, d'un vaisseau,
d'un sac ce qui le remplit ; enlever; ôter; éloigner.
Dér. du lat. Viduare.
Bouide, bouïdo, ndj. Vide; qui ne contient rien; qui
n'est rempli que d'air.
Dér. du lat. Viduut ou vitltiatus.
Bouïén, énto, part. prés, du V. Bout). Bouillant , qui
bout; aufig. (jui a beaucoup de vivacité, d'ardeur; colé-
rique ; prompt ; violent. — Aigo bouïénto, de l'eau bouil-
lante. Ase-bouïen. {Voy. Ase.) Ses trop bouïén, vous êtes
trop vif, trop i)étulant.
Dér. de Bouli.
Bottïno, s. f. La gent bovine, l'espèce bovine ; viande
de bœuf ou do vache. — Léngn-bouino. — V. c. m.
Dér. du lat. Bovis, génitif do bos.
Bouïo-baïsso, s. f. Matelote à la provençale; espèce de
ragoût ou de potage que l'on fait avec du poisson bouilli,
assaisonné Ix l'ail.
Les étymologistes provençaux, les plus compt^tents |)our
un mot qui leur appartient, lui donnent une dérivation
du sens même des mots dont il est formé : il bout, laisse ;
c'est-à-dire : descends la marmite , le potage bout. Et
servez chaud !
Bouïoù, s. m. Peson d'une balance; boulon, contre-
poids mobile d'm»e romaine.
Dér. du lat. Butta.
Boiuonn, s. m. Bouillon; décoction de vùindes ou
d'herlws ; consommé. — Vn bon liouïoun, aquà remonta,
un bon consommé, rien de mieux pour restaurer.
Dér. de la bass. lat. EbulUum, fait du lat. bullire, parce
que c'est par l'ébullition qu'il se pn^pare.
Bouïoun-blan, ». m. — Yoy. Alapas.
Bouiira, v. Bourrer, charger do coups; frapper quel-
qu'un à coups redoublés, comme l'on fait sur le corps
soufflé d'un IxEuf pour en détacher la peau.
Dér. du gr. Bo3{, bœuf.
Booiril, s. m. Ventre ; bedahie ; grosse panse; panse de
bœuf.
Même étym. que Bouïra.
Bouïssèl, s. m. Boisseau, mesure de capacité qui con-
tient le quart de la carte, le huitième de l'émine, le soixante-
quatrième de la salmée, d'après nos anciennes mesures ;
en mesure métrique, il contient 3 litres 125. Il est aussi
mesure de superficie et vaut \ are 25 centiares.
Dér. de la bass. lat. Bussellus.
Bouïssièïro, ». f. Terrain couvert de buis ; taillis de
buis.
Ce mot est un nouvel exemple de l'analogie qui existe
entre les désinences celtiques et les finales latines et pins
tard romanes, ou en langue vulgaire (jui les traduisait. Le
primitif final était certainement oc ou ec , marque de la
collectivité, que le lat. a rendu par elum, et que le lang.
exprime par iiïro : beuzae, heuxek, buxiacum, forme celtique;
buxetum, forme latine ; bouïssietro, forme languedocienne,
signifient également lieu couvert de buis, comme le fr.
bussaie, bussières, Buxières, n. pr., et Bussièrcs (Seine-et-
Marne), Bussiares (Aisne), Boussières (Nord), Bouxières
(Meurthe). [Voy. l'art. Argues, An, I&iro, etc., sufT.) Ces
affinités sont les plus directes ; mais la prononciation de
Vu en ou, l'altération de la voyelle double elle-même ou et
celle de la voyelle o de bos, bois, les traductions employées
dans la bass. lat. passées dans le roman et enfin dans le
languedocien, rendent souvent très-mal aisée l'application
pour distinguer s'il s'agit d'un lieu couvert de bois ou seu-
lement couvert de buis. Il faut toujours citer, d'après Sau-
vages, les n. pr. Boissier, La Boissièrc, Montboissier, etc.,
comme dérivés de bout, buis, qui a formé le masc. bouïssiè
et le fém. bouïssièïro. Il est certain que dans notre dialecte
la prononciation mène droit A cette étymologie. Il faut en
dire autant do La BouissUïro, La Boissière, communes de
Bez ot Esparon, et communes de Malons et Elze, de BouU-
sièïros, Boissières, commune du canton de Sommières,
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arrondissement de Nimes, et sans doute du nom de Bouïssé.
Boisset, Buxelum, commune du canton d'Anduzc, et
hameau de la commune de Saint-Sébastien. En composition,
Sèlbuis, de la commune de Rochegude, sera également à
citer. On est ainsi conduit à trouver comme similaires :
Boissières (Sarthe), et peut-être La BoisselUre (Sarllie), et
Boissi (Seine et-Oise) ; et môme le nom prop. Boissy, avec
la désinence familière aux dialectes du Nord, et chez nous
Boissin, représenté par Bouïssé; à moins toutefois qu'ils
n'aient été inspirés par le mot suiv. bouïssoit, qui est une
sorte de péjor. venant encore de bout, et qui a donné
comme noms de lieu et d'homme : Boisson, Bouïssoù, Bois-
sonade, Bouissounado, le Buisson, Boi/«onMm(Cievaudan).
— Voy. Bos.
Bouïssoù, s. m. Dim. Bouïssouné, péj. Bouissounas.
Buisson, en général; toute touffe d'arbustes épineux et
piquants, particulièrement le prunier sauvage ou prunelier.
— Voy. Agrunas.
Dér. de Bouï.
Bouja, V. Verser, répandre; à proprement parler, verser
d'un sac ou dans un sac.
Bouja, se vider, rendre tout ce que l'on a dans le corps,
se dit iron. d'une fille qui est accouchée depuis peu. —
Yen dé lou bouja, elle vient d'accoucher. En parlant d'une
pluie torrentielle : JY'é» bojo à plés feras, il en tombe à
seaux.
Dér. de Bojo.
Boul, s. m. Bouillon; ébuUition ; action de bouillir;
mouvement des bulles soulevées ; bruit d'imhquide qui bout.
— Prén lou boul, il commence à bouillir. Dinc un bout
aqttà sera quiè, dans un seul bouillon ce sera cuit. Fâou
pas qu'un boul, c'est l'affaire d'un bouillon.
Dér. du lat. Bulla.
Boulado, s. f. Jet d'une boule au jeu de boules. — Aï
éncaro uno boulado, il me reste encore une boule à jouer.
Dér. de Boulo.
Boulanjariè, «. f. Boulangerie; profession, atelier, bou-
tique de boulanger.
Dér. de Boulanjè.
Boulanjè, s. m. Boulanjèïro, «. f. Boulanger, boulan-
gère; qui fait et vend le pain.
Dér. du lat. Polentarius, de polenta, farine de froment.
Boular, j. m. Péj. Boulardas. Grosse boule ; gobille plus
grosse que les autres. — Un boular d'équipé, une grosse
gobille pour jouer à ce jeu d'enfant que La Fare décrit
dans ce charmant ITabl dé Sagati des Castagnados. — Voy.
Boulo.
Augm. de Boulo.
Bouldrado, s. f. Crevasse ; action de crever, de se cre-
vasser, de s'entr'ouvrir, de répandre par là son contenu.
Au fig. tour de maladresse, sotte équipée. Dans ce dernier
sens ce mot paraîtrait n'être qu'une altération de bdou-
drado.
Dér. de Bouldro.
Bouldro, s. f. Boue ; vnse ; dépôt de limon d'alluvion;
lie, crasse, fèces que dépose un liquide ; effondrilles d'un
bouillon, d'une infusion ; bourte. Bouldro et surtout son
péjor. Bouldras, entraînent l'idée d'un plus grand épaissis-
sement dans ces matières et d'un amas plus considérable
que la loudro. — V. c. m.
Dér. du gr. Bi^pEopoç, bourbe.
Boulé, .5. m. Dim. flnulété, péj. Boulétas. Bolet; cham-
pignon ; agaric ; fungus; cryptogame en chapiteau. On
peut diviser en deux classes les champignons comestibles
dont on fait usage dans ce pays, savoir : les laminés et les
poreux et fistuleux. Dans la première se rangent ; lou dorgut
fboulé rouge), l'éscumèl, lou capélan, lou souquarèl, lou
vinoùs ; dans la seconde, l'arcialoùs, la léngo-bouïno, la
sabatèlo et la galinolo. Il est rare que chacune de ces
espèces n'ait pas un analogue dans la classe des champi-
gnons malfaisants. Les plus comnmns sont le pissagù,
variété de Varcialoùs, et le fdou-dorgue qui ressemble
beaucoup à celui-ci. — V. c. m.
Les principaux diagnostiques des champignons vénéneux
se reconnaissent : 1 ° lorsque la cassure qu'on fait au cha-
piteau devient en quelques secondes d'une couleur violacée
et livide ; 2" lorsqxi'en les rompant il en suinte une humeur
laiteuse ; 3» lorsqu'ils ne portent pas vers le milieu de leur
tige une sorte de collet ou de couronne, qui n'est autre
chose que la membrane liant le chapiteau au pédoncule,
avant que cel ù-là ne fut développé; 4° lorsque l'épiderme
du chapiteau ne se détache pas nettement en ruban, en le
pinçant du bord au centre ; 5° lorsque la coupole est par-
semée de petits flocons de matière laiteuse et spongieuse.
Dér. du lat. Boletus.
Boulé, s. m. Boulet; boule de fer dont on charge les
canons.
Dér. du lat. Bulla. Dim. de Boulo.
Bouléga, v. Bouger; remuer; se remuer; changer de
place ; tant à l'actif qu'au passif. — Vole pat jamaï bou-
léga d'aïci s'és pas vrai, je veux ne jamais bouger de cette
place si je mens. Boulégues pas, ne bouge ni ne remue.
Bouléga lou véspiè, remuer le guêpier ; réveiller le chien
qui dort.
Dér. de l'allem. Wogen, voguer, ou du lat. bulla, bul-
lam agere, pousser, agiter une Iwule.
Boulégadis, s. m. Remue-ménage; démangeaison de
remuer; frétillement.
Dér. de Bouléga.
Boulégado, s. f. Foule; troupe; tas; fourmilière.
Dér. de Bouléga.
Boulégaïre, aïro, adj. Dim. Soulégatré, péjor. Boulé-
gaXras. Remuant; frétillant; qui s'agite, qui remue tou-
jours; mauvais coucheur.
Dér. de Bouléga.
Boulégamén, s. m. Remuement; mouvement perpétuel ;
frétillement.
Dér, de Bouléga.
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Bonléja, v. Confiner; être liiuitroplie ; tiire contigu ; se
touclicr, en parlant des propriétés. — yoits boulejan, nos
champs, nos propriétés se touchent.
Dér. de Bolo.
Boulétièïro, $. f. Terre à champignons; proprement,
chanipignouoière, c'est-i-dire un endroit particulier où les
champignons viennent de préférence. Une fois que cet
endroit est connu, on est à peu près sur d'y eu trouver plu-
sieurs années de suite, jusqu'à ce que le sol soit épuisé. Cela
ne s'applicjue guère qu'aux dorgues, au.x arcialoùt, aux
eapélans; les autres espèces viennent au hasard, ou bien
au pied des souches do certains arbres.
Dér. de Boulé.
Booll, V. Bouillir; s'élever en bulles et à bouillons par
l'effet de la dialeur ou de la fermentation ; fermenter ou
cnver, en parlant du vin. — A'juél vin a prou boiUl, ce vin
a assez cuvé. Moun sang mé bout, la colère me fait monter
le sang au cerveau, j'en ai la fièvre. — faire bouli l'émi-
ndw, verser de très-haut et avec force le blé dans la
mesure, de manière qu'il n'ait pas le temps de s'y tasser,
et qu'il forme par conséquent une plus grande quantité de
vide. C'est ce qu'on reproche aux revendeurs de blé qui
veulent faire maigre mesure.
Dér. du lat. BuUire, qui vient de buUa, bulle, bouil-
lon.
Bouli, s. m. Bouilli ; viande bouillie ou cuite dans l'eau.
— Métré lou bouli, mettre le pot-au-feu. Et pas bo ni pér
boulï ni pér rouM, il n'est bon à rien ; il n'est bon ni à
pendre ni à dépendre.
Dér. du lat. Bullire.
BouUdoii, s. m. Tourbillon dans l'eau; bas-fond qui se
forme dans une rivière par le tournoiement des eaux causé
par la rencontre de deux courants, ou d'un rocher qui
l'oblige à changer de direction, ou encore par des ouvrages
d'art qui ont le môme effet. C'est également toute espèce
de vaisseau supplémentaire dans lequel on fait cuver la
vendange, quand la grande cuve est insuffisante ; celle-ci
ne prend jamais le nom de bouliUoà, qui est un dimin.
Dér. de Bouli.
Boulnado, s. f. Dim. Boulnadélo, péjor. Boulnadatso.
Proprement, panse ; la poche gastrique où se rencontrent
les aliments à moitié digérés ; en général les intestins et le
bas- ventre.
Dér. du lat. Bolulus, boyau, intestin.
Boulo, s.f. Dim. Bou/éfo, augm. Boular, boulasse. Boule;
bille; gobille; tout corps rond ; au fig. la tête. — Boulo
d'équipé, ■.'obillo d'un jeu d'enfant qui se nomme équipé.
(Koj. Boular.] A perdu la boulo, il a perdu la télé. Ttra'no
boulo, terme du jeu do boule, viser à déloger une boule, la
débuter, en laujant fortement la sienne contre elle. — l'o^.
Boeho.
Dér. du lat. Bulla.
Bouloun, s. m. Dim. Boulouné. Boulon, cheville en fer
quia une tête d'un côté, et do l'autre une ouverture où l'on
passe une clavette on une mèche taraudée qui est vissée
par un écrou.
Bouizes, s. m. plur. Soufflet de forge ; mais particuliè-
rement soufflet double des chaudronniers ambulants, qui
consiste en une poche terminée par un tuyau, et qu'on
élève et comprime successivement de cliaque main. Ce
genre de forge s'établit en plein vont, sur la première place
venue, en creusant une petite fosse de trois ou quatre |x)uces
de profondeur, où vieinien! aboutir les tuyaux des boulzei,
et par-dessus on place une très-petite quantité de charbon
de bois.
Boulze, s. m. sing., est encore un nom pr. très-répandu
dans le pays, dont le fém. est Boulzitto et le dim.
Boulzé. Il est rendu en fr. par Boulze.
Boum I interj. Onomatopée qui exprime le bruit sourd
produit par la chute d'un corps j)esant. — Yoy. Chinnanano.
Dér. du lat. Bombut.
Boomba, v. Battre ; frapper un coup sourd ; heurter
avec force. — Boumbo-qutou, casse-cul; coup sourd qu'on
se donne on tombant sur le derrière.
Dér. du lat. Bombus.
Boumbanço, f. /. Bombance; gala; grande et bonne
chère; festin pompeux.
Dér. de la l)ass. lat. Pompantia.
Boumbarda, v. Bombarder; jeter, lancer des bombes;
canonner; jwr ext. tirer des coups de fusil, môme lancer
des coups de pierre.
Dér. de Boumbo.
Boumbé, éto, adj. Petit homme court, ramassé, gras-
souillet, rondelet, nabot tout rond de graisse. — Voy.
Boumboti, Coufloti.
Dér. de Boumbo, arrondi comme une bombe.
Boumbe, s. m. Augm. Boumbas. Bruit sourd; celui que
fait un corps lourd en tombant.
Dér. du lat. Bombut.
Boumbi, v. Hcndre un son sourd en tombant ; au fig.
mourir; crever. — !S'é boumbiguè, il en creva.
Dér. du lat. Bombut.
Boumbo, (. f. Bombe, gros boulet de fer creux qu'on
remplit de poudre pour le faire éclater. — Tira las boum-
bos, tirer des boites en signe de réjouissance et faute de
canon. Boumbo, grosse femme, courte et replète.
Dér. du lat. Bombut.
Boumboti, .s. m. — Voy. Boumbé, m. sign.
Boumbourido, t. f. Bourdonnement ; ne s'emploie qu'au
fig. caprice ; boutade ; transport. — Voy. Grâoule.
Boombourina, v. Bourdonner, comme font les taons, les
abeilles, les hannetons; au fig. murmurer; marmotta;
grogner ; bougonner ; corner aux oreilles.
Dér. du lat. Bombus, bourdonne mont.
Boumbourinéja, f. (réq. de Boumbourina.
Boomi. t;., ou Vouml. Vomir; jeter par la booche ce
qui était dans l'estomac.
Dér. du lat. Vomere.
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Bounas, asso, a>Ij. lîonhommc, trop bon, sans malice,
avec une légère teinte Je stupidité.
Augrn. de Bo.
Boundoù, J. m. Bonde; bondon; trou rond d'un ton-
neau par où on le remplit; bouchon, tampon qui ferme ce
trou. — Youdrièt que ma gorjo sérviguésse dé boundnit, je
voudrais que mon gosier servit d'entonnoir: souhait d'ivro-
gne. Mttre lou boundoù, bondonner.
Dér. du gr. Bkn, boucher.
Bonne, s. m. Dim. Bounélé; péj. Bounétas. Bonnet
d'homme, génériquemenl, ou lionnet de feinnie, par em-
prunt au fr. Le bonnet de coton, qui est la coiffure habi-
tuelle de travail pour les cultivateurs et la plupart des
artisans, se nomme particulièrement bounéto, ainsi que les
tonnels de laine rouge ou brune des auvergnats ou loze-
rots. — Le n. pr. Bouné, en fr. Bonnet, est assez porté.
Vouné signifie encore : bomiet carré, bonnet que portent
les gens d'église. — Un curé des hautes Cévennes, qui fai-
sait ses prônes en patois, dit un jour en chaire : Il y a une
personne dans ma paroisse qui scandalise tout le monde
par sa conduite plus que légère ; voulez-vous que je vous
la nomme, que je la désigne? Je vais lui jeter mon bonnet
carré... Le geste ryant suivi la parole, l'histoire ajoute que
toutes les femmes simultanément baissèrent la tête, chacune
ayant bien quelque petite chose à se reprocher. Ah ! fourié
l'é dé bounés. Ah ! qu'il faudrait de bonnets carrés, reprit
le malin curé, en voyant ce mouvement.
Un co dé bouné, une salutation, un coup de chapeau.
On l'nraparié à cos dé bnuné, on le prendrait avec un cha-
peau. — On croit vulgairement qu'un bonnet crasseux
d'homme calme les affections histériques d'une femme,
quand on lui en frotte le haut de la poitrine ou qu'on le
place à nu sur son sein.
On n'est pas d'accord sur l'étym. : les uns la tirent du
celt. Boned, bonnet; d'autres de l'angl. bonnet; quelques-
uns enfin du nom d'une esiièce de drap dont on faisait
anciennement les bonnets.
Bonnétado, s. f. Coup de bonnet ; salutation, révérence;
salut du bonnet.
Dér. de Bouné.
Bonnéto, s. f. Dim. Bounététo, péj. Bounétasso. — Voy.
Bouné.
Bounta, s. f. Bonté, qualité de quelqu'un ou de quelque
chose qui est bon ; obligeance.
Dér. du lat. lionitas,
Bounto, .f. f. Ce mot ne s'emploie qu'en se joignant
avec cabro, ou en la désignant directement et quand il est
déjà question d'une chèvre dans la phrase : Vno bounto.
— Cabro-bounto, chèvre franche, sans cornes.
Dans d'autres dialectes, au lieu de bounto, on dit mouto
pour la môme qualification. L'étym. donnée alors est prise
du lat. Mutila cornubus, à qui on a coupé les cornes, ou
du gr. MirjXoç, qui n'a pas de cornes. IN'ous n'avons pa»
mouto ; il n'y a rien à dire. Bounto serait-il une altération ?
Ces deux mots ne paraissent pas se prêter ."i une commu-
nauté d'origine. Mais pourquoi le nôtre ne viendrait-il pas
aussi du gr. Bouvi5;, mamelle?
Il peut sembler extraordinaire, au premier abord, que
ce mot grec, qui a une acception générique, soit employé
pour désigner adjectivement une espèce particulière de
chèvre. Pour que la déduction fût logique, il faudrait sans
doute que le radical étymologique indiquât l'absence de
cornes. Cependant si on veut remarquer la manière dont
les langues se sont formées, il ne serait peut-être pas diffi-
cile, dans l'espèce, de se rendre compte de la possibilité et
de la justesse d'une pareille racine. Les divers dialectes
méridionaux ont puisé alternativement dans la langue des
colons phocéens et dans celle des colons romains. Dans le
mot que nous étudions, une moitié est empruntée au lat.
capra, cabro; l'autre moitié vient du gr B-,jv(5;, qui a fait
Bounto, c'est-à-dire l'animal aux mamelles. Ces deux
idiomes s'ôtant confondus dans le roman lang., il en est
résulté deux mots divers pour rendre l'idée de la chèvre.
Dès lors on a liien pu profiter de cette richesse pour dési-
gner par l'un des deux une espèce particulière. Or la chèvre
sans cornes parait le type de l'esi^ce ; la chèvre encornée
est l'exception, puisque, en fr., on désigne la première
espèce par le nom de chèvre franche, au témoignage de
Sauvages, la chèvre-type. On l'a appelée dès lors cabro-
bounto, comme on dirait chèvre-chèvre, et cabro-banardo,
la chèvre à conies.
Bouqua, v., ou Boulqua. Verser les blés ou les foins ;
les coucher, ce qui est d'ordinaire l'effet d'une grosse
averse, lorsque les blés et les foins étant fort épais et fort
orgueilleux, les tiges en sont tendres et faciles à s'age-
nouiller. Ce même effet est produit quand une personne ou
un animal les foule en les traversant ou en s'y vautrant.
— S'aquél bla se bouquo, y-âoura dé païo, si ce blé vient
à être versé, la paille sera ahondante cette année. Cela
veut dire que ce blé en herbe est bien maigre, et s'il vient
à être assez fort, assez dru pour être versé, c'est une
preuve que tous les autres, qui sont de plus belle venue,
réussiront merveilleusement. Locution ironique pour expri-
mer un champ de blé étiolé et clair-semé.
Dér. du lat. Volvere, rouler.
Bouqua, v. Terme de magnanerie, couvrir, féconder la
femelle du papillon du ver à soie.
Dér. de Bou, papillon mâle.
Bouqué, s. m. Dim. Bouqueté, bouquétoù. Bouquet,
réunion de fieurs liées ensemble ; mais il se dit plus com-
munément d'une fleur isolée. — Ah.' que de bouquéaf Ah !
que de fieurs ! dira-t-on en entrant dans un parterre. Bou-
qué de péiros, pierre d'attente. Bouqué dé pèous, une
mèche de cheveux, un toupet, un flocon de cheveux.
Dér. de la bass. lat. Jioscetum.
Bouqué, .«. m., n. pr. de lieu. Bouquet, commune du
canton de Saint-Ambroix, arrondissement d'Alais. C'est
le nom d'une montagne vers le nord-est d'Alais, Sère dé
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Bouqué, au sommet de laquelle, dit le guithn , on a ùrigé
récetiwneiil une statue colossale de la sainte Vierge. I-'alti-
lude de la montagne, au guidon, est de G3t mètres.
Ce nom est d'évidence un dimin. de Itoi [Y. c. m.), tra-
duit de la bass. lat. Bosquetum, boscelum. hoschetum. Il a
pour analogues Dousché, Bouscliet, œmniunes de Ponteils
et de Hrésis ; lou Bousqué, le i)<)US({uet, liameaude la com-
mune de Sainl-Romansde-Codière ; tous Bousquet, les Bou-
quets, commune do Soudorgues, et les noms de j)ersoiine
Bouchet, Bousquet, Bosquet, communs dans nos pays. Sa
signif. indique la présence de petits bois, ou clair-scmés,
ou de médiocre hauteur.
Bonquéto, ». f. Petite bouche, bouche mignonne. —
Fatre liniiqiiéii, faire Vx petite l)ouche; ne manger ou ne
parler (|ue du bout des lèvres; faire le dédaigneux, auflg.
Dim. de Boiiquo.
Bouquo, 5. f. Dim. Bouquéto, péj. Bouquatto. Bouche,
partie inférieure de la tête par où on [)arlc et on mange ;
ouverture. — La bouquo dé l'ésiouma, le creux de l'esto-
mac. (Voy. Paléto.) La bouquo d'un four, la gueule d'un
four. Bouquo-fino, un gourmand, ou un lx!au parleur.
Bouquo s'emploie rarement au positif pour bouche, qui
se dit Ciorjo. — V. c. m.
Las biiuquos, les lèvres.
Dér. du lat. Bucca.
Boura, v. Casser des pierres ou des rochers avec une
masse de carrier qu'on ap|)elle bouro. Au fig. Bourrer ;
frapper rudement; maltraiter; travailler avec assiduité et
employer toute sa force. — Fôoh boura aquél ro, il faut
cass<3r ce rocher à coups de masse. IVous bourarén , nous
lutterons ensemble. Zou .' houras , allons, ferme, forcez,
poussez.
Dér. de Bouro, masse de fer.
Boura, v. Bourrer; au prop. garnir on remplir de bourre;
presser la charge d'un fusil.
Se boura, se bourrer de vivres ; se gorger d'aliments ;
prendre double fourrure contre le froid; se rembourrer, au fig.
Dér. de Bouro, bourre.
Boura, v. Bourgeonner, se dit principalement de la
vigne quand elle commence à ]K)usscr ses bourgeons.
Dér. de Boure, bourgeon.
Bourado, j. f. Effort ; épaulée ; reprise d'un travail,
d'un ouvrage. — V viiou faire uno bourado, je vais don-
ner encore un coup de main à cet ouvrage. Y-avèn fa uno
bravo bourado, nous avons donné un bon coup de collier.
Dér. de Bouro, masse de fer.
Bouraïè, s. m. Bourrelier, celui qui fait les colliers de
labour et harnais de roulage, parce qu'il emploie beaucoup
de l)ourrn ])our rembourrer.
Bourajo, s. f. Bourrache, Borrago officinatis , lAnn.
Plante de la fam. des Borraginées, diaphonétique et bé-
cbique.
Dér. du lat. Borrago, altér. de corago. Selon Apulée,
mot qui dans la Lithuanie signifiait cordial.
Bouras, s. m. Péj. Bourassag. Lie, l)one, que dépose
l'biiile soit dans les fosses du pressoir, soit au fond des jarres.
Dér. du gr. IWfSop'jç, l)oue, bourbier.
Bouras, x. m. Pt'j. Bourassai. Etoffe de laine grossière;
bure ; grosse toile d'étou{x; dont on fait les sacs et drafts de
la campagne, bourén.
Dér. de Bouro, Iwurro.
Bourasso, s. f. Dim. Bourasséto. Lange en laine gros-
sièn', espèce de bure dont on envelopi» les enfants au
maillot par-dessus le lange de toile, drape ou drapèl, et au-
dessous du lange de parade. — Eslre à la bouratio, être au
maillot.
Dér. d(! Bouras.
Bourbouïado, .v. f. Hachis d'herbes, ragoût, fricassée,
macédoine conqjosée de légumes, d'herbes et de viande
hachée, d'œufs brouillés, apprêtés comme les épinards; plat
assez commun et qui n'est pas du goiit de tout le monde.
— Vùou manja aquélo bourbouïado, dit, surtout un jour
maigre, quelqu'un qui n'a (ju'un trés-mince ordinaire.
Dér. du gr. B6p6.pj;, bourbier.
Bourbounés, $. m. Au p\ur.' Bourbnunéset. Bourlion-
nais, province de France; habitant du Bourbcmnais, qui
lui appartient. On di^igno ainsi mie espèce de porcs tout
blancs qui viennent du Bourbonnais.
Bourboussado, s. f. Curoir de l'aiguillon ; (x^tit fer
plat en forme de |)elle, au bout du manche de l'aiguillon à
bœufs, pour détacher la terre, les herbes, les ronces qui
s'engagent dans le soc de la charrue en lalnurant. — Voy.
Curélo.
Dér. du gr. BûpCop-jj, boue, faugc.
Bourdaléso, >. f. Débris fangeux de menu Imis et de
végétaux de toute espèaî, que les inondations déposent
dans les oseraics et ijui marquent le plus haut (wint qu'a
atteint le niveau des eaux. — Voy. Botirdinchè.
Ce mot parait directement issu de bordo; la place où
sont déposés ces débris sur les bords des rivières, la trace
qu'ils laissent comme bordure, pourraient avoir aussi
influencé sur sa dénomination.
Bourdas, .«. m. Péj. Bourdattas. An plnr. Bourdatset.
Rustre ; gros lourdaud. Epithète injurieuse donnée aux
montagnards de la iMzèrc, parce qu'ils voyagent avec un
gros bAton nommé hourdo. De là ce nom; mais ne vien-
drait-il pas du lat. Burdo ou burdus, mulet engendré par
un âne?
Bourde, «. f. Sabot, espèce de tonpie qu'on fait tourner
en la frappant avec un fouet. Ce mot n'est plus usité que
par comoaraison : Etcarab'ia coumo «n bourde, vif comme
une toupie.
Bourdèou, n. pr. de lieu. Bordeaux, ville, ancienne
capitale de la Guyenne, maintenant chef-lieu du départe-
ment de la Gironde.
Dér. du lat. Burdigala. Isidore de Séville dit que ce nom
lui vient de ses premiers habitants, qu'il appelle Burgos
Gallot.
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Bourdérèou, s. m. Bordereau; facture des différentes
livraisons d'une marchandise ou d'une denrée vendues.
Enip. au fr.
Bourdifaïo, s. f. Fétus et brins de quoi que ce soit qui
surnagent dans un liquide ou qui vont au fond ; brous-
sailles; rejetons ravalés qui croissent au pied d'uii arbre.
— y-a bé dé bourdifaïos, c'est une affaire sale ou em-
brouillée.
Dér. do Bordo.
Bourdifèl, ». m. Péj. Boudifelas. Amas embrouillé de
fils entrenoués, de racines enchevêtrées.
Dér. de Bordo.
Boardinchè, s. m. Péj. Boitrdinchèïras. Débris fangeux,
détritus de bois, de racines, mêlés de limon, déposé dans
une cruede rivière sur les rives ou dans les oseraies. —
— Voy. Botirdaléso.
Dér. de Bordo.
Bourdo, s. f. Péj. Bourdas, bmirdasso. Bas-bout noueux
d'une souche; long bâton renflé à une extrémité, qui se
termine par une sorte de boule, bougno. — Pè-dé-bourdo,
pied-bot.
En V. fr. bourde, bâton ; d'où bourdon, bâton de pèle-
rin.
Bourdo, i. f. Bourde ; menterie ; fausse nouvelle. —
Débita dé bourdot, débiter des mensonges.
Dér. de la bass. lat. Burda, mensonge.
Bourdouïra, v. Ravauder ; farfouiller ; mettre sens des-
sus dessous ; fouiller; retourner en tous sens. — Dé gué
bourdouïres pér aqui ? que vas-tu ravauder là ?
Formé de Bordo, balayures, débris, et de vira, ou de
bordo, V. m., maison des champs, et vira, tourner la
maison.
Boure, s. m. Dim. Bour'ioù. Bourgeon qui commence à
pousser ; plus particulièrement œil de la vigne. — Pouda
à boure et bourïoU, tailler la vigne en ne laissant au scion
restant que deux bourgeons ou deux yeux. — Voy. Bou-
rïoù.
Dér. de Bouro, bourre, parce que le bourgeon, quand il
commence à gonfler, est couvert, entouré d'une sorte de
duvet cotonneux.
Bouré, éto, adj. Brun, couleur de la bourre de bœuf
on de vache. — Vi-bouré, vin blanc rosé, clairet et dou-
ceâtre.
Dér. de Bouro, bourre.
Bourèïo, ». f. Boiu-réc, bourrée d'Auvergne ; rigaudon ;
danse qui s'est effacée déjà devant le galop et la contre-
danse, détrônés eux-mêmes par la polka et la mazurka. —
Voy. Bourigal.
Bourèl, s. m., au fém. Bourèlo. Péj. Bourélas. Bour-
reau; exécuteur des hautes-œuvres; au fig. cruel, inhu-
main, féroce. —Pagode bourèl. paiement d'avance. Avédre
un fron dé bourèl, être déhontè comme un valet de bour-
reau. Lou bourèl l'a manqua, c'esl-à-dire il s'est échappé
de la corde qu'il a méritée.
On n'a qu'à choisir entre les diverses étyni. proposées.
Ce mot, dit-on, vient ducelt. borrev; Caseneuve le tire du
gr. Bcpi;, qfii dévore; Gui-Patin, du lat. burnts, roux,
parce que les rousseaux sont ordinairement violents ; li*
P. Labbe, du v. fr. bouckeriau, petit boucher ; Ménage, du
lat. buccarus, boucher, passant par buccarellas, burellus,
bourèl; Eiisôbe do Salverte et Uoquefort, du bourguignon
buro, lance; Villai'et, du nom d'un clerc, possesseur en
1 260 du fief de Bellem-Combe, à la charge de pendre les
voleurs du canton. En langue romane et en ital. on dit
boya, en bas-breton bourreo. J'incline pour ce dernier.
Bourén, s. m. Dim. Bourenqaé, péj. Bourmquas. Drap
de grosse toile qui sert à porter du foin, de la paille, etc.
— Voy. Bouras.
Dér. de Bouro.
Bourétaïre, ». m. Au fém. Bourétaïro. Cardeur, car-
deuse de lleuret et de bourre do soie. Us cardent les cotes
et ce qu'on appelle lous estrasses de cocons de filature. Ils
en tirent dans les premières barbes ce qu'on appelle la fan-
taisie, et du reste le fleuret, qu'on nomme boureto.
Bouréto, ». f. Fleuret ou bourre de soie, provenant des
débris grossiers des cocons. C'est une étoffe qui fait un
très-long usage, et dont les femmes de la campagne étaient
exclusivement vêtues, il y a quelques années, excepté dans
les grands froids. Aujourd'hui les jeunes filles ont des ten-
dances marquées à s'émanciper de la servitude de cette
mode antique. L'étoffe était très-solide à la chaîne, mais de
mauvais teint et peu élégante d'ailleurs.
Dér. de Bouro, bourre.
Bourgadiè, ièïro, ». et alj. Habitant d'un bourg, d'une
bourgade ou gros village; plus généralement, habitant d'un
faubourg de ville ; qui appartient au faubourg d'une ville.
Dér. du lat. Burgus.
Bourgade, s f. Dim. Bourgadéto. Bourg, bourgade,
petit bourg ; faubourg.
Dér. du lat. Burgus.
Bourgal, alo, adj. Franc, loyal. La franchise et la
loyauté étaient censées les vertus particulières aux bourgeois
affranchis, par comparaison aux serfs de la glèbe, dont les
compliments et les offres de service étaient entachés d'une
arrière-pensée de servilisme.
Ce mot dérive évidemment de bourg, qui a fait bour-
geois ; l'idée qu'il exprime est l'honneur de la bour-
geoisie.
Bourgalamén, ar/v. Loyalement; franchement; carré-
ment; sans arrière-pensée; avec indépendance. Il répon-
dait autrefois à bourgeoisement, qui, dans l'acception fran-
çaise, comme subst. et comme adv., a bien dégénéré de
notre temps, où bourgeois est devenu une expression de
mépris et synonyme de homme vulgaire, sans esprit, sans
délicatesse et sans goût.
Bourges, ». m. Au fém. Bourgéso ; au pi. m. Bourgéses.
Bourgeois; habitant d'une ville, qui vit sans travailler; le
peuple entend par là les riches. 11 signifie encore : patron,
BOU
BOU
tSl
olief d'atelier, dans le langagn des ouvriers; maitre et hôte-
lier, dans celui dos domestiques ou des voyageurs.
Mr. du Int. fliirgiis, Imurg.
Bourgnoù, «. m. Ruche il miel ; tronc d'arbre creusé,
cai&se ou panier dans leqwA on met les alieilles.
l)ér. de Itonjue, oljscur.
Bourgougno, s. f. F-a Bourgogne, ancienne province de
France. — Pé<ji) dé Bitunjniignn, importun qui s'attache à
vous avec obstination et dont on peut se d^ibarrasser plus
difTicilement que de ta poix de Bourgogne, qui est la meil-
leure et la plus adhérente.
Dt^r. du lat. Biinjuniliiis.
Bourguignoun, ». m. Porc, cochon. C'est là mi des
nombreux dii^uisemeiits que l'urbanité languedocienne im-
pose à cet animal immonde pour le produire l.t où il doit
du respect. Môme alors n'est-il désigné qu'en accompagnant
son surnom de précautions oratoires, comme : parlan-i-én
réspé, parihiulos pmlnu pas. Elle fait de môme, quand elle
parle du fumier, d'un Ane, etc. Cet usage se perd cepen-
dant, soit par le contact du fr. (|ui se moque de ces locu-
tions, soit p.ir l'extension des idées d'égalité. — Voy.
Lachén, Vésti-Jé-aéJo.
Il est probable que les premières races de nos porcs nous
sont venues de la Bourgogne, ce qui leur a donné ce nom.
Bourigal, a. m. D'un. BmirigaHé. Rigodon, liourrée, sorte
de danse.
Dimin. de Bourèïo. — V. c. m.
Bouril, t. m. Dim. Bourïoù. Bouchon; duvet; coton;
éraillures de fd qui dépassent sur la trame d'une étoffe,
qui la déprécient et qu'il faut éplucher; bouchon ou caillot
qui se forme à un fil en le fdant. — Tiroaquél bouril éntté
ta.i dins, tiro-toi d'embarras si tu peux. ; dénoue cotte diffi-
culté.
Dim. de Bnttro.
Bourioù, .f. m. Petit bouchon de fd ; petit bourgeon;
contre-bourgeon qui pousse ,1 cùté du principal ; le plus
bas reil d'un sarment do vigne. — Voy. Boure.
Dim. de Bouril et de boure.
Bourïoùs, ouso, adj. Dim. BouHousé; i)éj. Bout^outa».
Cotonneux ; bouchonné; plein de duvets et de bouchons.
Dér. de Boure.
Bourisquado, a. /". Dim. Bnuriaqiiadéto, péj. Bourisca-
dasso. .Viierie, faute grossière, ignorance cr.isse.
Dér. de Bonrisqiio
Bonrisquo, a. f. Dim. Bniirisqiioii , Bonriaqiiéto, péj.
Povrisqiiiissri. Bourrique, ànesse, ou même .'lue générique-
menl. .Vu ma.se. llouriaqiriH, avec la diplilliniigue finale
muette, ce qui le distingue de son dim. Bourisqimù où elle
est accentuée. — Voy. Boitrou.
Jioirriaqiioii, baudet, Ane ; bourrique ; au» fig. ignorant ;
lourdaud ; ignare ; bourrique, qui a aussi les deux accep-
tions. — Vi médial est long; il est bref dans Bourisquoii.
Dér. du gr. HJ^Jt/o;, roux.
Bonrisquoù, s. m. .\non, bourriquet, petit àne. — La
nuance entre les diminutifs, bouriaqué, m., bovritquéto, {.,
et bouriaqiioii, est si.'uleriienl que celui-ci est un jietit Ane
qui commence A porter le bit , les autres dos ànons qui
tètent encore leur mère.
Boorja, v. Fouiller profondément la terre avec la Iréa-
quo, lou béchar ou loii eoutrii. — V. C. m.
Augm. de Ilouléga.
Bourjoù, ». m. Tisonnier; fourgon pour atiser le fou;
tout liMon de Iwis ou de fer, propre à fouiller, à remuer.
Altér. pour Fourjm'f, dér. du lat. Fiirca.
Bourjouna, v., et Bourjonnéja, fréq. Fourgonner;
remuer ; fouillerdans un trou avec les mains, un fer ou un
bAton. — Bourjouna lou fia, fourgonner le feu, le remuer
avec les pincettes; tisonner. Bourjouna las térvos, fouiller
les remises du jmisson avec une [«relie [wur le faire sortir.
Déqu'anns bourjouna a'/u)? (ju'al lez- vous farfouiller làî
Formé de Bourjoii.
Bourjounaïre, aïro, adj. Remuant, qui s'agite, qui -
fouille partout et sans ce.sso.
Dér. de Bourjoii.
Boorlls, ». m. Trouble; confusion; tumulte; foule
agitée.
Dér. do l'ital. Burlana, tourbillon.
Boumal, ». m. Cendrier d'un four.
Il est dit (wur Fournal, altér. fréfjuente de F en B.
Bonmèl, £. m., ou Boumèou. Dim. Bournélé, péj.
Bournélas. Conduit d'eau souterrain ou e.xiérieur, en
plomb, en zinc, en fonte ou en iwterie; tuyau de poêle.
Dér. du celt. Born, fontaine.
Boumiquèl, èlo, adj. Dim. Boumiquélé, j)éj. Boumi-
quélas. Myope; qui a la vue basse, faible, mauvaise vue;
qui cligne les yeux; louche.
Dim. de Borgne.
Bouro, ». f. Masse de fer montée sur un manche long et
flexible pour briser les rochers; tnasse de mineur ou de
carrier pour rompre les pierres.
Bouro, ». f. Péj. Bourn.iso. Bourre ; poil dos animaux ;
duvet qui recouvre certains fruits et certains végétaux ;
bourre d'un fusil , Iwuchon fait de Iwurre ou de papier
pour presser la charge. — Bouro dé aédo, lx)urre de soie.
Quan-t-on fat mérca énd'él fdou Umjmir y la'i^aa dé bouro.
on no peut traiter une affaire avec lui sans y lai.ssier du
sien. Emb'él fôou ton jour y laïtaa pèou ou bouro, on ne
peut se tirer de ses mains les braies nettes. Fàou qui la
bouro né saoule, il ne faut pas s'y épargner quand vous
devriez y laisser de la |)eau. Tira pi-oua et bouro, tirer d'une
affaire, d'une six'culation, tout ce qu'il est possible de lui
faire rendre. Y-a dé bnuro, cela s'entend sans qu'on soit
obligé de compléter le dicton qui est : y-a dé Imuro à balre.
Pour le rendre, on trouve la phrase toute faite : il y a du
fil à retordre. En vérite, si l'on voulait positivement et
sans velléite même d'antiphra.sc qui n'y est certainement
pas. si l'on voulait, [wr une image, par une comparaison,
exprimer une très-grande difficulté à vaincre, on pourrait
13*2
BOU
BOU
sans peine trouver plus juste et plus vrai. En effet, rien
n'est au contraire plus facile que de tordre, même de
retordre du fil et de battre de la bourre comme do la laine.
Le français a donc bien décidémont déraillé, quoique les
chemins de fer ne fussent pas inventés à cette époque ;
mais qu'il s'arrange. Quant au languedocien, qui nous tient
en ce moment davantage au cœur, il n'y aurait pas moyen
non plus de sauver sa locution en la prenant comme on la
dit et surtout comme on l'entend communément. Il en serait
tout autrement si, au lieu do battre, il y avait comme dans
le français et plus à propjs que chez lui tordre ou filer;
car le poil si , court de la bourre se prêterait dillicilement à
cette opération. Il n'est pis i npis-sitile que notre dicton soit
parti de là pour arriver on il fst, par une oblitération quel-
conque. Slais il est plus ijr.ib.ible encore (ju'il ait été fait dans
un autre ordre d'idées, et qu'il ne dise pas ce que l'on croit.
Boiiro signifie aussi la masse de fer, au bout d'un long
■manche, dont se sert le mineur ou le carrier pour rompre
les blocs de rocher et les réduu'o en moellons. Frapper de
cette masse est à couji siir un travail des plus pénibles.
N'est-ce pas cela qui a donné naissance au dicton ? Notons
d'abord que batre est pris de nràme pour frapper. On dit :
batre tous piqués, frapper les pieux pour les enfoncer avec
le tnouioit, le bélier ou la sonnette, qui les bat comme la
masse bat la pierre. Notre locution a du être primitivement
avec une inversion : Y-a dé ta bouro à batre pour y-a à
batre dé la bouro, autrement dit : éndé la bouro, ainsi
qu'on dit en français : jouer de la prunelle, des couteaux,
pour avec la prunelle, avec les couteaux. Cela équivalait à :
il y a à frapper de la masse, ce sera aussi rude que de frapper
avec la masse. Dans cet ablatif, l'article la a disparu, parce
qu'il n'était pas indispensable ni môme nécessaire à la clarté
de la phrase, qu'il allongeait inutilement, ce dont la langue
a horreur. Dans nos proverlxis si nombreux, des irrégula-
rités, des ellipses bien autres abondent. Cette suppression de
partie de l'article, créant un calembour, a donné ouverture
à cette double interprétation par les deux sens qui se présen-
taient ; mais dans le choix à faire il faut se garder de toute
préoccupation du français. A chacun sa responsabilité, à
chacun selon ses œuvres : parce que dans cette circonstance,
le fr. a mal dit, ce n'est pas une raison pour que le lang.
en ait fait autant; lorsque surtout il est si facile de voir
qu'il a autrement et mieux dit, qu'il a dit ce qu'il fallait.
Dér. du lat. Burra, bourre, fait de burrus, roux, cou-
leur de la bourre, ou du gr. Ilu^fô;, roux, rougeitre.
Bouro, s. f. Jeu de cartes, espèce de bête-ombrée ou de
mouche. — listre à la bouro, faire la bête à ce jeu-là, faire
la remise.
Bourou, -1. m. Ane, baudet, bourrique; as, au jeu de
cartes. — Voy. Bourisquo.
Bourtoulaïgo, s. [., ou Pourtoulaïgo. Pourpier, Por-
tulaca ohracea, Linn., de la faiii. des Portulacées, plante
potagère et grasse.
Dér. du lat. Portulaca.
Bourtoumiou, s. m. Barthélémy, prénom d'homme, qui
est devenu nom de famille fort commun. Il fait au fera.
Bourtoumigo , et au dim. Bourtnumigué. — Sén-Bourlou-
mioii , la Sainl-Barthéicmy, jour de la foire principale
d'Alais, qui commence le 24 août et dure huit jours. C'est
une date fort intéressante pour tout le pays, parce qu'elle
sert de terme aux baux à loyer et à ferme, à la location des
domestiques des champs, et à la plupart des transactions
et des échéances de rentes foncières. Quouro que vèngaa
Sén-Bourtuumiou y-doura dous uns, il y aura deux ans,
vienne la Saiut-Barlhélemy : forumlc générale de comput
de date pour les paysans, qui prennent ainsi pour point
de départ, tantôt une fête, tantôt une récolte, tantôt l'époque
d'un travail qui se fait à temps fixe : quouro que vèngott
las pruHos, loas Avéns, lous cabosses, vienne la saison des
prunes, l'A vent, l'époque des provins. Finis sous ans pér
Sén-Bourtoumiou, il compte ses années à partir de la Saint-
Barthélémy ; il est né aux environs du 24 août. La Fare,
dans SOS Castagnados, a fait fie la Fièïro dé Sén-Bourtou-
miou, un tableau du genre des plus gais et des mieux
réussis.
Dér. du lat. Bartholomeus.
Bouru, udo, adj. Dim. Bourudé, péjor. Bourudas, asso.
Velu ; couvert de poils ou de bourre. Au fig. bourru,
inquiet avec grossièreté. Au jeu de la bouro, celui qui a
fait une mauvaise affaire, une spéculation ruineuse. —
M'a fa bouru, il m'a mis dedans. Estre bouru émbé lou rèï,
perdre avec beau jeu; en effet, au jeu de la bouro, quand
on ne fait pas de levée on est bouru, et il est par trop fort
de n'en pas faire, quand on a en main le roi, qui est la plus
forte carte.
Bousa, V. Fienter; mais il ne se dit (jue du gros bétail
domcsti(iue, dont les excréments se nomment bouso.
Bousado, s. f. Augm. Bousas. Fientée ; tas de boùae
que les bœufs ou les vaches ont rendue en une seule fois.
Dér. de Bouso.
Bousanqué, éto, adj. Homme ou femme de très-petite
taille ; bamboche; nabot. Il est devenu n. pr. — Voy. Bou-
sérlé.
Dim. de Bousas.
Bousas, s. m. Péj. Bousassas. Fientée énorme. Au fig.
homme ou enfant de taille basse et large, îi la fibre lâche
et molle.
Augm. de Bouso et de bousado.
Bouscarasso, s. f. Bois fort épais et mal entretenu, où
les ronces et les plantes sauvages abondent ; fourré sau-
vage.
Péj. de Bouscas.
Bouscardiè, s. m. Bûcheron, qui coupe et qui dépèce
les arbres sur j^ace ; qui habite les bois.
Dér. de Bos.
Bouscardièïro, s. f. Bûcher; hangar au bois; lieu où
l'on serre le bois de chauffage. — Voy. Piolo.
Dér. de Bos.
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Bouscarido, ». /". Dim. Bouscan'léio. Fauvette ; l)ec-fin
à tète uiiire, Sylvia alricapilla, Teiiirn., do la fam. de»
PassiTiMux. O; cli.'ii'iiiant oiseau, le seul qui puisse riva-
liser avec le rossignol par son chant, (|ui dure plus long-
temps s'il est un |iou moins parfait , est fort commun à
son double passage d'automne cl de printemps ; il en reste
aussi l)eaucoup en hiver dans lo jiays. 11 vit d'insectes et
de larves, ainsi que des baies du sureau et du groseiller, et
fait son nid d-.ms les buissons d'aul^'pine et d'C'glantier. Il
a le dessus de la tète d'un noir profond, le corps cendré,
légèrement nuancé d'olivâtre à la queue et aux ailes, le
ventre et la gorge inclina'iit au blanchAtro. Lo nom de
Bouscarido, qui vient ùvidem;iiL':il A3 boi, li.ibitnht, ama-
teur (les Iwis, s'applique bien p.irticuli 'reim'nt à cette fau-
vette, mais il se donne égalernsnil aut autres espèces de ce
genre, qui sont nombreuses. C'est que le languedocien n'est
point une langue de savant; il se contente de tracer à
grands traits et abandonne les détails. Ce n'est point par
pénurie, car il donne souvent plusieurs noms au même
individu, mais il est frap[)é surtout de la difTorencc des
genres et néglige ou dédaigne les nuances, insignifiantes
souvent, qui distinguent les variétés. Nous le verrons ainsi
confondre sous le nom do turlano et de mouïcé la plupart
des oiseaux, de proie, de sèr, de lusèi- ou Utrou, de raiopé-
nado, de grapànu, toutes les espèces de ces animaux, qui
sont très-nombreuses et qui ont chacune un nom ou une
6pithètc différents dans la science. On p^mrrait citer bien
d'autres exemples de ce genre qui se retrouveront.
Bouscarido, et par abrév. Bouscar, est un sobriquet que
l'on donne A quehpi'un do frôle, maigre et fluet.
Bouscarido (Grosso), s. f. Silclle ou Torchepot, Siita
Europe)!, Linn. Cet oiseau, qui a les plus grands rapports
avec les pies, vit sédentaire chez nous. Il a les parties supé-
rieures du corps d'un cendré bleuAtre, la gorge blanche, les
flancs et les cuisses d'un roux marron. — Voy. Raté.
Bouscarlo, j. f. Fauvette ; variante de Bouscarido, qui
a la même racine et s'applique aussi aux mêmes variétés
de fauvettes. — Voy. Bou.scarido.
Bouscas, s. m. Gros bois ; grande forôt; forêt solitaire ;
bois qui brùlo difficilement; mauvais bois. — Yoy. Bous-
cara-iso.
Augm. et jh-j. de Boi.
Bouscas, casso, s. et adj. Sauvage; sauvageon; braiichc
non greffée; bâtard; faux. — Leva lou bouscas. enlever les
pousses de sauvageon d'un arbre. Pèro bouscas, père nour-
ricier. Fraïre boiiscax, frère utérin ou consjinguin. Cousis
bouscas, cousin bâtard, parent fort éloigiK'. Las litaniai
botiscassos, dos chants obscènes, grivois ; la mère Gaudl-
chon. Fron bouscas, front très-étroit, où les cheveux sont
très-bas plantés.
Péjor. de Bos.
Bouscassino, s. /. Généralité des arliros-sauvageons ;
pous.ses de sauvageon qui sortent tout le long de la tige
^un arbre greffé à la tête, qui forment souvent comme des
buissons, et qu'il faut se hMet d'enlever pour ne pas affa-
mer le bourgeon de la greffe.
Dér. de Bouscas.
Bousérlé, s. m. Enfant tout petit de taille, menu,
mignon. Il est, comme bousanqué, un dim. de bousas, mais
il n'entraine pas, comme lui, une idée de ridicule ; il ne
s'iittache qu'aux enfants, tandis que bousanqué s'atlaclio à
des individus de tout âge. — Voy. Bousanqué.
Boasiga, v. Fouiller, remuer, soulever la terre avec le
grouin, & la manière des pourceaux et des sangliers. Par
exl. giter un ouvrage, bousiller, le gâcher, le faire à demi
et sans régularité ; rabAcher ; ressasser. — Bou.iiga lou fêlé,
est ce que fait un enfant à la mamelle, quand il donne des
coups de tête au sein de sa mère pour faire venir le trait
ou le jet de lait.
Dér. do Bauso et du lat. agere, remuer, agiter, parce
que tout le monde sait que c'est surtout dans la fiente que
les porcs aiment à fouiller.
Bousigado, .t. f. Trace laissée dans un champ par le
fouillenient des pourceaux; barbouillage, mal-façon.
Dér. de Bousiga.
Bousigadoù, s. m. Fouillis ; endroit hanté par les porcs
et surtout labouré par leurs œuvres ; groin ; gros nez qui
ferait croire que le propriétaire pourrait s'en servir à bou-
siga, iron.
Bousigaïre, s. m. Mauvais ouvrier; celui qui gfktc un
travail. Au fig. rabicheur.
Dér. de Bousiga.
Bousigaje, s. m. Bousillage; ouvrage, travail mal fait;
œuvre donnée à un champ, peu profonde, inégale, toute de
trous et do bosses, comme si elle était faite par le groin
d'un porc.
Dér. de Bousiga.
Bousin, (. m. Tapage; tintamarre; train; rumeur. —
Yoy. Boucan. Par ext. mauvais lieu, lieu de délwuchc.
Emp. au fr. mais le lat. Buccinare semble ne pas être
étranger à sa formation.
Bonso, s. f. Fiente, crottin des Iwcufs, vaches, ânes,
chevaux et mulets. — Ramassaïre dé bmao, le dernier
degré sur l'échelle sociale, ou plus académiquetnent sur la
roue de la fortune ; ce métier, consistant à ramasser du
crottin sur les routes, est sale et donne de jwtits bénéfices;
aussi n'est-il exercé que par les enfants, les vieilles femmes
et les hommes hors d'état de travailler. Doux jeunes enfants
se rencontrent; le plus grand dit à l'autre : Dé que fat?
— Ramasse dé bousos, it lus ? — Oh I ïéou, soûl à las bro-
quo.i. Et lo plus petit d'envier son camarade qui avait fait
son avancement; car, quittant son premier métier, il était
passé raraasseur de bûchettes. — Para bé la bouso pér la
gorjo, expression fort sale, mais très-énergique, pour dire
qu'une personne, vivement contrariée, irritée, va finir par
exhaler sa colère, vomir sa bile et son venin.
Dér. du gr. Bwtrraafa, venu de Boî;, bœuf.
Boussa, V. Former une bosse, s'élever en protubérance ;
134
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se dit surtout des plantes tuberculeuses ou bulbeuses,
comme les pommes de terre, les raves, les aulx, etc., lors-
qu'elles commencent à développer leurs tubercules ou leurs
caïeux.
Di'-r. de Jtoxso.
Boussado, s. f. Dim. Boiasadéta. Contenu d'une bourse;
plein une bourse; magot d'un avare ; iH^cule d'une femme,
qui se dit mieux faté(o.
Di?r. do Boiisso.
Boussar, ardo, ndj. V6'\. Bmissanlas. Vilain bossu;
mauvais bossu; se prend toujours en mauvaise part.
Péjor. de Bnttssu.
Boussargue, s. m. n. pr. de lieu. Boussargues, village,
dans la viguerie de Bagnols, Broasanicœ, dans le dénom-
brement de la sénéchaussée de Nimes.
Y. pour l'étym. l'article Vos.
BoussèlO, s. f. Dim. Boussèlélo; péjor. Boitssélassn.
Oignon de fleurs; tète d'ail, qui est composée d'un assem-
blage de plusieurs caïeux ou gousses, béségnos.
Dim. de Bosso.
Boussi, s. m. Dim. Boussiné. Morceau ; bribe ; petit las.
— Voy. Flo, Tèfle, Tro.
Dim. do Bosso.
Soussignolo, s. f. Dim. Boussignouléto. Petite bosse ;
bosse an front ; excroissance ; protubérance ; bosse de cha-
meau; tuméfaction quelconque.
Dim. de Bosso.
Bonssignoula, v. Enfler; se former en bosse; tuméfier.
— 5o('n fron hovssignoulè tout dé suito, l'œdème se forma
tout de suite sur son front.
Bousso, s. f. Dim. Bousséto, péj. Boiissasso. Bourse;
petit sac de peau, de fil, ou de soie, où l'on met de l'argent; .
par ext. l'argent que l'on a, dont on peut disposer. — Es
élo que garda la bousso, c'est la femme qui tient les cor-
dons de la bourse. A bono bousso, c'est un richard. Vôou
ma'i amis en cour qu'argén en bousso, exp. prvb., la
faveur en justice vaut mieux que l'argent. Tant gué vou-
ras ami, mais que la bousso noun toques, prvb. ami jus-
qu'à la bourse.
Dér. du gr. BJpia, ou Bjfai;, peau, cuir, parce que les
premières bourses en étaient faites.
Boussà, ». m. Gousset, petite poche placée près de la
ceinture de la culotte, où autrefois on tenait l'argent pour
porter avec soi.
Curo-houstt), vide-gousset, est le nom d'un village sur la
route de Nimes à Bcaucaire, qui autrefois n'était qu'une
taverne de route. Ce nom lui fut-il donné parce qu'on y
faisait bonne clièrc et qu'on y buvait du bon, ce qui allé-
chait les voyageurs à y vider leur gousset, ou bien cette
taverne avait-elle mauvais renom, et supposait-on que le
gousset s'y vidait un peu contre le gré de ceux qui étaient
forcés de s'y arrêter ? La première version est plus chari-
table, la seconde est mieux dans les mœurs du temps où
le surnom a été donné. — Par ext. on appelle curo-b(A»sà
tous les objets de dépense habituelle et les enfants qui
font des apiiels fréquents à la bourse de leur père ou qui
leur coûtent beaucoup pour leur ('xlucation. — Gratas itn
pdou voste Imussb, mettez la main à votre gousset, dit à son
père un fils qui demande de l'argent.
Di't. de Biiiissn.
Boussu, udo , adj. Dim. lloussudé, péj. Boussudat.
Bossu, qui a une bosse; montueux; inégal ; contrefait. —
Faï nousvéïre se siàs boussu, tourne sur tes talons et va-
t-en. S'oii vos pas croire, vendras boussu, si tu ne veux
pas le croire, tu deviendras bossu, c'est-ù-dire Dieu te
punira. Dé jouine médéci, céméntèri boussu, le jeune méde-
cin peuple le cimetière.
Dér. de Bosso.
Boussuduègno, s. f. La gent bossue ; la race des bossus ;
express, collective, avec le suffixe iiègno : à conférer à
Bastarduègno, Éfantiiêgno, etc. — V. C. m.
Dér. de Bos.io.
Bouta, V. Mettre, poser, placer.
Ce terme est très-élastique ; ses diverses acceptions
s'étendent à beaucoup d'actes. Queliiues exeiriples aideront
à en bien comprendre les sens divers. — /imitas qii'ague
pas rés di, faites comme si je n'avais rien dit. Lmis cahris
boutou dé banos, les cornes commencent à pousser aux
chevreaux. Las fédos boutou dépièï, les brebis commencent
à avoir les mamelles gonflées, preuve qu'elles mettront bas
bientôt. Afjiiél éfan bouto dé déns, les dents commencent à
percer à cet enfant. Bouta davan, faire marcher queliju'un,
un troupeau devant soi. Boutas-y la man, mettez la main
à cette affaire. Bouta cotre, mettre le pot au feu, ou en
terme de boulangerie, enfourner le pain. Bouta fia, com-
mencer une chose que d'autres feront après; attacher le
grelot. Bouta lou lévan, mettre le levain, pour faire le pain;
au fig. semer des ferments de discorde.
Dér. de la bass. lat. Biitare.
Boutado, s. f. Ecluse, réservoir d'un moulin; le pre-
mier lait qui vient aux mamelles après l'accouchement.
Dér. du gr. HM;, fond, profondeur.
Bontar, s. m. Gros tonneau; tonne; foudre.
Augm. de Bouto.
Boutas! interj. Sorte de locution explôtive, qui n'a
rien de commun avec le v. bouta. Quand elle est prise inter-
jectivemcnt, elle répond suivant les cas à : Allez donc!
Allons donc ! Mon Dieu, non ! Je vous en prie ! Allez !
.\ttendez, attendez ! Bon ! — Doutas ! fasi-m'aquél plèst,
ah! rendez-moi ce service, je vous en supplie. Ah/ boutas!
mon Dieu, non, vous n'y pensez pas ! Est-ce possible 7 Bou-
tas, boutas ! es pas tan néci, allez, allez, il n'est pas si sot
qu'il en a l'air. Routas ! laïssa-lmi dire, ne vous tourmentez
pas, laissez-le dire. Boutas.' n'agués pas pdou, allez, ne
craignez rien. Ah ! bouta-vmis , ah ! laissez-donc ! Vous n'y
pensez pas! Ce sont des balivernes. — Ce dernier exemple
présente un idiotisme qu'il faut remarquer. L'interj. a pris
ici tout à fait, pour ainsi parler, la forme verbale, c'estrà-
BOU
BOl)
135
k
dire que boutas est considéré comme un temps du verlw
bouta. Il entre alors dans une règle générale et invariable
qui veut que, lorsqu'un verbe à la î""" personne plur. de
l'impératif est suivi iininédtatemcnt du pronom pour régime,
on supprime 1'» final : Âima-vous, régarda-mé, réicoundè-
lou. Ainsi boiita-voits, laissez donc. Dans ce cas, comme
dans les précédents, i^reste une observation : boutas est la
forme respectueuse et plurielle; au sing., avec la môme
acception, on emploie : Bouta! bouta! va! va! Bah! pas
possible! Bon, bon! que dis-tu là? Boulo! vingues pas,
va, je t'en prie, ne viens pas. Bouta ! té troumpes, bien vrai,
tu te trompes. Bouta! save ce que tènes, va, va, je sais ce
que tu vaux. Bouta! qu'où faras bé, j'en suis sur, tu le
feras.
Bouté, s. m., ou Siblé. Tuyau de greffe, pour enter en
flûte ; virole d'écorce prise à un scion franc, qui a un ou
deux, œilletons et qu'on insère dans un scion écorcé de
^uvageon. Il faut faire attention que cette virole soit juste
à la place qu'elle doit occuper : trop large, elle perdrait la
sève et laisserait l'air circuler entre elle et le sujet ; trop
étroite, elle se fendrait avant d'arriver à sa place.
Dira, de Bon, bout.
Boutéïa, ado, adj. Qui a de gros mollets. — Bien bou-
téïa, (|Hi a de forts mollets, bien pris, bien tournés.
Dér. de Boutét.
Boutéïè, s. m. Plant, semis de courges, de toute espèce
de cucurbitacées. — Voy. Cougourliè.
Dér de Boutera, courge.
Boutéïo, s. /". Dim. Boutététo; augm. et péj. Boutéïasso.
Bouteille ; vase de verre ou d'autre matière, à long col et
à large ventre, propre à contenir les liquides ; quantité de
liquide contenu dans la bouteille. — Sour coumo uno boit'
têio, sourd comme un pot. Béoure boutéto, boire chopine.
La bo fèio l'a mes aqui, le vin l'a tué.
Dér. de B uto, dont boutéïo est un dimin.
Boutéïo, s. f. Courge de toute espèce, la famille appelée
cucurbitacée ; potiron. — Boutéto étivinadouïro, espèce de
courge, étranglée par le milieu, renflée par les extrémités,
dont on fait les gourdes à vin. (1*6!;. Gourdo.) Los autres
e^)àces sont : la cougourlo, lou pastis, lou courné , ta
eouasso.
Dér., comme le précéd., do Bouta, parce que la courge
sert aussi de vaisseau à vin.
Boutéïoù, s. m. Graine ou pépin de courges et des
cucurbi lacées en général.
Dér. et dim. de Boutéïo.
Boutél, s. m. Dim. Boutéïé, boutéïoù, péj. Bouléïas.
Mollet, gras de la jambe. — A miè boutél, à mi-jambe.
long d'esquino, prin dé boutél, rasclo m'aquél, mot à mot:
long d'écliine, fluet de mollets, n'est pas redoutable, atta-
que-le; longue taille et jaml)es grêles annoncent la faiblesse
de la constitution, qui rendent propre il recevoir uno raclée.
Faire tous bautéls énd'un éfan, fêter à table le baptême d'un
enfant.
• Ce mot parait avoir la même étym. que le fr. botte, fais-
ceau d'herlxîs, parce que le mollet est un faisceau de mus-
cles et tendons.
Boutigna, f., ou mieux Réboutigna, Bouder; rechi-
gner; répondre avec aigreur; revenir sans cesse sur un
grief passé; se montrer capricieux, mutin, chagrin.
Boutignaïre, aïro, adj. Péjor. Boutignaïras. .Mieux
Réboutignaïre. Boudeur; rechigné; capricieux; mutin;
chagrin.
Bontigo, s. f. Dim. Boutiguéto; péj. Boutigasso. Bou-
tique.
Ce mot, en fr., s'étendait autrefois aux industries et
aux professions les plus lil)érales, de l'échoppa du savetier
aux brillants magasins de nouveautés et à l'étude ou plutôt
au cabinet du notaire ; il ne s'élève pas plus haut aujour-
d'hui que la boutique du regrattier. Le lang., qui ne veut
pas être en reste, a suivi la progression de la mode ; mais
il lui a fallu emprunter au fr. les apjicllations plus pom-
peuses pour lesquelles il n'a pas été consulté, attendu
qu'elles lui sont arrivées toutes formulées de Paris. Aussi
est-il obligé de se faire patois, quand il entre chez le bot-
tier à la mode, pour appeler sa boutique un aféii. Cepen-
dant il a conservé l'ancien vocable, sinon dans toutes ses
applications, au moins avec certaines acceptions caracté-
ristiques dont il use encore.
— Faïre boutigo, tenir une boutique, tenir un tout petit
commerce de détail. FaX bien boutigo, il est achalandé ; il
est gracieux et prévenant pour les chalands. Bara boutigo.
fermer boutique ; faire banqueroute ; au fig. se taire. Leva
boutigo, commencer un commerce ; au fig. se battre, se
quereller; susciter une rixe.
Dér. du gr. ^\ml^■Kr^.
Boatiguiè, s. m. Au fém. HoutiguUïro. Boutiquier, bou-
tiquière ; celui ou celle qui tient boutique; petit marchand
en détail.
Dér. de Boutigo.
Bouto, s.f. Dim. Boufeto; augm. Boutar.fé]. Boutasso.
Tonneau ; fût ; futaille. Lorsque le tonneau de ce pays est
pris pour mesure de capacité, il contient 360 litres, ou six
barraux. — Béoure à la barbo dé la bouto, boire à même
le tonneau, en plaçant la bouche à la canelle. Bouto-trém-
piiïro, tonneau à piquette, trempo, que l'on tient à part
pour cet objet, parce que le vin pourrait en être détérioré.
Bouto-caréiiiiro , petit tonneau qu'on place debout et
défoncé sur une charrette pour charrier la vendange.
Dér. de la bass. lat. Buta; on allem. butte, barrique,
cuvior.
Bouto! interj. S"" pers. sing. impér. do Bouta. Terme
de menace, qui s'emploie dans toutes les acceptions, quand
on tutoie l'interlocuteur. — Voy. Boutas.
Boutoù, s. m. Dim. Boutonné; péj. Boutounas. Bouton
d'habit ; de fleur ; bubon, élevure sur la peau ; Iwurgeon
d'arbre; moyeu de voiture, de charrette ; testicule d'animal.
Dér. de la bass. lat. Botonus, bouton, que Roquefort
136
BRA
BRA
fait venir de ftoufa , mettre; hoionus signifie également
bont, extn''inité, ce qui le rend applicable à toutes les
acceptions.
Boutougnèïro, s. /". Diiu. Voulougmïrélo, pi5j. lloutoit-
gnèïrasso. Boutonnière, {«tite entaille faite à un habille-
ment quelconque pour y passer un bouton. Au fig. estafi-
lade à la peau, blessure.
Dér. de Boiiloù.
Boutonna, v. Boutonner, attacher, fixer avec des bou-
tons. Boulonner , bourgeonner, pousser des boutons , en
parlant des plantes à fleurs, des arbres.
Boutonna, part. pass. Bourgeonné, couvert de bubons;
au fig. boutonné, discret, caché, dissimulé.
Se boutonna, se boutonner; être discret, dissimuler.
Dér. de Boutoù.
Bouvé, s. m. Bouvreuil, pivoine ou pivète. Pyrrhula
vulgciris, Temm Ce joli oiseau a le dessus du corps d'un
noir lustré de violet et le dessous d'un beau rouge minium,
excepté le bas-ventre et les couvertures inférieures de la
queue qui sont blancs. Il se nourrit de baies, de bourgeons
des îrbres et de graines. Il s'apprivoise facilement, retient
les airs qu'on lui siffle et apprend à parler.
Bouvé,!. m. Bouvet, terme de menuiserie, rabot destiné
il faire des languettes et des rainures.
Bouviè, s. m. Bouvier, celui qui conduit les bœufs;
valet de charrue. La planète Vénus, lorsqu'elle parait
avant l'aurore, est désignée sous le nom de Bouviè.
Ce mot a servi à former le n. pr. Bouïè, en fr. Boyer.
Dér. du lat. Bos, bovis, bœuf.
Bracana, adj. Dim. Bracanadé, bracanadoù, péj. Bra-
canadas. Bariolé; moucheté, tigré; tacheté; tavelé; mar-
qué de bandes, de taches, de zig-zags, en couleurs tran-
chantes sur le fond.
Dér. de l'ancien lang. Brac, tache de boue.
Bracongnè, s. m. Braconnier, chasseur par contrebande;
celui qui chasse furtivement.
Dérive-l-il du gaulois Brac, boue, bourbier, parce que
les braconniers s'exposent à traverser des flaques d'eau, à
séjourner dans des mares, ou du lat. bracca, chausses, sorte
de vêtement de la Gaule dites Braccata? Il est fort possible
que les premiers braconniers aient été des soldats licenciés,
comme on en voit tant dans le moyen âge, qui étaient
obligés de chercher des moyens d'existence dans le pillage
et le braconnage.
Brafa, v. Bâfrer; manger goulûment; goinfrer. — A
tout brafa, il a dévoré tout son patrimoine.
En bas-bret. Dibriff, m. signif.
BrafadO, s. f. Diin. Brafadélo, péj. Brafadasso. Bâfre;
repas abondant; coup de dent solide.
Dér. de Brafa.
Brafaïre, aïro, adj. Dim. Brafairé, péj. Brafaïras.
Bàfreur; goinfre; gros mangeur.
Dér. de Brafa.
Bralo, ». f. Bàfrerie; goinfrerie ; la gueule. — La brafo
Il fariè faire fnssn rdnuso>i, il n'est rien qu'il ne fil pour
un bon repns.
En bas br. Dibriff, manger.
Bragassargue, s. m. n. pr. de lieu. Bragassargues, com-
mune dans le canton de Quissac, arrondissement du
Vigan.
Ce village est connu dans les tijfes sous le nom lat.
Brucassanicœ. Dans la première syllabe, ]iar un accident
très-fréquent, il y a eu nmtation des consonnes : / est
devenu r. La substitution étant.certalne, ou obtient blacat
pour radical tiré de Mac, celt., jeune chéjie, et fort bien
employé dans notre langued. avec l'orthographe Blaquas.
(V. c. m. et Blaqaarédo.) Quant à la finale lat. explétive
anicœ, représentée par argue, nous renvoyons aussi à nos
explications. L'analogie amène immédiatement les noms
similaires répandus dans nos environs : Blaquéxras, La
BlaquiHro, hameaux de la commune de Cendras, de Pom-
miers, de Peyroles, de Savignargues, et autres, et Blacoàs,
dans la commune de Cardet.
Braïa, v. Culotter; mettre une culotte ou un pantalon.
— Se hraïa, mettre sa culotte, le pantalon aujourd'hui. La
gradation est sensible ; le lang. est resté gaulois avec les
brayes ; la traduction fr. est obligée de se servir du mot
qui ne s'applique plus à l'objet désigné, et pour se faire
comprendre, d'adapter le mot nouveau qui n'est pas encore
devenu un verbe.- — Es braïa bien juste, au fig. il a tout
juste ce qu'il lui faut pour vivre. Se bra\o bé nàou, il a
bien de la morgue pour sa condition. Un amouriè bien
braïa, un mûrier bien fourni- en feuille dans l'intérieur de
ses grosses branches. Un par bien braïa, un porc dont les
jambons sont bien fournis en graisse. Un braïo-l'ase, un
nonchalant, un niguedouille ; ou bien un homme qui veut
se mêler d'un ouvrage de femme, ou de ce qui n'est pas
dans ses attributions.
Dér. de Braïn.
Braïa, v. Brailler; babiller sans mesure; criailler;
chanter.
Dér. de la bass. lat. Bragulare, criailler, faire du bruit.
Braiar, arda, adj. Dim. Braïardé, braïardoù; péj.
Braïardas. Braillard, qui parle haut, sans cesse, hors de
propos ; brailleur ; tatillon ; qui se mêle de ce qui ne le
regarde pas ; qui fait l'important. — Dé que se mêln aquél
braiar? que veut donc ce braillard? que vient-il ici four-
rer son nez?
Dér. de Braïa, brailler.
Braïardije, s. m. Importance, manie de se mêler des
affaires des autres.
Dér. de Braiar.
Braïasso, .5. m. Qui est mal culotté; qui laisse tomber
sa culotte en marchant ; par ext. qui a les jambes courtes
et le derrière bas. Péjor. de braiar, importun, curieux,
tatillon.
Dér. de Braïo.
Braïéto, s. f. Primevère des prés à fleur jaune, Primula
BRÀ
BRA
137
officinalis, Linn. Plante de la fam. dos Prinmlacées. Oreille
d'ours, primevèro des jardins à flenr rouge ; variété.
Dér. de Braïo, et dim. probablement parce que sa fleur,
en forme de calice, est recouverte, à moitié de sa longueur,
par une enveloppe verte, ressemblant à un canon de
culotte.
Braïo, t. f. Dim. BraUto, péj. Vrdiatto. Culotte, pan-
talon ; brayes, braie ; chausses. — Donna la» braïos, culotter
tin enfant pour la première fois. Un cago-braïo, terme de
mépris, un chie-en-lit, un Iftche, un poltron. S'en tira las
braios néios, s'en tirer les braies nettes, se tirer adroite-
ment et sans pertes d'une mauvaise affaire. Quito pas mas
braïos, il m'est toujours après, c'est un importun dont je
ne peux me débarrasser.
Dér. du celt. Brag, d'où le lat. Braca, bracca, braceœ.
Brama, v. Braire, comme les àncs; crier, brailler ; pleu-
rer comme font les enfants ; pleurer en général. — Lou
diable lé brame ! peste soit du pleurard ! Cette locution
revient souvent sans que le diable serve de nominatif au
verbe; on dit de même : lou diable té rigue! peste du
rieur! Lou diable té démore.' peste soit du lambin qui
n'est jamais prêt ! Un bramo-fan, un prêche-misère, un
crie-famine, qui cric famine sur un tas de blé. Latsso lou
brama as ases, laisse le braire pour les ftnes, dit-on de quel-
qu'un qui pleure sans sujet. Bramo coumo un biôou, il ne
crie pas, il beugle. Quan douras prou brama, quand tu
auras assez pleuré. A brama soun sadoul, aro se pdouto,
il a pleuré tout son soûl, maintenant il se repose.
Dér. du gr. Bp^fistv, frémir, braire, gronder. En bas-bret.
Bram, en ital. Bramare.
Bramadis, t. m.,ouBramadisso, s. f. Pleurs continus;
criaillcric soutenue d'un enfant; manie de pleurer; naturel
d'un enfant pleurard; braiement prolongé de plusieurs
ânes, soit à la fois, soit par dialogues.
Dér. de Brama.
Bramado, t. f. Dim. Bramadéto, péj. Bramadasso.
Durée du braiement d'un ftne ou des pleurs d'un enfant ;
interruption jusqu'au temps d'arrêt qui les sépare d'une
reprise.
Dér. de Brama.
Bramadoù, ». m. Gosier, au fig.; l'instrument par
lequel un cnfanl pleure.
Dér. de Brama.
Bramaïre, aïro, adj. Dim. Bramaïré; péj. Bramairas.
Pleurard; braillartl ; brailleur; qui pleure ou crie conti-
nuellement.
Dér. de Brama.
Bramovaquo, s. f. Gratiolc, Gratiola offlcinalis, Linn.
Plante dé la fani. dos Personnées, médicinale, employée
souvent par les indigents comme émétique et purgative.
Brancu, udo, ndj. Dim. Brancudé; péj. Brancudas.
Branchn ; qui a beaucoup do branches ; qui se termine en
forme de fourche. — Yoy. Branquaru.
Dér. de Branquo.
Branda, v. a. et n. Branler, ébranler; agiter en divers
sens; remuer fortement; secouer; pousser deçà et delà;
branler; être peu solide, branlant; chanceler; balancer. —
Aquél iôou brando, cet œuf cloque , il a du vide. Branda
las eambos, liattre le pavé, faire le fainéant. Tout ce qui
brando tombo pas, tout ce qui menace ruine ne tombe pas.
Branda las eampanos, sonner les cloches ; an pr. et au fig.
Branda-nicouldoit, être faiseur de bas au métier. Brando-
pinto, ivrogne, amateur de la dive bouteille. C'est le surnom
qu'on donnait aux habitants du Collet-de-Dèze. Branda un
Aoubre, secouer un arbre. Branda àou manche, branler au
manche. Al vno dén qui brando coumo uno sovnaïo, j'ai
une dent qui branle comme une sonnette. A toujour
quâouque fère que li brando, il a toujours un fer qui loche,
au fig. il a toujours des entraves ou quelque affaire qui
cloche. Tdoulo que brando, table qui chancelle.
En ital. Brandire, brandir.
Brandi, v. Secouer avec force; branler; ébranler rude-
ment. — Vou lou brandiguèrou coumo se déou, on vous le
secoua, on le pelota comme il faut.
En esp. Brandir.
Brandido, s. f. Secousse; saccade; branle; remuement.
Au fig. reproche, mercuriale; semonce.
Dér. de Brandi.
Brandimar, ardo, adj. Péj. Brandimardas. Grand
vaurien; fainéant; grand flandrin.
Ce mot vient évidemment de Brandimart, l'un des per-
sonnages de l'Arioste. Un grand nombre de ces person-
nages sont passés proverbialement dans le fr. et le lang.,
comme rodomont, sacripant, etc. Mais si Rodomont a con-
servé son caractère en s'adjectivant, il n'en a pas été de
même pour Sacripant et Brandimant, car dans le poème
italien leur caractère est à peu près l'opposé de celui que
leur donnent le fr. et le lang.
Brandin, ino, adj. Brandinas, asso. Fainéant; batteur
de pavé; flandrin; dégingandé.
Dér. de Branda.
Brandin-Brandan, adv. Sorte d'onomatopée de mouve-
ment ; bras ballants, balançant de droile et de gauche,
comme un pendule ; démarche dégingandée.
Rôdupl. de Branda.
Brandinéja, v. Fainéanter; battre le pavé; gueuser.
Dér. et fréq. de Brandi.
Brando-quuïo, s. f. Bergeronnette. — Voy. BirgHrito,
Couach", Galapnstre.
Brandouïa, v. Brandiller; branler; secouer vivement.
Se brandouia, se balancer, se dandiner.
Dér. et fréq. de Branda.
Brandussa, V. Secouer rudement ; branler; brandiller.
Se brandussa, se dandiner en marchant; sui\Te des épaules
le mouvement des jambes. — Brandussavo sa lèsio, il
branlait la tête.
Dér. et fréq. de Branda.
Branle, s. m. Branle; danse; ronde. — Anan fa\re lou
18
138
BRA
BRÂ
branle, nous allons danser la rondo. Lou branle dé Pala-
dan, Imt pu nèci es lou pu gran. chanson qui acœmpagno
une ronde d'enfants, au dernier mot de laquelle chacun,
pour ne pas être pris ou donner un gage, se pelotonne et
se fait petit ; le plus grand est le sot qui paie.
Branoùs, s. m., n. pr. de lieu. Branoux, hameau de la
commune de Blannaves. — Voy. Blannavo.
Branquado, s. f. Diiii. Branquadéto. Branche chargée
de fruits ou de feuilles de mûriers, qui s'éloigne assez du
tronc pour qu'on ne puisse les cueillir sur l'arbre sans
échelle; rameau hors de portée couvert de fruits; grain de
folie.
Dér. de Branquo.
Branquaie, s. m. Branchage; ensemble des rameaux et
branches d'un arbre; bois-menu produit des branches.
Dér. de Branquo.
Branquar, s. m. Brancard, espèce de litière pour trans-
porter un malade, sorte de civière pour porter des far-
deaux, des pierres ; les bras d'une charrette entre lesquels
on attelle le cheval.
Dér. du lat. Brachium.
Branquam, udo, adj. Branchu, qui a beaucoup de
branches. — Voy. Brancu.
Dér. de Branquo.
Branquas, s. m., ouBranquasso, ». f- Grosse branche;
longue et grosse branche considérée comme une arme.
Augment. de Branquo.
Branquo, «. f. Dim. Branquéto, péj. Branquasso. —
Branche d'arbre; branche de rivière ; brin ; division ; por-
tion ; racine ou germe d'un mal ou d'un défaut.
Dér. du celt. Branc, d'où le lat. brachium, et la bass.
lat. branca, branche.
Bràou, s. m. Dim. Bràoudé, Brâmidoù, péj. Srâoudas.
Taureau, bœuf entier. — Brama coumo un hràou, beugler.
Aquà's un bràou; for coumo un brdou, il est fort comme
on taureau.
Dér. du bas-bret. Braw, qui a fait aussi l'adj. brave, et
le fr. brave. En lat. bravium,, et en gr. BpaSaov voulaient
dire : prix des jeux, prix de la bravoure et de la force.
Partis aussi signifiait brave et fort : les deux qualités
suprêmes. Le taureau était chez tous ces peuples le type
adopté de la vaillance et de la force.
Braqua, v., mieux Âbraqua. Braquer, tourner vers ;
fixer un but. — / braqué sous doits ièls dessus, il braqua
ses yeux sur lui. — Voy. Abraqua.
Emp. du fr.
Bras, s. m. Dim. Brassé, brassoù; augm. Brassas- Au
plur. Tirasses; dim. plur. Brassés el Brassoiis. Bras, membre
du corps humain qui tient à l'épaule; ce qui en a la forme,
la figure, l'usage ; au fig. action, force, puissance. — A pas
que soies brasses , il n'a que ses bras pour le nourrir. Sèn
prou brasses aïci, il y a bien assez de bras ici. Brasses
d'uno caréio, brancard d'une charrette, timons. En bras dé
camiso, en manches de chemise. Lou bras dé Diou, la
puissance, le bras, la main de Dieu. A lou bras long, il a
les bras longs; il peut beaucoup.
Dér. du lat. Brachium.
Brasa, v. — Voy. Abrasa.
Brasas, s. m. Au plur. Brasasses. Grand brasier; gros
tas de braise ; foyer bien garni de braise et qui ne flambe
plus.
Augm. de Braso.
Brasièïro, s. f. Dim. Brasièiréto. Brasier, récipient à
braise, en fer ou en terre, pour chauffer un appartement.
Dér. de Braso.
Braso, s. f. Braise, charbon allumé ou portion de bois
brûlé qui ne donne plus de flamme.
Dér. du bas-bret. Bras, braise, du gr. BpiÇoj ou Episuto,
bouillir; en allem. Brasen , brûler. Esp. Brasa, ital.
Bragia .
Brassado, s. f. Dim. Brassadélo, péj. Brassadasso.
Brassée, ce que peuvent enceindre les bras étendus en
cercle ; embrassement ; embrassade ; accolade ; même sim-
plement baiser. — A brassado, à pleins bras. — Vno bras-
sado dé bos. une brassée de bois ; uno brassado dé gavèls,
dé païo, uno brassée de sarments, de paille. Faî uno bras-
sado, un baiser, s'il te plait. Arapa à brassado, prendre à
foi de corps.
Dér. de Bras.
Brasséja, v. Gesticuler, remuer les bras avec vivacité
en parlant ; travailler des bras.
Dér. do Bras.
Brasséjaïre, aïro, adj. Gesticulateur ; travailleur à
bras.
Brassiè, s. m. Journalier, cultivateur qui travaille la
terre seulement à bras, et non avec un instrument ara-
toire ou le secours des animaux de labour.
Dér. de Bras.
Brassièïro, s. f. Lisière pour soutenir les enfants qui
commencent à marcher, — Efan à la brassièïro, enfant à
la lisière.
Dér. de Bras.
Brasacado, s. f. Dim. Brasucadéto. Grillade de châ-
taignes sous la braise. — Dans une partie des Hantes-
Cévennes, ce mot est pris pour la châtaigne elle-même,
quand elle est rôtie. — Voy. Afachado.
Dér. de Braso.
Bravamén, adv. Beaucoup; à foison; ni trop, ni trop
peu ; raisonnablement ; médiocrement. — Bravamén, sui-
vant l'intonation, a tous ces sens divers : preuve nouvelle
que le ton fait la chanson.
Brave, avo, adj. Augm. Bravas. Se dit généralement
de beaucoup de qualités du corps ou de l'esprti. Selon les
cas, il signifie : honnête, intelligent, leste, adroit, robuste,
bien portant, sage, de bonne mine. Il se dit aussi des
choses inanimées pour : bon, avantageux, beau. — Un
brave home, un honnête homme. Vno bravo fénno, une
honnête femme. Vno bravo fio, fille sage, de mérite. Sis
BRÉ
BRE
139
brave eotttno un stiou, vous vous portez comme le Pont-
Neuf. Sériât bé brave té..., vous seriez bien aimable si...
Sè$ brave ? vous allez bien ? Vno bravo téro, un champ
assez considérable. Un brave oustdou, une maison confor-
table. Se tén pas riches, séguén braves, si nous ne sommes
pas riches, soyons honnôtes.
Jirave n'a jamais l'acception de brave en fr. Cependant,
faute d'un mot qui réponde à bravoure dans le sens de
courage ou d'exploit guerrier, on dit par exception et en
ajoutant un nom pour qualifier et justifier cette extension :
Brave coumo César, brave comme César. Mais l'exception
confirme la régie, et elle est rare.
Dér. du bas-bret. Braw, on du lat. Bravium. — Voy.
Brâou.
Bravé, éto, adj. Dim. Bravait, bravouné, bravounéto.
Joli; gentil; mignon. C'est là un exemple frappant de la
dégénérescence des mots, quand ils passent par différentes
filières et après un long laps de temps. Celui-ci a la même
origine que le précédent, et voilà leur radical brdou, tau-
reau, qui finit par différentes cascades à l'adj. bravouné,
gentillet, qui semble la qualité la plus antipathique avec
lui.
Bravén, s. m. Nature particulière de terrain assez fer-
tile et ton surtout pour la vigne, mais difficile à labourer
en bonne saison ; car il est très-dur avec la sécheresse et
argileux par la pluie. 11 est composé d'un mélange de limon
et de schiste.
Bravonro, s. f. Honnêteté ; probité. Ne signifie jamais
bravoure ou courage.
Dér. de Brave.
Brégadiè, s. m. — Voy. Bérgadiè.
BrégadO, s. f. — Voy. Bérgado.
Brégan, j. m. — Voy. Bérgan.
Brégandaje, ». nt. — Voy. Bérgandaje.
Brégandéja, v. — Voy. Bérgandéja.
Brégo, s. f. Noise; chicane; querelle d'Allemand. —
Cérgua brégo, chercher noise.
Dér. du gallois Breg, rupture. En esp. Brega, en ital.
Briga, dispute.
Brégoùs, OUSO, adj. Dim. Brégousé; péj. Brégousas.
Querelleur ; hargneux ; tracassier. — Chi brégoù.i a las
dourék'o5 virménousot, chien hargneux a les oreilles déchi-
rées : le dicton se comprend de reste et ne s'applique pas
seulement aux animaux.
Dér. de Brégo.
Brén, s. m. Son, partie la pins grossière du blé moulu.
— Déatré (lou brén et larje à la farina, économe de bouts
de chandelle; il ménage la paille et prodigue le grain.
Dér. du bas-bret. Brenn, même sign. 11 a formé le fr.
bran, excrément, bran de son, qui est le son véritable du
brénean. Tous ces mots n'ont aucune espèce d'analogues ni
en lat. ni en gr., ni dans les langues modernes qui ont
puisé à cette source. La racine celtique est forcée.
Brénoùs, ouso, adj. Qui contient trop de son, en par-
lant du pain ; défaut de tonte antre préparation culinaire
qui n'est pas liée, ou qui est graveleuse.
Dér. de Brén.
Brès, s. m. Dim. Bresse. Au plur. Bresse*. Berceau
d'osier; larcelonnette d'enfant. Au fig. jeune âge; commen-
cement, lieu oii une chose a commencé. — Ou a prés ûou
brès, c'est un défaut qu'il a pris au berceau. Gna'n plén
brès, loc. prvb., il remplit son berceau, en parlant d'un
gros enfant, quelquefois même d'un adulte. On dit d'une
femme qui désire ardemment des enfants : Ah boutas.' lou
fariè en tout lou bris, ah ! mon Dieu ! elle consentirait à
accoucher d'un enfant tout liotté, tout éperonné. La grano
di bris, les petits enfants.
Dér. du lat. Versus, part. pass. de versare. Cependant
quelques-uns le tirent du gr. BptÇeiv, dormir, ou de Bpiaaeiv,
agiter.
Bréa (Sén-), s. m., n. pr. Saint-Brès, commune dans
le canton de Saint-Ambroix (Gard). Bris est la traduction
du nom pr. Brice, Saint-Brice, disciple de saint Martin de
Tours, vers le milieu du V« siècle ; du lat. Brietiut.
Bréscan, s. m., ou Briaqno, ou Briscan. Brisque, bris-
can, nom qu'on donne aux as et aux dix du jeu de mariage
ou de biscambille.
Brésl, s. m., n. pr. de lieu. Brésis, quartier du terri-
toire d'Alais, au midi et sud-ouest de la montagne de Saint-
Germain-de-Montaigu, et que l'abbé Teissier, notre compa-
triote, ainsi que d'autres après lui, soutiennent avoir été
Prusianus, l'habitation de Tonance Ferréol, préfet des Gau-
les au V« siècle, décrite par Sidoine-Apollinaire.
Brésï serait une altération du nom lat. Prusianus.
Brésil, s. m. Brin ; fétu ; résidu en poussière ; petite
parcelle ; débris de charbon qui restent au fond d'un sac.
Dér. de Briso.
Brésqno , s. f. Rayon de miel ; ganffre on g&teau de
cire ; cire avec ses alvéoles pleines, telle qu'elle est ou
qu'elle sort de la mche. — Bâtonnet ; jeu du bâtonnet ;
jeu d'enfant.
Dér. du bas-bret. Bree, cassant. En allem. Breehen,
rompre, briser.
Bréssa, v. Bercer, donner le branle à un liercean;
balancer un enfant dans son berceau poiu: l'endormir. —
Se bréssa, se dandiner, se balancer lourdement en mar-
chant, comme font les bergers et les gens chaussés de gros
sabots.
Dér. par métathèse, du lat. Versare, agiter.
Brèsso, s. f. Lit en planches d'un valet d'écurie dans
l'écurie même; cabane de l)erger portative pour coucher
dehors, couverte le plus souvent en paille.
Augm. de Bris.
Bréssolo, s. f. Dim. Brissoulito. Lit d'oiiant à bar-
reaux ; table à rebords, avec des pieds en bateau, sur
laquelle on pose le berceau d'un enfant, pour l'élever au
niveau du lit de la nourrice et lui imprimer au besoin
le balancement qui le berce et l'endort.
140
BRE
BRI
Bréthmas, s. m., n. pr. de lieu. Brelhmas, écart de la
commune de Saint-Hilaire, à laquelle il donne son nom,
Sint-Alari-dé-Bréthmas, canton et arrondissement d'Alais.
D'antiques ruines découvertes dans ce quartier, des restes
de tuiles et de poteries gallo-romaines, sans doute, font
remonter assez loin son origine et son nom.
Ce village est mentionné dans une ancienne charte qui
mérite d'être rapportée. — Hist. gén. de Lang., t. \", pr.
p. 35. — C'est une donation faite vers l'an 810 à l'abbaye
d'Aniane. Trademus res quœ sunt in territorio nemausensi
suburbio castra andusianensl, sive infra ipsum pagum, villa
cui vocabutum est Berlhomales , hoc est cum mansis,
campis, curtis et liorlis, cum exeis et regressis, cum ecclesia
Sancli NUarii conslnicta, necnon aliis ecclesiis gua: infra
terminum de ipsa villa fmidata fuerint, cum oblatis et
mansionibus ad Berlomates aspicienlibm.
Le nom porté dans cet acte avec une légère variante se
trouve au dénombrement de la sénéchaussée, en 1384,
S. Ylarius de Bretomanso.
Il n'y a rien à dire de la dernière portion du mot Mates,
identique à Mazes et Mages, traduit par le latin mansus
et abrégé selon les règles par le lang. et le fr. en mas. Sa
forme au pluriel parait moins l'indice d'une agglomération
que la réunion ou la proximité d'un certain nombre de
mansi dans sa dépendance. La première partie jouit d'une
possession d'état fort respectable, et Beriho, Breto pour
signifier breton ; par où on arrive à if as du Breton.
En contestant cette facile interprétation, je ne voudrais
pas me faire une méchante affaire avec ce Breton breton-
nant, qui, à une époque assez reculée, nous aurait laissé le
nom de son pays, plutôt que son nom propre, ce qui est
étrange d'abord. Mais l'existence même de cet étranger
transplanté aux bords du Gardon ne me semble pas encore
soflisamment attestée par ime simple dénomination, à
laquelle on peut assigner dans notre langue vulgaire une
origine et une raison plus naturelles. En effet, si Bertho-
mates, Bretomansus, Bréthmas a eu pour parrain un Breton
quelconque, le droit d'invoquer pareille descendance au
même titre appartient à une petite place de la ville d'Alais,
appelée en fr. Berthole aujourd'hui, en lang. Brétolo, et
dans une proclamation de l'an 1388, — Mss. de l'IIôtel-de-
Ville, — trivium de Berihola. C'est la même racine et le
même mot. Or cette place, au moyen âge, à proximité du
Marché, était le lieu spécial où se cantonnaient et s'éta-
laient les denrées apportées des Cévennes avec la bréto, la
hotte montagnarde, ou dans le bértoul, brétoul, panier fait
de minces lames de bois; peut-être aussi y avait-il là une
industrie de fabrication de brétos et de bértouls. Elle en a
retenu le souvenir. Les deux noms, en tous cas, qui ont
contribué à faire celui de Brétholo, Berthole, dérivent du
gaulois brett, en lat. lignum, bois, planche, éclisse, ser-
vant à faire brétos et bértouls. Mais les analogies nous
viennent encore en aide. Le nom propre Breteuil n'est pas
plus breton d'origine que notre Bréthmas et que notre
Brétolo, son correspondant direct, avec la différence du
dim. roman euil au dim. lang. ol ou olo. Et l'on sait que
le nom de cette ancienne famille était autrefois Tonnelier,
changé depuis en Breteuil, son équivalent synonyme, plus
noble et plus sonore peut-être mais sorti de la même souche,
exprimant la même idée, fait du même bois, brett. Pareil-
lement pour Bretche, vieux mot fr. signifiant fortifications
de bois, dans Du Cange Bretechiœ, castella lignea. Dans
tout cela pas la moindre trace d'un Breton.
La dérivation pour Bréthmas nous parait donc fort pro-
bable, en y faisant entrer brett, soit que le mansus pri-
mitif fût construit en planches, soit qu'il ait été établi
dans un pays couvert de bois ; les deux hypothèses peuvent
être également soutenues.
Brève, s. m. Brevet, privilège ; acte portant concession
d'une grâce, d'un don, d'une autorisation.
Emp. au fr.
Breveta, ado, adj. et part. pass. Breveté; qui est
pourvu, muni d'un brevet.
Emp. au fr.
Brïa, V. Briller ; reluire ; jeter une lumière étincelante ;
avoir de l'éclat.
Emp. au fr.
Brian, anto, adj. Brillant, qui a de l'éclat ; qui reluit.
Emp. au fr.
Brida, v-, mieux Embrida. Brider, mettre la bride ;
lier, arrêter, attacher. — M'an bien brida et séngla, on
m'a joliment lié et garrotté, dit-on proverbialement, quand
on vient de passer un acte qui vous lie fortement. Sén bri-
das, nous sommes arrêtés, liés. Sauvages traduit : nous
jeûnons. Très-juste : la loi est la bride. Brida Vase pér la
quuio, prvb., prendre une affaire à contre-pied; agira
contre-sens.
Les étym. paraissent nombreuses : d'abord le celt. bride,
puis le vieux saxon bridel, bridl, même mot et même signi-
fication, le gr. éolien Bpu-nîp, pour ^uTiip, tirer, parce que la
bride sert à tirer. En ital. briglia; en esp. brida, bride.
Bridèl, s. m. Dim. Bridélé; péj. Bridélas. Bridon; filet
à mors brisé, sans branches ni bossettes.
Dér. de Brida.
Brido, s. f. Dim. Bridéto, péj. Bridasso. Bride; partie
du harnais d'un cheval qui sert aie conduire; petite bande
de toile ou d'étoffe, attachée au béguin d'un enfant, aux
bonnets et aux chapeaux de femme, destinée à passer sous
le menton, pour retenir ces coiffures. — Trépa émbé la
brido, ou émbé lou cabéstre, jouer avec sa queue à la
manière des jeunes chats ; se dit des gens très-jeunes qui
ne prennent nul souci et se font un jeu de tout. — Voy.
Cabéstre.
Dér. de Brida.
Brido-mousquo, s. m. Cogne-fétu; tatillon; qid fait de
grands embarras de petite chose ; homme fluet, frêle, débile.
Bridoolo, ». f. Dim. Bridouléto. Bois de jeunes scions
refendu en lames fort minces, que l'on tresse pour faire les
BRI
BRI
141
pataront, bértoulos cl eampanèjes. {V. C m.) Les jeunes
pousses de cli;\laigiiier sauvageon sont considérées comme
les plus favoral)les ; à cet effet, on les aménage en taillis et
on les coupe tous les trois ans.
Dér. de Brido.
Brignoù, i. m. Brignole; prune de mirabelle, la plus
petite de toutes les espèces. Elle est d'un assez beau jaune
quand elle est mûre.
Comme son nom, et surtout son représentant fr. l'in-
dique, ce fruit vient de Brignoles, en Provence, ou il est
cultivé avec succès, et où l'on fait des conserves de prunes
très-renommées.
Brignoon, s. m. n. pr. de lieu. Brignon, commune du
canton de Vézénobres, arrondissement d'Alais. La tradi-
tion donne à ce village une origine fort ancienne.
Le nom de Brignoun sous la forme Briginn, est un de
ceux qui sont inscrits sur un petit monument du musée
,de Nimes, portant les noms de onze localités du territoire
des anciens Volces Arécomiques. Il occupe le second rang
dans le deuxième groupe, qui parait avoir pour chef-lien
Veetia, Uzès. L'attribution de Briginn à Brignoun, Bri-
gnon, n'est pas douteuse. Dans l'inscription le mot est évi-
demment abrégé de la dernière syllabe à cause des dimen-
sions du piédestal ; il devrait se terminer en o, Briginno,
simple nom de localité avec la fmale celtique si commune,
ou en ones, au plur., si on veut l'appliquer à une peuplade,
Briginnoms. La traduction latine du moyen âge donne
raison à cette désinence. La basse latinité des Cartulaires
disait, en effet, en 1207, Brinnonum, en 1273 Brinno, en
1381 et 1384 Brinhonum, en 1435 Brinhon, dont le lan-
guedocien a fait Brignoun et le fr. Brignon. Ici se remarque
la transformation du g entre deux voyelles, dont la pro-
nonciation était mouillée, ce que le latin rendait eu plaçant
lui A ou un t après n, et que nous avons repris par notre
gn qui produit le même effet ; les exemples sont nom-
breux.
Dans le voisinage on a découvert des restes d'antiquités
romaines ou gallo-romaines; un monticule où l'on prétend
que l'ancien village était établi, porte le nom de Sère dé
Briino, colline de Brienne, et un ruisseau est aussi appelé
Brdouno, Braune ; ce sont autant de dérivations du celtique
Briginn.
Quant à l'étymologie du mot, on trouve en gallois Bri-
gynn, cime, sommet, extrémité, bout, où l'on reconnaît la
racine bri, brin, bren, colline, élévation, hauteur, qui a
donné avec le même sens dans diverses langues ter, Wr,
berg, bem, birn. La situation de Brignoun justifie cette
dénomination, et son ancienneté d'origine est également
établie : village sur luie élévation.
Brin, ». m. Brin de fil ; fil de la soie sans être doublé et
tel qu'il se dévide sur la roue à filer ; brins de chanvre
dont est composée une corde, ou un fil redoublé et tordu.
— Floundo à guatre brins, fronde à quatre bouts.
Ce mot parait dérivé de Prin dont il est la métathèse.
Il ne faut pas perdre de vue que le mot prin vient évi-
demment du lat. primus. Le fil dont on fait les étoffes est
doublé, triplé, quadruplé; lorsqu'il est simple, il se dit
brin, ce qui revient à premier; ce sont bien là dès-lors ces
premiers filaments qui restent dans la main de celui qui
sérancc, les brins premiers, par excellence.
Bringo, s. f. Diin. Bringuéto, péj. Bringasso. Bringue;
rosse; cheval maigre; femme maigre, délianchée, mal
bâtie. — Métré en bringo, mettre en pièces, en désarroi.
Emp. au fr.
Briou, s. m. Dim. Brivé, brtoulé. Certain temps; petit
intervalle Je temps. — Y-a un bon briou, il y a longtemps.
K'avès pér un pouli briou, vous en avez encore pour long-
temps. Espérarés un briou, vous attendrez un peu. T-a'n
brivè, il n'y a qu'un petit instant.
Dér. du lat. Brevi, bientôt.
Briqué, s. m. Dim. Briquétoii. Briquet à feu, outil
d'acier pour tirer du feu d'un caillou ; sabre-briquet court
à l'usage de l'infanterie ; jeune gars, blanc-bec ; homme
sans valeur et sans consistance; petit homme, au physique
et au moral ; petit et mauvais cheval, criquet. — Batre
dàcu briqué, au fig. être cagneux, avoir les genoux qui se
heurtent en marchant.
Emp. au fr.
Briquo, s. f. Dim. Briçuéto ; péj. Briqucuso. Brique,
terre argileuse pétrie, montée et cuite, qu'on emploie dans
les constructions. — Briquo énvérnissado, brique vernissée.
Briquo canéludo, brique à crochet, qui sert à faire des
voûtes.
Dér. de la bass. lat. Brica.
Brisa, V. Briser; casser; rompre, mettre en pièces;
réduire en poudre.
Dér. de la bass. lat. Brisare, presser.
Brisai, t. m. Dim. Brisa'ié. Menus débris de pierres;
petits fragments, réduits en poussière, de tout corps dur
très-divisé.
Dér. de Briso.
Briso, s. f. Dim. Briséto, s. f. Brisouné, s. m. Miette ;
brin ; parcelle ; morceau détaché d'un plus grand ; miettti
de pain. — Douna-mé n'é'no briso, donnez-m'en un petit
morceau. Né risto pa'no briso, il n'en reste pas un fétu, il
n'en reste rien. N'avédre dé las brisos, en avoir des écla-
boussures. Àou foun dâou sa s'atrobou las brisos, prvb.,
au fond du vase la lie ; au dénouement les angoisses. Las
brisos né sdouiavou àou capèl, on mangeait de si grand
appétit, on cassait si vivement la croûte, que les éclats,
les miettes en volaient au loin.
Las brisos, châtaignes sèches qui ont été brisées en les
battant pour les dépouiller. Cette espèce de châtaignes a
un peu moins de valeur au marché que les autres, parce
qu'elle se met en marmelade en cuisant ; mais elle est aussi
bonne, préférable môme, si on veut la moudre en farine
pour l'abreuvage des porcs, parce que généralement ce sont
les châtaignes de meilleure qualité et les plus sèches qui se
143
BRO
BRO
brisent le plus; œlles qui sont avariées, nioisies ou ver-
moulues contenant une humidité qui les préserve de se
concasser.
Dér. de Brisa.
Briso-baro, s. m. Ecervelé; indompté; tranche-mon-
tagne ; qui se met au-dessus des lois.
Comp. de Briso, brisa, et baro.
Brisqné ! interj. intraduisible, qu'on adresse à quelqu'un
qui commet une incongruité en parole ou en action sales.
Ce mot parait la contraction et un sous-entendu de :
brusquez la politesse.
Brivado, j. f. Dim. Brivadéto. Séance, durée d'un tra-
vail entre ses diverses interruptions ; séjour. — Y-avèn fa
vno bono brivado, nous avons fait une bonne séance de
travail. — Il a aussi toute la portée de JBriou; on dit bien
et également : Y-a un bon briou et uno bravo brivado,
pour : il y a un long espace de temps.
Dér. de Briou.
Brocho, s. f. Dim. Brouchéto, mieux : Haste. Broche
de cuisine; espèce de longue aiguille.
Dér. de Broquo, parce que les premières broches étaient
un pieu de bois, une bûche. Sauvages prétend qu'il y a
des bâtons d'un certain bois dont les fibres sont de leur
nature tellement torses que la chaleur les fait détordre, et
que les viandes qu'on y embrochait autrefois, tournaient
d'elles-mêmes. Probablement ce n'étaient que des moineaux
ou tout au plus des grives, avec lesquels on pouvait se
permettre cette économie de tourneur ou de tourne-
broche.
Brodo, s. f. Paresse ; fainéantise; mollesse; indolence ;
produites par l'ennui on par »me certaine disposition d'es-
prit ou de corps semblable au spleen anglais. Ce n'est pas
une paresse habituelle, mais accidentelle, un entraînement
irrésistible et momentané au far-niente, qui donne du
dégoût pour le travail et par conséquent de l'inapti-
tude.
Les ouvriers de Paris appellent cette disposition : avoir
la flême, ce qui veut dire : avoir la brodo, être plus en
train de flftner que de travailler. — La brodo mé gagno,
l'ennui, le dégoût me gagnent; je ne suis bon à rien. Aquél
tén faï vénl la brodo, ce temps lourd donne des vapeurs,
de la lassitude dans les membres, de la mélancolie dans
l'esprit. Mé dones la brodo, tu m'ennuies.
Dér. du gr. BpaSû?, lent, Bpeiôoç, lenteur.
Broquo, s. f. Dim. Brouyu^fo, péj . Brouquasso. Bûche;
bâton brut ; scion d'arbre sec. — Lou touqaariè'i pas énd'uno
broquo, je ne le toucherais pas avec des pincettes. Porto uno
broquo, lou fib s'amousso, apporte une bûche, le feu va
s'éteindre. S'arrape uno broquo.' si je prends un Mton,
gare!
Dér. de la bass. lat. Broca, branche d'arbre, échalas,
broussaille.
Broqao-qaion (A), adv. Tout de travers; à la diable.
— Travaïa à broquo-quiou , gâter rou\Tage, en se hâtant
trop et ne faisant nulle attention : va comme je te pousse.
Aqu() s'apèlo juja à broquo-quiou , voilà qui s'appelle jugé
à la diable, dit un plaideur qui perd son procès, dans les
vingt-quatre heures bien entendu, et quelquefois, avec plus
de raison, après ce délai de tolérance.
Dér. d'un jeu d'écolier qui porte ce nom et qu'on nomme
en fr. broche-en-cul.
Bron, s. m. Dim. Brouté. Jeune pousse des arbres; brin
détaché d'une plante; trochet de fleurs ou de fruits; Iwur-
geon. — Un brou dé sdouvio, dé vidouïè, dé basali, une
branche de sauge, de giroflée; un brin de basilic.
Dér. du celt. Brout ou Brot, brin, d'où la bass. lat.
Brogilum, Bruillum, Brolium, petit bois, broussailles; OU
du gr. Bpj(o, bourgeonner.
Brou, s. m. Terme de boucherie, pièce du poitrail d'un
mouton, qui répond au grumeau du bœuf; haut côté de la
poitrine.
Dér. du v. m. Brutz, sein, poitrine.
Broucanta, v. Brocanter; acheter, revendre ou troquer;
vendre par échange; vendre du bric-à-brac, des marchan-
dises d'occasion.
Dér. du lat. Becantare, se dédire, parce que ce genre de
revendeurs avaient autrefois vingt-quatre heures pour se
dédire, et rompre leurs marchés.
Broucantur, urdo, adj. Brocanteur; celui qui sans être
marchand, a la manie de brocanter, d'échanger, de troquer
ce qui lui appartient, comme chevaux, voitures, meubles.
Dér. de Broucanta.
Brouchado, s. f. Dim. Brouehadéto. Brochée; hàtelettes;
enfilade de petits-pieds à la broche.
Dér. de Brocho.
Brouda, v. Broder.
Emp. au fr.
Broudariè, s. f. Broderie.
Emp. au fr.
Brouduso, s. f. Brodeuse.
Emp. au fr.
Brouéto, s. f., ou Brouvéto. Brouette. — Voy. Barioto.
Brouïa, «. Brouiller, semer la discorde; mettre le dé-
sordre. — Se brouïa, se brouiller avec quelqu'un; d'ami
devenir ennemi.
Dér. de Vital. Brogliare, imbroglio.
Brouïadisso, s. f. Brouillerie, mésintelligence.
Dér. de Brouta.
Brouïar, s. m. Dim. Brouïardé; péj. Brouïardas. Brouil-
lard ; nuage. — Lou brouïar a mouqua las vignos, la gibou-
lée a fait périr les bourgeons de la vigne.
Broaïar, en style d'écolier, est le brouillon , cahier on
écrit qui n'est pas mis an net. — Papiè brotiiard, papier
gris, qui Iwit.
Dér. du lat. Pruina.oudelabass.lat. Brolhardus, m. sig.
Broniarda, ardado, adj. Couvert de brume, chargé de
brouillards.
Dér. de Brouïar.
BRO
BRO
143
Bronïo, ». f. Brouille; mésintelligence légère; petite
brouillerie. Le môme que Brouiadiiio, mais avec une
nuance un jieu plus foncée.
I)ér. lie Brouta.
Broun-broun, 5. m. el aJv. Ilurlu-berlu ; étourdi;
étourdiment, en renversant tout. Onomatopée. Viendrait-il
du gr. Bpovn5, tonnerre?
Broundas, s. m. Dim. Broundastoù ; péj. Broundatseu.
Rameau de cliène-vert avec toutes ses feuilles, dont on se
sert, en guise de balai, pour amonceler les feuilles mortes
ot les hérissons de châtaigniers ; braudes, bourrée.
Dér. et augm. de Broundo.
Broundïo, s. f. itamilies, émondilles, broutilles; débris
de menu bois qui reste après qu'on a dépecé des arbres, ou
ëbranché.
Dim. de Broundo.
Broondïoù, s. m. Brindille, petit morceau, petit éclat de
bois.
Dim. de Brount/to.
Broundo, ». f. Bourrée; brandes; fagots de menu chène-
vert ou de broussailles, dont se servent les boulangers, les
potiers de terre et autres pour chauffer leur four.
Dér. du lat. Frons, Frondis, ramée, feuillage, qui, par
apocope et changement de f en b, avait fait dans la bass.
lat. Bronda, menues branches.
Brounqiia, v. ou Braqua. Brondier, faire un faux pas
en heurtant du pied contre quelque chose. — Que bruguo
et noun tomba avança cami, prvb. qui bronche sans tomber
accélère ses pas ; c'est-à-dire on apprend en failiant.
Dér. de l'ilal. Bronciare, broncher, el Bronco, tronc,
souche, heurter contre une souche.
Brounquado, t. f. ou Bruquado. Bronchade; action de
broncher; faux pas d'mi cheval.
Dér. de Brounqua.
Brouncaïre, aïro, adj. ou Bruquaïre, aïro. Qui
bronche; qui est sujet à broncher; cheval qui n'a pas les
jambes solides.
Dér. de Brounqua.
Brounza, v. Bronzer; donner au fer une couleur bleuâtre
poui- le préserver de la rouille, ce qui se fait à un feu très-
vif. Au ilg., cuirasser contre les douleurs de l'&me et du
corps ; aguerrir, rendre insensible à la souffrance ; devenir
dur comme le bronze.
Brounza, part. pass. Bronzé, couleur de bronze ; teint en
noir. — Souïèt brounzas, souliers de peau teinte en noir,
présentant le velouté de la peau, à l'extérieur.
Dér., disent aucuns, du celt. Bronez, m. sig.
Broonzl, v. Se rdlir outre mesure, se dessécher au feu ;
noircir comme bronze; bronzir par le froid, qui produit le
même effet.
Dér. de même que Brounza.
Brounzi, v. Siffler, bruire, en passant comme font les
balles, les boulets, une pierre lancée avec une fronde. Au
fig., murmurer, grogner, marmotter, gronder. — Lai balos
brouniisiièou, les balles nous sifflaient aux oreilles. Dé gui
brounzitses din toun cantoà? qu'as-tu à murmurer, à gro-
gner dans ton coin? — Voy. Brounzina.
Dér. du gr. Bp-j/iJ, hurlement.
Brounzidoù, ». m. ou Rouflo. Loup, instrument de jeu
pour les éojliers, fait d'une petite planche fort mince atta-
chée au bout d'un cordon. Ils le font tourner très-vivement
au-dessus de leur tête, et produisent par ses vibrations dans
l'air un frémissement sourd, un brounzimén, qui imite le
hurlement du loup.
Dér. de Brounzi.
Brounzimén, ». m. Bruissement; sifflement d'un projec-
tile ; frémissement de l'air produit par le frôlement d'un
corps quelconque; frôlement d'une robe, d'une étoffe.
Dér. de Jirounzi.
Brounzina, v. — Toy. Brounzi, siffler, bruire.
Brounzinaïre, aïro, adj.PèyJirounzinaïras.GTOBdeut;
grommeleux ; qui marmotte, qui aime à gronder ; qui mar-
ronne.
Dér. de Brounzi.
Bronqua, v. Planter des oseraies, des saulsaies. L'osier,
le saule, le peuplier se plantent par simples boutures dans
les graviers les plus secs, et ils y réussissent toujours pour
peu qu'ils trouvent de l'humidité à la profondeur où l'on
enfonce leur extrémité inférieure. H faut, en général, les
planter après que la sève s'est retirée ; cependant lors(]u'ou
les plante dans l'eau ou dans des terrains marécageux, ils
prennent en toute saison, même en juillet et août.
Comme ces plantations se font très en grand dans le pays,
au bord des rivières, soit pour en défendre les bords, soit
pour bonifier les graviers inertes en arrêtant les dépôts
d'alluvion, on prend très-peu de soin pour ce travail de
brouquaje. On a des scions de toute grosseur, on les coupe
à la longueur d'un mètre, et l'on amincit en pointe leur
gros bout; ensuite on. fait un trou dans ies graviers avec
un instrument de fer pointu, appelé Aguïo, et l'on y place
trois ou quatre scions à la fois, en se contentant d'écraser,
d'ébouler le sable avec le pied pour remplir le vide du trou.
II est rare qu'aucun de ces plants reste sans pousser.
Brouqua s'applique à toutes les espèces de boutures,
comme celles de la vigne, du figuier, etc.
Il se dit aussi, pour repiquer des plantes que l'on a
semées d'abord sur couches et qu'on repique à distance dans
les jardins potagers, comme l'oignon, la betterave, la poi-
rée, la laitue, la chicorée, le céleri, etc.
Dér. de Broquo, dans la première acception, à cause des
scions qu'on emploie et qui se nomment Broçvo; dans la
seconde, à cause de la bûche qui sert de plantoir dans cette
opération.
Brouquaje, ». m. Action de planter des oseraies; la
saison de ce travail, et surtout la masse des bois qu'on y
emploie. — Aqub'a dé bravt brouquaje, éttén bien, c'est du
bois très-favorable à planter en oseraies, il foisonne beaucoup.
Dér. de Brouqua.
U4
BRO
BRU
Brouquéto, s. f. Allumette.
Toutes les allumettes se faisaient avec des brins de che-
nevotte coui)és à quatorze ou quinze centimètres de lon-
gueur, soufrés simplement aux deux bouts et mis en paquets.
De là leur nom de Brour/uéios, dira, de Broquo, parce que
ce n'était en effet que de minces bûchettes. Il est bien
entendu qu'aujourd'hui on ne peut plus par cette raison
appeler Brouquétos, les allumettes en cire de Roche et
autres. Aussi le lang. a-t-il été forcé d'adopter VAluméto.
Les gamins qui vendent les allumettes à la Congrève, ont
même fait disparaître à peu près entièrement les marchans
dé brouquétos, quâou né vôou, dont le cri est remplacé dans
nos rues par celui d'alumétos à la Congre, dous cén pér un
sôou. C'est du bien bon marché, mais c'est du bien mau-
vais lang. — Yoy. Aluméto, Luquéto.
Brouquïado, s. f. Dim. Brouquïadéio. Fagot ou brassée
de broutilles ou de Iràchettes ; ramassis qu'on en fait dans
un lx)is ou au fond d'un bûcher. Au Cg., feu de paille, de
peu de durée.
Dér. de Broquo.
Bronquiè, s. m. Boisselier; artisan qui fabrique des
futailles de bas-bord, telles que seaux, baquets, cornues,
cuves à lessive, barillets, etc. Les mêmes font les patins à
semelle de bois pour les femmes.
Dér. de Broquo, bois refendu.
Brousén, s. m., n. pr. de lieu. Brouzen, quartier du
territoire d'Alais, en amont sur la rive droite du Gardon,
où quelques étymologistes placent le Prusianus du préfet
des Gaules, Tonance Ferréol. — Voy. Srési et Berén-
guèri.
Broussa, v. Tourner, caillebotter, grumeler ; faire tourner
le lait, une crème, une sauce ; c'est-à-dire que la partie
butirense ou onctueuse se sépare de la partie séreuse et se
grumelle par caillots. — Moun la ses broussa, mon lait a
tourné. A broussa sa erèmo, elle a laissé tourner la crème.
Brousso-sâouço, s. m. Gàto-sauce, mauvais cuisinier
qui manque ses sauces.
Dér. de Brousso, parce que le lait tûumé forme de petits
caillots assez semblables à la graine de bruyère.
Brousso, s. f. Touffe de bruyère de la petite espèce, basse
et rampante.
Dér. du bas bret. Broust, buisson, broussaille. Dans la
bass. lat. Bruscia.
Brousso-pèou (A), adv. A contre-poil ; en sens contraire
du poil ; à relwurs ; de travers ; au pr. et au fig. — Yoy.
Cronto-pèou.
Broustïo, j. f. Petite boite de sapin, à lames minces,
refendues.
En bas bret. Brousiet, branche aisée à refendre. Dans la
bass. lat. BrusCia.
Broutél, s. »ji.Dim. Broutélé. Trochetou glane de fruits ;
jet d'arbro qui porte une certaine quantité de fruits ramassés
en bouquet.
Dim. de Brou,- en celt. Bi-out ou Brot, traduit dans la
bass. lat. parBrajiVus, BruiUus, Bz-o^iks, qui signifie comme
dimin. petit bois, broussailles qu'on fait brouter.
Broutélado, s. f. Quantité de fruits qui se trouve réunie
dans un seul trochet ou sur une môme branche.
Dér. de Broulél.
Bru, s. m. Bruit, son ou mélange de sons, tapage,
vacarme; bruisseinent ; rumeur; nouvelle qui circule;
dicton; renommée; renom. — N'es pas bru que d'acà, on
ne parle que de cela. Ké coure tm bru, on en murmure bien
quelque chose dans le public. Faï fosso bru, il fait beaucoup
de tapage. Crén pas bru, il ne se laisse pas intimider. Vn
home sans bru, un homme paisible, qui ne fait pas parler de
lui. S'én-és douna lou bru, la nouvelle, le bruit en a couru.
Dér. du bas bret. Brud, Brui, bruit, rumeur, ou du gr.
BouÊo'jv, rugissement, murmure.
Bru, adj. masc. — Pan-bru, pain-bis. N'a pas d'autre
application.
Dér. du lat. Brutus, grossier; il pourrait être aussi une
altération ou une contraction de Brun.
Bruèl, s. m. et n. pr., ou BnièiL En v. lang. petit bois;
un fourré ; jeune taillis.
Il y a dans l'Aveyron un village et commune de Saint-
Jean-du-Bruel, qui a pris cette épithéte de sa position dans
les bois.
En V. fr. on disait : breuil, brouil et brel, auquel le mot
lang. répond très-exactement; et dans la bass. lat. on avait
dit : broilus, broilum, brolium ; brogilus, brogihim, bruillus.
Cette diversité de désinences, attachées à un radical inva-
riablement le même, donne clairement le sens dans lequel
il faut les entendre dans les différents idiomes. La termi-
naison lang. èl est diminutive, comme le sont en fr. ses
correspondantes directes en el, eïl, euil, uil, qui traduisent
ou que traduit le lat. oihis, oliutn, ogilus, uillus. Par con-
séquent comme règle générale, tous les mots-racines, affectés
d'une do ces finales égales entre elles, auront une signification
diminutive. De plus les désinences en ol,ols, 6ou, jnl, jols,
jôou, du languedocien, rendues par oiliif, olius, ogilus latin,
seront identiques à ^i et également diminutives, comme dans
le fr. eul, euil, el, oil et eau, eaux, ège, elles, elles, ailles,
eilles, ailles, parfaitement équivalentes. De sorte que Bruèl,
en ôtymologie, sera le même que Brueilet, du Breuil, Brue-
joul, Bruojols, Bruèges, Broglio, Brouelles, Braailles,
Bruclles, Brouxelles, Breaux; et que de la même source
dériveront, A part les noms communs, les noms propres
Bruyère, La Bruyère, Bruguit', lang. Bruguèïrole, Ilrugas.
Le gaulois Bru, ou Brou, Brout, bois, branche, brin, est
atténué par sa désinence qui prend toute sorte d'inflexions;
mais l'élément primitif reste immuable et toujours recon-
naissable.
Brugas, s. m. Lande couverte de bruyères.
Péj. de Brugulè.
Bruguèïrolo, s. f., n. pr. d'homme et de lieu. Bruguei-
roUe. Petit champ couvert de bruyères. — Yoy. Bruèl.
Dim. de Bruguiè.
BRU
BRU
145
I
Bruguiè, *. m. Taillis de bruyères à balais que l'on met
en cou[)c régl(?e. — N. pr. d'homme : Bruguier. Avec la
désinence féminine, léïro, il est encore n. pr. de lien, et
très-commun.
Ainsi que nous l'avons déjà remarqué, les anciens radi-
caux, signifiant bois ou forêt ont dû nécessairement donner
naissance à de nombreuses dénominations dans nos pays
couverts de forêts, de landes de bruyères, de hautes et
basses futaies : de là aussi les diminutifs ou les péjoratifs
caractéristiques d'une situation ou de l'état des lieux et des
propriétaires. Aussi le primitif celtique ôruj, adouci en 6r«
ou bru$, bruyères, broussailles, que nos ancêtres gaulois
prononçaient jxîut-être broug, et dans lequel certainement,
en latin. Vu sonnait ou, s'est-il reproduit dans nos appella-
tions locales et dans les noms d'homme avec des variétés
nombreuses, tantôt en conservant sa consonnance simple,
tantôt en adoptant l'euphonie latine.
A propos du mot qui nous occupe, la plus ancienne forme
connue du radical est tirée d'une inscription gravée sur un
petit piédestal conservé au Musée de Nimes, malheureuse-
ment tronqué, mais où se lisent encore onze noms de loca-
lités des Volces Arécomiques. A la seconde ligne de ce
monument est porté le nom de Brugetia. Nous n'avons pas
à chercher ici la certitude d'attribution entre les diverses
localités qui auraient, chacune, des raisons égales à la
réclamer : les savants ne sont pas d'accord sur la vraie
position indiquée. Cependant le mot nous reste, et la
divergence des opinions no fait ressortir qu'une chose :
c'est que le nom Brugetia est aussi bien représenté par
Bntget, hameau de la commune de Comillon, que par La
Bruguière, canton de Lussan, arrondissement d'Uzès, ou
par La Bruyère près d'Anduze, ou par Bruges de la com-
mune d'Aigaliers; comme il pourrait l'être par Brugèdet,
commune de Sénéchas, par Bruéje, commune de Saint-
Privat-des-Vieux, par Bruguier, commune de Monoblet et
Méjeannes-lès-Alais , et par tous les autres noms de La
Bruguière répandus dans le département du Gard. Ce qui
amène à reconnaître que toutes ces appellations ont une
commune racine, et que, si elles se distinguent par leurs
sufHxes en et, yès, i-de, iè, ièiro, elles n'en représentent pas
moins des localités où les bruyères étaient abondantes, ce
qui donne la signification ; et ces nuances prouvent que ces
désinences sont égales entre elle? et équivalentes , ce qui
donne raison à ce que nous disons des suilixes et de la
composition des noms.
Mais il y a plus : la différence de prononciation dans le
radical multiplie les analogies. Bru étant identique à Brou,
il s'ensuit que les noms de Brouzén près d'.VIais, Brouzel,
commune, liroussoiis, près de Portes, dans notre arrondis-
sement, Hrousnan, commune de Bellegarde (Gard), devront
être ramenés à la même signification désignant des lieux
anciennement remplis de broussailles, couverts de bruyères.
La variété ethnique des terminaisons n'emi)êcherâ pas de
les reconnaître et de les rapprocher; elle ne servira qu'à
démontrer la fécondité de la langue qui se prête harmo-
nieusement à ces modulations diverses, à prouver la
richesse de notre idiome et sa souplesse à diversifier la
forme sans altérer ni compromettre le sens des mots.
Dér. de Brut.
Bnila, V. Brûler; consumer par le fen; être en état de
combustion ; brouir, se dit des effets produits par le froid
sur les fleurs et sur les premiers bourgeons des arbres. —
Fato-brulo, jeu d'enfant qui consiste à cacher un objet de
petite dimension et à le faire chercher par un patient. A
mesure qu'il se rapproche de l'objet, on lui crie : falo-brulo/
et quand il s'en éloigne : brulo pat; par ce moyen oa le
conduit petit à petit à l'objet lui-même. Par suite, le mot
Brûla, dans le langage ordinaire, est devenu synonyme de
se rapprocher, être prêt à deviner. — Brulei bien, tu es
sur la voie, tu te rapproches singulièrement du but.
Brûla, t. m. et part. pou. — Et un brûla, c'est une
tète brûlée.
Dér. du lat. Peruitulare.
Broladoro, t. f. Brûlure; action du feu; sa trace, sa
marque.
Dér. de Brûla.
Brulaïre, t. m. Poêlon à brûler le café; brûloir; instru-
ment ou ustensile servant à cette torréfaction.
Dér. de Brûla.
Brun, bmno, adj. Dim. Brune, ilo; péj. Brunat, aito.
Brun, brune; noirâtre; d'une teinte foncée, sombre; obs-
cur; bis. — Mouli brun, moulin destiné à fabriquer le
pain bis, parce que les meules en étant plus serrées donnent
un degré de plus de trituration à la farine, ce qui rend
impossible sa séparation d'avec le son au tamis. — Il est
aussi n. pr. d'homme. Brun : d'où son dim. Brunit.
Dér. de l'allem. Braun, en ilal. et en esp. Bruno.
Bmqua, v. — Voy. Brounqua.
Bruquaïre, aïro, adj. — Voy. Brounquaire, dira.
Bms, (. m. Dim. Brutti. Au plnr. Brustei. Bruyère à
balais, Eiica scoparia. Linn. Arbuste de la fam. des Eri-
cacées. C'est celle qu'on emploie pour ramer les vers à soie,
et dont on fait des balais, éicoubot dé brut. — Ana at
bruttet, aller à la provision de bruyère pour les vers à
soie. Capouta dé bruttet, couper les brins de bruyère de la
longueur nécessaire pour les échalasser entre les rangs des
tables. Pligariat lou proufl dinc uno fièto dé brut; la feuille
de bruyère étant sans largeur aucune, que pourrait-on plier
avec? Aussi cette phrase équivaut à celle-ci : le bénéfice est
venu à rien.
Dér. du celt. lias-bret. Brue; Brutcut en lat., dans la
bass. lat. Bruscia et Brueria, broussailles.
Bmtâou, talo, adj. Péj. Brutalas. Brutal; grossier;
féroce; emporté; sans égard, sans politesse, sans ménage-
ment.
Dér. du lat. Brutut.
Bu, s. m. Dim. Buijué: péj. Buquas. Chicot d'arbre;
ergot de branche; bout mort et desséché d'un scion d'arbre
it
I4C
BUQ
BUT
qui a ètë taillé el qui n'a repoussé qu'à quelques pouces
au-dessous de la taille ; éclat de bois, écharde ou picot qui
est entré dans la chair. — lU'és entra un bu din Vounglo,
il m'est entré une écharde entre l'ongle et la chair.
Dér. de la bass. lat. Buca, tronc, lige.
Bn, j. m. But; intention; point où l'on vise, fin qu'on
se propose. — Y-anavo énd'un bon bu, il se présentait pour
le bon motif, en vue du mariage.
Dér. de la bass. lat. Tiutum.
Bobo, s. f. Bubon; pustule qui se forme sur la tête des
enfants mal soignés; boutons qui s'élèvent aux lèvres;
échauboulure. — Renouvela las bubos, au fig. renouveler
de tristes souvenirs, une ancienn3 douleur.
Dér. du gr. Bou6u')v, tumeur.
Bufadèl, s. m. Mets du pays composé de raves et de
châtaignes bouillies ; celles-ci à deuii-cuites, qu'on nomme
calossos. — Bufadèl est l'expression gounèlo et alaisienne ;
les Cévenols, chez lesquels ce mets est surtout en honneur,
le nomment Picourelo.
Dér. de Bufa, ou Boufa, qui veut dire soufller ou man-
ger, deux acceptions également applicables à un mets qu'il
faut manger chaud, et souffler.
Bugada, v. Faire la lessive; blanchir au moyen de la
lessive; faire boire à grands verres de l'eau ou de la tisane.
Etyni. nombreuses et variées : du celt. Biigad,\e&û\c et
abreuver, d'où le bas-brct. Bugat, m. s.; du lat. i;«ca, trou,
parce que la lessive s'écoule par un trou; du gr, Bou/iSa,
cuve, grand bassin ; du lat. Buo ou Imbuere, imbiber.
Bugadièïro, s. f. Péj. Bugadièïrasso. Lessiveuse; lavan-
dière ; blanchisseuse ; buandière . — Un froun dé bugadièïro,
une effronterie de harangère. Le prvb. dit : Las soubros
dàou flascou dé las bugadièiros garissou las fèbres; c'est
comme si l'on disait : le vin pur guérit les fièvres, car ce
qui reste au fond de la gourde d'une lessiveuse est assuré-
ment du vin pur, ou bien peut-être : la fièvre est un mal
sans remède, qu'on guérirait cependant avec les restes d'une
gourde de lessiveuse, mais impossible de s'en jjrocurer
jamais une goutte de surabondance. Qtiinio bugadièïro!
quel bavard ! des deux genres.
Dér. de Bugada.
Bngado, s. f. Lessive; quantité de linge encuvô, lessivé,
blanchi. — Métré la bugado, mettre à cuver le linge dans
la lessive. Faire bugado, faire la lessive. Esténdre la bugado,
étendre le linge lessivé pour le faire sécher. Au flg. Bugado,
perte considérable au jeu, une lessive, dans ce sens, lié
léssiou sus la bugado, ajouter une dette à une autre, une
maladresse, une sottise sur une autre, faute sur faute.
Môme dér. de Bugada.
Buqua (se), v. Se blesser, se faire une déchirure à la
peau en se piquant à un éclat, bu, il un chicot de bois.
Dér. de Bu.
Buquado, s. (. Dim. Buquadéto. Déchirure à. la peau ;
accroc il un habit, ii une robe ; procurés par un c liicot de bois.
Dér. de Bu.
Burataïre, s. m. Au fém. Buraïaïro. Tisserand de
burate. Aujourd'hui cette étoffe de laine, plus fine que le
cadis, ne se fabrique plus; on appelle Buralàires les tisse-
rands de fleuret ou bouréto.
Ce mot vient peut-être du portug. Buraio, gaze, parce
que la burato était beaucoup plus claire que le cadis.
Bure, s. m. Beurre; crème du lait épaissie en l'agitant.
— Un bure, un pain de beurre. Âguù's un bure, ce fruit
est fondant comme du beurre. Faire soun bure, faire ses
orges, ses choux gras; bénéficier dans une spéculation ;
expression qui entraine toujours l'idée d'un gain illicite ou
peu délicat. A foundu soun bure, il a dissipé tout son bien.
M'en coustè moun bure, il m'en a coûté fort cher.
Dér. du gr. BoTipov, formé de Bo3;, vache, et de Tup6ç,
fromage; d'où le lat Butyrum, leurre.
Burèl, èlo,a!//. Dim. Burélé;i>él. Barétas. Brun; tirant
sur le brun. — Cadis-burèl, cadis fait de la laine de moutons
noirs, sans teinture, avec la couleur naturelle ; on dit aussi
couloù dé la hèsiio, de la couleur de la bête qui l'a produit.
Dér. du lat. Burrus.
Burèou, ». m. Bureau, table destinée au travail des
affaires; pupitre, secrétaire; lieu où l'on expédie les affaires.
— Lou burèou ddou vi, le bureau du receveur des contri-
butions indirectes. Escriou dinc un burèou, il est employé
dans un bureau administratif.
Empr. du fr.
Burina, v. Buriner, graver au burin; avoir une belle
plume, une écriture élégante ; bien peindre.
On le dit dér. du celt. Burin, ou de l'allem. Boren, creuser.
Bus, s. m. Dim. Busfjué. Buse, lame de haleine, de fer
ou de bois, qui sert il tenir on état un corps de jupe. On
disait autrefois Intsquièïro; mais ce nom, comme l'objet
qu'il représente, n'était connu que de l'aristocratie. Aujour-
d'hui que l'usage du Buse est devenu populaire dans toutes
les classes, on a emprunté le nom au fr. qui fournissait la
chose.
Busqua, v. Echancrer une jnpe, un corsage, pour dessi-
ner le galbe de la taille. — Se busca, se cambrer; creuser
les reins et développer la poitrine eu marchant.
Dér. de Bus.
Busquaïa, f. Ramasser du menu bois, des broutilles;
couper des branches d'un arbre.
Dér. de Busquaïo.
Busquaïo, s. /". Bûche ii brûler; broutilles; mciui-bois
refendu ; éclat de bois.
Busquaïo est évidemment pour bousquaw, bosquàio, dér.
do Bns.
Buta, V. Pousser; heurter; serrer contre; soutenir;
affermir; germer. — Buta lou tén, pousser le temps avec
l'épaule. A pas bésoun que lou butou, il n'a pas besoin
d'être poussé, d'être excité. La fan lou buto, la misère le
pousse. Butas la porto, poussez la porto. Butas ferme,
heurtez v\ement. Mé butarés un 2>àou, vous me soutien-
drez un pou. Butés pas.' ne poussez pas! Aguét âoubre buto
m
bien, col arbre jmusso avec vigneur. l^it hUi a huta, le blé
a comniciicô à geniifir. Fôou qui qudouqmis lou bute, fariè
pas flf/iiO, il faut que quelqu'un l'excite, il ne ferait pas cela
de lui-niônie.
D(^r. Je la bass. lat. Buiare.
Butado, s. f. Diin. Butailéio; p6j. Butadasto. Secousse;
heurt; poussOe; coup d'C'paule. — À bèlos butadoi, par
secousses: par épaulées. M'a fougu douna uno bonobulado,
il a fallu donner un Iwn coup de collier pour terminer cette
affaire, pour mener cet ouvrage à bonne fin.
Dit. de Buta.
Butaroù, s. m. Chasse roue. — Même sign. que buto-
rodo, dont il n'est qu'une syncope et peut-être une corrup-
tion. — yoy. Biito-rodo.
Butavan, ». m. Boutoir, outil de maréchal, espèce de
l)elle tranchante pour parer le sabot d'un cheval avant d'y
placer le fer.
Formé de Buta, iwusser, et Avan, en avant.
Butin, I. m. llutin ; provisions de bouche et autres. Il
ne se prend guère qu'en mauvaise part — Manqua pat
butin, il y a Iranche-lippée.
Empr. au fr.
Buto-rodo, ». m. Borne, en pierre, en fer ou en fonte,
en forme de cône tronqué, placée soit au coin d'une maison,
A la jwrte d'une remise, à l'entrée d'un pont, pour empê-
cher que l'essieu des roues d'une voiture ou charrette
n'écorne les murs; soit à l'cntour d'une place, pour inter-
dire la circulation des voitures.
c
I
c, troisième lettre de l'alplialM?! ; elle a la même pronon-
ciation qu'en fr. et subit les mêmes modifications, c'est-à-
dire qu'elle a la prononciation du K devant les voyelles a-
o-u, et colle de 1'» double devant e et ».
Le C est la deuxième des consonnes ; il appartient à l'ordre
des Palatales, parent de la famille des Gutturales. Les gram-
mairiens le classent ainsi en expliquant la manière dont se
fait son émission, forte ou faible, par l'organe buccal : très-
bien; nous n'insistons pas autrement. Son histoire est plus
curieuse et présente plus d'intérêt : nous lui devons une
mention. — Les Romains, qui avaient adopté l'alpliatet
des Grecs, l'appelèrent d'alxird Gamma et le figuraient par
le signe r : ce qui cependant n'empêcha pas d'employer la
forme arrondie en croissant, C, d'où lui vint le nom de
Luna, surfont quand il prenait le son adouci. Tout cela
est formel, et il est Imn de citera ce titre, Varron disant :
« Antiquis enim C quod nunc G ; » et Festus Avienus :
« C pro G fréquenter ponebant Aniiqni, » et dans un autre
passage : • Quae nunc C appellalur, ab Antiquis G vocaba-
• tur. » C'est ce qu'écrivait aussi Ausone dans ce vers,
De literis :
Pra-valuit postqnam gamma; vice functa prius C.
Cependant l'opinion contraire était soutenue par d'impor-
tantes autorités ; en latin, Tacite, Pline et Juvénal en par-
lent, et appuient le nom lunaire; en grec. Suidas et Plutar-
que penchent aussi jwur la forme du cappa au lieu du
gamma. Mais on sait par Isidore de S<Wille, De oHginibiis,
que le K prévalut et fut introduit définitivement par un
maitre d'école, nommé Sallustius.
Puérilités, dira-t-on. Nullement. La conclusion à tirer
est que, si la forme a eu quelque influence, au point de
faire confondre une lettre avec l'autre, il y a certainement
rapprochement d'articulation quand la lettre et le son se
produisent, ce qui tient à leur nature et au procédé
d'émission ; mais ceci explique encore que le C latin tenait
de son origine grecque la force et la dureté devant toutes
les voyelles, comme le T on G grec, et que, par suite aussi,
leur permutation est naturelle et facile. C'est ce qu'a trans-
mis le latin aux langues romanes, et celles-ci au languedo-
cien. Par où on ne sera plus étonné, dans la recherche des
étymologies, des substitutions fréquentes des deux signes,
et par exemple, des changements de eavea, lat., en gabio,
lang., cage, fr.; cicada cncigalo; cranut en gras ; crolatum
en gréld; actis, aciicula en aguïo; ecclesia en glèïso; ficus
en figo; vicariiis en viguiè; etc., etc. Et encore, par des
variantes caractéristiques plus remarquables : le lat. canis,
du gr. KiSiov, KuviS;, qui donne au fr. chien, à notre dial.
chi pour chin, au toulousain, gous et cas; de plus, le lat.
catus, en gr. KaT(î, donne au fr. chat; à notre dial. ca; au
prov. gat; au cat. gat ; à l'esp. et au port, gato; à l'ital.
gatto.
Nais dans la formation du roman, la permutation ne
s'arrêta pas là : la réaction continuant amena d'abord
l'adoucissement de l'intonation sur les voyelles e et i, par
lequel le C dur, romain ou grec, se convertit en deux SS;
puis, pour les voyelles éclatantes et fortes, a, o, n, les
mêmes tendances firent introduire la combinaison primitive
et celtique sans aucun doute du C avec H, flexion chuin-
tante inconnue au latin. Ce CU est gaulois pur-sang, il ne
vient pas d'importation germanique. F.,es peuples tudesqnes
ne le prononcent qu'avec une articulation fortement guttu-
rale aspirée, et leur langue en général ne montre aucune
aptitude pour les mouillures adoucies du roman. Nos dia-
lectes au contraire, et le français lui-même, l'ont repris à
148
CÂ
sa source; et en particulier, notre dialecte cévenol, comme
preuve d'origine ancienne, lui qui a mieux conservé les
traditions du langage, l'emploie partout et invariablement
et dit cha pour ca, châou pour câou, et même où nous
disons fdoit : châou ana séjaïre; cliabro, pour cabro; etc.
Nous signalons ici un des phénomènes de l'élaboration
de l'idiome, comme nous l'avons fait à la lettre B. En pas-
sant du celtique au latin, du latin au roman, en dérivant
ensuite vers le languedocien et ses dialectes, la langue ne
s'annule pas plus qu'elle ne se crée, elle se modifie suivant
les latitudes et suivant les dispositions propres aux groupes
de chaque zone. C'est pourquoi les permutations n'ont pas
de règles absolues, invariables, savantes, en vertu desquel-
les tous les mots se seraient transformés et qu'on devrait
nécessairement retrouver dans leur composition nouvelle.
A part le radical il peu près innnuable, toutes ces lois de
transformation et de permutation varient à l'infini dans
l'intérieur d'un idiome, et à plus forte raison dans un dia-
lecte comme le nôtre, qui se distingue par un caractère
si particulier : nous en saisissons seulement les principaux
accidents. Ce qui est à bien constater, c'est que, à toutes
les époques où le langage s'est modifié, il a obéi partout à
des tendances spéciales, et que, sans se dépouiller d'une
manière complète de ses formes, il a cherché en tout temps
et partout à ressaisir ses propriétés primordiales; et que
toujours, cédant ou à la puissance de l'habitude ou à des
influences organiques et climatériques, appropriées au pays
où il était reçu, il suivait dans ses innovations un certain
plan uniforme, sans secours de la science ni souci de la
grammaire, mais sous l'inspiration d'aptitudes innées et de
facilités de prononciation, dont le peuple, peu instruit
d'ailleurs, restait le souverain juge, .\ussi nous contentons -
nous de prendre notre dialecte sur le fait, et laissons-nous
de coté les classifications scientifiques.
Le languedocien n'admet pas le C final, non plus que le
C devant ime consonne autre que les fluides L et R. Lors-
qu'il emprunte au gr. au lat. ou au fr., qui tous admettent
celte rencontre, il supprime net le C et le considère comme
non avenu. C'est une délicatesse d'acoustique qui lui est
commune avec l'ital. Une seule exception a été faite pour
la propos, (lin, dans, précédant une voyelle; on dit : dine
un an, dans un an.
Dans une langue dont l'orthographe n'a rien de précis,
rien d'arrôté, qui n'a jamais eu de grammaire et qui ne
pouvait en avoir à cause de ses variations d'une localité à
l'autre, qui n'a eu que des lexiques partiels et à principes
divergents, chaque écrivain, chaque glossateur surtout doi-
vent se créer des principes, des règles et une orthograplie à
leur usage, faute de type à imiter, de loi unanimement
acceptée et reconnue ou d'académie autorisée qui impose
ses décisions. Au milieu de ces incertitudes, un principe
semble bien surnager, celui de l'orthographe auriculaire ;
et cependant, son application absolue a présenté des diffi-
cultés si nondireuses que tous les essais ont échoué. Sauva-
ges, qui a été plus loin ([u'aucun autre peut-être dans cette
voie, s'y est fourvoyé lui-même, et plus d'une fois. L'ori-
gine de certains mots, leur étymologic l'ont entraîné ; et
c'est ainsi qu'il nous donne jusqu'à trois signes différents
pour rendre la prononciation du C, en se servant tour à
tour du C, du S et du Q.
Certes, en suivant la règle de l'orthographe auriculaire,
le C et l'S auraient suffi à exprimer les diverses prononcia-
tions combinées que nous offrent les lettres C, K, Q, S, et
nous y aurions gagné l'économie de deux signes ; mais nous
l'avons dit, nous faisons de l'éclectisme ; et il est prudent,
avec une certaine mesure, de respecter, dans cha(jue mot,
sa physionomie étymologique. Nous avions d'ailleurs des
traditions qui obligent, et mieux encore les notes et les
formules de l'éminent poète des Castagnados, qui, dans tout
ce travail, sont notre guide, notre loi et notre inspiration.
Nous conserverons donc chacune de ces consonnes, en don-
nant toutefois congé définitif au K intermédiaire, qui nous
parait tout à fait anomal au languedocien et que le fr.
lui-même n'adopte que dans quelques emprunts exotiques.
On s'étonnera peut-être d'après cela de rencontrer quel-
quefois le Qit, là où le C aurait été parfaitement suffisant,
où même il aurait eu plus de convenance étymologique ;
nous l'avons employé ainsi parce que notre premier besoin,
en cette affaire, a été de faire concorder orthographiquement
chaque mot avec ses composés, avec ses dimin. et ses péj.,
chaque verbe avec les divers membres de sa conjugaison.
Si, par exemple, nous avions écrit broco, — saco, — Wuca,
il aurait fallu écrire brouciè iwur brouquiv; sacélo pour
saqiiéto; toucére pour louquère; l'on comprend bien que
cette orthographe n'était pas abordable.
Ca, 4'. m. Dim. Caté, catoii, calouné; augni. Catas; péj.
Catarus. Chat, felis catiis, Linn. Mammifère delà fam. des
Carnivores. — Le chat sauvage, la véritable souche de
notre chat domestique, existe dans nos cantons montagneux
et boisés; gris plus ou moins brun, avec des ondes plus
foncées sur le dos et transversales sur les flancs ; dedans
des cuisses un peu jaunâtre ; les lèvres et la plante des
pieds noires, la queue annelée terminée en noir. — Voy.
Chaîné. — Lou ca miâoulo, le chat miaule. Es saje coumo
Ion ca âou froumaje, il est sage, tranquille comme un chat
qui tient sa provende, c'est-à-dire jusqu'à ce qu'elle soit
achevée. Sâouta coumo un ca maigre, sauter comme un
chat maigre, comme un cabri. Lou mes das cas, le mois de
février, temps des amours des chats. Au fig, Faïre lou ca,
faire la ch.-^tte-mitte, patte de velours ; baisser le ton ; baisser
pavillon; ramper devant plus fort ou plus puissant que soi.
Kmpourla lou ca, vider un loyer sans prévenir le maître,
décamper à la sourdine; partir sans prendre congé, sans
faire ses adieux. Acheta un ca dinc un sa, acheter chat en
poche; faire marché sans voir la marchandise. Soun coumo
Ion ca et lou ra, ils vivent ensemble comme chien et chat;
ils vivent très-mal d'accord. Y-a pa'n ca, il n'y a per-
sonne, personne! Fariè d'iHs énd'un ca, exp. prvb., il
CAB
CâB
149
€8l si adroit qu'il ferait des yeux à un chat. 3Ianjo ca que
roumiaras, loc. prvb. pouvant se traduire par : tel qui rit
vendredi, diinanclie pleurera.
D6r. de la bass. lat. Caiu$, même sig. Quant à l'étym.
de celui-ci, on est loin d'être d'accord : le gr. KaT({, furet;
l'hébreu Chatoul, peuvent y avoir contribué; le lat. y a
pris part : Caiare, ou CaHar«, voir clair; Catum ab e<i qtiod
eatat, id est videt; i'atos id est iicutos; et encore, Si origo
ejus adferri posait, à caveo diei maxime probatur, jwnse
Vossius. On n'a que le choix.
Cabala, v. Cabaler; intriguer pour quelqu'un ou pour
soi; comploter; se liguer avec quelqu'un.
Emp. au fr.
Cabalo, ». f. Cabale, complot, coalition d'ouvriers.
Emp. au fr.
Cabanèl, «. m., n. pr. Au fém. Cabanèlo; dim. Caba-
nèlé, Cabanéloii. Cabanel.
Dér. de Cabano, chaumière, on du bêam. Caban, formé
de Cab, tète, en v. lang., manteau des pâtres béarnais et
navarrois, pourvu d'un capuchon.
Cabanis, ». m., n. pr. d'homme. Au fém. Cabanitto;
dim. Cabanissé. Cabanis.
Dér. de Cabano.
Cabano, s. f. Dim. Cabanéto; péj. Cabanasto. Cabane;
chaumière, hutte. — Cabano dé pastre, hutte de berger.
11 est aussi n. pr. d'homme, Cabane. Au fém. Cabanésso;
dim. Cabane.
Dér. de la bass. lat. Capanna ; àxx gr . Katjâvr,, fi/yurium.
Cabâou, ». m. Bétail gros et menu qui fait partie d'une
ferme d'exploitation nirale, , et que le code civil désigne
sous le nom d'ijiiiiieubles par destination. Par ext. ce mot
8'appli(iue i fortune, avoir, héritage, possession, trésor. —
Y-a un for cabâou dinc aquél mas, il y a un bétail consi-
dérable dans ce domaine. Àquà's tout moun cabâou, c'est
tout mon avoir. Las fénnos soun un michan cabâou, les
femmes sont une mauvaise engeance dans une maison. Que
s'aquito, faï cabdou, prvb., qui paie ses dettes s'enrichit.
On emploie aussi famil. le dim. Cabale, pour dire toute
sorte de famille d'insectes et de petits animaux, comme
les rats, les fourmis, les sauterelles, etc.
Dér. du lat. Caballus, mauvais cheval, rosse.
Cabaré, ». m. Cabaret; logis; hôtellerie; auberge; lieu
où l'on donne à boire et à manger. — Faire cabaré, tenir
une aulierge; vendre du vin en détail.
Les étymologistes français, qui ne peuvent se décider à
devoir quelque chose au languedocien, tandis qu'ils vont
fouiller dans les patois les plus sauvages des Gaulois et des
Gertnain.s, font dériver calwrct du gr. Kaw;Xjt'-v, même
sig. Le mot nous parait, à nous, d'origine purement lan-
guedocienne. En fr. il était peu connu au moyen âge; il n'a
guère commencé à paraître qu'au temps de la Ligue, et il
était sjTionyme alors de taverne : c'était les rendez-vous de
l'aristocratie comme les cafés de nos jours, à la seule diffé-
rence qu'au lieu de liquetirs et de café, on y buvait du vin.
Le lang. Cabaré semble bien plus ancien, car son acception
est plus large : il signiflait autrefois logis, hôtellerie, et il
n'a pris que plus tard la synonymie de taverne et Iwnchon.
Le nom du château de Cabaret, dans le département de
l'Aude, fameux dans les fastes de la guerre des Albigeois,
était une corruption de Cab - are, caput arietis, tète de
bélier. N'est-il pas probable que le nom commun de Cabaré
a la même origine? peut-être parce qu'une tête do bélier
était l'enseigne commune des logis à l'époque et dans la
localité où ce nom a pris son origine. Il est bien évident
dès-lors que le fr. nous aurait fait cet emprunt , comme en
mille autres circonstances, sans qu'il veuille en convenir.
Cabarétéja, v. fréq. Hanter les cabarets, les tavernes.
Dér. de Cabaré.
Cabarétéjaïre, adj. m. Pilier de taverne; liabitué des
cabarets.
Cabarétiè, ièïro, ». Cabaretier, cabaretiére; aubergiste;
hôtellier.
Cabas,», m. Dim. Cabasté; péj. Cabossas. C&bns; panier
de sparterie, dont se servent les cuisinières pour aller à la
provision d'herbes, de légumes, et même à la boucherie.
Au fig. une femme sale, mal fagotée, très-négligée dans sa
tenue; un torchon. — Voy. Acabassi.
D'après les étym. fr. le gr. Ki6o{, ancienne mesure de
froment, aurait donné naissance au mot cabas. Nous le
croyons plutôt tout méridional et formé du lat. Caput, qui
avait fourni à l'esp. Cabessa, comme au lang., pour dire
tête, sans doute parce que cette sorte de panier se portait
autrefois sur la tête. La quantité de mots lang. qui ont la
syllabe cab pour racine, et qui sont tous relatifs à la tête,
apporte une nouvelle probabilité à celte origine.
Cabasso, ». f. dim. Cabasséto; péj. Cabassasso. Tronc
d'arbre étètè, qu'il soit mort ou vivant ; maîtresse branche
de la tête d'un arbro. Lorsque les mûriers ou les châtai-
gniers sont étiolés et menacent de périr par les branches,
ou rase celles-ci tout près du tronc : s'il arrive que les
racines soient encore saines, l'arbre reprend toute sa vigueur
et pousse de nouvelles branches, qui atteignent vite leur
première dimension.
Dér. de Cab, pour tête, Cabasso augm. En esp. Cabesta;
en ital. Capo. tête.
Cabassu, ». m. n. pr. d'homme. Au fém. Cabassudo;
dim. Cabasstulé. En fr. Cabassut ou Chabassut. Il est très-
répandu, indifféremment avec les deux intonations à la
première syllal». Qu'il dérive de Cabésso on de Cabasso, le
mot adjectivô a voulu dire en principe forte tête ou grosse
tète, au moral ou au physique, avec Cab pour racine.
Cabassudo, ». [. Jacée des prés, Centaurm jacea, ou
Cenlaurea nigra, Linn. Plante de la fam. des SjTianthérées,
commune dans les prairies. — Voy. Carouje.
Cabés, ». m. Chevet d'un lit; côté du lit où l'on met la
tête; oreiller; traversin.
Dér. de Cab, tête.
Cabésso, s. [. Péjor. Cabissasso. Tête; an fig. savoir.
150
CAB
CÂB
jugement, esprit, bon sens. — Vno forio cabésso, «ne bonne
tête ; une t&te bien meublôc et à jugement siir.
Dér. de Cab, tête. En esp. Cabessa, Cabeza; en port.
Cabeca ; en b. bret. Cab. Le lat. Caput n'est pas étranger
à tous ces mots, non plus que le gr. KEjpaÀ»;, si on voulait
bien.
Cabéstre, «. m. Licou ou licol; lien que l'on met à la
tête des bètes de somme pour les attacber au moyen d'une
longe. — Trépa émbé tou cabéstre, OU émbé la brido, se dit
des jeunes gens,, qui s'amusent de tout, sans nul souci,
fringants et dissipés, qui ont la bride sur le cou. — Voy.
Brido.
Dér. du lat. Capisirum, formé de caput stringo, capitis
stringiutn. En bas-bret. Kabestr.
Cabi, V. Serrer un objet, le ranger, le mettre à l'abri des
voleurs ou des curieux, le cacher. — Cabi iino fio, marier
une fille, la collo(]uer. Couss) quicon la eabirén, de manière
ou d'autre nous l'établirons bien.
Dér. du lat. Cavum ou Cavu$, cavité, cachette, enfonce-
ment.
Cabïè, s. m. Ruban de fil dit Chevillére, dans toutes les
localités de France, quoique non enregistré par l'Académie.
Sauvages le fait dér. de Capilli, les cheveux, parce que,
dit-il, les femmes, peu avant lui, se servaient de ce ruban
ix)ur tresser leurs cheveux ; il aurait pu ajouter que, de son
temps, il servait à tous les hommes du peuple pour rouler
leurs cheveux en queue. Aujourd'hui, comme cordon, il
entre dans beaucoup d'ouvrages de couture.
Cabine, s. m. D'un. Cabinété ; pèy Cabinétas. Armoire;
bahut; garde-robe; jamais cabinet. C'est le meuble essen-
tiel jwur tout nouveau ménage : une fille des plus pauvres
ne consent guère à se marier, quand elle ne peut pas se
donner nn cabine; elle attend, s'il le faut, avec une rési-
gnation méritoire, jusqu'à ce que son pécule arrive au pair
de cette dépense.
Ce mot vient évidemment du précéd. Cabi : cependant
il est singulier que le lat. barbare se soit rencontré avec
lui dans son emploi relatif au mariage. Dans la bass. lat.
Cabimentmn veut dire établissement.
Cabà, s. m. Chabot, meunier, chevane, poisson de
rivière à grosse tête; ce qui lui vaut sans doute son nom.
— Yoy. Aréstoù.
Cabosso, s. f. Dira. Cabousséto; péj. Cabowssasso. Clou
de fer de cheval à grosse tête carrée ; clou de même forme,
mais de plus grande dimension, avec lequel on fixait les
bandes de fer sur les jantes de charrette, et où ils étaient
autrefois en si grand nombre que la roue portait sur les
clous et non sur la bande. Aujourd'hui qu'on ne ferre plus
les roues à bande, mais en cercle, on n'emploie que des
Iwulons A tôle plate. — Voy. Clavèl dé carélo.
On apiK'lle aussi Cabosso, certains gros clous dont les mon-
tagnards garnissent leurs sabots et souvent leurs souliers.
Dér. de Cabésso.
Cabra, s. m. Troupeau de chèvres, génériquemeut ; mais
il n'est employé qu'en parlant des chèvres qu'on envoie au
Imuc pour les faire saillir. C'est là une branche d'industrie
agricole, qui consiste pour toute mise de fonds dans l'achat
d'un bouc. On amène \h toutes les chèvres du canton, et
elles y rsstcnt jusqu'à un mois ou deux. En attendant, le
propriétaire du bouc profite d'un restant de lait que les
chèvres ont conservé, se fait payer la nourriture, et quand
le lait tarit, il a grand soin de renvoyer les chèvres à leur
maître. Ténl cabra, c'est garder un bouc pour cet usage.
Cabra, v. Dresser une échelle, une planche, une poutre
contre un mur, dans la position d'une chèvre qui se dresse
contre un arbre.
Se cabra, se cabrer; se dresser, se révolter contre; s'em-
porter, se brouiller avec quelqu'un. — Se soun cabras, ils
sont en opposition.
Dér. de Cabro.
Cabri, s. m. Dim. Cabridé, Cabridoù. Chevreau, cabri,
petit de la chèvre, Hœdtis; petit coté d'une échelle double,
qui, dans certains pays, n'est composé que d'une barre
ronde. — Sdouta coumo un cabri, sauter comme un cabri.
Vno tèsto dé cabri, au fig. un étourdi, un écervelé. Quan
la cabro vaï pér hor, se lou cabri sdouton'apas (or, prvb.,
quand la chèvre va dans le jardin, si le chevreau y saute,
il n'a pas tort ; pour signifier que les parents doivent seuls
rester responsables des mauvais exemples qu'ils donnent à
leurs enfants.
Dér. de Cabro.
Cabrida, v. Chevroter, mettre bas des chevreaux; faire
le chevreau. Se dit encore d'une échelle double, qui, étant
dressée, s'ouvre entièrement, parce que la partie qui sert
de support vient à glisser en arrière : par ext. et de là,
cabrida, signifie dégringoler, tomber.
Dér. do Cabri.
Cabridado, s. f. Portée d'une chèvre, quantité de che-
vreaux qu'elle met bas. Par cxt. dégringolade, chute de
haut.
Dér. de Cabri
Cabridan, s. m. Frelon, guêpe frelon, Vespa crabro,
Linn. Insecte du genre de la guêpe. — Voy. Grâoule.
Cabriè, s. m. Au fém. Cabrièïro. Chevrier; celui ou
celle qui garde les chèvres. Est devenu n. pr. d'homme et
fait en fr. dans le Midi, Chabrier, et dans le Nord, Che-
vrier.
Dér. de Cabro.
Cabro, s. f- Dim. Cabréio; péj. Cabrasso. Chèvre,
femelle du bouc. ■ — Cabro- bounto. Voy. Bounto et
Boucho. Mé fartas véni cabro, vous me rendriez fou,
vous me feriez perdre patience. La cabro dé moussu Sagnè
se baiéguè toulo la gnuè émbé lou loup, mais ânu jour lou
loup la manjè, phrase proverbiale qui exprime de longs
et vains efforts pour se défendre, surtout au jeu ; on syn-
coi» souvent et l'on dit : Faï coumo la cabro dé nwussu
Sagnè, et Cela signifie : il finira par être enfoncé ; il va tout
iwrdre.
CAB
CKC
15i
Il s'agit, comiiie on le voit, de toute défense longue,
obstinée, désespérée, mais inutile, conti-e plus fort, plu»
habile ou plus beureux que soi. Un joueur qui perd la
partie après l'avoir disput'ie pied it pied ; un malade qui
meurt après avoir longleri)ps et péniblement résisté au
mal; un négociant, un jwrliculier qui voit s'accomplir sa
déconfiture après l'avoir retardée autant que jiossible eu
faisant flèche do tout bois; nos éducations de vers à soie
depuis vingt ans, commençant bien pour finir par un
désastre; tout cela fait coumo la cabro dé moussu Sagnè.
D'où vient qu'une chèvre est devenue le parangon de tous
ces braves malheureux?
C'est ce qu'explique suffisamment le complément du
dicton, qu'on scinde parce qu'il serait trop long et que
tout le monde le sait assez pour pouvoir l'abréger. J'ai
môme vu les gens en pareille occasion se permettre une
ellipse bien autre en disant seuleiiient : la cubro; Mais
c'était un j)eu des argotiers. L'entier dicton est comme
dessus : Faire coumo la cabro dé moussu Sagnè, que se
batéguè toulo la gnué émbé lou loup et lou mati lou loup la
manjè, faire comme la chèvre de monsieur Sagnier, qui se
battit toute la nuit avec le loup et le matin le loup la
mangea. — Cette fin était prévue, mais celle des Spartiates
aux Therniopyles l'était aussi; et la chèvre ne méritait
pas moins de passer à la postérité et d'y entraîner son
maître, qui sans elle serait fort peu connu, et avec elle
risque môme de ne survivre que dans le proverbe.
Dér. du lat. Capra.
Cabro, s. f. Echelle double; chevalet des scieurs de
long, (|ui soutient le baudet o« ase.
Cabro, ». f. Mante, mante religieuse. — loi/. Prigo-
Dlou.
Cabro, ». f. Papillon femelle du ver .'i soie; morpion,
vermine qui s'attache aux endroits couverts de poils.
Cabros, au pi., les deux iwulres princiiwles qui soutien-
nent l'appareil d'une sonnette à piloter, ou moutoù; la
troisième, qui est garnie d'échelons pour grimiwr à la
poulie, se nomme éscalo.
Cabréto, ». f. Chevrette, meuble de l'âtro d'une cuisine,
appui en fer [wur soutenir les pots dans les cendres.
Dér. du lat. Capra.
Cabrôou, s. m. Chevreuil; chamois; isard; toute espèce
de chèvre simvage; Ca/jreo/u», Limi. Quadrupède de l'ordre
des Cerfs; brun ou roux, à cinq andouillers au plus. — Le
n. pr. Chabr6oii,en fr. Chabrol, est formé de là, comme en
fr. encore Chevreuil et Chevreau. La seule différence est
dans la désinence, sufllxe diminutif en lang. exprimé par
ôou, traduit par ol, rendu par le fr. euil. — Voy. Oou
suffixe. A conférer avec Bagndou. Cassagnolo. Plagndou,
etc.
Dér. de Cabro.
Cabroù, ». m. Dim. Cabrouné. Chevron, pièce de char-
[lente compost-e d'un pied droit et de deux arbalétriers.
Dér. de Cabro.
Cabas, ». m. .\ctionde plonger dans l'eau, on de tomber
de haut la tète la première ; de faire un plongeon.
Dér. du lat. Caput, parce que la tète porte la première.
Cabus, t. m. Au pi. Cabusses. Provin, branche de vigne
que l'on couche dans la terre jwur qu'elle prenne racine et
remplace un cep qui manque. — Ddou lén dos cabusses,
dans le dernier quartier de la lune de mars.
Cabus, aJj. m. Cdou ou Câoulé cabiu. Chou blanc,
chou cabus ou chou pommé.
Dér. du lat. Caput, parce que cette espèce de ciiou forme
une grosse tète ronde.
Cabussa, v. Plonger dans l'eau ; faire le plongeon ; tom-
ber de haut la tète la première. 11 est quelquefois actif : —
Cabussa qudouquus, plonger pour sauver quelqu'un qui se
noie. Cabussa un sôou, aller chercher un sou au fond de
l'eau, en plongeant : exercice qu'on s'amuse à faire exécu-
ter aux enfants en jetant un sou dans l'eau.
Dér. du lat. Caput, tête; en esp. Cabessa.
Cabossa, v. Proviguer la vigne; marcotter toute espèce
de plantes ou d'arbustes. Au fig. inhumer, enterrer quel-
qu'un.
Cabussaïre, aïro, adj. Plongeur; qui a coutume de
plonger.
Dér. de Cabus.
Cabussàou, ». m., ou Cassdou, ou Saeol. — Voy. Cat-
sâou.
Cabussé, ». m. Haie d'eau, Jlallus aquaticus, L'inn. Ce
nom est aussi donné à la poule d'eau marouette, gallinula
porzana, dont les habitudes tiennent beaucoup de celles
du Haie. — Voy. Itasclé.
Cabussèl, ». m. Dim. Cabussélé; péj. Cabussélas. Cou-
vercle; ce qui sert à couvrir. — Lou cabussèl dé la listo,
le crâne, l'os sujK'i'iour de la boite du cerveau.
Dér. du lat. Caput; en esp. Cabessa.
Cabusséla, v. Mettre un couvercle; couvrir un plat, un
pot, une huche, de son couvercle.
Cabussèlo, ». f. Couvercle d'un pot an feu, uniquement.
— Chaquo toupl trobo sa cabussèlo, chaque cheville a son
trou; chaque fille trouve un mari.
Las cabussèlos, au pi. les cymbales, parce que cet ins-
trument a effectivement la forme d'uu couvercle à pot.
Môme étym. (jue les préc.
Cacaï, ». m. Caca; selle d'un enfant; ordure, saleté;
terme de nourrice qui, pour détourner un enfant de tou-
cher à quelque chose, lui dit : Cacaï! C'est par suite do la
môme idée (ju'on met une décoction amère au bout du sein
do la nourrice (juand on veut sevrer son nourrisson, et
quand il y porte la bouche, il se retire en s'écrianl : Cacaï/
— Aquà's dé cacaï, c'est sale.
Dér. du gr. Kiiarj, excrément.
Cacalaca! interj. et ». m. Coqnerico, chant du coq;
onomatopée. Gosier, au fig; par exl. cou, col. — Li coupé
soun cacalaca, il lui coupa le cou.
Cacalaca, ». m. ou PantoufUto, ». f. Digitale pourprée.
15â
CAC
CAD
mufle de veau, Antirrhinum majus, Linn. Plante de la
fam. des Pei-sonnées, qui croit sur les vieilles murailles, à
fleurs irrégulières et pourprées, auxquelles il ne manque
que d'être plus rares et exotiques pour être recherchées.
Cacalaca, en terme de coiffure, toute espèce de nœud de
ruhans, de pouf, posé sur le haut d'une coifTure de femme,
en guise de la crête d'un coq : d'où le nom.
Cacalas, j. m. Au pi. Cacalasses. Eclat de rire. — Faguè
un bel cacalas, il partit d'un grand éclat de rire.
Ce terme vient-il du gr. KayyaXdîw, rire à gorge déployée;
ou bien n'est-il qu'un rappel du cacalaca du coq, avec
lequel l'éclat de rire a un rapport d'onomatopée?
Cacalassa, v. ou mieux S'éscacalassa. Eclater de rire ;
tire à gorge déployée, bruyamment, rire aux éclats.
Dér. de Cacalas.
Cacha, v. Serrer; presser; meurtrir; casser, briser en
serrant fortement, avec les dents, ou en frappant ; mâcher,
broyer avec les dents. — Cacha dé noses, casser des noix.
Sloiin ésclà mé cachavo, mon sabot me blessait le pied. Un
ase dé smin tén cachariè pas la païo; c'est ce que l'on dit
de quelqu'un qui veut se faire ou que l'on croit plus jeune
qu'il n'est, et qui a cependant largement atteint ou dépassé
l'âge où un âne, faute de dents, ne pourrait plus broyer ou
mâcher la paille.
Se cacha lotis dés, se meurtrir les doigts ; au fig. être
dupe de son propre stratagème.
Dé froumaje cacha, du fromage qui a dépassé le degré de
fermentation qui lui convient, vieux, fort et rance.
Dér. du lat. Qttassare, briser.
Cachaduro, s. f- Meurtrissure ; pinçon ; blessure produite
par une forte pression. — Aou débasta se vésou las cacha-
duros, exp. prvb., quand on enlève le bât à un âne, on
aperçoit ses blessures; au fig., c'est à fin de compte qu'on
juge de son mal.
Dér. de Cacha.
Caché, *. m Cachet; sceau; pain à cacheter.
Dér. de Ccu:ha.
Cacheta, v. Cacheter; appliquer un cachet; fermer avec
un pain à cacheter.
Dér. de Cacha.
Cacho, s. f. Cachette; cache; lieu secret où l'on cache
quelque chose.
Emp. au fr.
Cacho, s. m. Dim. Cachouté; péj. Cachoutas. Cachot;
prison basse et obscure.
Emp. au fr.
Cacho-foué, s. m. Chambrière de charrette; gros bâton
suspendu par une douille mobile au tablier d'une charrette,
qui sert à soutenir les bras en équilibre lorsqu'elle est
dételée, et à soulager le limonier lorsqu'elle est attelée
chargée, mais au repos.
Comp. de Cacha et de Foué, fouet.
Cachomoure, s. m. Coup de poing sur la mâchoire, sur
le nez.
Comp. de Cacha, meurtrir, et Moure, visage.
Cadabre, j. m. Péj. Cadabras. Cadavre, corps mort;
plus particulièrement en parlant du corps humain; au fig.
homme maigre et décharné, ou seulement livide.
Dér. du lat. Cadaver, qui serait la syncope de caro data
vermibus, à ce qu'on assure et qui est vraisemblable et
ingénieux.
Cadacu, n. pr. de lieu. Cadacu, petit hameau dans la
commime de Laval, arrondissement d'Alais.
Dér. du lat. Caput et Acutum, chef pointu.
Cadaï, s. m. — Voy. CalaX.
Cadansa, v. Balancer; remuer en équilibre; pencher;
branler. — La tàoulo cadanso, la table n'est pas solide ;
elle branle sur ses pieds.
Dér. du lat. Cadere, tomber, et de Danso.
Cadâoula, v. Fermer au loquet; fermer une porte avec
le loquet.
Cadâouléja, v. Loqueter; agiter, faire aller le loquet
d'une porte pour ouvrir, ou pour indiquer qu'on se dispose
à entrer.
Cadàoulo, s. f. Dim. Caddoulélo; péj. Cadâoulasso.
Loquet; cadole; languette de fer, avec son appareil en
bascule qui la soulève, et le crochet-gache qui la retient,
pour fermer une porte. En terme de charcuterie, verge du
porc, y compris son fourreau et la longue membrane qui le
lie à l'abdomen. — Es ton jour en l'air coiimo uno cadâovlo,
au fig., il est sémillant, actif, agité; il ne saurait rester en
place. Fino cadàoulo, loc. prvb., fin matois, rusé et actif.
Le fr. s'est emparé de ce mot dont il a fait Cadole, qui
a la même acception, mais qui ne s'emploie que comme
technique de serrurerie.
Dér. du lat. Cadere, tomber.
Cadaràou, s. m., n. pr. d'un torrent qui borde à l'ouest
la ville de IN'imes : Cadarau.
Dans le dialecte uimois, ce mot est synonyme de voirie,
gémonies. Cela tient peut-être à ce que le lit de ce torrent,
sur lequel est aussi situé l'abattoir public, servait à cet
usage; et que cette destination était ancienne. Mais ne
pourrait-on pas prétendre avec autant de fondement que
c'est de cette circonstance même que le torrent tire son nom?
Il n'est pas hors de probabilité que l'expression, soit qu'elle
s'applique génériquoment à tout emplacement de voirie,
soit à l'emplacement particulier de ce torrent, ne dérive du
lat. Cadaver, cadavre; si l'on se rappelle surtout que des
fourches patibulaires , véritables gémonies, dont on voit
encore quelques piliers sur la route de Sauve, dominaient
le cours de ce ruisseau. Cependant Sauvages, en consultant
sans doute quelque dialecte voisin, applique ce nom de
Cadaràou aux ruisseaux d'écoulement des rues, et lui
donne pour origine le verbe grec KaTà^éw , couler de haut
en bas. D'autres veulent le faire venir du catalan cataranco,
torrent. Le mot n'appartient pas à notre langue ; et nous
y voyons plutôt une redondance réduplicative de notre
Cardon, qui a la même signification. — Voy. Caràou.
CAD
CAD
153
Cadastre, t. m. Cadastre; anciennement registre de
capitation ; plus tinl terrier des proprii^ti^ imposées à la
tiiili'; aujourd'hui registre public où sont marquées l'éten-
due et la valeur des terres.
Dér. de la bass. lat. Capitasirium. Godefroi dit : In
Gallia, aliquibtts in locls, à capltlbm vel enpitatione cap-
daslra, rrl enta tre, rocatur capilnlionis scilicel regisirum,
in (juihm siiigiilnriim nomina aSnotata eraiif.
Cade, 5. m. Grand genévrier à baies rouges, Jtiniperm
nxijcerlriis, I.inn. Arbrisseau de la fam.dos Conifères. C'est
la grande esiièce dont la racine fournit l'huile empyreuma-
tique de Cade, qui est d'un usage très-fréquent en agricul-
ture pour le traitement des animaux, et principalement
contre la gale des moutons. La tige de cet arbuste fournit
par incision la résine appelée Sandaraque, base des plus
beaux vernis. — Es ilavala dàou cade, il a dégringolé; il
est en déconfiture; ou ikest mort.
• Cade-mourvU, s. m. — Voij. Mourvis.
Cade-sabi, s. m. — Voy. Sabino.
On regarde ce mot comme dér. du celt.
Cadè, J. m. Dim. Cadété; péj. Cadélas. Cadet. Snmom
qu'on donnait beaucoup dans le [leuple au fils puiné d'une
famille, au second enfant mMe, n'importe le nombre des
frères subséquents. Ce nom était tellement incarné à l'indi-
vidu qui en était affect(^ dans son enfance, qu'il ne le per-
dait pas même par la mort de son fn>rc aîné, quoiqu'il
devint par lA le chef de la maison. Lorsqu'on voulait y
ajouter le nom de famille, on faisait précéder celui-ci de la
partie, dé; on disait donc : cadè dé Marti et non cadè-
Marti. Il en est de même encore assez généralement pour
les prénoms; on dit plutôt : Jean dé Brunèl que Jean
Brunèl. Dans les races vraiment populaires et autochtones,
il n'est pas rare qu'on ajoute au prénom et au surnom de
Cadi la désignation de la mère, surtout lorsque cette mère
est plus connue que le père, ou lorsqu'elle est veuve. On
dira plus volontiers par ext. cadè dé Martino, Janà dé
Briinêlo, que cadè dé Marti ou Janà dé Brunèl. Cette
tonrnurc prend un caractère plus original et plus local
encore, si l'on féminise p^iur la mère le surnom du père.
Un homme était surnommé /ion Dioti. son fils était connu
sons le nom de cadè dé Bon Dioulo. Ce nom de Cadè est
resté dans le génie de la langue, mais l'usage se perd de le
donner aux enfants. — Un bon cadè, un bon drille. I.ous
cadè.i dé las Mattlos, que tous doux fan cent ans; loc prvb.,
de \vm\ jouvenceaux! la paire fait un siècle! dicton qui
a été imiwrté de Mont|)ellicr : les Matèles est un village au
bord de l'étang de Mauguio.
Cadè, qui se disait autrefois Capdè, est un dim. de Capta,
chef, petit chef, second chef de la famille.
Cadèl, s. ni. Dim. Cadélé, Cadéloù; itf'']. Cadélas. An
fém. Cadrio. Jeune chien, petit de la chienne; par ext.
jeune homme sur les confins de la puberté. — Vn cadélas,
nn jeune gars, robuste et un peu niais.
Dér. du lat. Catellus.
Cadèl, .f. m. Chaton on folles fleurs des arbres que les
botanistes distinguent sons le titre et rangent dans la fam.
des Amentacées, comme le chêne, le noyer, le châtaignier,
le coudrier, le i)cuplier, l'orme, le saule, etc.
Cadéla, v. Chicnner, mettre bas, en parlant d'une
chienne; pousser des chatons, en parlant de certains
arbres.
Cadélado, s. f. Portée ou ventrée d'une chienne ; lailée,
en fr., se dit également d'une chienne de chasse.
Dér. de Cadèl.
Cadenas, ». m. Cadenas; serrure mobile et portative,
qu'on adapte par un anneau à un autre anneau fixe, com-
me fermeture. — Lou cadenas dânu col, les vertèbres du
cou ; les clavicules qui joignent les deux épaules en fermant
l'orifice su|)érieur de la poitrine.
Dér. du lat. Catena, chaine.
Cadénéto, ». f. Cadenette, longue tresse de cheveux.
C'était la coiffure des incroyables du Directoire, qui se
nommaient aussi Muscadins. Cette mode était renouvelée
d'autrefois, et remontait, dit-on, à Henri Allwrt, seigneur
de Cadcnet, maréchal de France, qui lui aurait donné son
nom. Il est bien aussi probable que ce nom lui vient de ce
qu'elle consistait à relever les cheveux en tresse plate, en
chaine, qu'on fixait au haut de la tête avec un peigne.
Cadéno, ». f. Chaine, suite d'anneaux ou chaînons
entrelacés. — Cadéno dé coula.^, mancelle, chaine qui tient
au collier d'un cheval de charrette. Fré coumo la cadéno
d'un pous, froid comme une chaine de puits.
Cadéno est le nom d'une rue du vieil Alais. Est-ce un
souvenir du moyen-âge, pour rappeler les précautions d'une
bourgeoisie toujours jalouse de ses libertés et privilèges à
rencontre de ses soigneurs, qui faisait placer des chaînes à
l'entrée do ses rues contre les incursions des gens du châ-
teau dominant la ville sur ce point, ou contre les attaques
extérieures? Ou bien, cette rue en pente était-elle si diffi-
cile, qu'autrefois il avait été nécessaire d'établir une chaine
dans toute sa longueur pour servir de main-coulante aux
passants? Le nom se retrouve dans les plus anciens titres
des archives municipales : les attaches des chaînes se dis-
tinguaient encore aux deux extrémités et indiquaient leur
position en travers de la rue; la première origine nous
parait donc préférable. Le lat. Catena est en tous cas le
radical du mot.
Cadièïraïre, aïro, ». Fabricant, tourneur, faiseur de
chaises ; rempailleur de chaises.
Dér. de Cadifiro.
Cadièïro, ». f. Dim. Cadièïrélo; péj. Cadièiratso. Chaise,
siège à dossier où l'on s'asseoit ; chaire à prêcher. — Empâta
uno cadièïro, rempailler une chaise. L'an tracho dé la
cadièïro en bas, on a publié en chaire les bans de son
mariage.
Dér. du lat. Cathedra, qui a les deux mêmes signif.
Cadis, ». m. Cadis: étolTe de laine grossière, espèce de
gros drap gris ou brun, sans teinture, qu'on fabrique dans
154
CAG
CAG
les campagnes, surtout dans la Lozère. — Faire un cadis'^
faire faire une pièce de cadis dans la maison, ce qui pro-
cure une meilleure qualité que de l'acheter en foire ou chez
les marchands .
Dér. sans doute de la ville de Cadix, d'où cette étoffe
doit avoir été importée dans l'origine.
Cadissaïre, aïro, s. Tisseur de cadis; marchand ou
fabricant de cette étoffe.
Dér. de Cadis.
Cadissariè, s. f. Hardes et habits de cadis de toute une
maison, qu'on lave à la fin de l'hiver et qu'on suspend dans
la cave pour les préserver des vers.
Dér. de Cadis.
Cadiuèïsso, s. f. ou Cadôousso, ou Dôonsso. Cosse de
pois, de fèves, de haricots et autres légumes qu'on écosse ;
au fig. forte tape, causant contusion et douleur. — Voy.
Dôousso.
Cadra, v. Cadrer; convenir; s'ajuster, s'assortir avec.
— Aquà eadro bien, cela vient juste à point.
Dér. du lat. Quadrum, carré.
Cadran, ». m. Cadran, surface sur laquelle sont marquées
les heures. Au fig. homme ou femme effronté, aux allures
hardies, qui s'affiche avec affectation et mauvais goût.
Dér. dans sapremièreacceptiondnlat. Q«adrat«m; dans
la seconde, par comparaison peut-être avec le cadran, qui
étale et marque les heures.
Cadre, ». m. Cadre, bordure de bois en baguettes dont
on entoure une glace, un tableau, une gravure; chambraide
d'une porte.
Dér. du lat. Quadrum, carré.
Café, ». m. Café; nom commun à la graine du cafier, à
l'infusion qu'on en fait, et au lieu où on le vend préparé.
— Faire café, tenir un café ; être cafetier, limonadier. Au
fig. préne soun café, jouir silencieusement et paisiblement
d'un spectacle qui amuse. Cette phrase se prend d'ordinaire
en mauvaise part, c'est-à-dire qu'on jouit malicieusement
d'une mystification que l'on fait subir à quelqu'un, ou
d'une querelle h laquelle on ne prend part que pour juger
des coups et en rire.
Dér. comme le fr. de l'arabe Gahoukah.
Caîétiè, ièïro, ». Cafetier ; limonadier ; le maître ou la
maîtresse d'un café.
Dér. de Café.
Cafétièïro, ». m. Dim. Cafétièïréto. Cafetière; vase à
faire le café, ou toute autre infusion.
Dér. de Café.
Cafio, ». m. Chenet; landier; ustensile de cheminée qui
soutient le bois dans le foyer.
En bas-bret. Kafuner, chenet; en ital. Capi fuocco.
Cafour, ». m. Enfourchure d'un arbre; le point où les
grosses branches se séparent du tronc ; carrefour ; embran-
chement de plusieurs rues qui forment une sorte de petite
place.
Dér. du lat. Quadrum et Forum, place carrée.
Caga, v. Chier ; aller à la selle; s'ébouler, en parlant
d'un mur, d'une tranchée , ou d'une bobine, d'une fusée,
d'une toupie, dont le fil ou la corde est enroulée trop
lâche.
Notre Dictionnaire s'est fait un devoir d'enregistrer tous
les mots et de chercher l'explication de toutes les locutions
populaires. Il suffit de le rappeler. « En mouchant une
expression mal propre, on s'expose à lui arracher le nez —
c'est-à-dire le caractère, l'originalité, » a dit un glossateur
de beaucoup d'esprit : il n'y a donc pas à faire les délicats
avec une langue qui professe hautement et avec raison que
pardoulos pudou pas. Un empereur d'assez bonne maison
disait la même chose de l'argent ; nous pouvons bien le
dire de la monnaie courante du peuple. Nous toucherons
donc au passage deux dictons fort usités, et sans aucmi
scrupule.
Caga ddou pichô quiou : inutile de donner le mot à mot ;
mais l'argot de la langue verte nous fournit un correspon-
dant : chier de petites carottes; même signification. C'est
mener petit train, vivre de peu, se serrer le ventre; cette
dernière expression, plus académique, nous mène tout droit
à la nôtre, comme on va le voir. Quand on est obligé
d'économiser jusque sur son manger, l'estomac n'a pas
beaucoup à faire. Dans cet atelier de fabrication, comme
dans les autres, la matière première faisant défaut, les pro-
duits diminuent nécessairement ; et l'importation manquant,
l'exportation doit être peu de chose : d'où il suit qu'une
petite voie suffit pour l'opérer. L'effet est dit pour la
cause dans notre locution, qui, par une bizarrerie à
noter, indique beaucoup moins le fait d'économiser sur sa
cuisine, avec les conséquences de l'espèce, que celui de se
restreindre, par nécessité aussi, et de faire petitement toute
autre chose, quoique les mêmes conséquences n'y soient plus.
Caga méléto. Le melet est un poisson de mer assez long
mais surtout très-mince. C'est cette conformation qui a
donné lieu à notre dicton qui signifie : avoir grand peur.
On sait qu'un des effets de la peur est de resserrer singu-
lièrement chez l'homme certain conduit sécréteur; bien
d'autres dictons dans toutes les langues viennent, avec la
science, témoigner de ce fait. Or, il doit résulter de cet
état que les produits ne peuvent être que fort minces,
comme la mélélo, par exemple, et c'est encore dire la cause
que de dire l'effet.
Dér. du lat. Cacare.
Cagado, ». f. Cacade; excréments. Au fig. éboulis;
imprudence , entreprise manquéo ; ànerie , pas de clerc. —
As fa aqui uno bèlo cagado, tu as fait là une loui'de sottise,
une énorme imprudence. De cagados dé mousquos, chiures
de mouches.
Dér. dn Caga.
Cagaràoulé, s. m. Très-petit pot à bouillir; le plus petit
pot, dans lequel on fait chauffer le bouillon d'un malade,
la soupe d'un enfant.
Dér. du lat. Cacàbulus, dim. de Cacalus, pot au feu.
CAO
CAI
155
Cagarâoulo, s.f. Dim. CagaràouUto. Escargot, limaçon
àc<)<juillo; hélice asjiergé, Ilelix aspersa, Linii. Mollusque
Gastéropode. En fr. nioyen-àge, on disait Caquerole, qui
signifiait h la fois un escargot el une espèce de marmite
à trois pieds et à longue queue. Cette dernière acception
semble annoncer sa dérivation du lat. Cacabus, pot au feu ;
et l'escargot y aurait participé par analogie de forme. Le
limaçon, quand on l'irrite ou qu'on l'approclie du feu, rend
une écume comme le pot au feu. — lou tambour dé las
cagardoulos, le tonnerre. Aïfo é$ la eaiso dé las cagardoulos,
tan dé vis tan dé prés; dicton pour exprimer un succès
complet en quoi que ce soit, comme au jeu, par exemple,
quand on gagne toutes les parties. Ordinairement on ne dit
que le premier membre de la phrase, le second restant
facilement sous-entendu. Il est inutile, pour expliquer ce
dicton, de dire que lorsqu'on va à la recherche des escar-
gots, ce qui se fait après une pluie de printemps ou un
orage, on en prend tout autant qu'on en trouve ; ce gibier,
dont on est généralement friand dans le pays, étant peu
propre k dépister ou à fuir le chasseur.
Cagarèl, Picarèl ou Snscle, s. m. Mendole, Sparus
Marna, Linn. Petit poisson de la Méditerranée, de l'ordre
des Holobrancbes ; bon quand on le mange frais, mais qui,
ainsi que l'indique son nom lat., peut imiter l'anchois,
Marna, et qui en effet se conserve dans la saumure ; c'est
le goût piquant qu'il en tire qui l'a fait appeler Picarèl.
— Yoy. c. m.
Cagarèlo, *. f. Mercuriale, foirclle; Mercurialis annua,
Linn. Plante de la fam. des Euphorbiacées, purgative et
laxative : elle est un poison pour plusieurs animaux et
entr'autres pour les lapins.
Son caractère éminemment émollient lui a valu son nom.
Cagarocho, ». f. Dim. Cagarouchéio. Très-petite mai-
son, cahutte étroite, taudis, où l'on est logé à pli de corps.
Au fig. hamlwchc, très-|)ctit homme, nalwt, avorton.
Il peut, dans les deux sens, pr. et fig., dériver par com-
paraison de la posture accroupie exprimée par le verbe.
Cagasso, ». f. A-bé-cé, alphabet, croix de par Dieu. —
Voy. CroiM.
Cagnar, ». m. Dim. Cagnardé. Cagnard, abri exposé au
soleil; c'est le foyer d'hiver des pauvres gens, des vieil-
lards et des fainéants; la cheminée du roi René à Ais.
Dér. du lat. Car»'», chien, ou de l'ital. Cagna, chienne,
parce que les chiens aiment à se coucher au soleil.
Cagnarda, v. Exposer au soleil et à l'abri du vent.
Dér. (le Cagnar.
Cagno (Faire la), v. Faire la mine, la grimace; dédai-
gner ; refuser d'un air dédaigneux.
Dér. du lat. Canis, c'est-à-dire faire une mine de chien.
Cagnà, Oto, adj. Dim. Cagnouté, élo; péj. Cognoutas,
asso. Sot, imbécile; poltron.
Dans l'ancien lang. Cagnà signifiait chien : on dit encore
un foulrassdou de cagnà, un gros diable de chien.
Dér. du lat. Canis; en itai. Cagnolino, petit chien.
Cagnoto, ». f. Dim. Cagnoutéto ; pty Cagnoutasso. Cor-
nette de femme en indienne, sans dentelle ni avance, qui
emboitc la tête et les oreilles. C'est la coiffure exclusive
des femmes du peuple et de la campagne dans leur négligé
de travail. Les étrangers conspuent cette coiffure, qui n'est
pourtant pas sans grâce, et qui ressemble Ixïaucoup au
bonnet phrygien. Tout dépend du plus ou moins de coquet-
terie dans la manière de l'arranger.
Ce mot parait encore dér. du lat. Canis, parce que, dans
le principe, cette coiffure descendait sur le cou en oreilles
de chien.
CagnoQta, t>. Mettre la Cagnoto à quelqu'un ; coiffer une
femme de sa Cagnoto.
Dér. de Cagnoto.
Cago-chl, ». m. Bon-Henri, épinard sauvage, . Chenopo-
dium bonus-henrieus folio triangulo, Linn. Plante de la
fam. des Chénopodées; commune dans les lieux gras.
Son nom lang. lui vient de ce que les chiens aiment à
déposer sur elle leurs excréments.
Cago-prin, «. m. Pince-maille, fesse-Mathieu; ladre
d'une avarice sordide; vilain; taquin. — Sauvages donne
à ce mot pour équivalents : eago-dignès, cago-du, cago-sée,
eago-maïos : c'est la même idée, que nous avons expliquée
dans le verbe servant à la formation de tous ces subst. —
Voy. Prin, Digne, Maïo, etc.
Cago-trépo, ». f. Chausse-trappe ou chardon étoile,
Centaurea calcitrapa, Linn. Plante de la fam. des Compo-
sées Cynarocéphales, qui vient le long des chemins. La
même que Vàouriolo. — Voy. c. m.
Çaï, adv. de lieu. Ici, céans. Il a la même portée que
Aïci, avec cette différence que ce dernier suit d'ordinaire
le verbe auquel il sert de régime , tandis que le premier le
précède . — f aï sera lèou, ou sera lèou aïci, il sera bientôt
ici. Çaï sèn, nous y voilà. Diou çaï siéf que Dieu soit
céans! exp. prvb., quand on entre dans une maison.
faï a quelque chose de plus technique, de plus syncopé
et partant de plus poétique que Àiei.
Dér. du lat. Bàe, par ici.
Caîa, «. Cailler; coaguler; figer. — Lou earboù dé la
Gran'Coumbo es lou mïoù, parça que caïo lou mat, la
houille de la Grand'Combe est de la meilleure qualité,
parce qu'elle se caille, elle fait prise, c'est-à-dire que le
soufre et le bitume qu'elle contient se mettent en fusion et
en vitrification à l'action du feu ; ce qui cimente les mottes
entr'elles.
Dér. du lat. Coagulare; en ital. Quagliare.
Caïado, ». f. Caillé; du lait caillé.
Dér. de Caïa.
Caïàou, ». m. Dim. Caialé; péj. Caiaias. Caillou; galet;
pierre de pleine main et de la dimension dont on se sert
pour la fronde ou pour le jel à la main. — L'abalaiavo à
cos dé caïdous, il le poursuivait à grands coups de pierre.
S'arape un caidou, si je prends une pierre.
Dér. du lat. Calculus, ou Cautes.
156
CAI
CAl
Csùias, s. m. Caillot de sang, grumeau de sang caillé.
Dér. de Caïa.
Caïé, éto, adj. Bigarré; pie; de deux couleurs. Ce mot
ne se dit guère que des bœufs dont la robe est de deux
couleurs. Pour les porcs, on dit Garèl, dans le môme sens.
Ha-caïé, s. m. Lérot, espùce de loir ou de gros rat,
tacheté de gris et de blanc, qui niche sur les arbres. —
Voy. Ra.
Caïé signifie aussi mollet, à moitié sec, en parlant de
certains fourrages et de quelques céréales, connue la luzerne,
le sainfoin, le seigle et l'avoine, qu'il faut couper et entas-
ser, avant une parfaite dessication, pour éviter que la
feuille des premiers et le grain des seconds ne se détachent
en les remuant et ne se perdent.
CaïèïfO, s. f. Ventricule ou estomac des agneaux, veaux
et chevreaux, que l'on conserve par une préparation, pour
cailler le lait. La première opération digestive de ces ani-
maux étant de cailler le lait, le viscère qui sert à cette
opération , est saturé de certains acides, qui produisent le
même effet après la mort de l'animal et la dessication du
viscère. — Voy. Cal.
Dér. de Caïa.
Gain, ïno, aJJ. Tatillon; importum; inquiétant; qui se
plait à tourmenter; incommode.
Dér. du nom de Caïn, race de Caïn.
Caïna, v. Tourmenter; inquiéter; importuner; piquer à
coups d'épingles.
Même dér. que l'adj. préc.
Cûo, ». f. Caille, Perdix coturnix, Temm. Oiseau de la
fam. des Alectrides. Les cailles arrivent dans notre pays
vers le commencement d'avril. On les appelle alors cailles
vertes, parce que la campagne est déjà couverte de verdure;
elles sont peu grasses à cette époque, qui est celle de leurs
amours. Vers le mois d'août et de septembre, elles font un
second passage ; on les chasse dans les luzernes et dans les
vignes, et comme elles sont fort grasses, elles sont faciles à
tirer; leur chair alors est un manger délicieux.
RH dé caïo, s. m. Râle de genêt, Saliiis erex, Linn.
Oiseau de la même famille que la caille, un peu plus gros;
il vit solitaire, ce qui lui a valu sans doute d'être traité de
majesté.
En ital. Quaglia.
Caïo, s. Jeu d'enfants qui ressemble à celui de cligne-
musette, mais dont il est le contre-pied : car celui qui est
caché doit prendre celui qui le cherche avant qu'il ait
touché le but, tandis qu'ici celui qui se cache fait ses efforts
pour ne pas être découvert d'abord, et une fois éventé par
le chercheur qui l'annonce en criant : caïo pér uti tel, tâche
de toucher le but avant d'être saisi sous peine d'interver-
sion des rôles.
Caïradé, ». m. Gesse domestique; pois carré, Lathyrus
sativus, Linn. Plante de la fam. des Légumineuses, cultivée
soit comme fourrage, soit pour en cueillir la graine.
Dim. dér. du lat. Quadrum, carré.
Caïre, s. m. Dim. Caïioù. Coté; carré; coin; angle;
coté d'un angle. Au fig. endroit; canton; quartier. — Cara
dé tout caïre, carré dans tous les sens. Céiqua dé tout caïre,
chercher de tous cotés. Y-a un brave caïre dé Irufos, il y
a un beau carré de pommes de terre. Es réscoundu din
qudouque caïre, il est caché dans quelque coin. Bésto pas
en d'aquéste caïre, il n'habite pas dans ce quartier.
Dér. du lat. Quadrum.
Caïre, s. m. Carreau, une des couleurs du jeu de cartes.
— Joijuo caïre, qudou n'a pas né po pas traire, c'est un de
ces mille dictons que les joueurs inventent pour entretenir
la conversation , quand le jeu absorbe toutes leurs pensées
au point de ne pouvoir causer de sujets étrangers il ce qui
les préoccupe exclusivement. Le besoin de rimer est parti-
culier au génie du dicton, surtout en languedocien. Copo
caïre et jogo caïre, il triche; au fig. il plaide le faux et le
vrai; il fausse sa parole.
Ficha' n caïre pour ficha en caïre ou ficha un caïre. Cela
veut dire : fatiguer, ennuyer, scier le dos, et aussi contra-
rier, vexer, ficher malheur, ce dernier verbe mis par amen-
dement, bien entendu, comme dans notre languedocien.
Slainlenant, d'après ce que nous venons de dire, Caire a
plusieurs significations, selon l'occurrence : coin, sens, coté
et carreau du jeu de cartes. Il n'est pas absoluluent impos-
sible que la locution vienne d'une partie de cartes dans
laquelle un joueur aurait été obstinément poursuivi et battu
par la couleur carreau ; cejiendant il y a une autre explica-
tion assez simple, assez naïve, si ce n'est davantage, pour
être la bonne. Lorsqu'un enfant n'est pas sage, on l'envoie
en pénitence dans un coin de la chambre oii il doit rester
jusqu'à l'expiration de sa peine , delx)ut , sans bouger, et
tourné vers le mur ; il est clair que cela doit l'eunuyer, le
vexer, lui ficher malheur, si vous voulez. Ces souvenirs
d'enfance restent en grandissant et, quoique plus sage alors,
si l'on éprouve quelque contrariété, quelque ennui, quelque
vexation , on a pu les assimiler à ceux du jeune temps,
quand on vous flanquait dans un coin pour jiunition, et les
appeler du même nom en salant tant soit peu l'expression.
Mais il ne faut rien garder sur la conscience. Cette der-
nière explication , qui me revenait assez , je dois convenir
qu'elle ne peut être acceptée que sous bénéfice d'inventaire.
Le dicton est exclusivement languedocien et de vieille date.
Ceux qui font les dictons étaient, en matière d'éducation,
pour l'ancienne méthode de M. Cinglant, et je crois niôrae
qu'ils le sont toujours. Comment auraient-il» fait celui-ci
sur une nouvelle pénalité qui n'a été édictée que depuis et
seulement dans le code des salons? C'est assez difEcile à
arranger, et il faudra sans doute revenir à notre partie de
cartes au risque de la perdre encore.
Dér. du lat. Quadrum.
Caïre (dé), adv. De travers, obliquement; de côté; en
diagonale. — Ana dé caïre, marcher de côté; au fig. être
gêné dans ses affaires ; ne pas aller franchement. Coupa dé
caïre, couper de biais.
CÂL
CAL
157
Uér. du lai. Quadrum; ou du gr. Xtlp, la main.
Caïssa, V. Terme d'agric. Equarrir une fosse, une fosse
d'arbre, tailler ses berges |)erpendiculairement, les ragréer;
lalier, jwusser plusieurs rejetons do la racine. Au fig. si
eaUsa , se remplumer ;"rajustcr ses affaires; s'arrondir;
lirendre de l'einlionixiint. — Lou bla caïsso , le blé tallo,
lors(jue sa fane s'épaissit et forme plusieurs plantes avant
que sa tige s'élève. Un home, un ehival bien caïsjo», un
homme ou un cheval ragotés. S'és bien ca'issa, il a bien fait
ses orges; il a remonté ses affaires; se dit aussi d'un jeune
homme dont les membres se sont renforcés, qui a pris du
corps. Âquélo fénno s'és bien catssado, cette femme s'est
bien meublée, bien nippée; on elle a pris de la carrure.
Dér. de Caïtso.
Caïssàou, (. m. Dim. CaïsscUé; péj. Caissalas. Dent
molaire ou màchelière. — M'a déroba dous caïssdoiis, il
m'a extir])é deux grosses dents. Dérabo aqxtél ca'issAou, au
fig., tire toi de cet embarras; tire toi cette grosse épine du
pied; trouve une solution à cette affaire di^cilc.
En lang. romane Cals, mâchoire, dent.
Caisso, I. f. Dim. CaïMéto; péj. Cdissasso. Caisse de bois
propre à renfermer toute sorte d'objets ; coffre ; bière, cer-
cueil. — CaXsso dé cabiis, fosse à provigner. — Voy. Cros.
Dér. du lat. Capsa, coffre.
Caïssoù, s. m. Oiisson de charrette ; petite armoire placée
sous le brancard et fermant à clé, où les rouliers renferment
leur argent et ce qu'ils ont de plus précieux.
Dim. dér. du lat. Capsa.
Caïtiviè, ». f. Chétiveté; misère; infortune; pauvreté;
mésaise; saleté, crasse, scjualidité qui suivent la misère;
maigreur, mauvaise santé provenant d'une nourriture mau-
vaise ou trop peu abondante. — Es mor dé caïtiviè, il est
mort de pénurie . de misère. Tira sotm ventre dé caïtiviè,
manger goulûment , avec avidité , comme quelqu'un qui a
longtemps jeûné, et qui est à bonne table pour se refaire.
Y vaï pas dé caïtiviè, il n'y va pas de main morte.
Dér. du lat. Captivas, captif, esclave; en ital. Cattivo,
malheureux, chélif.
Caltivoùs, ouso, adj. Chétif, malingre; cacochyme; qui
végète languissamment.
Dér. de Caïtiviè.
Cajoula, t). Cajoler; courtiser; tenir à quelqu'un des
propos flatteurs, agréables, séduisants.
Emp. au fr.
Cal, ». m. Présure ; matière acide qui sert à faire cailler
le lait. La substance que l'on emploie le plus souvent,
provient de la macération de la caïèïro, caillette, ou estomac
des chevreaux, qu'on fait tremper longtemps dans l'alcool.
Une cuillerée à café de cette Uqueur, ainsi pénétrée des
acides do la caïèïro, suffit pour faire coaguler trois litres de
lait. — Voy. Caïèïro.
Cal se dit au prop. de cette sorte de matière gélatineuse,
ressemblant à du caillé, qui forme le noyau de certains fruits
au commencement de leur maturité, l'intérieur des grains
& enveloppe dure, et se prend pour jointure, calus, nœud
des os fracturés; au fig. il exprime la verdeur, la sève, le
défaut de maturité, dans le sens de jeunesse. — Lou bla é$
en cal, le blé commence à former son grain ; le moment où
le grain n'est encore qu'une pAte blanclie, laiteuse, comme
le caillé, yose in cal, noix , lorstiue son amande n'est
encore qu'une gelée. Aguà's pas qui dé cal, cela n'a point
de consistance encore. Préne cal, en parlant d'un os cassé
qui commence à se souder {ïht la coagulation de la substance
gélatineuse qui lubréfle ses pores : former calus. Aquilo
Jouïnèsso es incaro din soun cal, cette jeunesse n'est pas
formée, fam., si on lui pressait le nez, il en sortirait du
lait.
Dér. de Caïa.
Cala, V. Céder; baisser pavillon; l&cher; se taire; mettre
les pouces.
Dér. du gr. XaXtiw, céder, faiblir.
Calada, v. Paver; carreler; couvrir, revêtir de pavés, de
carreaux ; joncher. — La tèro èro toulo caladadodé poumot,
le sol était couvert de ])omme8. Lou ciel is calada d'éstèlos,
le ciel est semé d'étoiles. Fdou avéJre lou gousiè calada pir
béoure aquà, cette liqUeur estsi forte, qu'il faut avoir le
gosier pavé, le palais bronzé, pour la boire.
Dér. de Calado.
Caladaïre, ». m. Paveur, celui qui pave. Au fera. Cata-
daïro.
Calado, ». f. Pavé des rues; chemin pavé; l'ensemble,
l'espace pavé, recouvert de pavés.
Dér. du celt. Kaled, dur; en bas-bret. Kaled, ou Kalet.
Caladoù, ». m. Pavé; pierre équarrie qu'on appelle pavé
d'échantillon. Par est. pavé des rues, des œurs, des corri-
dore intérieurs. — A couja sus lou caladoii, il a couché par
terre.
Même dér. qne Calado.
Calai, ». m., ou Cadaî. Sorte de colle claire dont la
farine est la base. Les tisserands en oignent les fils de leur
chaîne, pour leur donner plus de fermeté, les empêcher de
s'ërailler ou de se détordre , ce qui leur procure une sorte
d'apprêt ou de raideur.
Dér. du lat. Catena, ou Cadeno. chaîne, dans Cadaï, ou
de Cal, pour calus, callosité, dans Calaï.
Calaman, s. m., ou Caraman. Arêtier, faîtage d'une
toiture ; pièce de bois qui s'étend d'une ferme à l'autre et
qui supporte les chevrons ou traverses, sur toute la longueur
du toit.
Dér. du gr. KoXdEiM], chaume, parce que dans l'origine
les maisons étaient couvertes en chaume; ou de KàXov, bois.
Calamandriè, s. m. Germandrée ou Chênetle, Tencrium
chamœdrys, Linn. Plante de la fam. des Labiées, qui croit
de préférence sur les aJteaux.
Calandra, v. Calandrer ; passer une étoffe à la calandre.
Dér. de Calandro.
Calandriè, ». m. Calendrier, almanach, livTe ou table
qui contient la suite de tous les jours de l'année.
158
CAL
CAL
Dér. du lat. Cahndarium, parce qu'on écrivait autrefois
en gros caractères en tête de chaque mois le mot Calendœ,
calendes, premier jour du mois, nouvelle lune.
Calandro, s. f. Calandre, presse ou machine cylindrique,
qui sert il lisser, h donner du lustre, du moiré il une étoffe.
Nodier fait dér. ce mot du gr. KaXéovTs;, rouleau, et
Roquefort de K'jXwopo;, cylindre.
Calandro, s. f. Grande alouette, non huppée; calandre,
Alauda calandro, ïemm. Oiseau lie l'ordre des Passereaux
et de la fam. des Suhulirostres. C'est l'espèce qui supporte
ie mieux la captivité; elle vit longtemps, chante agréable-
ment d'une voix éclatante et répète les airs qu'on lui
apprend.
Dér. du gr. KiXavSpa, alouette.
Caléndàou, s. m. Bûche de Noël; grosse bûche qu'on
met au feu pendant la veillée de ta messe de minuit, à la
Noël. Les gens de la campagne lui attribuent une foule de
qualités superstitieuses. En Provence, on l'appelle Cacho-
fuèc.
CaUndâmt est le titre du second poème provençal de
Frédéric Mistral : une nouvelle et magnifique épopée après
la charmante épopée de Mirèïo. Le récit des amours et des
aventures du jeune et beau Caléndàou, le héros du poème,
sert de cadre aux tableaux de mœurs, aux descriptions des
vieux usages, des fêtes, des gloires de l'ancienne Pro-
vence.
Dér. de Caléndos.
Caléndos, s. f. pi. Fête de Noël ; jour de la fête de Noël.
— Pér caléndos, à Noël, à fin décembre. Caléndos jalados,
Pasquos mouiados, éspigos carados, prvb., de la gelée à
Noël, de la pluie à Pâques, promettent une riche moisson.
Dér. du lat. Calendœ, les Calendes : terme de comput
pour la division du mois chez les Romains. Les Calendes
étaient le premier jour de chaque mois ; les jours qui pré-
cédaient se comptaient en ordre rétrograde. Ainsi le
31 décembre était le second jour des calendes ou avant les
calendes de janvier, secundo calendas, sous-entendu aniè ;
le 30 décembre tertio calendas, le 29 quarto calendas, et
ainsi de suite en remontant jusqu'au 1 S""" jour où commen-
çaient les ides, que l'on comptait aussi en rétrogradant
jusqu'au 5">« jour, qui était le jour des Nones. La fête de
Noël se trouvait donc à peu près au milieu de cette série
des Calendes, et comme cette fête occupait plusieurs jours,
on appelait tous ces jours-là les Calendes de janvier; et la
fête de Noël étant une des plus grandes solennités de l'année,
on l'a appelée Caléndos par excellence.
Le mot lui-même en lat. Calendœ, vient du gr. KaXav,
appeler, parce que le jour des Calendes, à Rome, on convo-
quait le peuple pour lui annoncer le nombre des jours du
mois, la nouvelle lune et quel jour tomteraient les Nones.
Calibo, s. m. Caillebotte, masse de lait caillé; du lait en
grumeaux qu'on obtient du pctitlait en le faisant bouillir.
On en fabrique plusieurs mets, entr'autres l'éscarassoù, qui
est une sorte de rhubarbe, et la réquiicho, recuite, sorte de
crème qu'on préijare avec du sucre et de la fleur d'orange,
et qui a quelque rapport avec la crème à la Chantilly.
Dér. de Cal, venu du lat. Coagulare.
Calibre, s. m. Calibre, diamètre intérieur d'un tube,
comme fusil, canon, conduit de fontaine, tuyau, etc. Au
fig. constitution physique, valeur individuelle. — Quinte
calibre.' quel calibre! dit-on en voyant un individu forte-
ment constitué, surtout une femme aux formes puissantes
et développées.
Dér., dit un auteur, de l'arabe Calib, moule.
Calice, s. m. Calice, vase où l'on fait la consécration de
la messe. Il s'ap])lique seulement dans cette acception. —
Propre coumo un calice, très-propre, très-net, comme un
calice.
Dér. du lat. Calix, coupe, tasse.
Calico, s. m. Calicot, tissu ou toile de coton, moins fine
que la percale.
Emp. au fr.
Caligna, v. Courtiser; flatter; coqueler, faire l'aimable
auprès des femmes; faire sa cour, faire l'amour; mugueter;
convoiter. — Caligna à cos dé poun, faire l'amour à coups
de poing.
Ce mot parait être une corruption de Galina, qui n'est
pas dans la langue, mais qui, en l'admettant, signifierait
faire le coq. Les mots fr. galant, galanterie, de Gai, ont
la même étymologie , de même que coqueter, coquetterie ,
coquet, dérivant de coq.
Calignaïre, s. m. Dim. Calignairoii. Le galant, l'amou-
reux d'une fille, celui qui lui fait la cour.
Même étym.
Calimas, s. m. Au pi. Calimasses. Chaleur forte et
humide ; air chaud, lourd, étouffant ; vapeur chaude.
Dér. du lat. Calidus, chaud.
Câlin, ino, adj. Dim. Câliné, éto. Câlin; flatteur; qui
fait le doucereux, qui s'insinue hypocritement dans les
bonnes grâces; patelin.
Dér. du lat. Callidus. rusé.
Calîou, s. m. Do la cendre chaude, de la braise qui se
conserve sous les cendres; au fig. feu, verve, inspiration.
Dér. du lat. Calidus, chaud.
Calo, s. f. Abri proprement dit. — Ne s'emploie guère
qu'adverbialement au dat. à la calo, à l'abri du froid et du
vent.
Dér. de Caloii.
Calos, s. m. Au pi. Colosses. Dim. Caloussé; péj.
Caloiis.sas. Trognon de chou; grosse tige d'une plante légu-
mineuse. — Calds dé brus, chicot de bruyère que l'on
coupe quand on rame les vers à soie. Calas dé fièïo, la tige
de nouvelle pousse des mûriers, qui est verte et tendre,
mais que les vers ne mangent pas. An pas laissa gué loin
colosses, ces vers ont bien mangé, ils n'ont laissé que le
bois de la feuille.
On dit au fig. un calas dé fénno, une femme très-grasse.
Dér. du lat. Coulis, tige, ou du gr. KôXov, bois.
CAM
CAM
159
CaloSBOS, adj. f. pi. N'a d'emploi que dans Bajanos
calouos, châtaignes sèches, qu'on ne fait cuire qu'à demi et
qu'on mange d'ordinaire avec de la salade.
Dér. du lat. Callosus, calleux, durci.
Caloto, j. f. Calotlo, petit honnet hémisph<?ri(iue qui
couvre le sommet de la tôte ; calotte de prêtre ; taloche, tape
du plat de la main sur la tête. — Dans ce dernier sens :
jouga à ta caloto. jouer en prenant une taloche pour enjeu;
on comprend que c'est le gagnant qui paie et le perdant qui
reçoit.
Caloto est aussi une réunion d'habitués, qui font cercle
et causent assis en public, oudelxiut, sur une place, devant
un café, etc.
Un auteur fait dér. ce mot du celt. Calota :ao\is n'avons
pas le moyen de le vérifier. D'autres du lat. Cattus,
couverture de tête, que nous ne trouvons pas, mais qui
viendrait du gr. RaXilraTu, couvrir, voiler : à la bonne
heure !
Caloù, s. f. Dim. Calounito; péj. Catounatto. Chaleur;
au fig. ardeur, feu, véhémence, activité. — Estre en caloA,
entrer dans la saison des amours, en parlant des animaux.
Dér. du lat. Calor, chaleur.
Calourado, I. /°. EchaufTaison; bouffée de chaleur. Au
fig, concupiscence, passion de l'àme.
Dér. de Caloà.
Calourén, énquo, adj. Chaleureux, échauffé; d'un
caractère chaud et bouillant.
Caloussu, udo, adj. Dim. Caloussudé et Caloustudà;
péj. Caloussudai. Robuste; bien membre; ragot, gros et
court ; qui a de gros membres.
Dér. de Calas.
Calottta, V. Donner du plat de la main une tape sur la
tète ; soufQeter. — Té vas faire calouta, tu vas recevoir une
taloche. •
Dér. de Caloto.
Calu, udo, adj. Dim. Caludé; péj. Caludat. Myope, qui
a la vue basse ; presque aveugle. Par ext. se dit des moutons
on brebis atteints du vertige ou tournis , sorte de maladie
qui leur rend la tôte lourde et les fait tourner sur eux-
mêmes jusfju'à ce qu'ils tombent. Elle est occasionnée par
des vers qu'une mouche dépose dans leurs naseaux et qui,
pénétrant jusque dans les sinus frontaux, y font de grands
ravages.
Dér. du lat. Caligo, obscurcissement, venu du gr.
KaXinjTtii, couvrir, voiler.
Camar, ardo, adj. Dira. Camardé et Camardoù; péj.
Camardas. Camard; camus, qui a le nez plat, gros et
écrasé. Dans le iiouple , on donne volontiers le surnom de
Camar par antiphrase aux gens porteurs d'un gros nez. —
Dé souïès camars, des souliers à pointe large et carrée.
Lou camar, substant. se prend pour le nez.
Son étym. est-elle dans le gr. Kajiif a, voûte, arcade, qui
a donné le lat. Camurus, tourné, courbé en dedans, parce
que les nez camards ou camus sont courbés en dedans? Ou
bien serait-elle tirée de Camelus, chameau, qui a le nez
très-aplali, mais qui porte aussi une bosse et a l'épine
dorsale fortement en arcade et en voûte? Les unes ont sans
doute formé les autres : tout se tient.
Camba, ado, adj. Dim. Cambadé;pé]. Cambadas. Jambe;
qui a la jambe bien faite ou de longues jamiies, suivant le
qualificatif qui précède, ou même seulement l'inflexion et
le ton. — Camba coumo un gai, qui a des jambes de coq.
Dér. de Cambo.
Cambado, t. f. Dim. Cambadélo; péj. Cambadasto.
Enjambée; gambade. — Faudra bé né dansa uno cambado,
il faudra bien essayer de cette danse, y danser une enjam-
bée.
Vno cambado, en termes d'agric. l'enjambée de terrain
que fait un ouvrier avec la houe, c'est-à-dire la largeur
qu'il peut atteindre autour de lui sans changer de place ses
jambes, qu'il est obligé d'enfouir dans la terre.
Dér. de Cambo.
Cambaïa (se), v. Mettre ses jarretières.
Dér. de Cambo et de ïa, lier.
Cambaïè, s. f. Dim. Cambaiiiréto. Jarretière.
Même étym.
Cambajoù, s. m. Jambon, cuisse de porc salé. — Tirarén
d'agu'i coumo d'un cambajoù, ce sera là notre plat de
résistance, qui doit servir pour plusieurs jours. Tiro d'iéou
coumo d'un cambajoù, il me prend pour banquier, il tire
sur moi comme si son crédit ne devait jamais s'épuiser.
Ce mot a toute l'apparence d'un dim. de Cambo, de
même que son correspondant fr. jambon, dim. de jambe :
nous ne savons pourquoi, car c'est la cuisse et fort grosse
encore qu'il désigne. Sauvages fait la même remarque, et
cite plusieurs mots fr. ayant leurs analogues en lang.
qui offrent la même anomalie, comme : caisse, caisson,
caïsso, caïssoù; salle, salon, salo, saloun; saucisse, saucis-
son ; sdoucisso, sdoucissà, etc.
Cambaloto, >. /'.Dim. Cambaloutéto ; pé'}. Cambatoutasso.
Culbute; cabriole; saut périlleux. — Faïre la cambaloto,
faire la culbute, tomber cul par dessus tête. Faïre dé
eambalotos, faire des cabrioles.
Quoique ce mot semble avoir pour racine le mot Cambo,
il est probable qu'il dér. de l'ital. Tombolata, qui a la
même signif.; seulement le lang. en l'empnmtant l'a trans-
formé de manière à lui donner une physionomie plus locale
par la métathèse de Cambo. U est certain qu'en prenant ce
dernier pour racine du mot Cambaloto, on ne sait trop que
faire de la désinence cUoto, qui ne présente aucun sens ni
aucmie analogie.
Cambalouta, v. Faire la culbute; faire des cabrioles;
tomber la tête en bas.
Cambalu, udo, adj. Qui a de longues jambes; c'est la
tournure du héron voyageant sur ses longs pieds.
Dér. de Cambo.
Cambarô, s. m. Douleur vive au poignet à laquelle sont
sujets certains artisans par le fréquent exercice de cette
160
CAM
CAM
partie du bras, ou plutôt par la reprise d'un travail de
main ou de bras dont on avait perdu riiabilnde. Les
fauclicurs y sont très-sujetsaucommencement de la saison,
parce qu'ils étaient déshabitués depuis plusieurs mois d'un
travail qui intéresse presque exclusivement les nerfs et
ligatures des poignets. On j)rétend, sans doute par préjugé,
qu'un bracelet ou cordon d'écarlale est le remède de celte
incommodité.
Dér. de l'ital. Gamba rotta, qui a la même signif. Pro-
bablement on a appliqué au bras un terme qui avait été
trouvé dans le principe pour une douleur de même nature
à la jambe.
Cambéto, s. /". Petite jambe; mancheron d'un araire,
qui est surmonté et terminé par le manche ou manipou. —
Faire la cambélo, donner un croc-cn-jambe.
Dé sdoulo-cambéto, loc. adverb., à cloche-pied.
Dim. de Cambo.
Cambi, s. m., ou Candou. Abonnement avec un maré-
chal pour ferrer les chevaux d'une ferme, et réparer les
outils aratoires. — Fera à cambi. ferrer par abonnement.
Dans le principe Cambi signiOait échange ; c'est par un
excès d'extension de sens qu'il en est venu à ne plus signi-
fier qu'abonnement.
Dér. du lat. Cambium, échange.
Cambo, ». f. Dim. Cambéto; péj. Cambasso. Jambe,
partie du corps du genou jusqu'au pied; tronc d'arbre, tige
de plante. — Douna las cambon à un éfan, donner la
liberté aux jambes d'un enfant, c'est-à-dire lui ôter le
maillot et le vêtir d'une robe pour la première fois. Cambo
dé pastièiro, surnom qu'on applique à im cagneux, à cause
de la ressemblance de conformation de ses jambes avec
celles d'un banc de maie-à-pétrir qui ont la môme dériva-
tion. Cambo falèto, jambe à moitié paralysée, qu'on traîne
ou qu'on jette en avant ; celui qui est affligé de cette infir-
mité. Sembla qu'un chi mé pisso à la cambo, phrase faite,
pour exprimer le mépris ou le peu de cas qu'on fait de
vaines paroles, ou d'une sotte fanfaronnade.
Dér. de la bass. lat. Camba, mêmesig., oudugr. KaixcjTi,
courbure, jointure. En ital. Gamba.
Camboï, ». m. Cambouis, vieux oing d'une roue de
charrette, ou d'une machine, devenu noir par suite du
frottement et par le mélange des parties métalliques.
Dér. du celt., dit Honnorat. Je lui crois plutôt une
parenté naturelle avec CambaJoU, à cause de la graisse de
porc qui en est la base. — Voy. Cambajoù.
Cambovira, i'. Faire la culbute; culbuter, renverser,
mettre sens dessus dessous. Au fig. trépasser.
Formé de Cambo et de Yira.
Cambra, ado, a'ij. Cambré; arqué; courbé; voûté.
Dér. du gr. Ka[j.ipi, voûte.
Cambrado, ». f. Dim. Cambradélo ; p{']. Cambradasso.
Chambrée, en terme de magnanerie, la quantité de vers ou
de cocons compris dans une magnanerie. — Fa:ire uno
cambrado, élever des vers à soie ; mena la cambrado, diri-
ger leur éducation. Manqua sa cambrado, ne pas réussir
sa chambrée.
Dér. de Camhro.
Cambrïoù, s. m. Dim. Cambrïouné. Petite chambre;
chambrette ; cabinet.
Dim. de Camhro.
Cambro, s. f. Dim. Cambréto, cambrïoù; p(''j. Cambrasse.
Chaïubro; plus particulièrement, appartement où l'on
couche. — ilounta uno cambro, meubler une chambre
pour des nouveaux mariés.
La cambro, la chamhre des députés. Acception nouvelle
prise du fr. et introduite dans le langage iwlitique.
Dér. du lat. Caméra, môme sign., ou du gr. Ka;ji<ipa,
voûte.
Cambroul, s. m. Échauboulurc, éruption de boutons,
efflorescence de l'épiderme, maladie commune aux enfants.
Camélo, s. m. Camelot, grosse étoffe de laine, originaire
du Levant, où elle était tissée de poils de chameau ; ce qui
lui a valu son nom.
Dér. du gr. Kaarp.iox^ peau de chameau.
Camèou, s. m. Chameau, Camelus bactrianus, Linn.
Mammifère de la fam. des Ituminants; il porte deux bosses
sur le dos. Au fig. un grand nigaud, badaud; une grande
femme mal charpentée et sans grâce. — Les armoiries de
Béziers sont un chameau. Des malins lui ont affecté pour
devise : Sèn foço, nous sommes fort nombreux.
Faire lou camèou, se courber, se voûter ; faire le dos de
chameau.
Dér. du lat. Camelus, ou du gr. Ke![j.rj),oç , même
sign.
Caml, s. m. Dim. Caminé. Chemin, route, voie, sentier.
— Caml méssadiè, chemin qui conduit à la messe, à
l'église. Camï das éndéoutas, chemin des débiteurs : chemin
de traverse, mauvais chemin, plu» long que la voie directe.
Tout caml méno en vilo, prvb., tout chemin conduit à Korae.
£.s- à la fin dé soun caml, il est à la fin de sa course.
Plusieurs étymologies ont été proposées : d'abord, du
celt. Cam, marche; ou d'un mot égyptien C/iom ou Chem,
signifiant incendie, feu; parce que les premières voies
auraient été frayées par le feu; ou de l'ancien gothique
Vamen, Quiman, ou du teuton Komen, avec le sens de
chemin; ou de l'allemand Kommen, aller et venir; enfin,
selon Ménage, de Caminare, tiré de Campinare, dimin. de
Compare, formé du gr. Kœpicni, jambe. En ital. Cammino;
en esp. Camino; en portug. Caminho; en cat. Caml. La
vraie source parait être dans la première indication : on
trouve en effet Caman en kymri, Ceum en gaël, Kamen en
armoricain : Kam y signifie Pas, comme le Kymri Camre:
dont l'anglais a fait to corne, venir.
Camina, v. Cheminer, faire route, marcher, aller, faire
son chemin. — Camino, tron dé l'air! as pdou que la tèro
té mam/ue? fais ton chemin, morbleu! tu as j)eur que la
terre te man<jue? C'est une phrase faite qu'on accuse les
provençaux d'adresser aux personnes qui leur demandent
CAM
CAN
161
leur route. Ce ne peut être qu'une calomnie motivôe par
leur brusquerie native : si elle a quelque chose de vrai, ce
défaut s'efface chaque jour par les progrès de la civilisation.
Faï bon cnminn lou mnti, il fait Iwn marcher le matin,
fnmifio, camino.' marche, marche : sorte d'interjection,
pour faire avancer, ou pour chasser quelqu'un.
D6r. de Cami.
Caminaïre, .?. m. Cantonnier, ouvrier employé à l'entre-
tien ou ."I la Réparation des chemins; marcheur.
DiV. de Cami.
Caminarèl, èlo, atlj. Voyageur, qui fait he.aucoup de
chemin; marcheur, qui marche beaucoup, longtemps.
Dér. de Cami.
Caminolo, ». /"., ou Caréïron. Petit sentier; chemin de
traverse; chemin niral,
Diin. de Cami.
Camisar, ardo, arij. Qui est en chemise; qui va en
chemise.
iMut Camiiards. les Camisards, bandes armées de calvi-
nistes cévenols dans la guerre religieuse du commencement
du XVlll"" siècle. Ce nom leur fut donné de ce qu'ils por-
taient sur leurs habits une chemise, camino, ou.un sarrau
ou blouse de toile blanche.
Camiso, ». f. Dim. Camiséto. Chemise, vêtement de
linge avec corps et manches, qui se porte sur la peau. —
En eoT dé camiso, sans antre vêtement que la chemise et le
pantalon, ou la jupe. En manchn de camiso, sans habit, de
manière Ji montrer les manches de la chemise. La car es pu
prèchi que la camiso, OU es pu prés la car que la camiso, la
chair est plus près du corps que la chemise : cette phrase
est employée pour exprimer qu'on porte plus d'intérêt à
soi-même ou h sa famille qu'aux étrangers.
Dér. do la bass. lat. Camisia.
Cammas, -i. m. Ilameair, manoir principal d'un domaine.
Dér. de Cap, chef, tête, et de JWn», métairie.
Camouflé, .?. m. Camouflet, insulte, affront; mystifica-
tion. Dans l'origine, cette sorte d'affront consistait à souffler,
au nez de quelqu'un qui dormait, de la fumée avec une
paille, un chalumeau ou un cornet de papier allumé.
Dér. du lat. Calamus et Flatus, chalumeau et souffle,
Calamo flatu.t.
Campagnar, ardo, adj. Campagnard, qui habite la
canipajrno. On dit mieux Pfj.ton.
Campagne, s. m. Sonneur do cloches, celui qui est
chargé de sonner les cloches.
Dér. de Campano.
Campagno, s. f. Campagne, grande étendue de pays;
lieux eu dehors de la ville où sont les champs, cultivés ou
non cultivés; expédition militaire et sa durée. — Ana in
campagnn, faire un voyage.
Dér. du lat. Campus, champ.
Campanéja, v. fret/. Sonner les cloches ; brimbaler les
cloches.; sonner .'i coups redoublés.
Dér. de Campano.
Campanéjado, s. f. Contenu d'un clayon; plein nn
clayon.
Dér. de Campanèjt.
Campanèje, s. f. ou Léradon. Clayon, sorte de panier
plat, plus long que large, avec un étroit rel)ord, formé et
tressé d'éclisses en bois refendu. On l'emploie ^ faire sécher
les fruits au soleil , pour transporter le linge sec du lavoir,
et pour élever les vers à soie dans le premier flge.
Campanéto, ». f-, ou Conréjolo. Liseron ou volubilis,
Convolvulus arvensis, Linn. Plante de la fam. des Convol-
vulacées ; sa fleur blanche ressemble à une clochette, d'où
lui vient son nom. — Yoy. Couréjolo.
Campano, ». f. Dim. Campanéto. Cloche; clochette,
sonnette. — Bé dé campano, se disait autrefois d'une pro-
priété cléricale.
Dér. du lat. Campana, nom pris de la contrée d'Italie
où les premières cloches furent connues, et dont saint Pau-
lin, évêque de Noie, en Campanie, fut le premier à intro-
duire l'usage dans les églises, en 400.
Campéja, v. Poursuivre, courir après quelqu'un ; chas-
ser, dissiper. — La fan lou campéjo, la faim, la misère le
talonne. — /-'aï campéja tout lou jour, je l'ai poursuivi
toute la journée. — Lou son lé campéjo, le sommeil t'ac-
cable, te poursuit.
Dér. du lat. Campus et Agere.
Campèstro, ». m. Terrain inculte, sauvage; propriétêde
peu do valeur et de mauvaise culture ; pays montueux.
Dér. du lat. Cnmpestris, champêtre.
Camus, uso, adj. Camus, camard, qui a le nez court et
aplati. Se dit mieux Camar. (Y. c. m.) — Qu'a »m pan dé na$
n'es pas camus, prvb., qui par une inversion du physique
au moral, du propre au figuré, s'applique ironiquement
à quelqu'un qui, recevant une juste mystification, échouant
dans une entreprise, n'en ayant qu'un pied-de-nez, voudrait
encore se faire passer pour habile ou pour avoir réussi. —
Voy. Camar, même étym.
Can, ». f. Plaine snr une hante montagne. — Avec la
même signif. et sans toutefois que cette différence puisse
être expli(iuée, si ce n'est par un usage local, on dit pour
certaines désignations la chan, en faisant sentir le ch, pour
la can, synon. Ainsi la chan ddou Tor, plaine sur la mon-
tagne du Taur (Ardèche), et la can dé l'Èspitalé, plaine
d'une montagne de la Lozère, n. pr. de lieu, ayant appar-
tenu aux chevaliers hospitaliers de St-Jean de Jérusalem,
qui possédaient plusieurs commanderies dans nos pays.
Il n'est pas douteux que ce monosyllabe Can pourrait
être une altération orthographique dérivant soit du latin
campus, soit de cantus, selon qu'il serait orné à sa der-
nière lettre de la consonne indicative ;> ou r / mais il est &
remarquer que le mot n'est reçu, dans notre dialecte, qu'an
féminin, dans l'acception qui précède, avec la flexion du
C dur, qu'il a retenue du latin ; il n'existe pas au masculin
isolé, avec aucune des flexions du C. Seulement il entre
volontiers en composition dans les deux sens de champ on
16-2
CAN
CAN
de chant, et alors, bien qu'il préfère le chuintement du Ch,
il admet aussi l'intonation latine, au moins dans le parler
gouiiM; car le ra'iôou n'emploie partout que le ch. Le fr.
conserve au contraire, pour les deux emplois, l'adoucisse-
ment chuintant. — Voy. Chamboù, Canla, etc., etc.
L'observation est importante au point de vue de notre
purisme lexicograpliique, qui ne doit donner droit de cité
qu'aux mots véritablement reconnus pur-sang, et proscrire
le mélange franchimaii et fantaisiste, qui ne nous appartient
pas. Notre nomenclature a ses rigueurs ; c'est le respect de
la langue qui les a inspirées et dictées. La langue avait ses
raisons pour choisir on adopter telles ou telles formes plutôt
que d'autres, et nous nous inclinons toujours devant elle ;
ce que le sentiment général et l'usage ont consacré, nous
parait avoir plus de cachet, plus de droit à être maintenu
que les prétendus perfectionnements de notre vieil et bon
idiome cévenol mis en vogue par les novateurs. — Voy.
Franchiman .
Dér. du lat. Campus.
Cana, t>. Mesurera la canne; mesurer en général. Ce
terme s'emploie principalement au jeu de boules, pour
mesurer la distance des boules des joueurs au but.
Dér. de Cano.
Canabas, s. m. Canevas, grosse toile, toile de chanvre.
Dér. du lat. Cannabis, chanvre.
Canabassariè, s. f. Toilerie, toute sorte de marchandise
de toile, ou de tissu de chanvre.
La Canabassariè était le nom d'une rue à Alais, dans les
environs du Marché, le quartier des Canabassiers , qui
représentaient dans les corporations du moj'en-àge les
commerces de chanvrier, de filassier et de toilier; là sans
doute se faisait l'étalage de ces marchandises.
Canabassiè, s. m. Tisserand, ou marchand de grosse
toile; marchand chanvrier -filassier.
Dér. de Canabas.
Canabièïro, s. f. Chènevière, champ où croît, où est
semé le chanvre.
Le nom de la fameuse rue de Marseille, la Canebière, tire
de là son origine.
Dér. du lat. Cannabis, chanvre, ou du gr. Kciva6o;,
canne, roseau.
Canaboù, s. m. Chènevis, semence ou graine de
chanvre.
Même étym.
Canaïo , s. f. Canaille, nom collectif pour designer tous
les gens sans aven, sans honneur, ni probité, ni déhcatesse;
souvent aussi, en l'adoucissant, pour troupe d'enfants
bruyants, tapageurs.
Dér. du lat. Canis, c'est-à-dire race de chiens ; ou plus
probablement du lat. Canalicoke, espèce de lazaroni de
Rome qui se tenaient sur les bords d'un des canaux de
cette ville.
Canâou, s. m., ou mieux Âcanàou. Cheneau, conduit
des eaux d'un toit de maison,- tronc d'arbre creusé pour
conduire des eaux d'irrigation. Ce mot dans notre dialecte
ne correspond nullamont au mot fr. Canal, bien que tous
deux aient la inéine étym. dans le lat. Canalis; mais quand
on parle, par cxt., du canal du Languedoc ou do tout autre,
on francise le mot et l'on dit ; lou canal ddou Léngadù,
lou canal das pras dé Sén-Jan, ou à Alais simplement, lou
Canal; et l'on s'entend. — Voy. Acandou.
Canar, s. m. Canard, Anas, Linn. Oiseau domestique ou
sauvage, de l'ordre des Palmipèdes, dont les espèces et les
variétés sont nombreuses. — Tira as canars, être très-peu
vêtu par un temps froid, grelotter de froid. Cette locution
provient sans doute de la chasse aux canards, qui se fait à
l'affût et dans la saison la plus rigoureuse do l'année : quand
on est peu vêtu en hiver on grelotte, comme lorsqu'on est
à l'affût des canards.
Canar, -s. m. Chien caniche, barbeL.
Dans la première acception, il est possible que Canar soit
une onomatopée tirée du cri de cet oiseau, Can, Can,
comme quelques-uns l'ont voulu. 11 se peut aussi que son
nom vienne du lat. Anas, qui semble cependant un peu
bien éloigné; mais, dans le second sens, la dériv. du lat.
Canis, chien, est très- indiquée.
Canarda, v. Canarder, tirer au fusil un animal ou un
homme; le tirer comme un canard.
Dér. de Canar.
Canari, s. m. Serin des Canaries, Fringilla canaria,
oiseau de l'ordre des Passereaux, remarquable par son beau
plumage jaune, par sa facilite à apprendre des airs, très-
susceptible d'attachement et d'éducation.
Canastèl, s. m., ou Canastèlo, s. f. Dim. Canastèlé,
Canaslèléto, CanastHuii. CorLeille, panier d'osier ou d'é-
clisses, de forme rondo ou oblongue, moins profond que
large ordinairement; corbillon, petite corbeille, suivant les
dimensions que suivent les dira.
Dér. du lat. Canistrum, ou du gr. Kâvainpov, vase en
forme de corbeille, fait de Kivr,?, corbeille.
Cancagnè, èïro, a//. Cancanier; médisant; faiseur de
cancans.
Cancan, s. m. Cancan, commérage; vacarme, tapage. —
Faire gran cancan, faire grand bruit, grand étalage.
Dér. du lat. Quamquàm, quoique, parce que, formule de
début de bien des discours quand on parlait latin à l'école.
Candéïè, s. m. Dim. Candéïèïré. Chandelier, flambeau,
ustensile destiné à supporter les ciiandelles, bougies, etc.;
fabricant de chandelles, qui fait ou vend des chandelles
Dér. de Candèto.
Candéïèïro, s. m. Fabrique de chandelles.
Candèl, s. m. Peloton de fil, de soie.
Corruption de Cap dèl, dim. de Cap, petite tête.
Candéla, v. Dévider, mettre en peloton.
Dér. do Candèl.
Candèléto, s. f., ou Aoubre-dré. Arbre droit, arbre
fourché. — faire la candèléio, faire l'arbre droit ou l'arbre
fourché ; jeu d'enfant qui consiste à se tenir en équilibre
CAN
CAN
169
sur la tfte, 1m pieds en l'air, droit comme nne chandelle,
dont ran'lélélo est le dimin. En espag. on dit de niftmc
Hnzer la cnnileliUa.
Candèlo, s. f. Dim CandHéto. Chandelle, petit cylindre
de suif dont une mèche de fi! do coton occupe le centre
d'un tout A l'autre; slalaclite qu'on trouve dans les caver-
nes et les souterrains en forme de cierges, ou celles formées
par la glace suspendues l'hiver au bord des endroits par où
l'eau coule.
Dèr. du lat. Cnndela, formé de Candeo, être hlanc de feu.
Candélonso (Nosto-Damo-la), ». f. Chandeleur, fête de
la Puriliealioii de l.i S.i in te -Vierge, qui est céléhrée le
2 février. Ce nom lui vient de la bénédiction des cierges
qui a lieu ce jonr-l<1. — Quan la Candélouso lusèmo,
eranto jours après hivèrno, prvh., quand le soleil brille le
jour de la Chandeleur, l'hiver dure encore quarante jours.
On prétend que l'ours rentre dans sa tinière s'il fait beau
ce jour-là. Le prvh. lat. dit aussi :
.Si sol clarueril Marld Purifîcanle,
Majus frigus er'U posteà quant antè.
Candi, s. f. Chanvre, Cannabis tativa, Linn. Plante de
la famille des L'rlicécs, que l'on cultive partout pour en
retirer la filasse connue sous le même nom. Il se faisait
autrefois un assez grand commerce de chanvre dans notre
pays, cette industrie a l)eaucoup perdu de son importance.
- Àï dima candi.' l'aXgo l'émméno! locution prvh., qui
n'a pu passer dans le langage et devenir le type d'une
exclamation de détresse, qu'à cause du prix qui s'attachait
à la culture et à la récolte du chanvre. La phrase doit avoir
nne origine anecdotique. Un individu avait mis du chanvre
à rouir dans un ruisseau; un orage grossit le ruisseau,
l'eau entraîna le chanvre, et notre homme, voyant son bien
se perdre, de pousser piteusement cette exclamation. Quel-
qu'un l'entendit, la répéta en racontant la scène, elle devint
le cri de désappointement, d'alarme, de déploration pour
toute autre chose que pour du chanvre emporté : trope,
figure, dicton pittoresque et populaire, qui a mainte appli-
cation. Quand une position critique se complique et s'ag-
grave, que les choses se gâtent, s'en vont à vau-l'eau; que
la déb.lcle arrive, commence; que miséricorde se perd;
qu'un danger menace, qu'une catastrophe est imminente;
que tout annonce une ruine inévitable : c'est ce que signifie
et le cas de crier : Aï dé ma candi! l'aïgo l'émméno.'
Dér. du lat. Cannabis, reproduisant le gr. KiwaStç,
chanvre.
Candîa, s. m., n. pr. de lieu et de personne. Candiac,
sur la rive gauche du Vistre, ancien château et seigneurie
dans le diocèse de Nimes, village du Gard, cité dans le
dénombrement de la sénéchaussée de 1 394 sous le nom de
Candiaeum.
Candïargne, s. m., n. pr. de lieu. Candillargiies, com-
mune et canton de l'Hérault, à dix-sept kilomètres de
Montpellier, situé sïir la rive septentrionale de l'étang de
Maguelonne. Dans un acte de donation de 960, il en est
parlé : dono villam indominicatam quam vacant Candiani-
cas. En 985, son nom est un peu différent; un titre porte:
in suhurbto caslrl substantionensis, in lerminio de villa
Candianicus, etc., e( in lerminis de Uontepestellario. Depuis,
la forme ranrfi'anicff a été seule employée; elle est devenue
par les procédés ordinaires Candiargu», Candillargues. —
Voy. Argut.
Ce n'est pas tout à fait à cause de l'importance, du reste
fort médiocre, des deux localités dont les noms précédent,
que leur étymologie mérite d'être particulièrement étudiée;
mais bien à cause des variétés intéressantes qui se sont
attachées à cette famille nombreuse d'appellations locales,
et qui font ressortir ce que nous disons de la formation et
de la composition des noms propres.
D'abord l'élément constitutif du mot, ce qui fait sa
signification, le radical , pour Candia et Candïargne, est
évidemment le même que celui de Cande, de Candé, de
Candat, de Candan, de Candaillac. Cande, qui parait être
l'expression la plus simple, est le nom de la ville de Ton-
raine où mourut saint Martin, le grand a|)6tre des Gaules :
la latinité du moyen-âge l'appelle Condate, Condaie Turo-
ntim, Condatentii vieus. Expillv, Diction, géog., cite en
France trente-un hameaux, villages ou villes du nom de
Condé, trois Condes, onze Condat, et ils sont rendus en
latin, sans exception, par Condate, ou par les variantes
Condatum, Condœum, Condetum, Condata, qui ne sontqne
des accords de genre.
Ainsi, devant la traduction, point de différence entre
Cande et Conde; ils sont égaux : la même identité existe
au fond. En effet, Kant, en armoricain, signifie : coin,
angle; en gallois, Kand, Kind, Kend, Cond, confluent,
rencontre de deux rivières, emlwuchure traçant un angle;
de même que le mot celt. Kon, Cuneus, lat., veut dire ;
coin, encoignure, angle. Du premier nous avons fait Cantèl,
Cantoit, peut-être Cantal, et leurs composés; du second
Cougna, Cougné, même Couga et autres; fV.c. ra.), par le
changement ordinaire en lang. de on en ou, o en u, on
peut-être en u lat. prononcé ou, de cuneus. Nous verrons
comment tous ces noms à l>ase identique répondent à la
même idée. Voilà pour la première syllabe, la plus certaine
affinité éUblie.
Une fois la racine étymologique dégagée, le reste est
affaire de terminaisons. On sait qne le gaulois était riche
en suffixes : pour faire des noms d'hommes ou de lieux,
pour adjectiver un substantif qui désignait l'objet, et
marquer la propriété, la provenance, la possession, l'état,
la qualité, les attributs, la configuration de la chose, il
employait des formules précises, qu'il redoublait même
quelquefois pour l'euphonie , ou pour leur donner plus de
force ; et il les variait avec une merveilleuse fécondité. La
langue latine vint ensuite exercer son génie pour s'appro-
prier les dénominations existantes. A son tour le roman les
modifia, et enfin le languedocien moderne s'est emparé de
16+
CAN
CÂN
toutes ces altérations, en conservant tantôt leur tournure
priniitive, en la remaniant tantôt à sa manière.
Essayons, jwur arriver aux deux mots qui nous occu-
pent, de remonter cette longue échelle de variantes. ÎNous
avons parlé des suffixes a, ac, argue, au; dans l'espèce il
eu apitarait de nouveaux sur la plus ancienne forme,
Cande, Conde, Condate. Par les exemples on arrive aux
plus claires démonstrations. La grammaire celtique de
Zeuss en fournit de nombreux : dia, deus, dia-de, divinus;
doin, liomo, doin-de, humanus; dal, forum, dat-de, foren-
sis; beo, vita, beo-de, vivus; bi, pix, bi-de, piceus; tiem,
cœlum, nem-de, cœleslis; dam, cervus, dam-de, cervinus;
irab, traba, trab-da, trabeatus ; riji, rex, n"<;-(/a, regius;
fag, fagus, fag-de, faginus; — cis, fiscus, census, cis-te,
censorius; mis, mensis, mit-te, menstruus; ros, rosa, ros-
le, rosarium; brot, momentum, ambroi-te, momentaneum;
gut, vox, gul-te, vocalis; — briv, pons, briv-ate, pontilis;
dun, castrum, arx, dun-ate, castrensis; maes, campus,
»na«-a(e, campestris ; nant, vallis,na»it-2«ï(e, vallestris; etc.,
etc. Par où, il résulte que de = da = te = ate, finales
adjectives, sont identiques.
De plus, si l'on veut remarquer que de et di sont deux
syllabes fort sujettes à se confondre, ou, comme dit Zeuss,
qui alternent souvent ensemble ; — nous les avons en effet
retrouvées dans le gallois ; — si l'on tient compte de l'intro-
duction du génitif en i, imposé par le latin au celtique,
dans les dénominations locales, et des procédés au moyen
desquels la désinence gauloise ak, ek, était conservée à la
condition de s'adjoindre la finale caractéristique latine en
us, a, uni; il sera facile de constater une parenté très-
rapprochée entre Cande, Caudale, et notre Candïa, Can-
di-ac-um, Candiac. L'assimilation avec Candïargue, Can-
dianicus, Candianica, Candillargues, ne sera pas moins
évidente.
Cependant les termes de l'équation que nous venons de
poser sur les désinences adjectives se sont multipliés. La
finale gauloise primitive ae = ec = a* = te = aie, s'est
modifiée, combinée tantôt avec elle-même, tantôt avec les
suffixes latins ; par suite d'influences agissant sur les orga-
nes de la voix et de la prononciation, selon les climats,
suivant le mélange et le contact de divers idiomes, elle a
pris les formes les plus bizarres, elle admet les variantes les
plus disparates en apparence. Si bien qu'elle se trouve
aujourd'hui représentée par a, as, at, argue, e, ey, ergue,
orgue, ez. ies, eu, ieu, y, et une infinité d'autres suffixes
simples, sans compter ceux produits par redoublement, par
l'adjonction du latin ou du tudesque. Ici la raison de ces
variétés est sensible.
Le radical Kant = Kon s'étant adjectivé pour faire un
nom de lieu, pour désigner une propriété d'après sa posi-
tion, a donné Kan-de = Kon-de = Kon-ak = Kon-ek, et
les autres, latinisés en CondaCe, Condatum, Cundetum, tra-
duits par Cuneatus, angulaire, pour signifier un lieu, un
terrain, une maison, Mantio, Villa, Prœdium, Castrum,
situés dans un angle, formant un angle, au confluent de
deux rivières, dessiné par la jonction, la rencontre de deux
cours d'eau, le plus souvent, ou encore et par extension,
dans un angle terrestre formé par des vallées ou par tout
autre accident de terrain remarquable. On comprend pour-
quoi le radical Kani, Kon, se trouve dans tant de noms de
lieux et est devenu si comuiun en France : aussi toutes les
localités que les anciens titres désignent par le mot Condaie,
sont-elles toutes posées au confluent de deux rivières.
Expilly le remarque à propos de Condéol Conrfaf, en disant
« que ces noms sont synonymes et signifient la même chose
que confluent ou jonction de rivière.» Evidemment, Cand'ia
sur le Vistre, et Candïargue sur l'étang de Maguelonne, et
formant angle, n'ont pas d'autre raison dénominative : ils
la prennent dans leur situation, comme leurs analogues :
Candes, Condate, Condata, ïouraine, Indre-et-Loire;
Candé, Condetum, Loir-et-Cher, Maine-et-Loire, Charente-
Inférieure , Vieinie ; Candilly, Oise ; Condac, Condate ad
Carantonum, Charente; Condac, Vienne; Condal, Saônc-et-
Loiro; Condat, Condato, Condatum, Cundalum, Cundadum,
Lot, Corrèze, Lot-et-Garonne, Puy-de-Dôme, Haute-Vienne,
Cantal, Dordogne; Candas, Aveyron; 27 Condé, Condate,
Condatum, Condœum, Condetum, Condatus, Condete, Cône-
dacus, Conadacus, Condetum, par toute la France ; Condes,
Tarn, Jura, Haute-Marne ; Condcsaygues, Lot-et-Garonne ;
Coûdel, Calvados, Tarn; Condette, Pas-de-Calais; Condillac,
Drôme; Condeau, Orne; Condrieu, Conderate, Condriacum,
Rhône.
Ces analogies pourraient se multiplier; adjoignons -y
seulement trois appellationsqui nous touchent : Coundamino,
terre autrefois seigneuriale, désignation très-répandue don-
née a la terre principale d'un domaine, comme on dirait :
le coin du seigneur, du maître. L'élément Conde, Conda,
lui donne cette signification, qui est complétée par l'abré-
viation euphonique de Domini, au gén.; le mot est ensuite
devenu le nom pr. d'homme £a Condamine. — Yoy. Coun-
damino.
Il faut encore remarquer deux noms de hameaux dans
le Gard, Canduzorgue, dans la commune de Sainl-Uoman-
de-Codière, et Conduzorgue, Condusonicœ, commune de
Moutdidier, qui peuvent être conférés h Condansargue,
Condansanicœ, dans le territoire du Caylar. Les variantes
sur le radical ne font que confirmer ce que nous avons
établi sur l'identité de Cande et Conde : même configuration
dans les mots, môme signification; la voyelle u, qui parait
au milieu du nom, nous l'avons également trouvée dans les
traductions de Condé et Condat, dans la bass. lat.
Le même thème primitif, dans sa pureté, suivant que
l'influence gauloise ou romaine a agi sur la dénomination,
se montre encore dans Lou Cun, Le Cun, hameau de la
commune de Ponmiicrs, Cuneus latin, et dans Coundou,
Coimaux, commune de Bagnols, où l'élément celtique Jion-
ak, est plus apparent.
Les termes de comparaison augmenteraient si l'on voulait
CAN
CAN
165
}
suivre la racine dans ses transformations : Condate, ancien
nom de ville dans la Gaule entre IS'eviruni et Ilrivoilurum.
est aujourd'hui (.'o«ne, Nièvre ; f onrfaJe, vers le confluent de
rille dans la Dordogne, se nomme Condat, près Libourne,
Gironde ; Cognac, dans la Charente, dans la Hante-
Vienne ; tous sont appelés au moyen-àge Condat». On voit
d'un coup-d'œil la nouvelle si'rie d'appellations locales (ju'a
fait naître le premier radical : Cognan, Cognât, Cogne,
Cogners, Cognes, Cognières, Cognin, Cogny, Coin, le Coin,
Coinces, Coinches, Coincy, Coing, Coigne, Coigneux, Coi-
goières, Coigny, etc. Concordance de racine, variété ethni-
que des terminaisons, qui se rencontrent dans bien des noms
communs et des noms propres, en lang. et en fr. de même
origine, dont le sens se rattache par là à une idée de coin,
d'angle, d'encoignure, de confluent.
Mais si ces déductions sont vraies, de tous ces rappro-
chements il faudra conclure au moins, sans trop de témé-
rité, que les noms ainsi formés à désinence en argue, ou
orgue, ne représentent nullement des noms historiques
complétés par le lat. ager, mais des localités que leur situa-
tion, leur emplacement seul a fait dénommer.
Candou, ». m. — Yoy. Cambi.
Cane, j. m., n. pr. de lieu, Canet.
Ce mot est plutôt un nom collectif qu'tu dim. Il vieat
de la bass. lat. Cannelum, canuaie, comrue le suivant, lieu
abondant en roseaux et même en joncs , la canne des ter-
rains bas et humides, r^assos.
Canéïè, s. m. Lieu planté de roseaux, qu'on coupe tous
les ans : cannaic.
Dér. du lat. Canna, roseau, dont le rad. celt. est Cari,
même sigu., auquel s'ajoute le suffixe de collectivité iè,
similaire à ïèïro, édo, et autres, répondant au fr. axe, ay, ei,
eix, etc.; dans le bas lat. Cannelum.
Canéla, v. Canneler ; en parlant du blé, se former en
tuyau, monter en tige.
Dér. du lat. Canna, roseau.
Canèlo, s. f. Roseau, plante aquatique. Se dit aussi du
tuyau de bois ou môme de cuivre qu'on ajuste à un ton-
neau, à une cuve, pour en tirer la liqueur, la faire écouler :
robinet, cannelle. Mais on dit mieux en bon lang. Enquo,
dans ce dernier sens. — T. c. m.
Dér. du lat. Canna, roseau.
Canélu, udo, adj. Cannelé; creux intérieorement; qui
forme le tube.
Dér. du lat. Canna.
Canfigoùs ou Canfiégoùs, s. m., n. pr. de lieu, dans la
commune de Soustelle, arrondissement d'Alais. —Sauvages,
prenant la seconde version, qui est cependant peu usitée,
donne à ce mot la sign. de terre brûlée; champ où le feu a
passé et a tout embrasé : il le décomiwse sans doute en
Can pour Camp, et Fiégoits pour Fuégoits, de Fuec, ancien
mot , feu. On pourrait peut-être aussi le faire venir de
Campus fici, champ du figuier, lieu planté de figuiers, qui
d'ailleurs se rapproche davantage de la première appella-
tion; mais l'autorité d'un maître tel que ^Vinvages, qui
possédait si bien la connaissance de la langue et le senti-
mont (les étymologies, mérite la plus grande considération.
Cangaro, 5. m. Blé de Crimée; par extension tout bl6
étranger qui arrive par mer et dont le peuple fait peu de
cas.
Ce mot est la corruption de Tangarok ou Taganrok, ville
de la Crimée.
CSanïo, s. f. Chenille. — Ce mot ne s'emploie que pour
désigner ces sortes de chenilles microscopiques qui arrivent
en masse et détruisent certains végéUiux et la feuillaison
des arbrcs, et qui meurent sans transformation, au bout de
quelques jours : ce sont à proprement parler des vers à
pattes. Par là on les distingue de VÉrugo, qui est la che-
nille ordinaire et qui passe par les mêmes métamorphoses
que le ver à soie. Il est une sorte de Canïo qui s'attaque X
la luzerne et en dissèque chaque feuille sans en altérer le»
flbres les plus tenues, de manière à la réduire en dentelle.
Ces chenilles s'aliattent en telle quantité qu'en mie matinée
un champ de luzerne est quelquefois entièrement dévoré.
Après trois jours de vie, cet insecte se dirige en colonne
serrée vers le cours d'eau le plus voisin, qu'il devine avec
un instinct merveilleux, et où il termine sa courte et mal-
faisante existence en se noyant; il eu périt aussi beaucoup
en chemin, et leurs cadavres forment mie trace noire dont
on distingue à peine les individus.
Traduit du fr. Chenille.
Canisso, s. f. Petite et même espèce de roseaux de
marais; le clayon lui-mêmj, fait de ces roseaux, qui sert
de plancher aux tables de vers à soie. Ces claies en treillis
sont préférables à des planches pour cet usage, parce qu'elles
laissent mieux pénétrer et circuler l'air dans leurs inters-
tices, et qu'ainsi la litière mieux aérée est préservée de
toute fermentation. Lorsque les vers sont jeunes et qu'ils
pourraient passer à travers le clayon, on le tapisse d'un
papier gris qui est connu sous le nom de papicr-ma^a.
Le fr. nous a emprunté ce mot; mais comme chaque
langue a sa petite vanité, il a fait comme le lang., il a défi-
guré son emprunt, qu'il nomme Canis. Quand je dis le fr.,
je ne dis pas celui de l'Académie et des savants, mais bien
celui de l'école séricicole, qui recherche et fabrique au
besoin tous les tecluiiques à son usage.
Dér. du lat. Canna, dont il est un dim.
Canisso, j. m. Petit homme chevelu et crépu. C'est un
surnom fort répandu.
Corr. du fr. Caniche.
Cano, J. f. Canne, bâton; jonc, pour s'appuyer en mar-
chant.
Dér. du lat. Canna, roseau.
Cano, I. f. Cane, femelle du canard, Anas, Linn.
Cano, ». f. Canne, mesure de longueur. Elle varie beau-
coup suivant les pays. La canne d'Alais est de huit pans,
elle vaut 1™ 989 ; la canne carrée vaut S" 956 miU.
carrés.
166
CAN
CAN
Mesure de capacité iwur le vin : l'ancienne canne était
de 18 litres, la nouvelle en vaut 20.
Mesure de capacité pour l'huile : l'ancienne canne valait
9 litres 521 , la nouvelle vaut un décalitre.
Cnno est souvent pris génériquenient pour mesure de
toute espèce. — Es pas dé cano, c'est indubitable, c'est une
assertion qui n'a pas besoin de preuve ; une dimension qui
peut se passer d'une mesure exacte.
Encore une de ces locutions dont le système métrique est
en grand train d'oblitérer l'origine. La cano était une
mesure de contenance, pour l'huile surtout, à très-peu près
le décalitre actuel; mais du même nom, nous venons de le
voir, il y avait aussi une mesure de longueur, qui équiva-
lait à la toise ; et l'on disait Cana comme toiser et aujour-
d'hui métrer. C'est de cotte dernière mesure seulement qu'il
est ici question. Notre locution s'usitait surtout au jeu de
boules ou à d'autres jeux analogues que les enfants avaient
en grand nombre : lors donc qu'il s'agissait de décider si la
boule, la gobillo ou le palet du joueur étaient plus près du
but que celui d'un autre, on disait en examinant des yeux
d'abord : Es dé cano, ou bien : Es pas dé cano, selon que
le cas était ou paraissait douteux ou non. Es pas dé cano
signifiait par conséquent : il n'y a pas à mesurer, il n'est
pas besoin de mesurer pour décider ce qui se voit, qu'il y
en a de reste. Et cela se dit toujours de ce qui est évident,
hors de discussion, incontestable; et par extension ou
exagération, de tout individu, de toute chose dont les qua-
lités ou les défauts atteignent largement ou dépassent môme
la mesure, sans que toutefois ni Cano, ni mètre aient rien
à mesurer en tout ceci.
Cano, s. f. Chancissure blanche, espèce de moisissure
qni surnage en paillettes blanches sur le vin mal bouché,
ou lorsque la Iwuteille a été mal égouttée au lavage. C'est
ce qui sort le premier d'une bouteille et le dernier d'un
tonneau. On dit au fig. es à las canos, il est à sec, il est à
son dernier sou.
Dér. du lat. Canus, blanc.
Canobas, s. m. Mauve sauvage, alcée.
Canoù, s. n». Dim. Canouné. Canon, longue pièce
d'artillerie, canon de fusil, de pistolet.
Dér. du lat Canna.
Canoù, s. m. Tuyau; tube; conduit; plumes en tuyau
d'un jeune oiseau : ce sont les grosses plumes des ailes qui
poussent les premières, tandis que celles du corps ne sont
encore qu'un duvet. Ce mot s'applique en général à beau-
coup de choses en forme de tuyau : Lou eanoft dé la chimi-
nito, le tuyau de la cheminée ; Loit canoù d'nno fon, le
tuyau, le robinet d'une fontaine, d'uno boulo, \a, canelle
d'un tonneau ; un canoù dé ploiimo, un tuyau de plume.
Dér. du lat. Canna.
Canonna, v. n. Monter en tuyau, comme toutes les céréa-
les, les oignons et autres plantes bulbeuses ; être en forme
de tuyau. Dans le sens actif, canonner, battre à coups de
canon; il est reçu, mais par imitation du fr.
Canounado , s. f. Canonnade, décharge de coups de
canon ; conduite d'une fontaine soit en Ixiis, en fonte ou en
poterie, lorsqu'elle est dirigée sous terre ; quand elle est à
ciel découvert, on emploie le mot Acanàou.
Dér. du lat. Canna.
Canouné, s. m., ou Manouné. Terme de triperie :
boyaux d'agneau, de chevreau, de mouton et même de
veau, qu'on lie par petites bottes, et dont on est friand
surtout à Alais, où l'on dit mieux Manouné. — V. c. m.
Dim, de Canoù.
Canounge, s. m. Chanoine, celui qui iMssède un canoni-
cat. — Il est devenu n. pr. d'homme, rendu par Canonge.
Dér. du lat. Canonicus.
Canourgo (La), s. f.,n.pr. de lieu. La Canourgue. ville
et canlon du département de la Lozère, mentionnée dans les
titres les plus anciens sous le nom de villa de Canonica. A
Montpellier, une place est aussi appelée La Canourgue, à
cause de son origine canoniale, voisinage ou dépendance
d'une propriété canoniale.
Les deux mots Canounge, Canonicus, et la Canourgo,
Canonica, dérivent évidenjinent de la même source : leur
radical commun se trouve dans le gr. Kavc'jv, règle, ordre,
que le lat. a simplement adopté dans le même sens Canon,
onis, et qu'il a adjectivé en Canonicus, a, um, régulier,
chanoine régulier. Dans le principe, il est probable que
celte unité d'origine en avait fait deux menechmes; depuis,
ils se sont un peu déformés ; mais , malgré la différence de
physionomie, l'air de famille persiste et les rapproche.
Seulement, le premier, subst. masc, a gardé les contours
émoussés, le ton sourd, qui sont peut-être plus fréquents
dans le Nord ; tandis que le second, nom propre féminin,
a revêtu cette forme rude, accusée, particulière à notre
Midi. Mais, la parenté une fois établie, ces ressemblances et
ces variétés, les altérations mêmes des deux mots, que nous
prenons pour types, présentent un assez curieux sujet
d'étude sur ces fameuses finales languedociennes en argues,
ergues et orgues, dont on s'est tant occupé.
L'importation grecque ou latine de Canonicus date de
l'époque où, dans les Gaules, l'ancienne langue nationale
était encore comprise et parlée, au moment où commençait
à se former, du mélange avec le ktin , l'idiome rustique
vulgaire. Des besoins nouveaux, une civilisation plus avan-
cée, surtout la nécessité de se reconnaître avec les dénomi-
nations locales débaptisées ou en voie de se modifier au
goût des conquérants, des traditions indestructibles et des
influences imjiérieuses avaient fait subir au langage des
changements considérables; mais une langue ne procède
pas au hasard, bien qu'il soit difficile d'avoir toujours rai-
son de ses variations, et, dans la conjoncture, les analogies
ne manquaient pas : elles sont même si frappantes qu'on
dirait une loi régulière , systématique , uniforme, dont on
va saisir les applications.
Le mot arrive tout fait, tout d'une pièce, purement
latin. Quand le roman , qui se créait, le rencontre et qu'il
-CAN
CAN
167
veut s'en einiMrer, il n'a garde de toucher au radical ; mais
sa finale en icux n'allait pas à ses aptitudes vocales : à
d'autres seinblaliles, à des noms de lieux ainsi terminés, il
avait fait subir une altération conforme à son génie, et il
appliqua à Canonicut sa niéthoile lialiituelle de transforma-
tion. La voyelle la plus souple devait d'abord être atteinte :
l'i disparait de la désinence, ou il se change en e plus ou
moins ouvert, qui le rappelle ; la palatale C est remplacée
par sa corrcspondanle G, la consonne celtique de prétlilec-
tion, sur la((uelle nous revenons souvent; enfin la termi-
naison devient muette et s'éteint. L'intrusion de R, qui se
substitue à A, est particulière au Midi. On ne peut exiîli-
quer sa présence que jar le désir instinctif du peuple, ce
maître souverain de sa langue, de donner à certains mots,
à des noms propres de lieux, plus de consistance, plus
d'énergie, et de faire peut-être un accord mieux lié avec le
son guttural fortement accentué qui la suit presque tou-
jours; ce que l'organisme méridional ne dédaigne pas,
quand celui du A>'ord y semble moins porté.
Ces procédés de recomposition se révèlent clairement
dans les diverses évolutions du mot Canonicui. Notre
langue romane en a fait Canonge, Canonègue et Canorgae.
Un exemple de chaque forme ; la chanson de geste de
Gérard de Roussiilon dit : Xi monge, ni canonge, ni cujie-
lan. Dans un litre de 1174 ou trouve : La claustrales
canonégiies ; dans Pierre Rogiers, troubadourdu XII™* siècle :
Peire Jtotgier si fo d'Alvernhe, canorgues de Clermon . L'abbé
de Sauvages cite Canonèjhe (Canonège), comme appartenant
au vieux langage. Enfin le languedocien moderne dit
Canounge. Le subsl. féminin suit la môme marche : Cano-
nica est représenté par Canorgtia, Canorguia. Dans Pierre
Rogiers : Luïsset la canorgua et fes se joglart; dans Pierre
Cardinal : Son paire lo mes per canorgue en la canorguia
del Piiei. Nous arrivons naturellement à la Canourguo; et
pas n'est besoin de faire remarquer que dans notre dialecte
ou égale roman.
La preuve maintenant qu'il s'agit ici d'une loi générale,
au moins en ce qui concerne la substitution du fi gaulois
au C latin dans ces désinences ; c'est que les idiomes cello-
latins l'adoptent de môme. Canonicus a donné en cat.
Canongo, en esp. Canonigo et Canongia, en port. Cano-
nego. L'anglais lui-raèmé a Canongaie, faubourg d'Edim-
bourg, qui accuse pareille fiUation ; l'italien seul Canonico
s'est conservé absolument latin.
Mais la règle s'applique encore ans noms propres et aux
noms communs, dans lesquels la présence du même suffixe
latin a du amener ime pareille combinaison dans le roman
et dans le languedocien. Sans citer ilonachus, qui faisait
en roman Monge, Mongne, Monègue, Morgne, Moyne; en
cat. Monjo, en esp. et en port. Monje; prenons le subst.
fém. lUonica, religieuse. Le roman avait Monja, Monga,
Morga, JHoyna; en cat., esp., port. 3Ionja; comme pour
monastère on disait Mongia et Morgia; et notre languedo-
cien Moungeo (Mounjo), et Mourgo : la cariètro dé las
Mourgnt, In nic des Mourgnes à .\lais; et les diminutifs
ilounjéto, Mourguéto, |)etite religieuse, et Mounjélos, nom
des tiaricots à enveloppe blanche ou noire, févcroles sèches.
Il faut voir comme le roman, au nord et au midi, en fr.
et eu lang., s'exerce sur ces syllal)es icus, ica, toutes les
fois qu'il les rencontre : Carrica, de la bass. lat., donne
Curguo, charge; Cranica, Graujo, grange; Lanica, lange;
Serica, sarjo, serge; Fabrica. Forjo, forge; Pautrica,
Fttngo, fange; Slanica, Margue, Hanche, manche; Porli-
cus, Porge, porche; Mediciis, Mi'je, médecin.
Les noms de lieux suivent la même voie. Pour ne citer
d'abord que les plus rapprochés par la consonnancc finale
avec notre type, dans le Gard, Colorgues, commune de
Saint-Chaptes, était, dans un dénombrement de 1394, Colo-
nicœ; connne un lieu détruit de la commune de Langlade,
Colonges ou Colongres, commune de Verfeuil. Colourcs,
commune de Marguerittes , s'appelait en lat. Colonicte ,
Colonices; Coulorgues, commune de Bagnols, Colonicar;
Colonges, dans la Cùted'Or, Cologne sur le Rhin. Cohnira;.
Santonicus est devenu Saintonge. Conduzorgues, commune
de Moutdardier (Gard), vient de Con-lu zonica ; Montuzor-
gues, de Montusonicte ; Solofgues, de Savaronitte; Soudor-
gues, de Sardonicœ et SorJonica; etc.
Ces rapprochements indicjuent une marche constante vers
le même effet à produire. Les termes de comparaison sont
alwndants pour démontrer que cette désinence latine, nicus,
nica, nicœ, au sing. ou au pi., au masc. ou au fém., se
reprixluil dans notre langue \ulgaire, et même dans le fr.,
par les comliinaisons nge, nigue, nège, rgua, rguia, rgue,
rguo, qui toutes sont équivalentes, égales entr'elles.
Mais ce n'est pas seulement alors que le mot porte o =
ou comme voyelle dominante à l'anté-iHînultièrae, onicus,
onicip, que la iicrmutation a lieu; les voyelles a, e, i, dans
les mêmes conditions ont le môme privilège. Ârmasanicœ a
donné Armasanègues , Aïmargue, Aimargues; Cajcanicus,
Caxanicœ, Caixanfgues, Caissargue, Caissargues; Domes-
sanicœ, Domessanègues, Domessanengues, Domensan, Dou-
méssargue, Domessargues ; Rutenicus, Rodinigus, Rouergue.
Enfin notre mot Diménche, dimanche, en lat. dies Domi-
nica, et le nom propre Dominique, du masc. Dominicus,
offrent une autre preuve à l'appui. Le roman traduisait
Diemence, Diemenche, Dimoingc, Dimenge, Diménche; dans
les coutumes d'Alesl, on lit Dimenige. Le verbe était,
d'après Sauvages, Endimirga ou Endiménga ; aujourd'hui
Endiméncha. De son côté, le nom propre a passé de Domi-
nicus en Doumèrjhe, Doumènjhe, Doumènghe ; il est Dou-
mèrgue, en fr. Domergue; en esp. Domingo. Ce sont
toujours et partout des formes identiques ; mais les derniers
exemples donnent plus d'extension au procédé et introdui-
sent de nouvelles désinences pour représenter le même
sulGxe : ce qui ne laisse pas que de jeter le plus grand jour
sur la comiwsition des mots et des noms propres.
D'où vient cependant cette constance à repousser une
telle finale, cette espèce de parti-pris des langues néo-latines
168
CAN
CAN
de n'admettre que des coiiibinaisoiis qui s'éloignent tant
en apparence de la construction ancicrmc? D'abord, si grand
que soit l'L'cart entre les formes actuelles et la forme primi-
tive des mots que nous relevons, il faut remarquer que, dans
la plupart des cas, les désinences seules sont atteintes. Dans
nos idiomes néo latins l'inconvénient n'est pas grave : car
l'influence de la terminaison est à peu près nulle sur la
signification des mots. Tout se réduit donc le plus souvent
à une question d'euphonie, et dépond de la manière dont tel
ou tel son est rendu ou perçu, suivant certaines préférences
de flexion naturelles h chaque peuple, selon une disposition
particulière des organes ou la différence des tempéraments.
On sait en effet quelle action exercent sur le langage les
habitudes, les influences locales et climatériques. C'est que,
il faut le bien dire, dans toutes les langues, dans tous les
pays, dans tous les temps, le peuple a une propension innée,
irrésistible à la contraction : il y est poussé et entretenu
par son dédain de la correction classique , par une négli-
gence naturelle de prononciation, par l'ignorance des flexions
qu'il abandonne volontiers aux savants et aux rhéteure;
mais à tout prix la syncope et l'ellipse doivent s'adapter à
ses instincts et à sa diction. On comprendra des lors com-
bien les licences du latin vulgaire, usuel, tel qu'il fut
transporté dans les colonies par les soldats de Rome, en se
mêlant aux idiomes gaulois, rencontrèrent de facilité à
faire accepter leurs incorrections, et comment la nouvelle
langue, en train de se former, éprouva peu de gêne, peu de
résistance à fondre ses propres éléments dans le moule
accrédité, à se façonner sur le modèle sans trop grandes
concessions, sans perdre son caractère et son génie.
Mais nous ne faisons qu'indiquer en passant ce mouve-
ment de transformation et de recomposition , et il n'est pas
de notre sujet de remonter aux causes. Il suffit d'en cons-
tater l'activité et l'énergie, et de saisir quelques-uns de ses
effets isolément, pour avoir une idée du travail général et de
l'esprit de notre langue.
Maintenant, en présence des altérations, des divergences,
des variétés de prononciation et de structure, par lesquelles
ont passé quelques mots, que nous étudions, avant de par-
venir à leur forme actuelle, nous nous demandons s'ils
n'ont pas ol)éi à une loi générale de compositions diverses;
et il nous semble impossible de ne pas reconnaître que
toutes ces disparités sont plus superficielles que réelles ,
qu'elles se confondent et se balancent; qu'au fond le nom-
bre des mots et surtout celui des noms propres, quoique
très-varié, est beaucoup plus réduit qu'on ne pense. Il res-
sort de là avec évidence que chaque pays, presque chaque
localité adopte de préférence une formule , qui ne lui est
peut-être venue que par une disjwsition propre, particulière,
de son organisme vocal à prononcer plus ou moins facile-
ment telle ou telle articulation , tel ou tel rapprochement
de lettres; et les exemples nous paraissent ici saisissants.
Ainsi, a propos de Canonicns, Canounge , Canonica, la
Canourgno, nous voyons les finales orgue et èrgue corres-
pondre exactement à onge, inge, èngtie, énche, one, par
onêgue, onège, onènche, reliées par contraction à oun, on,
en, et au fém. ono, ouno : pourquoi la désinence argues, qui
a été anègue.1, aniches , oniches, n'aurait-elle pas aussi
quelque nlïinilé avec an, anges, anche? Pourquoi inget,
ignés, ignies, igné, igni, igny , n'auraient-ils pas une atta-
che par tM, ine, inies, ein, eine, dje, ije; et ne seraient-ils
pas affiliés à cette communauté dénominative , qui , pour
englober tant d'appellations locales en France, part d'une
source unique? Pourquoi tous ces suffixes ne reconnaî-
traient ils pas pour auteur le celtique «c =: ec, qui s'est
transformé au contact du latin, tantôt faisant fonction
d'adjectif, tantôt servant à donner certaines attributions
ethniques et patronymiques? Ces conclusions nous semblent
solidement établies.
Mais alors que devient le système laborieux qui voulait
trouver une signification, dans la désinence expléti vearjrue,
des noms propres de lieux do nos contrées, en en faisant la
traduction du lai. Ager?
Nous nous en sommes expliqué ailleurs : ceci est un
nouvel argument. — Yoy. Argue.
Cansoù, s. f. Dim. Cansounéio. Chanson; pièce de vers
par couplets, que l'on peut chanter. ."Vu fig. sornettes,
contes frivoles. — Aqitd's la cansoù de l'agnM blan; c'est
toujours la même chanson; c'est un thème qui ne finit pas.
Dér. du lat. Cantio, même sign.
Ganta, v. Chanter, former un chant par une suite de sons,
d'accords. Au fig. célébrer, louer; sonner, résonner. —
Canta clari, rendre un son clair comme un vase vide. Il se
dit aussi pour : rendre un son fêlé Cantarén pas mésso,
loc. prvb. pour dire : nous ne serons pas longtemps
d'accord, nous ne nous entendons pas. C'est sans doute une
allusion aux chants du lutrin. Té foura canla pu ndou,
dit-on à quelqu'un qui marchande avec la prétention
d'obtenir k bas prix ou à des conditions très-modérées une
chose quelconque, une marchandise, qu'on estime davantage
qu'il n'est offert : il te faudra chanter une antre gamme,
un ton plus haut.
Dér. du lat. Cantare.
Cantaïre, aïro, arlj. Péj. ranfaïrns, asso. Chanteur; qui
fait profession de chanteur. — -En terme de magnanerie, on
appelle un cantaïre, un cocon faible, qui cède à la pression
du doigt et rend un son quand la coque reprend sa première
position.
Dér. du lat. Cantare.
Cantarèl, arèlo, ailj. Chanteur sempiternel et ennuyeux;
qui aime à ciianter, ou qui a des dispositions à chanter.
Cantarèlo, s.f. Chanterelle; sorte de Iwuteille en verre,
dont le fond très-mince est percé d'une petite ouverture. On
chante contre ce fond pour amuser les enfants, et le souffle,
qui fait vibrer fortement les parois, augmente très-singuliè-
rement le volume de la voix en lui donnant une qualité
métallique et frémissante.
Dér. du lat. Cantare.
CAN
CAO
169
Cantèl.t. m. Chanteau; premier morceau taill»^ en coin
sur uii grand pain; pointes supplômcnlaires d'un manteau,
d'une robe, d'une chemise de femme; pièce du milieu d'un
fond de tonneau, qui est terminée des deux côtés par un
segment de cercle.
Dé eanltU ou pér eanlèl , [)osé de champ. On le dit d'un
corps plat, d'une brique, d'une pierre de taille, posés sur
leur tranche, c'est-à-dire sur leur face la plus étroite,
comme les livres dans une bil)lioth(>(]ue.
Dér. de la Iwss. lat. Canlellum, dim. de Canfum, coin.
Canto-pérdrls, s. m. Garou ou Saint-bois, Daphne lau-
reola, Linn. Arbrisseau de la fain. des Thymélées; à feuille
étroite, commun dans les landes arides.
Par extension , on appelle Canto-pirdris , un terrain sec
et infertile, une propriété de peu de valeur, serait-elle
ornée d'une chétive masure, parce que c'est là que l'arbuste
de ce nom croit de préférence.
Les Iwtanisles assurent que les' fruits du garou, rouges
à leur ma